" ruse contre les fils de Xerxès, dernier obstacle à ses projets. Tranquille sur Artaxerxès (Longuemain) encore enfant, il lui fait croire que le roi a été tué par Darius, déjà dans l'adolescence, pour régner plus tôt à sa place, et il l'engage à venger ce parricide par un autre parricide. On court à l'appartement de Darius, qu'on trouve endormi, et on le tue, comme s'il feignait de dormir. Mais il restait un fils du roi; et Artaban, qui craignait d'ailleurs la rivalité des grands, communique son dessein à Bacabase. Celui-ci, content de sa fortune présente, le révèle à Artaxerxès, et lui raconte « comment son père a été assassiné, comment son frère a été la victime « d'un faux soupçon de parricide, comment « enfin lui-même est exposé à de nouvelles em« bûches. » Sur cet avis, Artaxerxès, qui redoutait les sept fils d'Artaban, ordonne que ses troupes scient le lendemain sous les armes, comme s'il voulait connaître leur nombre, et leur adresse dans les exercices militaires. Artaban était luimême tout armé à cette revue. Le roi, feignant d'avoir une cuirasse trop courte, invite Artaban à l'échanger contre la sienne. Artaban obéit, et à peine s'est-il dépouillé, que le roi le perce de son épée, et fait en même temps arrêter ses fils. C'est ainsi que ce prince courageux tira vengeance et du meurtre de son père et des embûches qu'on lui préparait. II. Tel était l'état de la Perse, lorsque la Grèce, délivrée de la guerre étrangère, tourna ses armes contre elle-même. Elle s'était divisée en deux factions, dont l'une avait embrassé le parti des Lacédémoniens, l'autre celui des Athé niens. D'un seul peuple il s'en forma deux, et taxerxe, puero admodum, fingit regem a Dario, qui erat adolescens, quo maturius regno potiretur, occisum; impellit Artaxerxem parricidium parricidio vindicare. Quum ventum ad domum Darii esset, dormiens inventus, quasi somnum fingeret, interficitur. Dein quum unum ex regis filiis sceleri suo superesse Artabanus videret, metueretque de regno certamina principum, assumit in societatem consilii Bacabasum : qui præsenti statu contentus, rem prodit Artaxerxi, Ut pater ejus occisus; ut frater falsa parricidii suspicione oppressus; ut denique ipsi pararentur insidiæ. » His cognitis Artaxerxes, verens Artabani numerum filiorum, in posterum diem paratum esse armatum exercitum jubet, quasi recogniturus et numerum militum, et in armis industriam singulorum. Itaque quum inter cæ teros et ipse Artabanus armatus assisteret, rex simulat se breviorem loricam habere: jubet Artabanum secum commutare exuentem se, ac nudatum, gladio trajicit; tum et filios ejus corripi jubet. Atque ita egregius adolescens et cædem patris, et se ab insidiis Artabani vindicavit. II. Dum hæc in Persis geruntur, interea Græcia omnis, ducibus Lacedæmoniis et Atheniensibus, in duas divisa partes, ab externis bellis, velut in viscera sua, arma convertit, Fiunt igitur de uno populo duo corpora; et eorundem castrorum homines in duos hostiles exercitus dividuntur. Hinc Lacedæmonii communia quondam civi des hommes jadis compagnons d'armes se partagèrent alors en deux camps ennemis. Les Lacédémoniens attiraient à eux les forces employées autrefois à la défense commune ; et les Athéniens, doublement illustres par l'ancienneté de leur origine et l'éclat de leurs exploits, mettaient leur confiance en eux-mêmes. Ainsi, les deux peuples les plus puissants de la Grèce, égaux entre eux par les institutions de Solon et par les lois de Lycurgue, s'armaient, par un sentiment de jalousie, l'un contre l'autre. Lycurgue, frère de Polydecte, roi de Sparte, et qui pouvait revendiquer pour lui-même l'héritage et le trône de ce frère, les remit fidèlement à Charilaüs, fils posthume de celui-ci, dès qu'il eut atteint l'àge viril, montrant par là que les droits de la justice, aux yeux d'un honnête homme, sont préférables à tous les biens. Dans le temps que le royal enfant croissait en âge sous sa tutelle, il donna des lois aux Spartiates, qui n'en avaient pas encore. Aussi grand par ses exemples que par ses préceptes, il n'imposa jamais de loi sans s'y conformer le premier. Il enseigna au peuple la soumission, aux rois la justice, à tous la frugalité, estimant qu'un régime sobre fait supporter plus aisément les fatigues de la guerre. Il substitua dans les transactions l'échange à l'usage des monnaies, et proscrivit l'or et l'argent comme la source de tous les crimes. III. Il donna à chaque ordre de citoyens une part dans l'administration publique. Aux rois il attribua le pouvoir de faire la guerre; à des magistrats annuels, celui de rendre la justice; au sénat, le dépôt des lois; au peuple, l'élection du tatum auxilia ad vires suas trahebant: inde Athenienses, et vetustate gentis, et gestis rebus illustres, propriis viribus confidebant. Atque ita duo potentissimi Græciæ populi, institutis Solonis et Lycurgi legibus pares, ex æmulatione virium in bellum ruebant. Namque Lycurgus quum fratri suo Polydectæ, Spartanorum regi, successisset, regnumque sibi vindicare potuisset, Charilao, filio ejus, qui natus posthumus fuerat, quum ad ætatem adultam pervenisset, regnum summa fide restituit: ut intelligerent omnes, quanto plus apud bonos pietatis jura, quam omnes opes, valerent. Medio igitur tempore dum infans convalescit, tutelamque ejus administrat, non habentibus Spartanis leges instituit, non inventione earum magis, quam exemplo clarior. Siquidem nihil lege ulla in alios sanxit, cujus non ipse primus in se documenta daret. Populum in obsequia principum, principes ad justitiam imperiorum formavit. Parcimoniam omnibus suasit, existimans, laborem militiæ assidua frugalitatis consuetudine faciliorem fore. Emi singula non pecunia, sed compensatione mercium jussit. Auri argentique usum, velut omnium scelerum materiam, sustulit. III. Administrationem reipublicæ per ordines divisit: regibus potestatem bellorum; magistratibus judicia per annuas successiones; senatui custodiam legum; populo sublegendi senatum, vel creandi quos vellet magistratus, sénat et la libre élection de ses magistrats. En répartissant également les terres, il fonda Fégalité civile sur celle de la propriété. Il voulut que les repas fussent publics, pour empêcher la prodigalité et l'intempérance d'échapper aux regards. Il ne permit pas aux jeunes gens d'avoir plus d'un habit par an, ni d'être plus recherchés dans leur extérieur les uns que les autres, ni plus délicats dans le choix de leurs mets, de peur que l'exemple n'enfantât le luxe. Il voulut que les pubères fussent élevés à la campagne et non à la ville, et qu'ils passassent leurs premières années dans des travaux pénibles et non dans la mollesse. Il leur défendit de dormir sur des lits, de ne rien manger d'apprêté, et de rentrer à Sparte avant d'être hommes faits. Il supprima les dots des filles, pour qu'on n'épousât pas les femmes à cause de leurs biens, et que le mari, n'ayant rien reçu, pût exercer plus librement sa puissance dans la communauté. Il n'attacha la considération ni aux richesses ni à la puissance, mais aux divers degrés de l'âge. Aussi, nulle part la vieillesse n'était plus honorée qu'à Lacédémone. Prévoyant que ses lois paraîtraient dures à un peuple dont les mœurs avaient été jusqu'ici fort relâchées, il feignit qu'Apollon en était l'auteur, et qu'il lui avait donné l'ordre de les apporter de Delphes, afin que la religion triomphât de l'habitude. Pour assurer l'éternelle durée de ses lois, il exige des Lacédémoniens le serment de n'y rien changer avant son retour; il feint d'aller à Delphes, pour consulter l'oracle sur les.changements qu'il convenait d'y apporter. Mais il se rend en Crète, et s'exile pour jamais. Au moment de mourir, il recommande de jeter ses potestatem permisit. Fundos omnium æqualiter inter omnes divisit, ut æquata patrimonia neminem potentiorem altero redderent. Convivari omnes publice jussit, ne cu jus divitiæ vel luxuria in occulto essent. Juvenibus non amplius una veste uti toto anno permisit, nec quemquam cultius quam alterum progredi, nec epulari opulentius, ne imitatio in luxuriam verteretur. Pueros puberes non in forum, sed in agrum deduci præcepit, ut primos annos non in luxuria, sed in opere et laboribus agerent. Nilil eos somni causa substernere, et vitam sine pulmento degere, neque prius in urbem redire, quam viri facti essent, statuit. Virgines sine dote nubere jussit, ut uxores eligerentur, non pecuniæ; severiusque matrimonia sua viri coercerent, quum nullis dotis frænis tenerentur. Maximum honorem non divitum et potentium, sed pro gradu ætatis, senum esse voluit. Nec sane usquam terrarum locum honoratiorem senectus habet. Hæc quoniam primo, solutis antea moribus, dura videbat esse, auctorem eorum Apollinem Delphicum fingit, et inde se ea ex præcepto numi. nis detulisse, ut consuescendi tædium metus religionis | vincat. Dein ut æternitatem legibus suis daret, jurejurando obligat civitatem, nihil eos de ejus legibus mutaturos, priusquam reverteretur : et simulat, se ad oraculum Delphicum proficisci, consulturum, quid addendum mutandumve legibus videretur. Proficiscitur aut m Cretam, os à la mer, de peur que, s'ils étaient rapportés à Lacédémone, les Spartiates ne se crussent déliés de leurs serments et n'abolissent ses lois. IV. Les Spartiates puisèrent une telle force dans leur constitution politique, qu'ayant déclaré la guerre aux Messéniens (A. de R. 11-31), pour avoir violé de jeunes Lacédémoniennes pendant la célébration d'un sacrifice, ils s'engagèrent par les plus terribles serments à ne revenir dans leur patrie qu'après avoir détruit Messène; tant ils comptaient sur leur puissance ou sur leur fortune. Ici commencent les divisions et la guerre intestine qui désolèrent la Grèce. Les Spartiates, qui s'attendaient à une victoire plus facile, avaient déjà passé dix ans sous les mers de Messène, lorsqu'ils furent rappelés par leurs femmes, qui se plaignaient d'un si long veuvage. Craignant donc que leur obstination à continuer le siége ne leur fût plus nuisible qu'à leurs ennemis, puisque ceux-ci, grâce à la fécondité de leurs femmes, réparaient la perte de leurs soldats, et qu'eux, au contraire, étaient affaiblis par des pertes continuelles, que rendait irréparables la stérilité forcée des femmes en l'absence des maris, ils choisissent, parmi les recrues qui leur étaient arrivées depuis leur serment, de jeunes soldats qu'ils renvoient à Sparte, avec la faculté d'y user indistinctement de toutes les femmes; ils pensaient que chacune d'elles deviendrait mère plus aisément, si elle cohabitait avec plusieurs hommes. Les enfants nés de ces accouplements furent appelés Parthéniens, à cause de l'infamie de leurs mères. Arrivés à l'âge de trente ans, et prévoyant la détresse qui les menaçait, faute de toute succession paternelle, ibique perpetuum exsilium egit, abjicique in mare ossa sua moriens jussit, ne relatis Lacedæmonem, solutos se Spartani religione jurisjurandi in dissolvendis legibus arbitrarentur. IV. His igitur moribus ita brevi civitas convaluit, ut, quum Messeniis, propter stupratas virgines suas in solenni Messeniorum sacrificio, bellum intulissent, gravissima se exsecratione obstrinxerint, non prius, quam Messeniam expugnassent, reversuros; tantum sibi vel de viribus suis, vel de fortuna spondentes. Quæ res initium dissensionis Græciæ, et intestini belli causa et origo fuit. Itaque quum contra præsumptionem suam annis decem in obsidione urbis tenerentur, et querelis uxorum post tam longam viduitatem revocarentur: veriti, ne hac perseverantia belli gravius sibi, quam Messeniis nocerent: quippe illis, quantum juventutis bello intercidat, mulierum fœcunditale suppleri; sibi et belli damna assidua, et fœcunditatem uxorum, absentibus viris, nullam esse. Itaque legunt juvenes ex eo genere militum, qui post jusjurandum in supplementum venerant ; quibus Spartam remissis promiscuos omnium feminarum concubitus permisere : maturiorem futuram conceptionem rati, si eam singulæ per plures viros experirentur. Ex his nati ob notam materni pudoris, Parthenia vocali. Qui quum ad annos xxx pervenissent, metu inopia (nulli enim pater exsistebat, cujus in patri puisque aucun d'eux ne connaissait son père, ils élurent pour chef Phalanthe, fils de cet Aratus qui avait donné aux Spartiates le conseil de renvoyer chez eux leurs jeunes gens pour en avoir des enfants. Ils avaient dû le jour aux conseils du père, ils espéraient du fils leur réhabilitation et leur fortune. Ainsi, sans prendre congé de leurs mères, dont il semblait que l'adultère les eût déshonorés, ils partent, et vont chercher une autre patrie. Après bien des traverses, ils abordent en Italie, s'emparent de Tarente (A. de R. 50), en expulsent les habitants, et s'y établissent. Plusieurs années après, PhaJanthe, banni à la suite d'une sédition, se retira dans la ville de Brindes, où les anciens Tarentins s'étaient réfugiés. Au moment de mourir, il leur persuada «< de broyer ses os, et d'en faire répandre «< la poussière sur la place publique de Tarente. « L'oracle de Delphes, ajoutait-il, avait prédit « que, par ce moyen, ils pourraient recouvrer << leur patrie. » Ceux-ci, pensant qu'il ne trahissait la destinée de ses concitoyens que dans le désir de s'en venger, exécutent ses dernières volontés. Mais le sens de l'oracle était tout différent. Il assurait aux Parthéniens la possession perpétuelle de Tarente, au lieu de les en dépouiller. Ainsi l'adresse de ce chef exilé, secondée par leurs ennemis mêmes, les rendit à jamais maîtres de la ville. En reconnaissance de ce bienfait, ils décernèrent à Phalanthe les honneurs divins. V. Cependant les Messéniens, que la force n'avait pu réduire, succombent sous les embûches des Spartiates. Traités en esclaves pen dant quatre-vingts ans (A. de R. 31), battus de verges, chargés de chaînes, en butte à toutes les vexations qui suivent la conquête, ils se soulèvent, et recommencent la guerre. Les Spartiates, de leur côté, prennent les armes avec d'autant plus de confiance qu'ils n'ont plus à combattre que des esclaves (A. de R. 69-96). Le ressentiment chez les uns et l'orgueil chez les autres enflamment les esprits. L'oracle de Delphes, consulté par les Spartiates sur l'issue de la guerre, leur ordonne de demander un général aux Athéniens. Et ceuxci, à peine informés de la réponse de l'oracle, leur envoient, par dérision, le poëte Tyrtée, qui était boiteux, et qui, vaincu trois fois, réduisit les Spartiates à un tel désespoir, que, pour grossir leur armée, ils affranchirent les esclaves, s'engageant à leur faire épouser les veuves de ceux qui seraient tués, pour combler les vides causés par leur mort; on leur assura même la succession aux dignités. Mais les rois de Lacédémone, craignant de plus grands malheurs si on continuait la lutte malgré la fortune, voulaient ramener l'armée. Tyrtée chante alors aux soldats des vers où il rallumait leur courage et les consolait de leurs pertes. Les Spartiates, enflammés par ses chants, ne songent plus qu'à mourir avec gloire. Ils attachent à leurs bras droits des cachets où ils font graver leurs noms et ceux de leurs pères, afin qu'on puisse les reconnaître et les inhumer s'ils succombent. Voyant l'ardeur de leurs soldats, les deux rois font en sorte que l'ennemi en soit instruit. Mais cette nouvelle, au lieu d'abattre les Messéniens, excite leur courage; on monium successio speraretur), ducem Phalanthum adsumunt, filium Arati, qui auctor Spartanis fuerat juventutis ad generandam sobolem domum remittendæ : ut, sicuti dudum patrem ejus nascendi auctorem habuissent, sic ipsum spei ac dignitatis suæ haberent. Itaque nec salutatis matribus, e quarum adulterio infamiam collegisse videbantur, ad sedes inquirendas proficiscuntur; diuque et per varios casus jactati, tandem in Italiam deferuntur; et occupata arce Tarentinorum, expugnatis veteribus incolis, sedes ibi constituunt. Sed post annos plurimos dux eorum Phalanthus, per seditionem in exsilium proturbatus, Brundisium se contulit, quo expulsi sedibus suis veteres Tarentini concesserant. His moriens persuadet, « Ut ossa sua, postremasque reliquias conterant, et tacite spargi in foro Tarentinorum curent. Hoc enim modo recuperare illos patriam suam posse, Apollinem Delphis cecinisse. » Illi arbitrantes eum in ultionem sui, civium fata prodidisse, præceptis paruere; sed oraculi diversa sententia fuerat. Perpetuitatem enim urbis, non amissionem, hoc facto promiserat Ita ducis exsulis consilio, et hostium ministerio, possessio Tarentina Partheniis in æternum fundata. Ob cujus beneficii memoriam Phalantho divinos honores decrevere. V. Interea Messenii, quum virtute non possent, per insidias expugnantur. Dein quum per annos LXXX gravia servitutis verbera, plerumque et vincula, cæteraque cap tivitatis mala perpessi essent, post longam pœnarumi pa. tientiam, bellum restaurant. Lacedæmonii quoque eo conspiratius ad arma concurrunt, quod adversus servos dimica. turi videbantur. Itaque quum hinc injuria, inde indignitas animos acueret, Lacedæmonii, de belli eventu oraculo Delphis consulto, jubentur ducem belli ab Atheniensibus petere. Porro Athenienses, quum responsum cognovissent, in contemptum Spartanorum Tyrtæum poetam claudum pede misere qui tribus præliis fusus, eo usque desperationis Spartanos adduxit, ut, ad supplementum exercitus, servos suos manumitterent, hisque interfectorum matrimonia pollicerentur: ut non numero tantum amissorum civium, sed et dignitati succederent. Sed reges Lacedæmoniorum, ne, contra fortunam pugnando, majora detrimenta civitati infligerent, reducere exercitum voluerunt; ni intervenisset Tyrtæus, qui composita carmina exercitui pro concione recitavit, in quibus hortamenta virtutis, damnorum solatia, belli consilia conscripserat. Itaque tantum ardorem militibus injecit, ut non de salute, sed de sepultura soliciti, tesseras, insculptis suis et patrum nominibus, dextro brachio deligarent: ut, si omnes adversum prælium consumpsisset, et temporis spatio confusa corporum lineamenta essent, ex indicio titulorum tradi sepulturæ possent. Quum sic animatum reges exercitum viderent, curant rem hostibus nuntiari. Messeniis autem non timorem res, sed æmulationem mutuam dedit. Itaque combat avec un acharnement jusque-là sans exemple. Enfin la victoire reste aux Lacédémoniens. à soutenir, ils n'hésitaient pas à en entreprendre une troisième pour susciter des ennemis à leurs ennemis. Pour faire face à ce nouvel orage, les Athéniens donnent le commandement de l'ar ses talents, et Sophocle, le poëte tragique. Tous deux s'étant partagé les troupes, ravagèrent le territoire de Sparte, et réunirent à la république plusieurs villes d'Achaïe. VI. Longtemps après, les Messéniens reprirent les armes pour la troisième fois (A. de R. 285-mée à deux généraux, Périclès, déjà connu par 295). Les Lacédémoniens demandèrent du secours à leurs alliés, et, entre autres, aux Athéniens. Mais suspectant la fidélité de ceux-ci et feignant de n'avoir plus besoin de leurs services, ils les congédièrent. Les Athéniens, indignés de cet affront, transportèrent de Délos à Athènes l'argent recueilli chez tous les peuples de la Grèce, et mis en réserve (A. de R. 278) pour les frais de la guerre contre les Perses, de peur qu'il ne devint la proie des Lacédémoniens, s'ils se détachaient un jour de l'alliance commune. Mais les Lacédémoniens ne restèrent pas inactifs, et, pendant qu'ils faisaient la guerre aux Messéniens, ils soulevèrent le Péloponèse (A. de R. 293) contre les Athéniens. Ceux-ci, qui avaient envoyé leur flotte en Egypte (A. de R. 291), n'étaient pas en état de résister. Ils furent battus sur terre et sur mer. Leur flotte étant revenue, ils s'apprêtent à livrer bataille. Les Spartiates abandonnent la Messénie, et marchent contre les Athéniens. La Victoire, longtemps disputée, reste indécise, et les deux armées se séparent. Rappelés par la guerre de Messénie, les Spartiates, ne voulant pas laisser un moment de repos aux Athéniens, s'obligent, par un traité avec les Thébains (A. de R. 297), à rendre à ce peuple la Béotie qu'il avait perdue dans la guerre des Perses, à condition qu'il se déclarera contre les Athéniens. Telle était l'animosité des Spartiates, qu'ayant deux guerres tantis animis concursum est, ut raro unquam cruentius prælium fuerit. Ad postremum tamen victoria Lacedæmoniorum fuit. VI. Interjecto tempore, tertium quoque bellum Messenii reparavere in cujus auxilium Lacedæmonii, inter reliquos socios, etiam Athenienses adhibuere. Quorum fidem quum suspectam haberent, supervacaneos simulantes, a bello eosdem dimiserunt. Hanc rem Athenienses graviter ferentes, pecuniam, quæ erat in stipendium Persici belli ab universa Græcia collata, a Delo Athenas transferunt, ne, deficientibus a fide societatis Lacedæmoniis, prædæ ac rapinæ esset. Sed nec Lacedæmonii quievere: qui, quum Messeniorum bello occupati essent, Peloponnenses immisere, qui bellum Atheniensibus facerent. Parvæ tunc temporis, classe in Egyptum missa, vires Atheniensibus erant. Itaque navali prælio dimicantes facile superantur. Interjecto deinde tempore, post reditum suorum aucti et classis et militum robore, prælium reparavere. Jam et Lacedæmonii, omissis Messeniis, adversus Athenienses arma verterant. Diu varia victoria fuit: ad postremum æquo marte utrinque discessum. Inde revocati Lacedæmonii ad Messeniorum bellum, ne medium tempus otiosum Atheniensibus relinquerent, cum Thebanis pacis cuntur, ut Bootiorum imperium his restituerent, quod temporibus Persici belli amiserant, ut illi Atheniensium bella susciperent. Tantus furor Spartanorum erat, ut, duobus bellis impliciti, suscipere tertium non recusarent, VII. Abattus par ces revers (A. de R. 308), les Spartiates conclurent une trêve de trente ans. Mais cet intervalle s'écoulait trop lentement au gré de leur haine. Ils rompent la trêve au bout de quinze ans (A. de R. 323), ravagent, au mépris des lois divines et humaines, les frontières de l'Attique, et, pour paraître moins avides de butin que de gloire, ils offrent le combat à l'ennemi. Mais les Athéniens, par le conseil de Périclès, ajournent les représailles de ces ravages, jugeant inutile de combattre un ennemi dont ils pouvaient se venger sans péril. Peu de jours après, ils font une descente sur le territoire lacédémonien, qu'ils pillent en l'absence des Spartiates, se dédommageant avec usure de leurs pertes. On peut dire que la vengeance dépassa l'injure de beaucoup. Cette expédition fut très-glorieuse pour Périclès; mais il s'illustra plus encore par son mépris pour ses propres biens. L'ennemi, en dévastant les campagnes, avait laissé intactes les propriétés de Périclès, espérant le perdre en le rendant odieux, ou le déshonorer en le rendant suspect. Périclès l'avait prévu : il en informa le peuple, et, pour prévenir la haine, il donna ses biens à la république. Le piége qu'on lui avait dummodo inimicis suis hostes acquirerent. Igitur Athenienses, adversus tantam tempestatem belli duos duces deligunt, Periclem spectatæ virtutis virum, et Sophoclem scriptorem tragœdiarum : qui, diviso exercitu, et Spartanorum agros vastaverunt, et multas Achaïa civitates Atheniensium imperio adjecerunt. VII. His malis fracti Lacedæmonii, in annos xxx pepigerunt pacem sed tam longum otium inimicitiæ non tulerunt. Itaque quinto decimo anno, rupto fædere, cum contemptu deorum hominumque, fines Atticos populantur; et ne prædam potius, quam pugnam, expetiisse vide. rentur, hostes ad prælium provocant. Sed Athenienses, consilio Periclis ducis, populationis injuriam differunt in tempus ultionis; supervacuam pugnam existimantes, quum ulcisci hostem sine periculo possent. Deinde interjectis diebus, naves conscendunt, et nihil sentientibus Lacedæ. moniis, totam Spartam deprædantur, multoque plura auferunt, quam amiserant: prorsus ut, in comparatione damnorum, longe pluris fuerit ultio, quam injuria. Clara quidem hæc Periclis expeditio habita: sed multo clarior privati patrimonii contemptus fuit. Hujus agros, in popula tione cæterorum, intactos hostes reliquerant, sperantes acquirere se illi posse aut periculum ex invidia, aut ex suspicione proditionis infamiam. Quod ante prospiciens Pericles, et futurum populo prædixerat, et ad invidiæ impetum declinandum, agros ipsos dono reipublicæ dederat: atque ita, unde periculum quæsitum fuerat, ibi tendu tourna ainsi à sa gloire. A quelques jours de là, les Spartiates furent vaincus dans un combat naval (A. de R. 325). Depuis, les deux peuples, toujours aux prises sur terre et sur mer, tantôt vainqueurs et tantôt vaincus, ne cessèrent de se faire la guerre. Lassés enfin de tant de désastres, ils conclurent une trêve de quatre-vingts ans (A. de R. 332), qui n'en dura que six. Chacun d'eux, après y avoir donné son assentiment, la fit rompre par ses alliés, comme s'il eût été moins parjure en prêtant à ceux-ci du secours, qu'en faisant la guerre directement. Les hostilités furent alors portées en Sicile (A. de R. 328). Mais, avant de les raconter, j'entrerai dans quelques détails sur la situation de ce pays. LIVRE IV. 1. La Sicile, selon la tradition, était autrefois liée à l'Italie par un isthme étroit, et elle en fut arrachée comme un membre de son corps, par la violence de la mer Adriatique, qui porte de ce côté toute la masse de ses flots. La terre y est légère, friable, et tellement percée de canaux et de cavernes, qu'elle s'ouvre presque tout entière au souffle des vents. Le sol y est aussi très-propre à produire et à alimenter des feux souterrains, le fond en étant composé, dit-on, de couches de soufre et de bitume. De là une collision interne entre l'air et le feu, qui cause en beaucoup d'endroits de fréquentes éruptions de flammes, des vapeurs et de la fumée de là cet incendie de l'Etna, qui dure depuis tant de siècles: de là enfin cette violence du vent, qui, s'échappant du fond des cavités, pousse devant lui des monceaux de sable. maximam gloriam invenit. Post hæc interjectis diebus, navali prælio dimicatum est: victi Lacedæmonii fuge. runt. Nec cessatum deinceps est, quin aut terra, aut mari, varia præliorum fortuna, invicem se trucidarent. Denique fessi tot malis, pacem in annos quinquaginta fecere, quam non nisi sex annis servaverunt. Nam inducias, quas proprio nomine condixerant, ex sociorum persona rumpebant: quippe quasi minus perjurii contraherent, si ferentes sociis auxilia, potius quam si ipsi aperto prælio dimicassent. Hinc bellum in Siciliam translatum : quod priusquam expono, de Sicilia situ pauca dicenda sunt. LIBER IV. I. Siciliam ferunt angustis quondam faucibus Italiæ adhæsisse; direptamque velut a corpore, majore impetu superi maris, quod toto undarum onere illuc vehitur. Est autem ipsa terra tenuis ac fragilis; et cavernis quibusdam fistulisque ita penetrabilis, ut ventorum tota ferme flatibus pateat; nec non et ignibus generandis nutriendisque soli ipsius naturalis materia, quippe intrinsecus stratum sulphure et bitumine traditur : quæ res facit, ut spiritu cum igne inter interiora luctante, frequenter et compluribus locis nunc flammas, nunc vaporem, nunc fumum eructet. Inde denique Etnæ montis per tot sæcula durat Le promontoire le plus voisin de l'Italie est Rhégium', ainsi appelé d'un mot grec qui signifie rompu. Il n'est donc pas étonnant que l'antiquité ait écrit tant de fables sur un pays qui réunit tant de merveilles. Nulle part la mer n'est aussi violente qu'en Sicile; la rapidité de ses vagues, la fureur de ses tempêtes ne sont pas moins terribles à ceux qui les affrontent qu'à ceux qui les contemplent du rivage. Le choc des flots y est tel, qu'on les voit, tantôt vaincus, s'engloutir dans l'abîme, tantôt vainqueurs, se dresser vers le ciel ici, on les entend mugir et bouillonner, là se plaindre et se dévorer eux-mêmes. Ajoutez à cela le voisinage de l'Etna et des îles Éoliennes, dont les feux perpétuels semblent nourris par les eaux elles-mêmes. Un si vaste incendie, concentré dans un si petit espace, n'aurait pu subsister en effet depuis tant de siècles, si les flots euxmêmes n'eussent entretenu son activité. De là, les fables de Scylla et de Charybde; de là, ces aboiements qu'on croyait entendre, ces monstres qu'on croyait voir; car les navigateurs, épouvantés de ce déchirement des ondes, prenaient pour des aboiements le bruit qu'elles faisaient en sc brisant et en s'abîmant dans le gouffre. La même cause perpétue les feux de l'Etna; les flots qui s'entre-choquent entraînent au fond de la mer des masses d'air qu'ils y étouffent pour ainsi dire, jusqu'à ce que cet air, passant à travers les conduits souterrains, y embrase les matières ignées. La Sicile et l'Italie sont si voisines, et la hauteur de leurs promontoires si parfaitement égale, que les anciens s'effrayaient de ''Phylovdeρnyvów, rompre, séparer. incendium. Et ubi acrior per spiramenta cavernarum ventus incubuit, arenarum moles egeruntur. Proximum Italiæ promontorium Rhegium dicitur, ideo, quia Græce abrupta hoc nomine pronuntiantur. Nec mirum, si fabulosa est loci hujus antiquitas, in quem res tot coïere miræ. Primum quod nusquam alias tam torrens fretum, nec solum citato impetu, verum etiam sævo; neque experientibus modo terribile, verum etiam procul videntibus. Undarum porro inter se concurrentium tanta pugna est, ut alias veluti terga dantes in imum desidere, alias quasi victrices in sublime ferri videas nunc hic fremitum ferventis æstus, nunc illic gemitum in voraginem desidentis exaudias. Accedunt vicini et perpetui Ætnæ montis ignes, et insularum Æolidum, veluti ipsis undis alatur incendium. Neque enim in tam angustis terminis aliter durare tot sæculis tantus ignis potuisset, nisi humoris nutrimentis aleretur. Hinc igitur fabulæ Scyllam et Charybdin peperere; hinc latratus auditi; hinc monstri credita simulacra, dum navigantes, magnis vorticibus pelagi desidentis exterriti, latrare putant undas, quas sorbentis æstus vorago collidit. Eadem causa etiam Ætnæ montis perpetuos ignes facit. Nam aquarum ille concursus raptum secum spiritum in imum fundum trahit, atque ibi suffocatum tamdiu tenet, donec per spiramenta [ferra diffusus, nutrimenta] ignis incendat. Jam ipsa Italiæ Siciliæque vicinitas, [jam] promontoriorum altitudo ipsa |