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des barbares taillée en pièces. C'est le seul fait de sa vie militaire qui soit connu; mais on cite de lui beaucoup de traits de justice, de désintéressement et d'équité. C'est à cet esprit de justice que les Athéniens durent la supériorité maritime qu'ils obtinrent sur les Lacédémoniens. Aristide se trouvait sur une flotte équipée en commun par les États de Grèce. Il y était avec Pausanias, le même qui commandait lorsque Mardonius fut battu. Jusque-là les Lacédémoniens avaient été les premiers sur terre et sur mer. Mais les Grecs, lassés de la hauteur et de l'emportement de Pausanias, et séduits par la modération d'Aristide, s'attacherent aux Athéniens, et les choisire ntpour chefs, afin de repousser plus aisément les barbares, s'ils étaient tentés de recommencer la guerre.

III. Aristide fut chargé de régler la somme que chaque ville devait fournir pour la construction | des flottes et la levée des troupes. D'après son avis, on déposa tous les ans une somme de quatre cent soixante talents dans le temple de Délos. Ce dépôt était regardé comme le trésor public de la Grèce. Plus tard on le transporta à Athènes. Il n'y a pas de preuve plus certaine du désintéressement d'Aristide que l'état de pauvreté dans lequel il mourut. Après avoir dirigé des opérations si importantes, il laissa à peine de quoi subvenir aux frais de ses funérailles. Les Athéniens décidèrent que ses filles seraient nourries et dotées aux dépens de l'État. Il mourut environ quatre ans après le bannissement de Thémistocle.

sus, populiscito in patriam restitutus est. Interfuit autem pugnæ navali apud Salamina, quæ facta est prius quam pæna liberaretur.

II. Idem prætor fuit Atheniensium apud Platæas, in prælio, quo Mardonius fusus, barbarorumque exercitus interfectus est. Neque aliud est ullum hujus in re militari illustre factum, quam hujus imperii memoria: justitiæ vero et æquitatis et innocentiæ multa; in primis, quod ejus æquitate factum est, quum in communi classe esset Græciæ simul cum Pausania, quo duce Mardonius erat fugatus, ut summa imperii maritimi a Lacedæmoniis transferretur ad Athenienses : namque, ante id tempus, et mari et terra duces erant Lacedæmonii; tum autem et intemperantia Pausaniæ, et justitia factum est Aristidis, ut omnes fere civitates Græciæ ad Atheniensium societatem se applicarent, et adversus barbaros hos duces deligerent sibi, quo facilius repellerent, si forte bellum renovare conarentur.

III. Ad classes ædificandas, exercitusque comparandos, quantum pecuniæ quæque civitas daret, Aristides delectus est qui constitueret. Ejus arbitrio quadringena et sexagena talenta quotannis Delum sunt collata. Id enim commune ærarium esse voluerunt. Quæ omnis pecunia postero tempore Athenas translata est. Hic qua fuerit abstinentia, nullum est certius indicium quam quod, quum tantis rebus præfuisset, in tanta paupertate decessit, ut, qui efferretur, vix reliquerit. Quo factum est, ut filiæ ejus publice alerentur, et de communi ærario dotibus datis collocarentur. Decessit autem fere post annum quartum quam Themistocles Athenis erat expulsus.

PAUSANIAS.

SOMMAIRE.

III. II

CHAP. I. Orgueil insolent de Pausanias, après sa victoire
sur Mardonius.
II. Il prend Byzance, sert les intérêts
de Xerxès et se prépare à trahir la Grèce.
adopte des mœurs étrangères; son emprisonnement. Il
cherche à soulever les Ilotes. - IV. Il correspond avec
l'ennemi; son trouble le découvre. V. Il est enfermé
dans le temple de Minerve, et y meurt bientôt.

I. Pausanias était un grand homme, mais il manqua toujours de constance dans sa conduite. Il joignit à de brillantes qualités des défauts qui les obscurcirent. La bataille de Platée fut son plus beau titre de gloire. Il commandait en chef à cette bataille où le satrape Mardonius, Mède de nation et gendre du roi, le plus courageux et le plus habile de tous les Perses, fut défait par une poignée de Grecs, à la tête de deux cent mille fantassins, tous hommes d'élite, et de vingt mille cavaliers: il fut même tué dans le combat. Pausanias, enorgueilli de sa victoire, commença à troubler la république par ses intrigues. Son ambition ne connut plus de bornes. Il mécontenta d'abord ses concitoyens, en faisant graver sur un trépied d'or qui lui revenait comme part du butin, et qu'il avait fait placer dans le temple de Delphes, une inscription où il était dit qu'ayant vaincu les Perses à la bataille de Platée, il avait offert ce trépied à Apollon en re

PAUSANIAS.

ARGUMENTUM.

CAP. I. Pausanias, Mardonii victor, fit insolens. -II. Byzan-
tium expugnat, Xerxi favet, Græciæ futurus proditor. -
III. Peregre absentis mores et carcer. Helotes sollicitat.
IV. Litterarum commercium cum hoste; perturbatus se
ipse indicat. - V. In æde Minervæ obstruitur, et mox interit.

I. Pausanias, Lacedæmonius, magnus homo, sed varius in omni genere vitæ fuit: nam, ut virtutibus eluxit, sic vitiis est obrutus. Hujus illustrissimum est prælium apud Platæas. Namque illo duce Mardonius, satrapes regius, natione Medus, regis gener, in primis omnium Persarum et manu fortis et consilii plenus, cum ducentis millibus peditum, quos viritim legerat, et viginti millibus equitum, haud ita magna manu Græcia fugatus est; eoque ipse dux cecidit prælio. Qua victoria elatus, plurima miscere cœpit, et majora concupiscere. Sed primum in eo est reprehensus, quod ex præda tripodem aureum Delphis posuisset, epigrammate scripto, in quo erat hæc sententia, SUO DUCTU BARBAROS APUD PLATEAS ESSE DELETOS, EJUSQUE VICTORIÆ ERGO APOLLINI DONUM DEDISSE. Hos versus Lacedæmonii exsculpserunt, neque aliud scripserunt, quam nomina earum civitatum, quarum auxilio Persæ erant victi.

II. Post id prælium eumdem Pausaniam cum classe communi Cyprum atque Hellespontum miserunt, ut ex his

connaissance de la victoire. Les Lacédémoniens firent effacer cette inscription, à laquelle on substitua, sans plus de détail, le nom des villes qui avaient concouru à la défaite des Perses.

II. Après la bataille de Platée, Pausanias fut envoyé à la tête de la flotte commune, dans l'île de Cypre et sur l'Hellespont, pour chasser les garnisons barbares établies dans ces contrées. Il ne fut pas moins heureux dans cette expédition qu'à la bataille de Platée, ce qui augmenta encore son orgueil et son ambition. Ayant fait prisonniers à Bysance quelques Perses de distinction, parmi lesquels se trouvaient des parents de Xerxès, il les lui renvoya secrètement, en faisant courir le bruit qu'ils s'étaient échappés de leur prison. Il avait fait partir avec eux un certain Gongyle d'Érétrie, en le chargeant d'une lettre pour le roi de Perse. Voici, d'après Thucydide, quel était le contenu de cette lettre : « Pausanias, << chef des Spartiates, ayant appris que ces Per<< ses qu'il a faits prisonniers à Bysance sont tes « parents, te les renvoie comme présent. Il dési<< rerait s'unir à ta famille et te demander ta fille << en mariage. Si tu y consens, il promet de t'aider | << à soumettre la ville de Sparte et toute la Grèce. « Dans ce cas, envoie-lui un homme sûr avec le« quel il puisse s'entendre. » Le roi fut ravi de revoir tant de personnes qui lui étaient chères. Il dépêcha immédiatement Artabaze avec une lettre pour Pausanias. Il le louait beaucoup et l'invitait à poursuivre ses projets, promettant de ne lui rien refuser, s'il réussissait. Cette lettre accrut l'ardeur de Pausanias; mais il devint suspect à ses concitoyens. On le rappela à Lacédémone et on l'accusa de trahison: il fut absous. On le condamna toutefois à une amende

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et on ne voulut plus le renvoyer sur la flotte.

III. Malgré ce jugement, Pausanias prit sur lui de retourner à l'armée; mais, au lieu de s'y conduire avec prudence pour déguiser ses projets, il les trahit par son extravagance. Non content de renoncer aux mœurs de sa patrie, il changea de costume et de manière de vivre. Il affichait un luxe royal, portait la robe persane, et se faisait suivre par une garde composée d'Égyptiens et de Mèdes. Sa table, servie comme celle de Perse, était d'une somptuosité qui indignait jusqu'à ses convives. Personne ne pouvait l'approcher; il était orgueilleux dans ses réponses et dur dans son commandement. Comme il ne voulait pas retourner à Sparte, il s'était retiré à Colone, dans la Troade, nourrissant des projets aussi funestes à sa patrie qu'à lui-même. Les Lacédémoniens, instruits de ses menées, lui envoyèrent des députés avec la scytale, pour lui commander, suivant l'usage, de revenir à Sparte sous peine de mort. Ce message ne laissa pas de l'inquiéter; mais il comptait sur ses richesses et sur son crédit pour conjurer le péril, et il revint à Lacédémone. A peine arrivé, les éphores le firent jeter en prison. La loi leur donnait le droit d'en agir ainsi même avec le roi. Il s'en tira cependant, mais sans pouvoir dissiper les soupçons qui existaient contre lui. On le supposait toujours d'intelligence avec le roi. On croyait qu'il voulait soulever les Ilotes par l'espoir de la liberté. C'est cette classe d'hommes qui cultive les terres à Lacédémone; elle est fort nombreuse. Ce sont, à proprement parler, des esclaves. Mais comme on n'avait pas de preuves contre Pausanias, on pensa qu'on ne pouvait pas accuser un homme aussi considérable sur de simples soupçons, et qu'il valait mieux attendre qu'il se découvrît luimême.

regionibus barbarorum præsidia depelleret. Pari felicitate in ea re usus, elatius se gerere cœpit, majoresque appetere res. Nam, quum, Byzantio expugnato, cepisset complures Persarum nobiles, atque in his nonnullos regis propinquos, hos clam Xerxi remisit, simulans, ex vinculis publicis effugisse; et cum his Gongylum Eretriensem, qui litteras regi redderet, in quibus hæc fuisse scripta Thucydides memoriæ prodidit : « Pausanias, dux Spartæ, quos Byzantii ceperat, postquam propinquos tuos cognovit, tibi muneri misit; seque tecum affinitate conjungi cupit. Quare, si tibi videtur, des ei filiam tuam nuptum. Id si feceris, et Spartam, et ceteram Græciam sub tuam potestatem, se adjuvante, redacturum pollicetur. His de rebus si quid geri volueris, certum hominem ad eum mittas face, cum quo colloquatur. » Rex, tot hominum salute tam sibi necessariorum magnopere gavisus, confestim cum epistola Artabazum ad Pausaniam mittit: in qua eum collaudat, ac petit, ne cui rei parcat ad ea perficienda, quæ pollicetur: si fecerit, nullius rei a se repulsam laturum. Hujus Pausanias voluntate cognita, alacrior ad rem gerendam factus, in suspicionem cecidit Lacedæmoniorum. In quo facto domum revocatus, accusatus capitis, absolvitur; multatur tamen pecunia. Quam ob causam ad classem remissus non est.

III. At ille, post non multo, sua sponte ad exercitum rediit, et ibi non callida, sed dementi ratione, cogitata patefecit. Non enim mores patrios solum, sed etiam cultum, vestitumque mutavit. Apparatu regio utebatur, veste Medica: satellites Medi et Ægyptii sequebantur: epulabatur more Persarum luxuriosius, quam, qui aderant, perpeti possent: aditum petentibus conveniendi non dabat : superbe respondebat, et crudeliter imperabat. Spartam redire nolebat: Colonas, qui locus in agro Troadis est, se contulerat; ibi consilia, quum patriæ, tum sibi inimica, capiebat. Id postquam Lacedæmonii resciverunt, legatos ad eum cum scytala miserunt: in qua more illorum erat scriptum, nisi domum reverteretur, se capitis eum damnaturos. Hoc nuntio commotus, sperans se etiam tum pecunia et potentia instans periculum posse depellere, domum rediit. Huc ut venit, ab ephoris in vincula publica conjectus est: licet enim legibus eorum cuivis ephoro hoc facere regi. Hinc tamen se expedivit: neque eo magis carebat suspicione; nam opinio manebat, eum cum rege habere societatem. Est genus quoddam hominum, quod Helotes vocatur, quorum magna multitudo agros Lacedæmoniorum colit, servorumque munere fungitur: hos quoque sollicitare spe libertatis existimabatur. Sed, quod harum rerum nullum erat apertum crimen, quo argui

IV. Cependant Pausanias chargea d'une lettre pour Artabaze un jeune homme nommé Argilius, qu'il avait aimé autrefois. Argilius, réfléchissant qu'aucun de ceux qui avaient été chargés de semblables missions n'était revenu, pensa qu'il pouvait être question de lui dans cette lettre. Il l'ouvrit, et vit que c'était fait de lui s'il la portait. Elle contenait d'ailleurs de grands détails sur les projets de Pausanias et du roi de Perse. Argilius la remit aux éphores. Remarquons ici la sage réserve des Lacédémoniens. Cette pièce ne parut pas aux éphores un témoignage suffisant pour s'assurer de Pausanias. Ils ne crurent pas devoir employer la force avant que le coupable se fût trahi lui-même. Ils indiquèrent à Argilius ce qu'il avait à faire. Il existe à Ténare un temple consacré à Neptune, et regardé comme inviolable par tous les Grecs. Argilius s'y réfugia et alla s'asseoir sur l'autel. On pratiqua auprès un souterrain d'où l'on pouvait entendre ceux qui viendraient lui parler. Quelques-uns des éphores s'y cachèrent. Pausanias apprenant qu'Argilius s'était réfugié dans ce temple, yaccourttout troublé; il voit ce jeune homme sur l'autel, dans l'attitude d'un suppliant, et lui demande la cause d'une résolution si soudaine. Argilius, lui répond qu'il a lu sa lettre. Cet aveu redouble l'effroi de Pausanias, qui le supplie de ne rien révéler, de ne pas trahir un homme qui l'a comblé de bienfaits, et lui promet de magnifiques présents s'il consent à le sauver par son silence.

posset, non putabant de tali tamque claro viro suspicionibus oportere judicari, sed exspectandum, dum se ipsa res aperiret.

IV. Interim Argilius quidam adolescentulus, quem puerum Pausanias amore venereo dilexerat, quum epistolam ab eo ad Artabazum accepisset, eique in suspicionem venisset, aliquid in ea de se esse scriptum, quod nemo eorum rediisset, qui super tali causa eodem missi erant, vincula epistolæ laxavit, signoque detracto cognovit, si pertulisset, sibi esse pereundum. Erant in eadem epistola, quæ ad ea pertinebant, quæ inter regem Pausaniamque convenerant. Has ille litteras ephoris tradidit. Non est prætereunda gravitas Lacedæmoniorum hoc loco: nam ne hujus quidem indicio impulsi sunt, ut Pausaniam comprehenderent; ne. que prius vim adhibendam putaverunt, quam se ipse indicasset. Itaque huic indici, quid fieri vellent, præceperunt. Fanum Neptuni est Tænari, quod violari nefas putant Græci. Eo ille index confugit: in ara consedit. Hanc juxta locum fecerunt sub terra, ex quo posset audiri, si quis quid loqueretur cum Argilio; huc ex ephoris quidam descenderunt. Pausanias, ut audivit Argilium confugisse in aram, perturbatus eo venit: quem quum supplicem dei videret in ara sedentem, quærit, causæ quid sit tam repentino consilio huic ille, quid ex litteris comperisset, aperit. Tanto magis Pausanias perturbatus orare cœpit, ⚫ ne enuntiaret, nec se, meritum de illo optime, proderet. Quod si eam veniam sibi dedisset, tantisque implicitum rebus sublevasset, magno esse ei præmio futurum, >>>

V. Les éphores, désormais convaincus, jugèrent qu'il valait mieux se saisir de Pausanias dans la ville, et partirent. De son côté, Pausanias, qui croyait avoir gagné Argilius, retourne à Lacédémone. On allait l'arrêter sur le chemin, lorsqu'un des éphores, voulant l'avertir, lui fit comprendre par les signes de son visage qu'on lui tendait un piége. Aussitôt Pausanias profite de quelques pas d'avance qu'il avait sur ceux qui lepoursuivaient, et se réfugie dans un temple dédié à Minerve, qu'on appelle Chalciœcus. Les éphores firent sur-le-champ murer les portes, pour l'empêcher de sortir. On démolit aussi le toit pour qu'il mourût plus promptement, exposé aux injures de l'air. Sa mère vivait encore à cette époque. On dit que cette femme, alors très-âgée, ayant appris le crime de son fils, fut la première à apporter des pierres pour l'y enfermer. C'est ainsi que Pausanias ternit par une fin honteuse la gloire qu'il avait acquise. Retiré à demi-mort du temple, il expira presque aussitôt. Quelquesuns étaient d'avis qu'on jetât son cadavre avec ceux des suppliciés; mais le plus grand nombre s'y opposa, et on l'enterra loin du lieu où il était mort. Exhumé dans la suite, sur une réponse de l'oracle de Delphes, il fut enseveli à l'endroit même où il avait expiré.

V. His rebus ephori cognitis, satius putaverunt in urbe eum comprehendi. Quo quum essent profecti, et Pausanias, placato Argilio, ut putabat, Lacedæmonem reverteretur, in itinere, quum jam in eo esset, ut comprehenderetur, e vultu cujusdam ephori, qui eum admonere cupiebat, insidias sibi fieri intellexit. Itaque paucis ante gradibus, quam qui sequebantur, in ædem Minervæ, quæ Chalciœcus vocatur, confugit. Hinc ne exire posset, statim ephori valvas ejus ædis obstruxerunt, tectumque sunt demoliti, quo facilius sub divo interiret. Dicitur, eo tempore matrem Pausaniæ vixisse, eamque jam magno natu, postquam de scelere filii comperit, in primis, ad filium claudendum, lapidem ad introitum ædis attulisse. Sic Pausanias magnam belli gloriam turpi morte maculavit. Hic quum semianimis de templo elatus esset, confestim animam efflavit. Cujus mortui corpus quum eodem nonnulli dicerent inferri oportere, quo hi, qui ad supplicium essent dati, displicuit pluribus; et procul ab eo loco infoderunt, quo erat mortuus. Inde posterius, dei Delphici responso, erutus, atque eodem loco sepultus, ubi vitam posuerat.

CIMON.

SOMMAIRE.

III. 11

CHAP. I. Cimon, héritier des fers paternels, est délivré par sa femme. - II. Ses qualités et ses exploits. Il défait, le même jour, les Perses sur mer et sur terre. est banni par l'ostracisme. Son rappel. Il meurt à Citium, après avoir ménagé la paix entre Athènes et Sparte. IV. Son éloge.

I. Cimon, fils de Miltiade, naquit à Athènes. Sa jeunesse fut éprouvée. Son père n'ayant pu payer l'amende à laquelle il avait été condamné, était mort en prison, et Cimon, détenu comme lui, ne pouvait recouvrer la liberté avant d'avoir acquitté la dette paternelle : c'était la loi d'Athènes. Il avait épousé sa sœur germaine Elpinice qu'il aimait; car il est permis aux Athéniens d'épouser leur sœur de père. Un certain Callias, homme obscur mais riche, et qui avait gagné sa fortune dans les mines, voulait épouser Elpinice. Il la demanda à Cimon, en lui proposant de payer l'amende de son père, s'il consentait. Cimon rejeta cette proposition avec mépris; mais Elpinice déclara que, puisqu'elle pouvait l'empêcher, elle ne souffrirait pas que le fils de Miltiade mourût dans les fers; et qu'elle épouserait Callias s'il tenait sa promesse.

II. Cimon ayant recouvré la liberté, parvint rapidement aux premières dignités. Il était éloquent, libéral, également habile dans la science du droit, dans l'art de la guerre qu'il avait appris dès l'enfance, en suivant son père dans les camps.

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un empire absolu, et la grande autorité qu'il eut plus tard sur l'armée. La première fois qu'il commanda en chef, il mit en fuite, près du fleuve Strymon, une nombreuse armée de Thraces. Il bâtit la ville d'Amphipolis, et y envoya une colonie de dix mille Athéniens. Il vainquit, encore près de Mycale, une flotte de Cypriens et de Phéniciens, forte de deux cents vaisseaux, dont il s'empara. Le même jour, il combattit sur terre avec autant de bonheur. A peine maître de la flotte, il fit débarquer ses troupes, et, chargeant les barbares, les renversa du premier choc. Cette victoire lui valut un riche butin. En retournant à Athènes, il fit rentrer dans le devoir quelques fles que la rigueur de la domination athénienne avait poussées à la révolte, et affermit dans leurs bonnes dispositions celles qui étaient restées fidèles. Mais il dépeupla l'île de Scyros, alors habitée par les Dolopes, et qui lui avait opposé une résistance opiniâtre. Il chassa les anciens habitants de l'île et de la ville, et distribua les terres à ses concitoyens. Il n'eut qu'à se montrer pour abattre l'orgueil des Thasiens, qui se fiaient sur leurs richesses. On décora, avec les dépouilles qu'il avait rapportées, le côté méridional de la citadelle d'Athènes.

III. Ces succès, qui l'élevaient si fort au-dessus de ses concitoyens, le rendirent victime de l'envie comme Miltiade et tant d'illustres citoyens d'Athènes. Il fut condamné à dix ans d'exil par cette sorte de jugement qu'on appelle l'ostracisme. Mais les Athéniens sentirent leur injustice

Tous ces avantages lui donnèrent sur le peuple | plus tôt que lui son exil. Il supportait l'ingrati

CIMON.

ARGUMENTUM.

CAP. I Vinculorum paternorum heres, ab uxore Cimon liberatur. II. Ejus dotes et res gestæ. Persas eodem die navali et terrestri prælio vincit. - III. Ostracismo ejicitur. Revocatus pacem cum Lacedæmoniis conciliat. Citii moritur. IV. Ejus encomium.

I. Cimon, Miltiadis filius, Atheniensis, duro admodum initio usus est adolescentiæ. Nam, quum pater ejus litem æstimatam populo solvere non potuisset, ob eamque causam in vinculis publicis decessisset, Cimon eadem custodia tenebatur, neque legibus Atheniensium emitti poterat, nísi pecuniam, qua pater multatus esset, solvisset. Habebat autem in matrimonio sororem suam germanam, nomine Elpinicem, non magis amore, quam patrio more ductus: nam Atheniensibus licet eodem patre natas uxores ducere. Hujus conjugii cupidus Callias quidam, non tam geberosus quam pecuniosus, qui magnas pecunias ex metallis fecerat, egit cum Cimone, ut eam sibi uxorem daret: id si impetrasset, se pro illo pecuniam soluturum. Is quum talem conditionem aspernaretur, Elpinice negavit se passurum Miltiadis progeniem in vinculis publicis interire, quoniam prohibere posset, seque Calliæ nupturam, si ea, quæ polliceretur, præstitisset.

II. Tali modo custodia liberatus Cimon celeriter ad principatum pervenit. Habebat enim satis eloquentiæ, summam liberalitatem, magnam prudentiam quum juris civilis, tum rei militaris, quod cum patre a puero in exercitibus fuerat versatus. Itaque hic et populum urbanum in sua tenuit potestate, et apud exercitum plurimum valuit auctoritate. Primum imperator apud flumen Strymona magnas copias Thracum fugavit: oppidum Amphipolim constituit, eoque decem millia Atheniensium in coloniam misit. Idem iterum apud Mycalen Cypriorum et Phœnicum ducentarum navium classem devictam cepit; eodemque die pari fortuna in terra usus est: namque hostium navibus captis, statim ex classe copias suas eduxit, barbarorum uno concursu maximam vim prostravit. Qua victoria magna præda potitus, quum domum reverteretur, quod jam nonnullæ insulæ, propter acerbitatem imperii, defecerant, bene animatas confirmavit, alienatas ad officium redire coegit. Scyrum, quam eo tempore Dolopes incolebant, quod contumacius se gesserant, vacuefecit, sessores veteres urbe insulaque ejecit, agros civibus divisit. Thasios, opulentia fretos, suo adventu fregit. His ex manubiis arx Athenarum, qua ad meridiem vergit, est or

nata.

III. Quibus rebus quum unus in civitate maxime floreret, incidit in eamdem invidiam, quam pater suus ceterique Atheniensium principes: nam testarum suffragiis, quod illi ostracismum vocant, decem annorum exsilio multatus

LYSANDRE.

SOMMAIRE.

tude de sa patrie avec la résignation d'une Aussi ne doit-on pas s'étonner si sa vie fut si calme ame supérieure, lorsque les Lacédémoniens et sa mort si regrettée. déclarèrent la guerre aux Athéniens. On se souvint alors de ce grand homme qu'on avait éloigné. On le rappela après cinq ans d'exil; mais au lieu de revenir à Athènes, Cimon, qui avait été accueilli chez les Lacédémoniens, se rendit à Sparte, et ménagea la paix entre ces deux puissantes républiques, pensant qu'elles avaient bien plus d'avantage à rester unies qu'à se faire la guerre. Peu de temps après, on l'envoya, à la tête d'une flotte de deux cents vaisseaux, contre l'île de Chypre. Il l'avait déjà réduite en partie, lorsqu'il fut attaqué d'une maladie dont il mourut à Citium.

IV. Cimon manqua longtemps aux Athéniens dans la paix et dans la guerre. Il était si libéral, qu'il ne mit jamais de gardiens dans ses fermes et ses jardins pour surveiller les fruits: il voulait que chacun pût jouir de son bien sans empêchement. Lorsqu'il sortait, il avait soin que ses esclaves fussent munis d'argent, pour assister surle-champ ceux qui avaient besoin de son secours: il eût craint qu'un délai ne fût pris pour un refus. Il se dépouilla souvent de son manteau pour en couvrir un malheureux mal vêtu. Chaque jour sa table était servie de manière à recevoir ceux qu'il rencontrait sur la place publique, et qui n'avaient pas d'invitation. C'est un usage auquel il ne manqua jamais. Tout le monde pouvait comp. ter sur son crédit, sur ses soins, sur sa bourse. Il enrichit plusieurs de ses concitoyens, et fit enterrer à ses frais beaucoup de pauvres qui n'a

CHAP. I. Vainqueur d'Athènes, Lysandre impose den dé-
cemvirs aux républiques de la Grèce. - II. Sa perfidie
et sa cruauté envers les Thasiens.
III. Ses efforts pour
abolir la royauté à Sparte, et pour corrompre les oracles.
Il est mis en jugement et acquitté; il est tué par les
Thébains. _ IV. Il se trahit lui-même.

I. Lysandre le Lacédémonien a laissé une grande réputation, qu'il a due à son bonheur plutôt qu'à son mérite. On sait qu'il défit les Athéniens, qui, depuis vingt-six ans, étaient en guerre avec le Péloponnèse; mais ce qu'on ignore, c'est à quelle circonstance il dut la victoire. Ce n'est pas le courage de ses troupes qui la lui donna, mais l'indiscipline de l'ennemi. Les Athéniens, méprisant la voix de leurs chefs, quittèrent leurs vaisseaux pour se répandre dans les campagnes, et se livrèrent ainsi à l'ennemi. Cette défaite soumit leur patrie aux Lacédémoniens. La victoire enivra Lysandre, qui était remuant et audacieux. L'abus qu'il fit de son pouvoir rendit ses concitoyens odieux à toute la Grèce. Ils avaient déclaré en prenant les armes qu'ils n'avaient d'autre but que de renverser la domination des Athéniens, dont le joug était dur et orgueilleux. Mais lorsque Lysandre eut détruit

vaient pas laissé de quoi payer leurs funérailles. I la flotte athénienne au combat d'Ægos-Potamos,

est. Cujus facti celerius Athenienses, quam ipsum, pœnituit. Nam, quum ille forti animo invidiæ ingratorum civium cessisset, bellumque Lacedæmonii Atheniensibus indixissent, confestim notæ ejus virtutis desiderium consecutum est. Itaque post annum quintum, quam expulsus erat, in patriam revocatus est. Ille, quod hospitio Lacedæmoniorum utebatur, satius existimans contendere Lacedæmonem, sua sponte est profectus, pacemque inter duas potentissimas civitates conciliavit. Post neque ita multo, Cyprum cum ducentis navibus imperator missus, quum ejus majorem partem insulæ devicisset, in morbum implicitus, in oppido Citio est mortuus.

IV. Hunc Athenienses non solum in bello, sed in pace diu desideraverunt. Fuit enim tanta liberalitate, quum compluribus locis prædia hortosque haberet, ut nunquam in eis custodem imposuerit fructus servandi gratia, ne quis impediretur, quo minus ejus rebus, quibus quisque vellet, frueretur. Semper eum pedissequi cum nummis sunt secuti, ut, si quis opis ejus indigeret, haberet, quod statim daret, ne differendo videretur negare. Sæpe, quum aliquem offensum fortuna videret minus bene vestitum, suum amiculum dedit. Quotidie sic cœna ei coquebatur, ut, quos invocatos vidisset in foro, omnes convocaret; quod facere nullum diem prætermittebat. Nulli fides ejus, nulli opera, nulli res familiaris defuit. Multos locupletavit; complures pauperes mortuos, qui, unde efferrentur, non reliquissent,

CORNELIUS NEPOS.

suo sumptu extulit. Sic se gerendo, minime est mirandum, si et vita ejus fuit secura, et mors acerba.

LYSANDER.

ARGUMENTUM.

CAP. I. Athenarum victor decemviros civitatibus imponit Lysander. - II. In Thasios subdolus et crudelis. - III. Lacedæmoniorum reges tollere et oracula corrumpere conatur. Accusatus, absolvitur; occiditur a Thebanis. IV. Ipse suus accusator.

I. Lysander, Lacedæmonius, magnam reliquit sui famam magis felicitate, quam virtute partam. Athenienses enim, in Peloponnesio sexto et vicesimo anno bellum gerentes, confecisse apparet: id qua ratione consecutus sit, latet. Non enim virtute sui exercitus, sed immodestia factum est adversariorum; qui, quod dicto audientes imperatoribus suis non erant, dispalati in agris, relictis navibus, in hostium venerunt potestatem. Quo facto Athenienses se Lacedæmoniis dediderunt. Hac victoria Lysander elatus, quum antea semper factiosus audaxque fuisset, sic sibi indulsit, ut ejus opera in maximum odium Græciæ Lacedæmonii pervenerint. Nam quum hanc causam Lacedæmonii dictitassent sibi esse belli, ut Atheniensium

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