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eut de grands différends avec le dauphin de Viennois: il épousa Yoland de Montferrat, fille de Théodore Paleologue, marquis de Montferrat, & il fut stipulé dans le contrat, que si Théodore ou ses descendans venoient à mourir fans mâles, Yoland ou ses successeurs hériteroient du Montferrat, à la charge de payer aux filles leur dot en argent. Aymon mourut le 24 juin 1343, & institua son héritier universel Amé VI, son fils aîné, si connu sous le nom du comte Verd. Comme il n'avoit que dix ans, il de meura sous la tutelle de Louis de Savoye, seigneur de Vaud son oncle, & d'Amé, comte de Genève, son cousin: il prit souvent les armes contre Humbert, dernier dauphin de Viennois, croyant obliger ce prince foible & timide à le faire son héritier; mais il fut supplanté par le roi Philippe de Valois, dont il redouta la puissance. Catherine de Savoye, comtesse de Namur, lui vendit l'an 1359, par contrat du mois de juillet la baronnie de Vaud, & les terres qu'elle posledoit dans le Bugey & le Valromey, pour soixante mille florins; à condition qu'elles demeureroient unies inséparablement à la Savoye. L'empereur Charles IV lui céda tous les droits de l'Empire sur le marquisat de Saluces, ce qui fut le levain d'une mésintelligence continuelle entre les comtes de Savoye & les marquis de Saluces ceux-ci ne prétendant qu'être vassaux des dauphins de Viennois. Louis, duc d'Anjou, se départit en sa faveur l'an 1387, (par lettres patentes du 19 février ) de toutes les prétentions que les comtes de Provence ses prédécesseurs pouvoient avoir sur le comté de Piémont ; la ville de Cony se donna à lui l'an 1382, & presque dans ce même tems le pape Clément VII, (par acte du 10 avril) lui fit donation dia château de Dian, en récompense des services qu'il avoit rendus au saint fiége; il mourut de la peste l'année d'après. Il inftitua l'ordre du collier, qui a depuis été appellé l'ordre de l'Annonciade, & il établit par son testament du 27 février 1383, le droit de primogéniture dans sa maison; il avoit épousé Bonne de Bourbon, fille de Pierre, duc de Bourbon, & d'Isabelle de Valois, dont il eut Amé VII, surnommé le Rouge, qui fut un des plus sages & des plus vaillans princes de fon fiécle; il soutint avec beaucoup de vigueur les droits de son domaine contre le marquis de Saluces & le seigneur de Beaujeu. Il fit la guerre aux Valaisans pour les intérêts d'Edouard de Savoye son parent, évêque de Sion: : ceux des comtés de Nice & de Vincimille, pressés par les partisans de la maison d'Anjou, & ne pouvant être secourus par Ladislas, fils de Charles de Duras, se foumirent à lui l'an 1388, par acte du mois de février; ceux de Barcelonnette & des vallées voisines, en firent autant; il en reçut le serment de fidélité, par acte du mois de mai, après quoi la souveraineté lui fut confirmée par deux déclarations, l'une du 2 août 1388, & l'autre du 28 septembre de la même année; il tomba de cheval & mourut de sa chute, en poursuivant un sanglier aux environs de Ripaille le 1 novembre 1391. Amé VIII son fils n'avoit que huit ans; la régence fut disputée entre Bonne de Berri sa mere, & Bonne de Bourbon son ayeule; mais celle-ci l'emporta & eut l'administration des états de Savoye jusqu'en 1398 qu'Amé fut majeur. Odon de Villars, comte de Genève, lui remit le comté de Genève par acte dus août 1401, avec tous les droits que les comtes de Genève avoient dans le Daupiné, le Viennois & le Graisivodan; & le prince lui donna en récompense quarante-cinq mille francs d'or, avec la feigneurie de Château-neuf en Valromey. Il envoya du secours au duc de Bourgogne contre les Liégeois, qui avoient chaflé Jean de Baviere, leur évêque, & ensuite il eut quelques différends avec Louis, duc de Bourbon, pour les hommages de la seigneurie de Dombes ; & après que cette affaire eut été terminée, il vint à Paris l'an 1410, à la priere du roi, qui lui donna la vicomté de Maulévrier. De retour dans ses états, il accompagna l'empereur Sigismond en Italie, auquel il fit de fi grands honneurs, que Sigismond en reconnoissance érigea le comté de Savoye en duché, par ses lettres patentes datées de Chambery le 19 février 1416. Il fit la guerre aux Valaifans, en faveur des barons de Rarons, qui étoient autrefois les plus puissans seigneurs du haut Valais: il acquit le Mondovi, ancienne dépendance du Montferrat, comme successeur présomptif d'Amé de Savoye, prince d'Achaye & de Louis de la Morée son fr ere ; & après la mort de celui-ci, qui arriva l'an 1418, il hérita du comté de Piémont. Yoland d'Aragon, mere & tutrice de Louis III, roi de Naples & de Sicile,

& comte de Provence, lui céda tous les droits que son fils pouvoit avoir sur le comté de Nice & fur la principauté de Barcelonette, & il lui quitta en échange la somme de cent soixante mille francs d'or, avec les intérêts, que le comte Verd avoit dépensée en Sicile & dans la Pouille, au secours de Louis I, roi de Naples & comte de Provence. Ce traité fut fait à Chambery le 5 octobre 1419. Louis de Poitiers, comte de Valentinois, & de Diois, l'appella à sa succession par son testament, si Charles Dauphin de Viennois, qu'il avoit institué son héritier, n'en exécutoit pas toutes les conditions; comme il arriva par le traité d'accommodement, que le dauphin fit avec Louis de Poitiers, seigneur de Saint-Valier, contre la volonté du testateur, ce qui obligea le duc de Savoye d'en prendre pollession, par des députés qu'il y envoya le 24 août 1422. Louis de Châlons, prince d'Orange, lui intenta procès pour le comté de Genève, qu'il prétendoit lui devoir appartenir du chef de Jeanne de Genève son ayeule maternelle; mais il en fut débouté par arrêt de l'empereur Sigismond, rendu à Bâle le 29 mai 1424. Ce prince ayant ensuite renoncé à ses états, sans qu'on ait pu découvrir la véritable raison se retira à Ripaille, sur le lac de Genève, & quelque tems après il fut élu pape par le concile de Bâle, & prit le nom de Felix V.

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Comme son élection causoit un schisme; il consentit à fa déposition, & conserva le titre de cardinal avec la prérogative de porter les ornemens pontificaux; il mourut à Genève le 7 janvier 1451. Il eut de Marie de Bourgogne, fille de Philipe le Hardi, & de Marguerite comrelle de Flandre, Amé & Louis: le premier étant mort le 2 août 1431, Louis lui succéda. Il termina les différends qu'il avoit avec le duc de Bourbon, au sujet des fiefs de la seigneurie de Dombes; il fit ensuite une ligue avec le duc de Bourgogne, & s'accommoda avec le dauphin touchant ses prétentions sur les comtés de Valentinois, & de Dyois : le traité fut conclu à Bayonne le 3 avril 1445, & en récompense Louis, dauphin de Viennois, lui céda la seigneurie directe & l'hommage du Foucigny; le roi Charles VII ratifia ce traité à Chinon, & le confirma par un autre conclu à Genève le 1 mai 1446. (Cette déclaration fut faite à Genève le 22 avril 1445.) Après cet accord, le duc de Savoye, convaincu que les partages ruinent ordinairement les maisons des princes, déclara le domaine de Savoye inaliénable; George & Charles marquis de Carreto, lui firent donation (2) des seigneuries & château de Zucarello, Bardinet, Château Blanc, & Stevalet, & quelque tems après ceux de Fribourg abandonnés par Albert duc d'Autriche, & craignant d'être attaqués par ceux de Berne, le reconnurent pour leur fouverain, (cette reconnoissance se fit le 10 juin 1450, ) à condition qu'il conserveroit leurs priviléges. Comme il avoit beaucoup contribué au mariage de Charlotte de Savoye ta fœur avec le dauphin, qui l'avoit fait fans le consentement du roi, Charles VII lui déclara la guerre l'an 1452: néanmoins elle fut terminée sur la fin de l'année, & par le traité de paix, ce prince s'obligea de servir le roi, avec quatre cents lances à ses dépens, envers tous, excepté le pape & l'empereur. La néceflité où il étoit alors d'avoir de l'argent, l'obligea de vendre la baronnie de Gex, à Jean d'Orléans, comte de Dunois & de Longueville, à faculté de rachat. Il mourut à Lyon le 29 janvier 1465, laissant d'Anne fille de Janus, roi de Cypre, & de Charlotte de Bourbon, Amé IX, surnommé le Bienheureux. Ce prince se déclara pour Louis XI, contre le duc de Bourgogne, & lui envoya des troupes, mais une longue & fâcheuse maladie l'ayant rendu incapable du gouvernement, les états du pays défererent la régence à la ducesse Yoland. Les princes de Savoye outrés de ce qu'elle l'avoit emporté sur eux, leverent des troupes, & voulurent foutenir leurs droits par les armes : le cointe de Genève surprit Montmélian, & se saisit du duc Amé qu'il fit conduire à Chambery; mais Louis XI ayant envoyé une armée au secours de la duchesse sa sœur, il se tint une conférence à la Perouse, la querelle fut appaisée; après quoi le duc de Savoye pafla les monts, & vint à Verceil, où il mourut la veille de Pâques 1472.Philibert I, qu'il eut d'Yolan de France, lui fuccé. da: le regne de ce prince fu déchiré par des guerres civiles qui faillirent à ruiner la Savoye. Comme il n'avoit que fix ans quand fon pere mourut, les comtes de Romont, & de Bresse, & l'évêque de Genève ses oncles, ne purent suppor ter que la duchesse leur eut été de nouveau préferée pour la

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régence: ils se saisirent de ce prince & contraignirent sa mere de se retirer en Dauphiné: Louis XI pacifia les troubles, à condition que la duchesse demeureroit régente, mais elle ne fut pas long-tems paisible dans le gouvernement; le duc de Bourgogne la fit enlever, & la retint prisonniere dans le château de Rouvre; cette violence obligea les états de Savoye à se mettre sous la protection du roi, il donna le gouvernement des pays deçà les monts à l'évêque de Genève, & celui de Piémont au comte de Breffe, on lui remit la garde de Chambery, & de Montmélian, & il prit soin des jeunes princes qu'il fit venir en France. Pendant ce tems, la duchesse se sauva de sa prifon, & retourna dans ses états, où elle mourut l'an 1478, Sa mort excita de nouveaux troubles, parce que le prince n'étoit pas encore majeur. Le roi choisit douze personnes pour composer le conseil d'état, & pour prendre connoissance de toutes les affaires; & il donna le gouvernement de la Savoye & du Piémont au comte de la Chambre. Philibert ne survêquit pas long-tems à sa majorité ; il mourut à Lyon fans enfans. *(a) L'acte de cette donation est du 11 mars 1448.

Charles I fon frere regna après lui; fon regne fut court, mais glorieux par les avantages qu'il remporta fur ses ennemis, & particulierement sur le marquis de Saluces, qu'il chassa de les états. Il prit la qualité de roi de Cypre, en qualité d'héritier présomptif de Charlotte de Lusignan reine de Cypre; il mourut à Pignerol le 13 mars 1489, à la vingt-uniéme année de son âge, laissant de Blanche de Montferrat Charles II qui demeura sous la tutelle de sa mere, malgré les prétentions des contes de Genève & de Breffe. Ce prince étant mort le 16 avril 1496, Philippe de Savoye, comte de Bresse son grand oncle, lui fuccéda; mais il ne regna qu'un an. Philibert II, dit le Beau, qu'il avoit eu de Marguerite de Bourbon, fille de Charles, duc de Bourbon, & d'Agnès de Bourgogne sa premiere femme, lui fuccéda. Il assista l'empereur Maximilien contre les Florentins, & se ligua avec Louis XII, pour le recouvrement du duché de Milan: il le reçut à Turin, avec une magnificence extraordinaire, & ensuite il alla à Rome pour conférer avec le pape Alexandre VI fur la croifade qu'il lui avoit proposée : l'empereur Maximilien lui donna l'hommage des comtés de Radicata & de Coconat par ses lettres patentes datées d'Anvers le 1 avril 1503, pour en jouir avec les mêmes droits que les empereurs ; & par d'autres lettres du 15 octobre de la même année, il lui quitta tous les droits impériaux fur les terres que le duc de Bourbon possédoit entre les rivieres de Sône & d'Ains, avec les hommages & la jurisdiction temporelle sur les villes & diocèses de Sion de Lausanne, de Genève, d'Aoste, d'Yvrée, de Turin, de Maurienne, de Tarantaise, de Verceil, & de Mondovy, & fur-tout ce qui dépendoit de ceux de Lyon, de Mâcon & de Grenoble dans ses états, conformément à la concession que l'empereur Charles IV en avoit faite au comte Verd. Ce prince mourut au pont d'Ains le 10 septembre 1504, fans avoir de postérité d'Yolan de Savoye, fille de Charles I, duc de Savoye, & de Blanche de Montferrat, ni de Marguerite d'Autriche fille de l'empereur Maximilien, & de Marie de Bourgogne qu'il épousa en secondes no

ces.

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Charles III son frere dit le Bon, lui succéda; fon regne fut long, pénible & malheureux, & il eut le déplaisir de voir fon pays devenir le théatre de la guerre entre François I & Charles-Quint. Il suivit d'abord le parti de la France; mais les prospérités de Charles-Quint l'ayant ébloui, il se déclara pour la maison d'Autriche, ce qui obligea le roi de lui faire la guerre, qui fut terminée par l'entremise des Suifles, avec lesquels ce prince s'étoit allié. Il affista au couronnement de Charles-Quint, qui donna à Béatrix de Portugal, que Charles avoit épousée, le comté d'Aft, pour elle & pour ses descendans; & par d'autres lettres datées de Malines, le 20 novembre 1531, il lui donna la souveraineté & le vicariat de l'Empire sur ce comté & fur le marquifat de Ceve; il attaqua ensuite ceux de Genève, qui s'étoient fouftraits de fon obéissance. Ce qui occafionna une guerre avec ceux de Berne en 1536. Ils prétendoient qu'il avoit contrevenu au traité d'alliance, en infultant leurs alliés & combourgeois : ils s'emparerent du pays de Vaud, chafferent l'évêque de Lausanne de la ville, & se rendirent maîtres du pays de Gex, du Genevois, & du Chablais, jusqu'à la riviere de Dranse, & en même-tems les Valaisans envahirent le reste du Chablais, & ceux de Fri

bourg se saisirent du comté de Romont. Il étoit impossible au duc de Savoye de s'opposer à ces conquêtes. François I, dont il avoit abandonné les intérêts, l'avoit attaqué avec des forces contidérables, & l'avoit dépouillé de tous ses états; la reftitution en fut ftipulée par le traité de Crepy en Laonnois, qui fut conclu entre le roi & l'empereur le 1s octobre 1544, mais quelque difficultés l'ayant empêché, ce prince en mourut de regret à Verceil le 16 septembre 1553, avec les sentimens d'un véritable repentir touchant sa mauvaise conduite envers le roi, & convaincu qu'il méritoit le traitement qu'il s'étoit attiré en manquant à sa parole. Le roi lui avoit fait proposer l'an 1539, de lui céder le comté de Nice avec ses appartenances & les dépendances, & qu'il lui donneroit en échange vingt mille écus de rente, dans quelque endroit du royaume qu'il voudroit choisir, pourvu qu'en même tems il lui remit en dépôt Turin, Moncalier, Pignerol & Savillon, jusqu'à ce qu'il eût fait la paix avec l'empereur: cette proposition fut fort examinée dans son conseil; la plupart de ses ministres lui conseilloient d'accepter cette offre, sur le danger qu'il y avoit à s'y opposer, d'autant qu'il avoit offert à l'empereur de lui céder tous les pays qu'il possédoit deça les monts, depuis Nice jusqu'à Valais, en échange d'autres terres, dans la Lombardie; il fut d'un sentiment contraire, gagné par les pensionnaires d'Espagne, qui en le piquant d'honneur, le jetterent dans l'embarras, dont il ne put plus se retirer.

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Emmanuel Philibert, qu'il avoit eu de Béatrix de Portugal, commandoit l'armée de l'empereur en Flandre, lorsqu'il apprit la nouvelle de la mort de son pere: comme il ne fuccédoit alors qu'aux titres de ses ancêtres, il conserva le commandement de l'armée, & remporta sur le connétable de Montmorency la célébre victoire de Saint-Quentin; il fut rétabli dans les états par le traité du Câteau-Cambresis, & pour profiter de la méchante politique de son pere, il épousa Marguerite de France, fœur du roi Henri II & s'attacha fortement à ses intérêts, comme le plus fûr moyen de regner tranquillement, & de se mettre à couvert des insultes de ses ennemis. Ses premiers soins, après son rétablissement, furent de corriger les abus qui s'étoient glissés dans l'administration de la justice; ensuite il envoya fes députés à Lyon, où les ambassadeurs du roi devoient se trouver pour éclaircir avec eux les droits qu'il avoit sur la Savoye; mais cette assemblée se sépara fans rien conclure, & le roi lui fit rendre les villes de Turin, Quiers, Chivas & Villeneuve d'Aft; les Bernois lui rendirent en exécution du traité de Lausane, du 30 octobre 1564, le pays de Gex, & tout ce qu'ils tenoient aux bailliages de Chablais, de Ternier & de Gaillard; mais ils retinrent le pays de Vaud; les Valaisans relâcherent aussi par le traité du 4 août 1569, tout ce qui est au deçà de la riviere de Morges, jus. qu'à la Dranse; mais ceux de Fribourg s'opiniâtrerent à garder le comté de Romont. Il échangea l'an 1575, avec Renée de Savoye, comteffe de Tendes, veuve de Jacques marquis d'Ursé, le comté de Baugé, dans la Breffe, & la seigneurie de Rivoles en Piémont, pour les seigneuries de Marro & de Prelle, & tout ce qu'elle possédoit à Oneille, Vintimille, Pornaix & Carpas, de la succession d'Honoré de Savoye, comte de Tende fon frere; Belse Ferrero, marquis de Masseran, lui céda par le traité du mois de décembre 1576, les seigneuries de Saint-Balarin, Lombardore, Montanara & Falet, avec le droit de patronage de l'abbaye de faint Benigne, & il lui donna en échange le marquifat de Crevecœur. Il renouvella l'alliance avec les cantons catholiques en 1577, & il acquit en 1579, d'Henriette de Savoye, marquile de Villars, les droits qu'elle avoit sur le comté de Tende, & fur Oneille, Vintimille, Marro & Prelle, Jérôme Doria lui avoit déja remis la seigneurie d'Oneille avec toutes ses dépendances, pour les seigneuries de Ciriez & de Cavallimours qu'il lui donna, à la réserve de l'hommage & de la souveraineté.

Charles - Emanuel, qu'il eut de Marguerite de France, lui fuccéda l'an 1580. Il fut un des plus grands princes de fon tems, habile dans le cabinet, savant dans le métier de la guerre, & connoiffant parfaitement bien ses intérêts; les électeurs se déclarerent en sa faveur pour le vicariat de l'Empire, & il fut décidé qu'il précéderoit tous les princes d'Italie à la cour de l'empereur, & par-tout ailleurs. Il se saisit du marquisat de Saluces durant les guerres civiles de France, l'an 1588, & profitant des troubles du royaume après la mort de Henri III, il conquit la plus grande partie

de la Provence: mais il en fut chassé, & Henri IV le força de lui céder en échange du marquisat de Saluces, la Bresse, le Bugey, le Valromey, & le pays de Gex.

Après l'exécution de ce traité, le duc de Savoye forma une entreprise sur Genève ; mais elle ne réuffit pas mieux que celle qu'il tenta quelque tems après sur le royaume de Cypre. Ce fut alors que pour fatisfaire son ambition, & pour diffiper les soupçons que le roi avoit de son attachement pour la maison d'Autriche, il lui fit représenter que la conjoncture étoit favorable pour se rendre maître du Milanez, tant par la nécessité où les Espagnols étoient réduits, que par le peu de troupes qu'il y avoit dans les principales places de ce pays, & par les dispositions qu'il y avoit parmile peuple à secouer le joug de leur domination. Il est certain que cette affaire entra dans les vastes projets qu'Henri IV avoit formés contre la maison d'Autriche; mais sa mort renversa tous ses desseins, & le duc de Savoye ne songea plus qu'à se prévaloir de la mort du duc de Mantoue, pour s'emparer du Montferrat, sur lequel il avoit de grandes prétentions. Il déclara la guerre au cardinal de Mantoue, de qui le roi prit le parti; mais comme le secours qu'on lui avoit promis étoit encore incertain, ce prince se mit sous la protection des Espagnols, qui envoyerent des troupes dans le Montferrat, ce qui détermina le duc de Savoye de consentir au traité de paix, qui fut conclu à Milan. Comme il ne fut pas exécuté de bonne foi de la part du duc de Mantoue, & que les Espagnols, au lieu d'évacuer le Montferrat, mettoient des garnisons dans les places, il négocia une alliance avec la France, qui promit de joindre ses troupes aux fiennes, si les Espagnols refu. soient d'accepter la paix qui venoit d'être arrêtée par l'entremise de ses ambassadeurs, de ceux d'Angleterre & de Venise. Ce traité fut conclu à Ast; mais il survint de si grandes difficultés touchant l'exécution, que la guerre se ralluma de part & d'autre. Le roi se déclara pour le duc de Savoye, après la prise de Verceil, qui découvrit assez les intentions des Espagnols. Le maréchal de Lesdiguieres commanda l'armée qui passa les monts; mais pendant ce tems, ce qui fut arrêté à la cour de France par le nonce du pape & par les ambassadeurs de Venise, ayant été ratifié par le roi d'Espagne, il y eut une conférence à Pavie, après laquelle le duc de Savoye accepta le traité d'Aft, & ce fut en exécution de ce traité qu'il licencia la plus grande partie de ses troupes, après quoi le prince de Piémont épousa madame Christine, sœur du roi.

Ce mariage ne fut qu'un effet de sa politique; il avoit de grandes vûes qu'il ne pouvoit faire réussir que par l'appui de la France: la politique éclata dans la guerre qu'il fit au duc de Mantoue. Car dès que ce prince eut recherché la protection du roi, il se ligua avec les Espagnols; cet engagement obligea de faire entrer des troupes dans ses états, les barricades de Suse furent forcées malgré toutes ses précautions, & il fut contraint de signer le traité de même nom, qui fut arrêté le 11 mars 1629, par lequel il accorda non-feulement le passage pour les troupes, mais encore il promit de fournir abondamment à leur subsis. tance, & de ravitailler Casal. Comme il n'avoit pas moins d'éloignement pour l'exécution de ce traité, que les Espagnols d'intérêt à l'empêcher, il manqua à la plupart des articles; le cardinal de Richelieu s'avança à la tête de l'armée, il voulut amuser ce grand homme, en temporisant, dans l'espérance de gagner par ce retardement, il tint la même conduite avec les Espagnols; mais en croyant se rendre néceslaire aux deux partis, il se rendit suspect à l'un & à l'autre, se vit à la veille de perdre tous ses états, & de se perdre lui-même. Le cardinal de Richelieu qui l'avoit pénétré, lui faisoit donner le change par des négociations, & dans le tems qu'il l'amusoit sur de vains prétextes, il voulut le faire enlever à Rivoles, ce qui seroit arrivé, si celui qui en étoit chargé, & à qui vil en couta cher depuis, n'en eût fait avertir ce prince, qui de rage de s'être abusé, & d'avoir couru un si grand risque, se déclara entierement pour la maison d'Autriche, à laquelle il tenoit naturellement; le roi se rendit maître de la Savoye, le prince de Piémont fut défait à Veillane par le maréchal de Montmorency, & le duc de Savoye qui s'attendoit à la victoire en mourut de chagrin à Savillan le 26 juillet 1630, laissant de Catherine-Michelle, infante d'Espagne, Victor Amédée, prince de Piémont, Maurice, cardinal de Savoye, & Thomas-François, Prince de Carignan.

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Victor Amédée hérita de toutes les vertus de son pere, & répara par sa prudence le mauvais état où étoient ses affaires. Le cardinal Mazarin, qui n'étoit alors que ministre du pape, proposa une treve qui fut acceptée de part & d'autre; mais le tems en étant expiré, l'armée françoise marcha au secours de Casal; & comme elle arrivoir à Canet, on reçut la nouvelle du traité de paix conclu à Ratisbonne, les Espagnols refuserent de signer, & le maréchal de Sch homberg ne promit de l'exécuter qu'en ce qui concernoit le duc de Savoye; il s'avança au-delà du torrent de la Gattola, & y mit l'armée en bataille; les Espagnols étoient dans leurs retranchemens, résolus de se défendre jusqu'à l'extrémité, le canon commençoit à tirer, & l'avant-garde françoise se disposoit à l'attaque des lignes, lorsque Mazarin, s'avançant vers le camp, cria que la paix étoit faite ; les généraux consentirent à une suspenfion, & ensuite le maréchal de Toiras & le sieur de Servien se rendirent à Querasque, où le baron Galas se trouva de la part de l'empereur, le président Benzo pour le duc de Savoye, & le chancelier Guiscardi pour celui de Mantoue. Le traité fut signé le 6 Avril 1631 , par la médiation de Pancirole & de Mazarin, ministre de S. S. & on convint que les dix-huit mille écus de revenu, que le duc de Savoye devoit avoir dans le Montferrat, avec la ville de Trin, seroient réduits à quinze mille, qu'il payeroit à l'acquit du duc de Mantoue, à l'infante Marguerite, duchesse douairiere de Mantoue sa sœur, cent mille écus pour sa dot, augment, bagues & autres prétentions, & que pour sureté du payement il lui remettroit trois terres proche de Casal, savoir la Motte, les Rives & Constanzano de trois mille écus d'or de revenu, qu'il pourroit racheter, & dont il conserveroit la souveraineté; & que le droit de patronage de l'abbaye de Lucedio avec la souveraineté des terres & dépendances enclavées dans celles qu'on lui donnoit, appartiendroit au duc de Mantoue & à ses successeurs, ducs de Montferrat: l'exécution en fut faite le même jour, & il fut ratifié le 26 du même mois, par le duc de Savoye. Comme il restoit encore quelques difficultés touchant l'évacuation des places, il fut stipulé par un second traité du 30 du même mois, que le roi feroit rendre au duc de Savoye le 4 juin les villes & châteaux de Saluces, Ville-Franche & Vigon, avec toutes celles qu'il avoit delà les monts, à la réserve de Suse, Pignerol, Briqueras & Veillane; pour ce qui regardoit l'article secret du premier traité, dont les Espagnols avoient conçu de l'ombrage, il fut expliqué par un nouveau traité du 19 juin d'une maniere qui dissipa tous leurs soupçons, & le duc de Feria, gouverneur du Milanez, en jura l'observation au nom du roi d'Espagne, ce qu'il confirma par sa déclaration datée de Pavie du 28 juin.

Les Espagnon avoient eu quelque vent de l'affaire de Pignerol, & quelques protestations que le duc de Savoye leur fit faire, ils croyoient que cette place n'étoit plus en son pouvoir. Pour mieux entendre cette affaire, il faut observer que le roi étoit perfuadé que les Espagnols seroient toujours les maîtres en Italie, tant qu'il ne contrebalanceroit pas leur puissance par le moyen d'une place, qui, lui facilitant l'entrée au-delà des Alpes, lui donnât le moyen de pouvoir secourir les princes que la maison d'Autriche vouloit opprimer. Cette maxime avoit été négligée par ses prédécesseurs: Henri IV en avoit reconnu l'importance, & c'étoit la raison qui lui faisoit souhaiter avec tant d'empressement la restitution du marquisat de Saluces: Louis XIII, pour réparer cette faute, & pour s'opposer avec plus de facilité aux conquêtes que les Espagnols méditoient en Italie, & particulierement celle du Montferrat, qui leur ouvroit en même-tems le paslage de la mer du côté de Final & celui des Alpes, fit demander Pignerol au duc de Savoye : ce prince témoigua d'abord de la répugnance, dans la crainte de se rendre les Espagnols irréconciliables, fit naître des difficultés pour en éluder la négociation; mais étant convaincu que l'intention du roi ne regardoit que le bien de l'Italie, qu'il seroit le premier à en tirer de l'avantage, il lui remit cette place par le traité du 30 mars 1630, avec Rive, Baudenasco, Biacosco Supérieur, Costa grande, le finage de Pignerol, les villages de l'Abbaye, le Valdelemie, le village & fort de la Peroufe, Villars les-Portes, le grand & le petit Diblon, leurs finages & autres terres situées dans la vallée de Perouse, qui sont sur la gauche, tirant de Pignerol à Pra

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gela, & au-delà de la riviere de Chison, pour être lesdits lieux unis à perpétuité à la couronne de France, & évalués à feize mille écus de rente; & en échange le roi lui promit de faite entrer la ville d'Albe & l'Aibefan, dans l'évacuation des terres qu'on devoit lui délivrer dans le Montferrat, & de payer le surplus à raison de deux pour cent, dès que le roi feroit en poffeffion de Pignerol. Ce traité demeura fecret, & il fut résolu qu'on ne le publieroit qu'après la conclufion de la paix: on procéda à l'exécution du traité de Ratifbonne, & après que les troupes françoises furent entrées dans Casal, à cause des nouvelles levées que le duc de Feria faifoit dans le Milanez, on témoigna quelque mécontentement de la conduite du duc de Savoye, pour avoir un prétexte de lui demander, comme on fit, Pignerol par forme de dépôt. Ce prince s'en plaignit comme d'une contravention au traité de Ratisbonne, & fe contenta d'offrir le passage pour les troupes du roi, en cas que les Espagnols fiffent de plus grands mouvemens: comme on le pressa plus fortement, & que le duc de Feria lui répondit qu'il ne seroit pas en état de le secourir, s'il étoit attaqué, il remit au roi cette place pour fix mois seulement, par le traité de Mirefleur du 19 octobre 1631; mais après que le terme fut expiré, le maréchal de Thoiras, & le sieur de Servien lui en ayant demandé la cession entiere, il répondit qu'il n'y confentiroit jamais; & pour mieux leurter les Espagnols, qui furent les dupes de cette négociation, il les fit proffenar sous-main de l'aider à l'empêcher; leur impuillance parut le principal motif qui le détermina à y donner les mains; le traité fut signé les juillet 1632: mais ce ne fut proprement que la publication de -celui du 30 mars, dont j'ai déja parlé.

La paix étant alors bien établie, ce prince fit fermer sa -couronne, prit les armes & le titre de roi de Cypre. Les princes fes freres ne tarderent pas à faire éclater leur mé-contentement, & ils s'engagerent dans la révolte , par l'intrigue des Espagnols, outrés de la cession de Pignerol : la duchefle douairiere de Mantoue se retira la premiere en Espagne, après avoir tâché de débaucher le duc de Mantoue, trop reconnoiffant pour oublier les services que la France lui avoit rendus; le prince cardinal quitta la protection de cette couronne, pour prendre celle de l'Empire, & le prince Thomas, renonçant à tous les avantages qu'il avoit en Savoye, se laisla aufli entraîner dans le parti des Espagnols. Le duc de Savoye les priva de leurs apanages, & entra dans la ligue qui lui fut offerte par le cardinal de Richelieu: : il fut déclaré capitaine général des armées d'Italie, avec un pouvoir absolu. On fit passer les monts à huit mille hommes de pied & à deux mille chevaux, sous la conduite du maréchal de Crequy: l'armée entra dans le Milanez, & la cavalerie espagnole fut défaite, & enfuite Valence affiégée: on porta la guerre dans les états du duc de Modéne, & presqu'en même-tems le duc de • Parme fit son traité d'accommodement avec l'Espagne, par l'entremise du pape & du grand duc de Toscane: la victoire qu'on remporta à Montbaldon fut fuivie de la mort du duc de Savoye, qu'une fiévre emporta à Verceil, le 7 octobre 1637, en la cinquantiéme année de son âge, & en la sepriéme de fon regne. Il eut de Cristine de France, François-Hiacinthe & Charles-Emanuel, qui regne•rent l'un après l'autre ; le premier n'avoit que cinq ans quand son pere mourut. Il demeura sous la turelle de sa mere, princesse recommandable par toutes ces grandes qualités. Elle renouvella la ligue offensive & défensive avec la France, par le traité du 3 juin 1638. Les Espaguols se rendirent maîtres de Verceil, & peu de tems après . le duc mourut d'une violente fiévre au Valentin le 4 octobre de la même année.

Charles-Emmanuel son frere lui succéda âgé seulement de trois ans ; madame royale fut continuée dans la régence, & fe gouverna, dans des tems très difficiles, avec une prudence admirable: elle obligea les princes ses beaux freres à mettre bas les armes, & de se départir de leurs prétentions: elle confirma l'alliance entre la France & la Savoye par le traité du Valentin du 3 avril 1645, qui fut ratifié par le roi le 24 de ce mois: trois ans après, elle remit à fon fils devenu majeur le gouvernement de ses états, dans un état bien plus floriffant qu'elle ne l'avoit trouvé : on continua la guerre avec les Espagnols, laquelle fut erminée par le traité des Pyrénées. Charles - Einnmanuel e fit adorer de ses sujets : il mourut l'an 1675, & laissa

sous la turelle de Marie-Jean-Baptiste, fille de CharlesEmmanuel, duc de Nemours, Victor-Amedée II, qui nâquit l'an 1666. Cette princesse donna une très grande idée de sa sagesse & de fon habileté dans les premiers momens de sa régence; elle rendit ses états plus florissans qu'elle ne les avoit trouvés, & donnant toute fon application aux intérêts de son fils & au bien de ses sujets, elle eut la gloire de se conserver en paix au milieu d'une longue guerre, de se rendre agréable aux deux couronnes, dont les intérêts sont si opposes, & de laisser à fon fils des maximes d'une judicieuse & fine politique; ce prince époufa l'an 1684 Anne fille de Philippe de France, duc d'Orléans, frere unique de Louis XIV & d'Henriette-Anne d'Angleterre.

Le duc de Savoye gouverne ses états avec une autorité abfolue: leur fituation aux confins de la France, & à l'entrée de l'Italie, les rend considérables : les Alpes leur fervoient autrefois de rempart contre les infultes de leurs voisins ; mais depuis que le roi est maître de Pignerol, ces montagnes ne font plus inaccessibles. La Savoye est gardée par quatre places, dont la meilleure est Montmeliand: Nice aflure la communication avec la mer Méditerranée; & vers la Lombardie, il y a plusieurs bonnes villes, la plupart fortifiées, à opposer aux Espagnols.

Le maréchal en étoit autrefois le commandant général, & avoit un pouvoir absolu sur les gens de guerre; fa charge fut établie lous le comte Verd, & ne fut d'abord qu'une simple commission; Amé VIII la rendit perpétuelle, & en régla les fonctions par son ordonnance de l'an 1430; mais parce qu'elle donnoit un trop grand pouvoir à celui qui en étoit revêtu, Emmanuel-Philibert la supprima l'an 1563. Le revenu du duc de Savoye monte à cinq millions., & il est diftingué en revenu de Savoye, & revenu de Piémont: il y a pour ce sujet deux fermes générales, qui portent le nom, l'une du pays deçà les monts, & l'autre du pays delà les monts; la premiere est affermée deux millions, & l'autre trois; elles sont sous la direction de deux généraux des finances, qui sont comptables aux chambres des comptes de Chambery & de Turin.

La justice est administrée dans trois fénats ausquels on appelle des bailliages & autres tribunaux inférieurs; le premier pour la Savoye, le second pour le Piémont, & le troisieme pour le comté de Nice & ses dépendances. Le premier, qu'on nomme le sénat de Savoye, a son siége à Chambery; il est composé de quatre présidens, de quinze sénateurs, sans compter l'abbé de Hautecombe, qui est sénateur né, d'un avocat général, d'un procureur général, de deux greffiers & de deux fecrétaires: il fut institué par Amé VIII l'an 1430; le chancelier en fut d'abord le chef, & eut pour adjoints des conseillers qui étoient nobles, & des collateraux, qui étoient jurisconfultes: ce prince l'établit en place du conseil que le comte Amé le Verd créa l'an 1355, pour juger fouverainement tous les procès civils & criminels. Avant cet établissement, les comtes de Savoye rendoient eux-mêmes la justice à leurs sujets, assistés des principaux seigneurs de leur cour. Louis I, duc de Savoye ayant résolu de demeurer en Piémont, créa par fon ordonnance du 15 mars 1459, un conseil dans la ville de Turin, pour connoître en dernier ressort des affaires des pays de-là les monts; ce conseil prit ensuite le nom de fénat, & il est composé de quatre présidens, de deux chevaliers d'honneur, de dix huit sénateurs, d'un avocat général & d'un procureur général; le duc Charles-Emmanuel érigea celui de Nice, qui consiste en deux présidens, fix fénateurs, un avocat général & un procureur général.

Outre ces deux cours souveraines, il y a deux chambres des comptes & un conseil des finances; celle de Savoye fut instituée par le comte Amé Verd en 1351; il n'y eut d'abord qu'un président, trois maîtres des compres, deux greffiers & deux clavaires; mais le duc Charles le Bon, tenant les états de Savoye à Moustiers en Tarantaise, l'augmenta de plusieurs officiers par son édit du 19 septembre 1522 : elle consiste présentement en trois présidens de robe longue, trois des finances, deux chevaliers, seize maîtres des comptes, un trésorier général, deux greffiers, deux clavaires & un contrôleur : Philibert-Emmanuel la déclara fouveraine & indépendante du sénat de Chambery par un édit donné à Mondovi le 6 octobre 1630, & en même-tems il créa celle de Turin, avec les

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mêmes prérogatives; elle consiste en quatre présidens,
deux chevaliers, vingt-quatre maîtres des comptes, quatre
avocats patrimoniaux, cinq procureurs patrimoniaux,
deux greffiers & deux clavaires.

Le surintendant des finances préside au conseil de ce
nom, & ce n'est que par son ordre qu'il est convoqué; on
y examine les comptes de tous ceux qui manient les de-
niers du prince, & on y traite de toutes les affaires qui
concernent les finances: il est composé du surintendant,
des deux premiers présidens du sénat & de la chambre
des comptes, de deux généraux des finances, de deux
présidens des finances, d'un contrôleur & d'un secrétaire.

Comme le duc de Savoye est vassal de l'Empire, les jurisconfultes ont voulu examiner pour quel pays il en relevoit; les Allemands & quelques Italiens on crû que c'étoit pour tous ses états, fondés sur les investitures des empereurs, & la qualité de vicaire de l'Empire: ils prétendent que lorsque l'empereur Sigismond érigea le comté de Savoye en duché, & qu'il en investit Amé VIII, il comprit dans l'investiture tous les états qu'il possédoit, & tous ceux qu'il pourroit acquérir, & que la même clause a toujours été inserée dans les investitures qui ont été données par les empereurs aux ducs de Savoye. Cette raison seroit invincible si la Savoye pouvoit être censée du corps de l'Empire, & qu'on pût prouver qu'elle en a relevé autrefois. Il est constant qu'elle se gouverne aujourd'hui par des loix particulieres, qui n'ont aucun rapport avec les constitutions germaniques, & qu'il n'y a point d'appel des arrêts du parlement de Chambery à la chambre de Spire, à laquelle reffortiffent toutes les justices de l'Empire; & qu'elle n'y a point été soumise dans les siècles paffés, puisque originairement elle faisoit partie du royaume de Bourgogne, & qu'enfuite elle a été poffédée comme une souveraineté indépendante par des seigneurs particuliers. On pourra peut-être m'objecter que le royaume de Bourgogne ayant passe au pouvoir de Conrad le Salique, par la donation que lui en fit Rodolphe le Faineant, tous les états qui composoient ce royaume devoient reconnoître Conrad pour leur seigneur souverain; personne n'en fauroit douter; mais cette vaslalité le regardoit comme empereur; autrement il faudroit conclure que les royaumes de Boheme & de Hongrie font partie de l'Empire, parce qu'ils ont été acquis par des empereurs, ce qui ne peut se foutenir. D'ailleurs il seroit difficile, à ceux qui font de cette opinion, de montrer des titres qui établissent solidement cette dépendance de l'Empire; le seul qu'ils peuvent alléguer est l'acte d'érection de la Savoye en duché par l'empereur Sigismond; mais cet acte ne prouve rien, si l'on veut se souvenir que les papes & les empereurs ont toujours été jaloux de distribuer les titres d'honneur, & qu'ils les ont donnés indifféremment à des princes souverains & à ceux qui étoient leurs vassaux: il seroit aisé de prouver, par une infinité d'exemples, que ces fortes de libéralités n'ont jamais inféré de dépendance. Quant à la qualité de vicaire de l'Empire que l'empereur Frédéric II donna l'an 1249 à Thomas comte de Savoye, elle ne

Vers le nord.

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regarda d'abord que la Lombardie, & enfuite toute l'Ita401 fur la Savoye, qui est en deça des monts, ses successeurs lie, & par conféquent sa jurisdiction ne s'étendoit point en ont depuis fait toutes les fonctions, & lorsque CharlesQuint fit donation du marquisat de Ceve & du comté il y attacha le vicariat, qui dans les interregnes de l'Emd'Att à Beatrix duchesle de Savoye, & à ses descendans, pire donne une grande autorité à celui qui en est revêtu. Le duc de Mantoue voulut prendre cette fonction après la mort de l'empereur Ferdinand III l'an 1657, mais le duc de Savoye en ayant porté ses plaintes au collége électoral, Francfort du 4 juin 1658, par laquelle il lui défendoit de ce collége écrivit une lettre au duc de Mantone, datée de faire aucune fonction du vicariat de l'Empire, qui appartenoit uniquement au duc de Savoye, à l'exclufion de tous la capitulation de l'empereur regnant, qu'on nomme la les autres princes d'Italie ; & cette lettre fut confirmée par capitulation Leopoldine; outre toutes ces raisons, le duc de Savoye ne contribuoit aux taxes de l'Empire que pour les n'avoit séance qu'après tous les princes de l'Empire; d'où états qu'il poflédoit en Italie, & même aux dietes; il quelques-uns ont crû, avec vraisemblance, qu'il n'y affistoit que comme comte d'Aft & marquis de Ceve; on ne voit pas même qu'il yait comparu avant la donation faite l'an 1531 par l'empereur Charles-Quint, à Beatrix de Portugal, longue dissertation, si je voulois ici combattre l'opinion de Sprenger & de Conring, qui, sur des raisons peu folides, duchelle de Savoye, & je m'engagerois dans une trop ont avancé que le Piémont, qui est purement allodial, releve de l'Empire.

cice fût permis dans les états de Savoye; les princes étoient La religion catholique étoit autrefois la seule dont l'exertoit qu'à des conditions fort onéreuses, qu'ils avoient même zèlés à maintenir cette unité de créance, & ce n'épermis aux Vaudois de suivre leurs dogmes dans leurs vallées; on y compte seulement l'archevêché de Taren& de Nice. Ce dernier n'est pas proprement dans la Sataise & les évêchés d'Aofte, de Maurienne, de Genève, voye, mais dans le pays deçà les monts, & la plus grande partie de la Savoye particuliere est du diocèse de Grenoble.

lent qu'elle soit ainsi appellée de l'ancienne Sabata, ville L'origine de son nom est assez incertaine : les uns veude la Ligurie; mais quelle apparence y a-t-il qu'elle l'ait tiré de là, & quel rapport entre la Savoye & cette ville ? Les autres le dérivent du mot de Sauvevoye, à cause de la difficulté des chemins dans des montagnes inaccessibles. On la divise en huit petites provinces, qui font la Savoye le Genevois, le Chablais, le pays d'Aoste, la Tarantaise, la Maurienne, le Foucigny, & partie du Bugey. taise, la Maurienne, le Daupiné & le Bugey: elle est parLa Savoye particuliere est entre le Genevois, la Tarentagée en neuf mandemens, qui sont ceux de Chambery, Montmelian, Rumilly, Aiguebelle, Conflans, Aix, Beauges, Pont-Beauvoifin & les Echelles.

Les états des ducs de Savoye font:

Le duché de Chablais.

Saint-Gingoult,
Evian,
Thoron.

Bonneville,

La baronnie de Foffigny: Cluse,

LE DUCHÉ DE SAVOYE,
où sont :

Salanches.

Thonnes,

Le duché de Genève.

Roche,

Annecy.

Yenne,

Partie du Bugey :

Saint-Genis.

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Rumilly,
Aix,

Bourget,

Chambery,
Mommelian,

Conflens,
Beaufort.

Saint-Maurice,
Moustiers.

Le comté de Maurienne. Saint-Jean de Maurienne;

Chambre,

Modane.

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