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l'on y voit la tête de cette chaîne de montagnes, qui, courant au nord, partagent l'Angleterre en deux parties égales, faisant comme un dos au milieu du royaume, jus qu'en Ecosse; ainsi la partie septentrionale du comté de Stafford est montueuse, ce qui lui a fait donner le nom de Moore-Land. Par là elle est plus froide que le reste, & même la neige y demeure affez long-tems sur la terre. On a remarqué dans ces quartiers que le vent d'ouest y amene la pluye, & que ceux de sud & d'est y apportent le beau tems, ce qui est le contraire des autres endroits du pays. On attribue cela au voisinage de la mer d'Irlande. Le terroir y eft bon pour les grains & pour les pâturages dans le voisinage de la Trent, & la campagne est couverte en quelques endroits de belles & agréables forêts. Mais la partie méridionale est la meilleure & la plus fertile à tous égards. Outre les pâturages & les grains, on y trouve des carrieres de charbon de terre, d'albâtre & de pierres de moulins. On y trouve aussi quelques mines de fer. Les rivieres abondent en poisson, sur-tout la Trent. Le Dove se déborde quelquefois au mois d'avril, & s'enfle pendant douze heures avec tant de violence, qu'elle entraîne les brebis & les vaches; douze heures après elle se rabaisse & rentre dans son lit. Ces débordemens sont aussi avantageux que ceux du Nil en Egypte. Les terres s'en trouvent engrais. sées, & les prairies en tirent une belle verdure. Il n'en est pas absolument de même de la Trent : elle se déborde aussi quelquefois; mais quand elle a passe ses bords, elle n'y rentre qu'au bout de quatre à cinq jours; de forte que la campagne voisine en est toute inondée pendant ce tems. Le Dove est par-tout bordée de carrieres, d'où l'on tire de la chaux. On la brule, & on s'en sert avec profit pour engraisser la terre. L'eau de la riviere reçoit une telle graisse de la chaux qui est sur ses bords, que les prairies voisines en prennent une agréable verdure, qu'elles conservent même au milieu de l'hiver. On trouve aussi dans cette province des puits salés, dont on fait de beau sel blanc. Enfin il y a quelques mines d'un plâtre fort blanc, qui se durcit comme de la pierre. * Délices de la Grande Bretagne, p. 382. Les villes & bourgs où l'on tient marché font:

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STAGABAZA. Voyez TAGABAZA.

STAGIRA ou STAGIRUS, ville de la Macédoine, au voisinage du mont Athos, sur le golfe Strymonique, entre Amphipolis & Acanthus. Etienne le géographe, qui écrit Stagira, orum, en fait la patrie d'Ariftote, qu'il surnomme Σταγειρίτης, Stagirites. Hérodote, l. 7, c. 115, in Xerxis itinere, donne à peu près à cette ville la même position que nous lui avons donnée; car il dit qu'après que l'armée de Xerxès eut quitté le Strymon, elle passa par Stagirus, & arriva à Acanthus. Thucydide, l. 4, p. 311, dit que Stagirus étoit une colonie des Andriens, & que, conjointement avec la ville d'Acanthus, elle abandonna le parti des Athéniens. Prolomée la compte parmi les villes maritimes, & la marque entre le fleuve Strymon & le mont Athos, mais au lieu de Stagira, il écrit Stantira. Pline, comme Etienne le géographe, dit Stagira. Cette ville est appellée Libanova par Sophien, qui, dans un autre endroit, la nomme Orthagoria ; & Nicetas lui donne le nom de Macra. * De l'Isle, Atlas. Ortel. Thefaur.

1. STAGNARA, petite ville de la Turquie, en Europe, dans la Romanie, près de la côte de la mer Noire, entre Sifopoli & les bouches de la mer Noire, ou du détroit de Constantinople. * Baudrand, Dict.

2. STAGNARA, Stagnum ou Develton-Stagnum. C'est un lac de Turquie, en Europe, dans la Romanie, près de la ville de Develto.

STAGNO, Stagnum, petite ville de la Dalmatie, dans la partie orientale de la presquifle de Sabioncello, & dans la dépendance de la république de Raguse. Cetre ville,

qui est fortifiée, a un évêché suffragant de l'archevêché de Raguse, & un petit port de mer, sur la côte du golfe de Venise, environ à trente milles de la ville de Raguse, vers la Tramontane, en allant vers le golfe de Na

renta.

STAGNO-PICCOLO, dans la langue du pays MaliSton. C'est un bourg & une forteresse, à un mille de la ville de Stagno, dont il est parlé dans l'article précédent, avec une garnison, toujours commandée par un noble de Raguse.

STAGNUM. Procope appelle ainsi un port de la mer Méditerranée, sur la côte d'Afrique, à quarante stades de Constantinople. Il dit que ce port est fort grand, & que l'entrée en est fort aisée. Ortelius croit que c'est de ce port dont parle Orose au livre quatrième, c. 22, & que c'est aussi le port de Carthage, simplement appellé Aίμνη par Appien, de Bel. Pun. * Wandalic, 1. 1, c. 20.

STAGUS. Voyez STEGOS.

STAIN, petite ville d'Allemagne, dans la basse Autriche, sur le Danube, où elle a un pont.

STAINFORD-BRIDGE, bourg d'Angleterre, dans Yorckshire, au quartier oriental de la province. De Wighton, en tirant an nord-ouest, on passe dans le bourg de Pockligton, & l'on arrive à Stainford-Bridge, situé fur le Derwent. On appelle auffi ce bourg BATLEBRIDGE, c'est-à-dire, Pont de la Bataille, parce que ce fut là que Harald, roi d'Angleterre, défit en 1066, Harald, roi de Norwége, & gagna sur lui un si riche butin, qu'il s'y trouva de l'or pour la charge de douze robustes jeunes hommes; mais le pauvre roi fut battu lui-même, neuf jours après, dans un combat qu'il livra à Guillaume le Conquérant, & il y perdit la couronne avec la vie. * Délic. de la Grande Bretagne, p. 234.

STAINTHORPE OU STAINDORPE, bourg d'Angleter re, dans la province de Durham, sur le chemin qui conduit de la ville de ce nom à celle d'Yorck, à quatre ou cinq milles de Bernard-Castle, au nod eft. Srainthorpe est un bon bourg. On y voyoit autrefois une église collégiale. * Délices de la Gr. Bret. p. 250.

STAINVILLE, bourg de France, au duché de Bar, fur la rive gauche de la Sault, dans le diocèse de Toul, office de Bar, & le chef-lieu d'une prévôté, qui reffortit au bailliage de Bar. Il y a à Stainville quatre chapelles, outre l'église paroissiale, qui est sous le titre de S. Mat. thieu. L'abbaye de Jouvilliers est dans le district de cette paroisse, aussi-bien que la ferme de Nantelle, qui dépend de cette abbaye.

STALBO. Voyez REGENSES.

1. STALIA.C'est l'un des noms qu'Etienne le géographe donne à la ville de Gènes.

2. STALIA, lieu dont il est fait mention dans le cinquiéme concile de Constantinople. Il paroît, dit Ortelius, que ce lieu devoit être aux environs de la Cilicie.

STALIMENE, isle de l'Archipel. C'est la même que les anciens Grecs & Latins ont appellée Lemnos ; mais qui à présent n'est connue parmi les Turcs, les Italiens & les Grecs modernes, que sous le nom de Stalimene ou de Stalimini. Les Turcs lui donnent aussi celui de Limio. Les Grecs lui donnerent le nom de Stalimene, parce qu'elle ressemble à un lac ou un étang, qui en grec signifie Aluνη. On pourroit encore dire que c'est un mot formé de Stomalimne, qui signifie embouchure de lac; car c'est ainsi que les anciens Grecs appelloient les étangs situés près de la mer, où ils se venoient décharger par leur embouchure. Belon tient Stalimene pour un mot italien, composé de Sta & Limni, & ce dernier pour un mot corrompu de Lemnos. Etienne le géographe dit que cette isle fut appellée Lemnos de la déesse Junon, que les anciens habitans de cette ifle appelloient Lemnos, & à qui ils immoloient des vierges. Elle avoit autrement été appellée Æthalie & Hypsipylée, d'une des filles du roi Thoas, qui avoit autrefois régné sur ses insulaires; & c'est aussi pour cette raifon qu'elle est appellée dans les anciens poëtes le pays d'Hypsipylée. * Dapper, Description de l'Archipel, p. 241 & suiv.

L'ifle de Stalimene est placée dans les cartes marines, à quatre lieues d'Allemagne, à l'occident de l'ifle de Tenedos; à sept, à l'est quart au sud du cap sud-est, de l'ifle de Lanio, par son cap sud-ouest; à huit, à l'ouest quart au fud du détroit des Dardanelles; à presque la même distance au septentrion du pays de Thrace; à sept lieues au sud ouest des isles d'Imbros & de Samandrachi, & environ à dix lieues au fud est du mont Athos, qu'on nomme à présent Monte Santo. Belon la place à quatre lieues de France du pays de Thrace, & par un de fes caps, appellé Blava; à dix-huit de ces mêmes lieues du cap de l'isle d'Imbros, qu'on nomme Aulaca, & à quatre journées de navigation de Conftantinople, quand le vent est favorable, en traverfant la Propontide ou mer de Marmora. Pline la met à quatre-vingt-fept milles, & Solin à quatre-vingt-fix milles du mont Athos, ou Monte Santo; à quatre-vingt-huit milles de l'ifle d'Imbros; à vingt-fix milles de Samothrace, & a cinq milles de Thassos. Selon Pomponius Mela, elle est vis-à-vis du mont Athos, &, felon Etienne le géographe, près de Thrace.

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On donne à cette isle cent milles d'Italie, ou vingt-cinq lieues d'Allemagne de circuit. Elle est plus étendue en longueur d'orient à l'occident, qu'en largeur du nord au midi. Elle avoit anciennement deux villes, dont la capitale étoit appellée Hephastia, Hephastias ou Hephestia, parce que Vulcain y étoit adoré sous le nom d'Epheftios, & l'autre Myrina; de là vient qu'elle étoit appellée par les anciens Grecs Dipolis, c'est-à-dire, qui a deux villes.

Quelques auteurs veulent qu'elle ait été située à l'endroit où l'on voit un petit village appellé Cochino, qui est près de la mer. Cependant Ptolomée appelle Hephatia une ville fituée au milieu des terres. Cochino a un fort beau port, qui fournit en tour tems aux vaisseaux une rade assurée. On y voit encore un vieux château presque entierement démoli, & dont les murailles, battues par les flots de la mer, tombent tous les jours en ruine. Les Pélasgiens ont autrefois habité une des deux villes de cette ifle, où ils se retirerent après avoir été chaflés de l'Attique par les Athéniens. Homére appelle Lemnos une petite ville bien bâtie; & dans ses Iliades il la nomme la petite ville du divin Thoas. La capitale de l'isle porte à présent le nom de STALIMENE, de même que toute l'ifle, & est située près de la mer. Il y en a qui tiennent que c'est l'ancienne ville de Myrina, que Ptolomée semble placer près de la mer, au lieu qu'il met celle d'Hephastia, au milieu des terres. Belon prétend que l'ancienne ville de Myrina est à présent nommée Lemno, & lifle de Stalimene.

Cette ville est bâtie, suivant le témoignage du même Belon, fur le penchant d'une colline, qui se termine au bord de la mer, & en est environnée de deux côtés; de forte qu'elle est fort étroite à l'endroit où elle vient aboutir. Le côteau sur lequel la ville est bâtie est environné de vieilles murailles, & a au sommet un château occupé par une garnison turque, sous l'autorité d'un gouverneur qui y fait fon féjour. L'accès en est fort difficile; de forte qu'il semble être plus fort par son affiette que par ses fortifications. Les maisons de cette ville font bâties le long d'une côte, qui est toute plantée de vignes. Il y a des masures au bord de la mer, qui font affez connoître l'ancienne splendeur de ses bâtimens. Porcachi la place au milieu de l'ifle, & met au-dessous du côté du couchant, & près du rivage de la mer, un village nommé Sala.

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On compte, dans l'isle de Stalimene, environ foixantequinze villages habités par des Grecs qui s'appliquent fort à l'agriculture. De tous ces villages il n'y en a que deux ou trois où l'on ne parle pas grec, & où il n'y a point de chrétiens. Porcachi, avec quelques autres, la fait basse & toute unie, & en effet, elle n'est pas fort haute. Ses plus hautes montagnes sont situées du côté de la Macédoine vers le quartier de l'isle, qui est sur la gauche, en y allant. Quand on vient du côté du nord-nord-ouest, du nordouest quart au nord, & du nord-ouest quart à l'ouest, & qu'on fait voile du côté de cette isle, on la découvre avec deux hantes montagnes, mais tout le reste paroît bas & uni. Une montagne de cette ifle, appellée Mosychle par Hesyche & Nicander, vomit à son sommet des feux & des flammes; delà vient que l'isle est appellée dans Sénéque l'ardente Lemnos, & que plusieurs anciens poëtes ont fait mention du feu qui y brule. C'est aussi en considération de ces vomissemens de feux qu'elle fut anciennement appellée Ethalie, c'est-à-dire, brulante; car quelque auteurs forment ce mot du grec "Αιθεσθαι, qui signifie bruler. Cette isle n'a point de riviere, mais seulement quelques fontaines & ruisseaux. Il y en a un qui fort d'un rocher à une demi-lieue de la ville, qui arrose toute la campagne

des environs du port, & vient baigner les murailles de la ville. Sa source se précipite du haut du rocher en bas, formant une chute d'eau avec grand bruit, qu'on nomme communément cataracte. Il y a pourtant un autre ruisseau appellé Salinari, qui ne coule pas loin de Myrina ou

Lemno.

Stalimene a un beau port, appellé Porto S. Antoni. Il est au côté méridional de son cap oriental entre deux montagnes, & il abonde en poissons. Il y a deux petites isles ou grands rochers près du cap occidental du port, qui est formé par la plus occidentale des deux montagnes dont j'ai parlé. Un écueil ou banc de sable, descend toutà-coup au-dessous de l'eau, & s'étend du cap oriental affez avant dans la mer. On peut être dans le port à l'abri de toute forte de vents, à la réserve du fud eft, & du fudfud-est. Porcachi donne à cette isle plusieurs ports; mais il ajoute qu'on pourroit plutôt les appeller de petits golfes, que des ports.

Les poëtes ont feint que Vulcain à cause de sa laideur & de fa difformité, fut précipité du ciel par Jupiter en l'ifle de Lemnos, où il fut nourri par des finges, ou, comme d'autres le racontent, par Eurynome, fille l'Océan & de Thetis. C'est à cette chute qu'on a attribué le défaut qu'il avoit d'être boiteux. Ils ont aufli dit, qu'il avoit une forge en l'ifle de Lemnos, de même qu'en celle de Sicile. C'est pour cela que l'isle de Leninos est appellée dans les anciens Vulcania. C'est pour cela encore, que Vulcain est appellé dans Virgile le pere Lemnien & qu'Homére représence cette isle comme une petite ville proprement bâtie, & que Vulcain chérit par dessus tous les pays du monde. Cette fiction poëtique a indubitablement pris son origine du mont Mosychle, qui vomit des Hammes dans l'ifle de Lemnos, comme nous l'avons ci devant remarqué, de même qu'en Sicile le mont Ætna. Quelques-uns ont appellé l'ifle de Lemnos, les pays raboteux de Vulcain.

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Cette ifle produit plusieurs herbes & plantes, entre lesquelles il y en a qui nous font inconnues, dont Belon fait mention. Il y croît unc herbe appellée charméléon dont la racine étant appliquée sur la peau, y excite une fi grande démangeaison avec inflammation, qu'il n'y a point d'ortie, si piquante qu'elle soit, qui en puisse caufer la centiéme partie. L'on ne fent pourtant pas d'abord la démangeaison qu'elle cause, mais seulement après une heure ou deux heures, & plus on se frote, plus on augmente la chaleur, la démangeaison, & la rougeur; de forte qu'enfin toute la peau qui en a été touchée devient plus rouge que du sang.

L'ifle est fort dépourvue d'arbres & de bois. Il n'y en croît guère, que près du village de Rapanidi, où il y a un bocage tout planté de hêtres; mais on ne les coupe pas pour bruler: on les conferve en considération d'un remede qui en découle, que les Grecs & les Italiens appellent Velanie. Ce reméde est fort estimé par les habitans de cette ifle, qui ne permettent pas qu'on le transporte hors de leurs pays. On se sert d'es glans & de l'écorce ou gouffes de cet arbre, qui est toujours verd pour taner les cuirs, & on appelle cette forte de tan de la velanie.

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Au lieu de bois ces infulaires se servent de tiges d'asphodèle, & d'une autre plante qu'ils nomment cachynopoda: on les brûle après les avoir fait sécher. Le terroir n'est même guère propre qu'à produire des arbres fruitiers & domestiques. Le quartier de l'isle qui regarde l'orient est fort aride, mais celui qui est du côté du couchant & du midi, est un peu plus bas & plus verdoyant. Les lieux abreuvés de quelque humidité, & qui sont situés entre des collines ne produisent que des arbres fruitiers, comme figuiers, noyers & amandiers, fort peu d'oliviers. Il y croît auffi de deux fortes de Siphisus, & un certain arbre appellé nérion, dont les infulaires parfément les fleurs sur les branches de grenadiers, où les attachent à ses rameaux, dans la pensée que ces fleurs étrangeres les empêchent de perdre les leur, ils s'imaginent même que cela empêche aufli les grenades de se fendre. Au défant de l'herbe appellée oréga, on se sert d'une certaine plante qui'croît entre les hayes & les buissons; on la garde communément dans les maisons, & on s'en sert lorsqu'on veut manger du poisson frais ou falé, pour en relever le goût & y faire une sauce. Les Grecs d'au. jourd'hui l'appellent Lagochimeni, c'està dire, gite de lié. vre. Elle a le goût & l'odeur fort semblable à la marjolaine grosse, ou héracléotique. Ses feuilles approchent de celles de la mille feuille; sa semence est ronde, & toute la plante Mmmmij

Tome V.

a beaucoup de rapport avec celle que les anciens médecins Grecs & Latins ont appellé Ammi. Les hayes font faites d'un certain arbrisseau, appellé par les Grecs anciens & modernes Rhamnus, nous le nommons Nerpun & Bourgépine.

On prétend que ce pays est mieux entretenu depuis qu'il est sous la domination du Turc, parce que les habitans y jouiflent d'une paix & d'une tranquillité profondes.

L'ifle nourrit différentes fortes d'animaux sauvages & domestiques. On y trouve beaucoup de ferpens de plusieurs especes, qu'on nomme en langue du pays Cenchriti, Laphiti, Ochendra, Amphisbena, Sagittari, Tephliti ou Tephlini & Nerofidia. Le Cenchritri est le Cenchris des anciens, comme le Laphiti leur Elaphis & l'Ochendra, leur Echidna ou Echis, bien qu'il ne soit pas une véritable vipére. L'Amphisbena a retenu son ancien nom: le Sagittari eft celui que les anciens ont appellé Jaculus ou le Javelot, & le Tephlini se rapporte à celui qu'ils ont nommé Tephlinos.

d'Hephastia,

L'ifle de Stalimene est encore estimée, comme elle l'a été de tout tems parmi les medecins, à cause d'une certaine terre qu'on appelle terre sigelée ou Lemnia, & qu'on tire de cette ifle. Il y a une colline ou montagne, à quatre fois la portée d'un trait de la ville ou du village de Cochyno, entre laquelle & la ville, on découvre une chapelle appellée Sotira, qui confitle seulement en quelques murailles fort petites & fort basles, sur lesquelles pose les toit. Quand on est arrivé à cette chapelle, on rencontre deux chemins, dont l'un rend à droite, l'autre à gauche, vers deux fontaines situées à la portée d'un trait l'une de l'autre. Celle qui est à droite tarit en été; celle qui est à gauche coule toute l'année. Comme ce quartier est fort humide, il n'y croît que des joncs; au lieu qu'au chemin, qui conduit à la fontaine sur la droite, il y croît tout du long des carouges, des sureaux & des saules, qui couvrent la fontaine de leur ombre. Cette colline est renommée tant par la chute de Vulcain, que par la terre sigelée ou lemnienne qu'on en tire. Porcachi témoigne qu'on n'y voit croître ni herbe ni plante; mais, s'il en faut croire Belon, le bled y vient affez heureusement. On pratiquoit anciennement diverses cérémonies pour aller tirer des entrailles de la terre, & pour former cette terre sigelée de Lemnos, fur laquelle on a imprimé diverses marques & figures fuivant les différentes circonstances des siécles, où l'on en a vû paroître dans le monde. Du tems de Dioscoride, qui a vécu long-tems avant Gallien, on avoit accoutumé de mê. ler du fang de bouc, dans les petits pains qu'on en formoit, & d'imprimer dessus la figure d'une chevre; mais cette coutume n'étoit plus en usage du tems de Gallien, comme il l'éprouva lui-même lorsqu'il alla à Lemnos pour s'en éclaircir. On avoit alors une autre maniere de préparer cette terre, & d'en former de petits pains; car avant toute chose, le prêtre montoit sur une colline, où après avoir répandu une certaine mesure de blé & d'orge, & pratiqué quelques autres cérémonies, il chargeoit un plein chariot de cette terre, qu'il faisoit conduire à la ville d'Hephastia, où on la préparoit ensuite d'une maniere bien différente de la précédente. Cependant il y a plusieurs fiécles que ces cérémonies ne font plus en usage, & qu'elles ont été entierement abolies : mais en leur place on en a introduit d'autres.

Tous les principaux de l'isle, tant Turcs qu'ecclésiastiques, ou prêtres Grecs, qu'on nomme Caloyers, s'assemblent le fixiéme jour d'août, dans la chapelle de Sotira, où les Grecs, après avoir lu leur liturgie, & fait des prieres, montent tous ensemble, accompagnés des Turcs, vers la colline, où l'on arrive par des dégrés qu'on a faits. Quand on est parvenu au plus haut, cinquante ou foixante hommes se mettent à creuser jusqu'à ce qu'ils ayent découvert la veine de la terre qu'ils cherchent, dont les Caloyers rempliffent quelques sacs faits de poile de bête, & les donnent aux principaux des Turcs, établis pour le gouvernement de l'ifle, comme le fous-bachi, ou le waiwode, qui se trouvent présents.

Quand ils ont tiré de cette terre en quantité suffisante pour toute l'année, ils en font recouvrir la veine avec d'autre terre. Cependant le sous - bachi fait porter à Conftantinople, & présenter au grand - seigneur une grande partie de ce qu'on a tiré, & vend le reste à des marchands.

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Il n'y a pas d'autre moyen d'en avoir & d'en acheter, que de s'adrefler au fous-bachi ou gouverneur Turc. Car il est défendu à tous les infulaires, fur peine de la vie, d'en transporter la moindre partie hors de l'isle; & fi quelqu'un étoit furpris avec le moindre petit pain, ou convaincu d'en garder dans sa maifon, à l'insçu du gouverneur, il feroit condamné à payer une grosse amende. Il n'y a que le sousbachi, qui tire tous les ans au nom de l'empereur fon maître, les revenus de l'isle, à qui il soit permis d'avoir de cette terre, & d'en vendre. Il ne seroit pas même facile, quand on auroit vingt ouvriers, & qu'on les feroit travailler toute la nuit, de pouvoir creuser pour la découvrir outre qu'on les pourroit reconnoître, & remarquer facilement. Quoiqu'il ne faille pas douter qu'on pourroit trouver en d'autres quartiers de l'ifle de cette même terre, les Grecs ne s'en voudroient pas fervir si on ne la tiroit en présence des caloyers & avec les cérémonies accoutumées. Ils ne voudroient pas même se servir de celle de la colline, ni permettre que les autres s'en ferviffent, si elle avoit été tirée dans un autre jour que le fixiéme d'août; tant ils attribuent de vertu & de force à ces cérémonies, & au tems & à la maniere de tirer la terre de sa veine. Ils s'imaginent aussi que s'ils'n'y étoient préfens, & ne la voyoient tirer eux-mêmes, sa vertu en seroit moins forte.

Les Turcs font dans ce point moins superftitieux, que les Grecs, ou les autres peuples, quoiqu'ils souffrent que les chrétiens Grecs faffent toutes ces grimaces & cérémonies, & répandent leurs bénédictions fur cette terre; en quoi ils semblent eux-mêmes les seconder. Suivant le rapport des plus anciens habitans de l'ifle, cette coutume de choisir un certain jour de l'année, pour tirer cette terre de sa veine, a été introduite par les Vénitiens qui commencerent à la mettre en pratique lorsqu'ils étoient en poffefsion de cette ifle.

Quand cette terre est hors de sa veine, on en forme de petits pains ronds, du poids d'environ deux dragmes, fur lesquels on voit seulement ces deux mots, en caracteres turcs & arabes, Tin Imachton, c'est-à-dire terre sigelée. Cependant ces lettres & ces caracteres ne sont pas femblables dans tout les petits pains; mais il en faut attribuer la cause à l'inégalité de l'écriture des Turcs, qui voulant exprimer une même chose se servent de différens caracteres, ou forment leurs lettres diversement, outre que plusieurs gouverneurs Turcs, en ayant eu en différens tems la conduite, ils ont fait aufssi imprimer des sceaux différens.

Au rapport des Grecs & des Turcs, la plus ancienne marque des différentes terres de cette nature, qu'on trouve encore, est celle qui n'a pas plus d'un pouce de large, & qui ne comprend que quatre lettres. Il y a seulement au milieu du sceau entre toutes les lettres, quatre points. La terre de ce sceau est si graffe, qu'elle semble du fuif, & qu'elle s'attache entre les dents quand on la mâche, fans qu'il paroiffe qu'il y ait le moindre sable. Elle est d'un rouge brun & enfoncé. Cependant la terre sigelée n'est pas toujours de la même couleur. Car il arrive souvent que dans une même veine elle est plus blanche, quelquefois un peu plus rouge, & d'autres fois d'un rouge clair. Elle a une vertu attractive & defficative qui résiste à la pourriture & au venin. Elle remet le sang figé dans sa consistance & fluidité naturelle, fortifie le cœur, & provoque les fueurs. Son principal usage est dans les fiévres malignes, dans la peste, dans la dyssenterie, & dans les piquûres & morfures de bêtes venimeuses, pour excentrer le venin, qui se pourroit infinuer, ou qui se seroit déja insinué dans le fang. Les anciens s'en servoient aufli, pour combattre & faire vomir le poison qu'on avoit avalé.

Les anciens médecins, tant Grecs que Latins ont fort estimé cette terre qu'ils employoient à divers usages. On peut dire aussi que les médecins modernes n'en font pas moins de cas, puisqu'ils s'en servent en diverses occafions extérieurement, & qu'ils l'employent, non comme un remede simple, dans les remédes composés. Le célébre & fameux Gallien s'embarqua dans l'ifle de Lemnos, dans la seule pensée de pouvoir s'éclaircir sur la force & vertu de cette terre, qu'il espéroit de pouvoir pénétrer par une exacte & longue application. Il y trouva une perfonne, qui s'en fervoit pour guérir les plaies invétérées & les morsures de viperes, & par conféquent contre toutes fortes de piquûres venimeuses & mortelles, & pour guérir ceux qui

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étoient empoisonnés, ayant coutume d'en faire prendre, non-feulement avant, mais aufli après le poifon.

Les corroyeurs de Lemnos s'en fervent au lieu de tan pour taner les cuirs. Celle qu'on vend à Constantinople est la plupart du tems falfifiée, & formée en plus gros pains que la véritable. Sa couleur eft auffi différente, & tire ordinairement fur le jaune.

Quoiqu'on falle un si grand cas de cette terre à la porte où le grand seigneur, pour honorer les ambasladeurs des princes & des têtes couronnées, leur en donnent en préfent; & quoique l'ifle de Lemnos soit le seul endroit du monde qui en fourniffe, on en trouve pourtant à vendre dans ce pays-ci, dans quelques boutiques rares d'apothicaires & de droguiftes, chez qui néanmoins la plupart du tems elle eft falfifiée. Car il y y a des gens fi adroits & fi experts à la falfifier, en faisant un mélange de bol d'Armé. nie, avec quelqu'autre terre ou poudre de cette nature, qu'il est assez difficile, même aux plus habiles connoisseurs, de ne s'y pas tromper.

Les marques les plus fûres, pour faire un bon & juste discernement de cette terre, font que la véritable est si graffe, que quand on la met à la bouche, il semble qu'on mâche du fuif, d'où vient qu'elle s'attache aux dents & à la langue, & qu'érant humectée de falive ou jettée dans l'eau, elle s'éleve en vessies. Mais la principale marque pour la diftinguer de celle qui eft falfifiée, est qu'en la mâchant elle exhale quelque chose d'aromatique; en forte que si on ne savoit pas que c'est son odeur naturelle, on pourroit se tromper, & s'imaginer qu'on y a mêlé des épiceries qui lui donnent cette odeur. Outre cela on s'apperçoit de quelque chose de sablonneux quand on en tient sous la langue.

On raconte que les anciens prêtres de Lemnos guérif. soient ceux qui avoient été mordu des ferpens, ce qu'ils opéroient sans doute par le moyen de la terre sigelée ou lempienne. Philoctete, fils de Pæan ou d'Apollon, & qui avoit accompagné lee Grecs à la guerre de Troye, ayant été blessé au pied par une fléche empoisonnée, ou plutôt ayant été mordu par un ferpent d'eau, ou une vipere, on le laissa en l'ifle de Lemnos pour y être guéri de sa playe ou morfure; mais après la mort d'Achille, Ulyffe revint en l'ifle de Lemnos, & l'emmena de nouveau à la guerre de Troye.

Le mont Athos, que les Grecs nomme à présent Agios Oros, c'est-à-dire la montagne fainte, & les Turcs Manstir, couvre l'ifle de Lemnos de fon ombre, lorsque le soleil approche de fon coucher. Car Belon témoigne qu'il a vû vers le second du mois de juin, qu'environ le coucher du soleil, le mont Athos lançoit son ombre jusques dans le port, qui est situé à l'autre extrémité de l'isle, & fur la gauche de la ville de Lemnos. Cette montagne est si haute, qu'avant même que le soleil approche de son coucher, son ombre s'étend jusqu'à la pointe gauche de l'isle.

Il y avoit anciennement, dans l'isle de Lemnos, la statue d'un bœuf, faite de pierre blanche, & le mont Athos l'obscurcissoit de son ombre; d'où étoit venu ce proverbe parmi les anciens; le mont Athos couvre le côté du bœuf de Lemnos; & l'on appliquoit ce proverbe à ceux qui tâchoient d'obscureir la gloire & la réputation des autres par leurs calomnies. Pline dit que cette montagne lançoit son ombre au folstice d'été, jusques dans le marché de la ville de Myrine.

Il y avoit aussi anciennement un labyrinthe, qui étoit le troisiéme des quatre, dont Pline fait mention. Car cet auteur place le premier dans l'isle de Créte; le second en Egypte; le troisiéme à Lemnos; & le quatrième en Italie. Celui de Lemnos étoit semblable à ceux de Créte & d'Egypte, avec cette différence qu'il y avoit quarante colonnes qui l'ornoient & le rendoient plus magnifique. Il étoit bâti de fort belles pierres de taille bien uni & poli, & tout couvert de voutes. Les architectes de ce grand & fuperbe édifice furent Zmilus, Rholus, & un certain Théodore, qui étoit natif de cette isle. On en voyoit encore quelques restes du tems de Pline. Mais Belon assure qu'il n'en a pu trouver la moindre trace dans toute l'isle. Il ajoute même que s'en étant informé desinfulaires, il n'y en avoit point eu qui lui en eût su montrer d'autres restes que quelques mafures, qui n'avoient rien de remarquable. Du Loir témoigne aufsi, au rapport des habitans de cette isle, qu'il n'en est pas demeuré la moindre trace qui puisse faire juger de l'endroit où il avoit été bâti.

Un certain Thoas, fils du Pere Liber ou Bacchus, poffédoit anciennement cette isle en qualité de roi. On dit que les femmes de Lemnos en tuerent tous les hommes, fous le regne de ce Thoas, à cause que leur mauvaise odeur & puanteur leur avoit rendu leur compagnie insupportable. Il n'y eût que le roi qui fut préservé de ce malheur, par le moyen de sa fille Hypsipylée, qui le tint caché, & le conserva. Depuis les femmes se mirent en possession de l'ifle, & prirent le gouvernement: nous voyons entr'autres dans Pomponius-Mela, qu'on assuroit que les femmes de Lemnos avoient retenu le gouvernement de l'isle après avoir tué leurs maris. C'est en considération de ce carnage & de celui qu'on y fit des femmes Athéniennes & de leurs enfans, comme on le voit ci-dessous, que toutes les noires & atroces actions étoient anciennement appellées par les Grecs des actions lemniennes; delà vient aussi qu'il avoit paflé en commun proverbe d'exprimer, par une main lemnienne une barbare & cruelle main. Hérodote rapporte que les femmes de cette ifle, conjointement avec Thoas, tuerent tous leurs maris. Homére l'appelle cependant le divin Thoas. Euripide & Ovide font mention, ainsi que plusieurs autres écrivains, de cette action atroce des femmes de Lemnos; delà vient que Sénéque, dans fon amemnon, appelle Lemnos une isle renommée par ses méchancetés.

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Quelque tems après, les Pélasgiens ayant été chaffés de l'Attique par les Athéniens, à cause qu'ils avoient usé de force & de violence envers leurs enfans, & qu'ils avoient résolu de couper les mains aux Athéniens même; ils se retirerent dans l'ifle de Lemnos, dont ils prirent poffeflion. Mais voulant ensuite tirer raison du tort qu'ils prétendoient avoir reçu, ils équiperent vers le tems des fêtes des Athéniens plufieurs galeres à cinq rangs, & firent voile du côté d'Athènes, où ils allerent dresser des embuches aux femmes de leurs ennemis, qui célébroient à Brauron, ville de l'Attique, où Diane avoit un temple, la fête de cette déeffe. Ils enleverent plusieurs de ces femmes, les emmenerent dans leurs galeres & les conduifirent à l'isle de Lemnos. Ces femmes ayant eu plusieurs enfans après quelques années prirent foin de leur apprendre la langue & les mœurs des Athéniens. Mais il arriva depuis que ces enfans, instruits par leurs meres, ne voulurent point avoir de commerce ni de fréquentation avec ceux des femmes Pélasgiennes. Quand quelqu'un des leurs étoit battu par ceux des Pélasgiens, les autres couroient d'abord à son secours & s'aflembloient pour le venger; car ils étoient prévenus de cette opinion, qu'ils étoient dignes de commander sur les autres, qu'ils regardoient beaucoup au-dessous d'eux, & qu'ils croyoient obligés à toute forte de soumiffion & de déférence à leur égard. De leur côté les Pélasgiens craignant les fuites de cette haine, résolurent de les faire tous mourir avec leurs meres qui les y avoient élevés. Mais il arriva qu'après avoir exécuté cet exécrable & funeste dessein, leurs terres ne rapporterent plus de fruits, & leurs femmes devinrent stériles, de même que les femelles de tous leurs bestiaux; de forte qu'ils se virent en même tems travaillés de la faim & agités de la cruelle appréhension de voir bien-tôt dépeupler leur patrie par la stérilité de leurs femmes, & par le ravage que pourroit en peu de tems faire la famine si elle continuoit. Pour prévenir ces malheurs, ils envoyerent vers l'oracle d'Apollon à Delphes pour le supplier de vouloir les délivrer de tous leurs maux. L'oracle leur répondit qu'ils n'en verroient point la fin qu'ils n'eussent donné aux Athéniens la fatisfaction, qu'ils fouhaiteroient. Les Pélasgiens s'embarquerent pour Athénes, offrirent aux Athéniens de leur donner fatis faction. Les Athéniens étendirent dans leur hôtel-de-ville les plus beaux lits qu'ils avoient, & firent dresser devant les Pélasgiens une table chargée de toute forte de biens, après quoi ils leur demanderent de remettre leur pays. Mais les Pélasgiens leur répondirent qu'ils leur accorderoient leur demande lorsqu'un vaisseau les auroit remenés d'Athénes dans leur pays par un vent de nord; ce qu'ils disoient parce qu'ils savoient bien que c'étoit une chose absolument impossible, à cause que le pays d'Athénes est situé plus au midi que l'ifle de Lemnos.

Après plusieurs années, la Chersonnèse de Trace, située près de l'Hellespont, étant tombée sous la domination des Athéniens, Miltiade, fils de Cimon, s'embarqua à Elis, ville de la Chersonnese, & vint faire descente à Lemnos, où il ordonna aux Pélasgiens, en les faisant ressouvenir de

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l'oracle, de se retirer de l'isfle, & de lui en laisser prendre de Coire ; mais ils ont acheté leur liberté depuis long.

polletion. Les habitans d'Hephæstia obéirent à cet ordre; mais ceux de Myrine fouffrirent un siege, qui à la fin les obligea de se sournettre. C'est ainsi qu'Hérodote rapporte cette expédition de Miltiade, & la prise de Lennos par les Athéniens. Cornelius Nepos dit que Miltiade, fils de Cimon, s'étant mis en mer avec une flotte contidérable, dans le detlein d'aller conquérir la Chersonnese, mouilla en pasfant à l'ifle de Lemnos, pour tâcher de la foumettre à la domination des Athéniens. Il follicita pour cet effet les habirans à se rendre; mais ils lui répondirent qu'ils feroient prêts à leur obéir, lorsqu'en partant de leur port, ils viendroient, par un vent d'aquilon, aborder en un jour dans l'ifle de Lemnos; car c'étoit le vent qui étoit abfolument contraire pour la route d'Athènes à Lemnos. Miltiade, à qui le retardement étoit ennuyeux, ne voulant pas s'arrêter davantage devant cette isle, cingla vers la Chersonnese & yaalla faire descente. Quand il s'en fut rendu maître, il patía de nouveau à Lemnos, dont il somma les habitans de lui rendre la ville, comme ils y étoient engagés par leur propre parole. Mais ils lui répondirent comme auparavant. Miltiade repliqua que par cette raison ils devoient lui rendre leur ville, puisqu'il faifoit son séjour dans la Chersonnèse, d'où il étoit venu dans un jour à Lemnos par un vent du nord. Enfin Miltiade leur fit faire de force ce qu'il leur demandoit. Après cela ce capitaine prit sa route vers les Cyclades, dont il s'empara avec le même bonheur.

Louis, patriarche de la ville d'Aquilée, mit seize galeres en mer en 1640, sous le pontificat de Calixte III, par ordre duquel il avoit armé, & se rendit maître de l'ifle de Lemnos; mais les Turcs s'en emparerent de nouveau, du tems de Mahomet II, qui l'a poflédée depuis, & l'a laissée à fes descendans.

Cette ifle fut anciennement habitée par certains peuples appellés Minyens, qui étoient descendus des Argonautes. Maisils en partirent pour paffer à Lacédémone, d'où ils allerent dans la Triphilie, & s'arrêterent enfin aux environs d'Arena, dans une contrée appellée Lypezie du tems de Strabon.

Ces premiers habitans étoient de Thrace. Ils font appellés Sintiens, & autrement Sapéens, par les anciens auteurs. Homére fait mention de ces Sintiens de Lemnos, & les nomme les Eurouez Sintiens.

Entre plusieurs peuples Grecs qui habiterent le Péloponnése, les habitans de Lemnos furent du nombre de ceux qui s'y établirent entierement.

La plupart des habitans de Lemnos sont à présent des Grecs fort diligens & laborieux, qui s'appliquent principalement à l'agriculture. Ils font des gâteaux avec de la farine pétrie dans du petit lait, qu'ils font enfuite cuire ou fécher au foleil. On les appelle bohourt, & on en porte & vend dans toute la Turquie. Les Grecs demeurent dans les villages; mais les Turcs se tiennent avec leur garnison dans le château.

STALIOCANUS-PORTUS, port de la Gaule Lyonnoise; Ptolomée, l. 2, , c. 8, le marque sur la côte de la mer Britannique, entre le promontoire Gobaum & l'embouchure du fleuve Titus. Au lieu de Staliocanus, le manuscrit de la bibliotheque palatine porte Saliocanus. Villeneuve veut que ce soit aujourd'hui S. Paul ; & c'est Roscou, selon d'Argentré.

STALLEN, communauté du pays des Grifons, dans la ligue de la maison de Dieu, où elle a le sixiéme rang. Cette communauté est composée de deux jurisdictions de Stallen & de Val Aversa, qui font au pied du mont Septimer, & de celles de Remus & de Celino, qui font bien loin de-là dans la basse Engadine. C'est du mont Septimer que descend le petit Rhin, qui se jette dans l'Albula, près d'Im Caster. Stallen s'appelle en italien Bevio, du latin Bivium. Ce dernier nom lui vient de ce qu'il y a deux chemins, l'un par le mont Septimer, qui conduit dans le pays de Pergell; & l'autre par le mont Julien, dans la haute Engadine. Cette jurisdiction dépend pour les affaires criminelles du bailli d'Oberfax, qui en tire les amendes. * Etat & Délices de la Suiffe,

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tems.

STAMBS, abbaye d'hommes, ordre de cîteaux, dans le Tirol, sur l'inn, au diocèse de Brixen, huit lieues au-dessus d'Inspruck: les anciens comtes de Tirol, & plusieurs autres grands seigneurs, y avoient leur sépulture.

STAMENA. Etienne le géographe, qui cite Hécatée, donne une ville de ce nom aux Chalybes. STAMFORD. Voyez STANFORD.

STAMPÆ, lieu de la France. Aimon & Grégoire de Tours le placent sur le bord de la Juine. Le nom moderne est ESTAMPES. Voyez ce mot.

STAMPALIE, ifle de l'Archipel. Les Italiens, les Grecs & les Turcs, l'appellent Stampalée. Strabon, Pline & Ptolomée, l'ont nommée Astypalée. Etienne le géographe femble connoître deux ifles de ce nom, & en mettre une entre les Cyclades, & l'autre entre l'ifle de Rhodes & celle de Crete. On peut cependant les prendre pour la même, puisqu'on peut comprendre les Cyclades entre Rhodes & Candie, outre que Strabon, Prolomée & Pline ne font mention que d'une ifle sous le nom d'Astypalée. Il est vrai que Strabon la place dans la mer Carpathienne, & Ptolomée dans celle que les anciens ont appellée Myrtoum, qui se confinent l'une l'autre ; mais les anciens écrivains ont souvent étendu les bornes de ces deux mers, d'un côté & d'autre au-delà de ce qu'elles devoient être posées, ou même ont confondu les unes avec les autres, d'où nous pouvons conclure qu'il n'y a eu qu'une ifle de ce nom. * Dapper, Description de l'Archipel, p. 185.

Cette isle fut nommée d'Astypalée, mere d'Ancée, qu'elle eut de Neptune. Astypalée étoit fœur d'Europe, & fille de Phénix, fils d'Agenor, & frere de Cadmus, qui eut ces deux filles de Péremides, fille d'Enée. Lorsque les Cariens étoient en poffeffion de cette ifle, elle étoit appellée Pyrrha; ensuite on la nomma Pylea, & quelque tems après d'un nom grec, qui fignifie la table des dieux, foit parce qu'elle étoit toute embellie & parfemée de fleurs, où à cause d'une montagne qu'elle avoit, qui étoit ainsi appellée.

Elle est située à l'occident de l'isle de Cos ou Lango, du bout méridional de laquelle elle est éloignée de sept lieues, & à quatre lieues à l'est nord-est de celle de Namphia, à la distance de quatre lieues. Strabon la place à huit cents stades de l'isle de Chalcia, & Pline à cent vingt-cinq milles de Cadiscus, ville de Créte; lui donnant en même tems quatrevingt-sept mille pas, qui font quatre-vingt-sept milles d'Italie de circuit; en quoi Porcachi l'a suivi. D'autres écrivains ne le font que de foixante milles d'Italie. Elle n'est pas fort haute, & on ne peut la découvrir de guères loin, quand on est en mer; car on ne commence de l'appercevoir qu'à la distance de sept lieues. Elie paroît haute vers ses deux bouts, & basse au milieu, quand on vient du côté du midi. Pline la nomme l'Astypalée d'une ville libre.

Les anciens habitans de cette isle révéroient le vaillant Achille comme un Dieu. Il y avoit même sur la pointe septentrionale de l'ifle, une chapelle en fon hon

neur.

Le terroir de l'isle de Stampalie est fertile. On y nourrit d'excellens chevaux', & on y fait une pêche considérable. Il y a plusieurs villages.

Elle a deux ifles au midi, derriere lesquelles est un port, où les vaisseaux se peuvent venir mettre à l'ancre fur un fond net & fain, & à l'abri de tout vent tant à l'orient qu'à l'occident. On trouve auffi un port au côté septentrional de cette ifle, & un rocher caché sous l'eau, entre les deux petites isles situées au midi de celle de Stampalie. On découvre plusieurs autres petites isles à l'orient de Stampalie, & qui sont pourvues de fort bonnes rades. Il y en a aussi quelquesunes près du rivage de cette isle, du côté du midi, entre lesquelles on peut voguer & faire voile fort commodément. On voit une isle haute & pleine de rochers, à deux lieues au midi de celle de Stampalie; on l'appelle Saphranie : au midi de celle-ci il y en a une autre, qu'on nomme Sthrophi, dont le fond n'est pas propre à l'ancrage, à cause qu'il n'est couvert que de rochers. Il y en a une au nord-nord-est de celle de Saphranie, appellée S. Sevan, & entre deux est celle de Schiron. On en trouve une antre un peu plus vers l'occident & au midi de Stampalie, appellée Grossi.

Pline en place une qu'il nomme Platée, à foixante milles d'Astypalée. C'est appareinment l'isle ou rocher de Placha

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