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ce que l'on serait capable de faire devant tout le monde. >>

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Le parfait courage est celui que dicte le devoir.
Le courage est un.

L'homme courageux a du

toutes choses.

courage en tout, pour

L'homme lâche est lâche toujours.

autant que

Il est pris en pitié et méprisé. Rien ne dégrade la lâcheté. Le menteur et le lâche sont les êtres les plus vils. Du reste, le mensonge est une sorte de lâcheté. Pour être constamment véridique, il faut être très courageux,

On dit d'un ouvrier de l'usine, d'un paysan, d'un travailleur quelconque attaché à sa besogne, ne perdant pas son temps, ne ménageant pas ses forces, qu'il est courageux.

le

Le genre de courage dont il fait preuve est bien courage, le courage sans qualificatif.

C'est le même qui anime le soldat sur le champ de bataille, qui lui fait braver le péril et la mort.

C'est le même qui fait marcher l'homme vaillant au-devant des difficultés, des obstacles, des dangers.

C'est encore le même courage qui fait que l'on accepte sans hésiter, sans se laisser accabler, toutes les charges de la vie, toutes celles que le devoir im

pose, celles aussi qu'un sentiment généreux fait supporter sans qu'il y ait obligation morale.

La lâcheté, elle aussi, est une.

C'est par lâcheté qu'on recule devant le travail, qu'on fuit devant la fatigue qu'il impose, comme c'est par lâcheté qu'on recule dans le combat, qu'on fuit devant l'ennemi, devant le danger, devant la

mort.

C'est par lâcheté que l'homme faible ou égoïste, lâche en tout cas, n'accepte pas les devoirs lourds ou périlleux; qu'il craint d'assumer les charges d'une famille, qu'il recule, qu'il fuit devant ce que la vie apporte avec elle de difficultés, mais aussi de douceur et de beauté.

La lâcheté est vile, mais elle est bête aussi; et le lâche, au demeurant, calcule mal son repos et sa sécurité. L'un et l'autre s'achètent par l'effort, par

courage.

le

Le soldat qui cède à la peur, abandonne le combat et s'enfuit, a plus de chance d'être tué que celui qui résiste à l'ennemi et demeure au poste du devoir, où n'est pas toujours le plus grand danger.

L'homme qui manque de courage au travail, qui, là aussi, recule ou déserte, s'achemine vers la misère et se prépare des jours plus difficiles et plus durs que ceux qu'il eût passés en travaillant de bon cœur, en

assurant son avenir.

LE COURAGE.

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Dans ces circonstances, le manquement au devoir, au courage, reçoit une prompte et juste punition.

Le courage devant la mort ne consiste pas seulement à ne point reculer lorsqu'elle approche et qu'il est du devoir de l'affronter sans défaillance.

Bien souvent on la voit venir quand elle est inévitable. Le courage fait alors qu'on l'attend dans le calme, qu'on se prépare à l'accueillir le visage tranquille, l'âme ferme et sereine.

La mort de Socrate est donnée en exemple depuis des siècles. Ce n'est pas uniquement parce que le philosophe refusa de fuir pour échapper à l'inique sentence qui l'avait condamné. C'est qu'il attendit. la mort en héros du devoir, en homme vaillant et bon qui ne craint pas la fin, ayant conscience d'avoir rempli une belle vie.

Platon, dans ses dialogues, nous fait assister aux derniers moments de son maître. Un serviteur du tribunal d'Athènes a présenté à Socrate la coupe contenant le poison: << Celui-ci la reçut avec sérénité, sans trembler, sans frémir, sans changer de couleur ni de visage... Il m'est bien permis, dit-il, d'adresser une prière aux dieux, et de leur demander que je passe heureusement de ce monde dans l'autre; c'est ce que je leur demande, puissent-ils exaucer ma prière! Et tout en disant cela, il approcha la coupe de ses lèvres, et, sans effort, sans révolte, il la vida. »

Quand ses amis, groupés autour de lui, pleurent, sanglotent, se lamentent, Socrate ne se laisse pas gagner par l'émotion; il les exhorte: «< Restez en paix, leur dit-il, et reprenez courage. »

Cette mort d'un juste vaut bien d'être rappelée.

On en pourrait citer cent autres que l'histoire, les récits qui nous ont été faits, nos propres souvenirs ont laissés en mémoire à notre admiration.

J'ai vu, il y a quelque quinze et vingt ans, la fin de deux hommes, qui fut précédée d'une longue, terrible et consciente agonie. L'un et l'autre avaient le visage rongé par un cancer dont ils étaient lentement défigurés, et qui les conduisait à la mort sans rémission possible, dans un temps dont on pouvait calculer les limites. A l'horreur de cette condamnation à terme, s'ajoutait la continuelle souffrance, le sentiment douloureux, l'humiliation d'être un objet de pitié et aussi de répulsion physique pour ceux qui approchaient ces deux victimes d'un inexorable

sort.

L'un était Eugène Bersot, directeur de notre École normale supérieure, l'autre, Joffrin, un ancien ouvrier, devenu représentant d'un quartier de Paris à la Chambre des députés. Ils étaient tous les deux, à des titres divers, hommes de mérite. Ils montrèrent, dans leur lente agonie, qu'ils valaient mieux encore que cela, qu'ils étaient hommes d'admirable tenue

vahi leur visage, ils ne faiblirent pas un jour, et restèrent eux-mêmes quand s'ouvrait la du tomporte beau. Ils firent jusqu'au bout leur tâche humaine, sans que la douleur et la présence de la mort, visible et les guettant, les eût un moment interrompus.

La mort de Bersot et celle de Joffrin sont dignes de la mort de Socrate.

Plus près de nous encore, à quelques mois de distance du moment où j'écris ces lignes, des hommes. ont connu la mort lente et fatale.

Le bateau sous-marin le Farfadet coula dans la rade de Bizerte, gardant enfermés dans son compartiment arrière une dizaine de matelots et leur jeune chef, un enseigne de vaisseau. L'air que contenait le compartiment était en trop petite quantité pour leur permettre de respirer longtemps. Mais une autre cause que le viciement de l'atmosphère devait abréger leurs jours. La porte et la cloison qui les séparaient de la partie du navire que l'eau emplissait n'étaient pas complètement étanches, et l'eau s'infiltrait, pénétrait peu à peu dans l'étroit logement.

Le bateau reposait sur la vase, par 10 mètres de fond. On travaillait, du dehors, à le remonter à la surface pour sauver ces marins prisonniers de la mer. L'espoir était faible, étant donnés les moyens

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