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'Ai lu, par ordre de Monfeigneur le Chancelier, le Dictionnaire Géogra phique de la Martiniere, en fix volumes in-folio. Cette édition, la feconde qu'on ait faite en France, n'a pu que gagner beaucoup, foit par les critiques dont les Editeurs ont profité, foit par les nouveaux fecours qu'ils le font procurés, & qui ont été inconnus à M. Bruzen de la Martiniere. Ces avantages ont été fuffifamment détaillés dans le Profpectus que les Libraires ont fait diftribuer il y a quelques mois, d'après l'Avis qu'on vient de lire ; & l'on croit ne rien hazarder en affurant que cette nouvelle édition eft digne de l'accueil le plus favorable. Fait à la Bibliotheque du Roi, ce 20 Décembre 1768. CAPPERONNIER.

PRIVILEGE CÉNERAL.

Lféaux Confeillers les Gens tenans nos Cours de Parlement, Maîtres des Requêtes ordinaires de notre

par

OUIS, PAR LA GRACE DE DIEU, ROI DE ERANCE ET DE NAVARRE: A nos amés & Hôtel, Grand Confeil, Prévôt de Paris, Baillifs, Sénéchaux, leurs Lieutenans Civils, & autres nos Jufticiers qu'il appartiendra SALUT. Notre amé HIPPOLYTE-LOUIS GUÉRIN, Imprimeur & Libraire à Paris, Nous ayant fait expofer qu'il auroit entrepris de continuer l'Impreffion d'une Collection des Hiftoriens de France, depuis l'origine de la Nation, dont il a déja publié huit Volumes in-folio : Et comme cet Ouvrage, autant utile à la République des Lettres, que glorieux à notre Royaume, engage l'Expofant dans des dépenfes confidérables, il Nous a très-humblement fait fupplier de vouloir bien, pour l'aider à fupporter les frais d'une fi grande entreprife, lui accorder nos Lettres de continuation de Privilége, tant pour l'impreffion dudit Livre, que pour l'impreffion ou la réimpreffion de plufieurs autres, dont les Priviléges font expirés ou prêts à expirer; offrant pour cet effet de les imprimer ou faire imprimer en bon papier & beaux caracteres, fuivant la feuille imprimée & attachée pour modéle fous le contrefcel des Préfentes. A CES CAUSES, voulant favorablement traiter ledit Expofant, & encourager par fon exemple les autres Imprimeurs & Libraires à entreprendre des Editions utiles pour l'honneur de la France & le progrès des Sciences, Nous lui avons permis & accordé, permettons & accordons ces préfentes, de continuer d'imprimer ladite Collection des Hiftoriens de France, depuis l'origine de la Nation, fous le titre de Recueil des Hiftoriens des Gaules & de la France, & d'imprimer ou faire réimprimer les Livres intitulés Livres d'Eglife à Pufage de l'Ordre de faint François; Anti-Lucretius du Cardinal de Polignac, avec la Traduction, par M. de Bougainville; Bibliothèque Françoife par M. l'Abbé Goujet; le Dictionnaire Géographique de la Martiniere; en tels Volumes, forme, marge, caracteres, conjointement ou féparément, & autant de fois que bon lui femblera, & de les vendre, faire vendre & débiter par tout notre Royaume, pendant le temps de vingt années confécutives, à compter de la date des Préfentes, & de l'expiration des précédens Priviléges. Faifons défenfes à tous Imprimeurs, Libraires & autres perfonnes, de quelque qualité & condition qu'elles foient, d'en introduire d'impreffion étrangere dans aucun lieu de notre obéillance; comme auffi d'imprimer ou faire imprimer, réimprimer ou faire réimprimer, vendre, faire vendre ni débiter lefdits Livres, en tout ou en partie, ni d'en faire aucuns extraits, fous quelque prétexte que ce foit, d'augmentation, correction, changement ou autres, fans la permiffion expreffe & par écrit dudit Expofant, ou de ceux qui auront droit de lui, à peine de confifcation des Exemplaires contrefaits, & de trois mille livres d'amende contre chacun des contrevenants, dont un tiers à Nous, un tiers à l'Hôtel-Dieu de Paris, & l'autre tiers audit Expofant, ou à celui qui aura droit de lui, & de tous dépens, dommages & intérêts; à la charge que ces Préfentes feront enregistrées tout au long fur le Regiftre de la Communauté des Imprimeurs & Libraires de Paris, dans trois mois de la date d'icelles; que l'impreffion & réimpreffion defdits Livres fera faite dans notre Royaume, & non ailleurs; que l'Impétrant fe conformera en tout aux Réglemens de la Librai→ rie, & notamment à celui du 16 Avril 1725, qu'avant de les expófer en vente, les Manufcrits & Imprimés qui auront fervi de copie à l'impreffion & réimpreffion defdits Livres, feront remis dans le même état où l'Approbation y aura été donnée, ès mains de notre très-cher & féal Chevalier, Chance lier de France le fieur DE LAMOIGNON, & qu'il en fera enfuite remis deux Exemplaires de chacun dans notre Bibliothéque publique, un dans celle de notre Château du Louvre, un dans celle de notredit Très-cher & féal Chevalier, Chancelier de France, le Sieur DE LA MOIGNON, & un dans celle de motre très-cher & féal Chevalier, Garde des Sceaux de France, le Sieur DE MACHAULT, Commandeur 'de nos Ordres, le tout à peine de nullité des Préfentès; du contenu defquelles vous mandons & enjoignons de faire jouir ledit Expofant, & fes ayans caufe, pleinement & paifiblement, fans fouffrir qu'il leur foit fait aucun trouble ou empêchement. Voulons que la copie des Préfentes, qui fera imprimée tout au long au commencement ou à la fin defdits Livres, foit tenue pour duement fignifiée, & qu'aux copies collationnées par l'un de nos amés & féaux Confeillers - Secrétaires, foi foit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huiffier ou Sergent, fur ce requis, de faire pour l'exécution d'icelles, tous Actes requis & néceffaires, fans demander autre permiffion, & nonobftant clameur de Haro, Charte Normande, & Lettres à ce contraires : CAR tel eft notre plaifir. DONNÉ à Versailles le vingt-neuvième jour du mois de Juin, l'an de grace mil fept cent cinquante-trois, & de notre Regne le trente-huitiéme. Par le Roi en fon Confeil. Signé, SAINSON.

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Regiftré fur le Regiftre treize de la Chambre Royale des Libraires & Imprimeurs de Paris, No. 212, fol. 170, conformément aux anciens Reglemens, confirmés par celui du 28 Février 1723. A Paris le 2 L Août 1753

Signé, DIDOT, Syndic. Tome I. a iij

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Le Relevé ou la Table promise des noms latins, fe trouvant nouvellement à la tête de l'ATLAS UNIVERSEL de Meffieurs Robert de Vaugondi pere & fils, & ce Recueil de Cartes faifant naturellement la fuite & le VIIeme Volume de notre Dictionnaire, qui y renvoie continuellement pour les Longitudes & Latitudes, par la crainte de furcharger le public de répétitions on n'a pas cru devoir imprimer ce travail pour le mettre à la fin de notre Dictionnaire, comme on l'avoit annoncé.

Nous renvoyons pour cela d'autant plus judicieusement à la tête de cet Atlas, qu'on y voit avec les Longitudes & Latitudes non-seulement les noms anciens de la Martiniere traduits en leurs noms modernes pour faciliter le renvoi au détail du Dictionnaire, mais encore tous les autres noms de la Géographie latine ou ancienne, dont la Martiniere & conféquemment notre Dictionnaire n'ont point fait de mention; & nous avouons qu'en cela nous n'aurions rien pu donner qui approchât de la perfection de ce que préfente aujourd'hui cet Atlas.

Le prix de cet Atlas ou Tome VII, eft pour ceux qui ont acquis ou acquerront les fix Volumes de notre Dictionnaire; fçavoir,

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Il est pour ceux qui n'ont point acquis ou n'acquerront point notre Diction naire de douze livres de plus que le prix marqué ci-deffus.

Il contient 108 Cartes fçavoir,

I

:

pour la Géographie sainte.

10 pour la Géographie ancienne.

1 pour la Géographie du moyen âge.

91 pour la Géographie moderne.

5 pour les Poftes, ou grandes Routes d'Europe.

Dans les demi-reliures & les reliures il y a des onglets ou fonds d'attente vacans pour recevoir les Cartes que le goût particulier d'un Acheteur pourroit lui faire dé"firer d'ajouter par la fuite à fon Exemplaire d'Atlas.

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PREFACE

DE M. DE LA MARTINIERE.

B

I EN loin de me plaindre des murmures que le Public a faits depuis quelque tems, de ce que la publication de ce Dictionnaire a été retardée au-delà de fes espérances, j'en ai une reconnoiffance fincere. Son impatience me fait honneur; & fi j'ai différé à la fatisfaire, c'est uniquement parce que j'ai cru qu'il étoit de fon intérêt & de mon devoir, que je redoublaffe mes efforts pour la mériter, & pour rendre mon travail plus ample, plus exact, & par con1equent moins indigne de l'empreffement que des personnes, très-respectables pour moi, ont témoigné de le voir imprimé.

Je ne m'arrêterai point à vanter ici l'utilité de la géographie. Je craindrois qu'il ne m'arrivât comme à ce Sophifte, qui fatiguoit fes auditeurs d'un long panégyrique d'Hercule. Un Lacédémonien lui en fit fentir le ridicule, en lui difant: Qui eft-ce qui le blâme ? Mais comme on pourroit m'accufer de témérité de ce que j'ai ofé traiter de nouveau une matiere épuifée par plufieurs grands hommes, au jugement d'un certain nombre de Lecteurs, qu'il me foit permis de me juftifier en marquant par quelle espece de vocation je me suis trouvé engagé à ce travail.

La providence m'ayant transplanté à la fin de 1709, dans l'ancienne patrie des Herules, des Wandales, & autres nations qui ont été célèbres durant & après la chute de l'empire Romain, j'employai le loifir que me faifoient mes devoirs, à m'inftruire de l'hiftoire de ces peuples: je raffemblai avec foin les auteurs anciens, qui avoient du rapport avec les révolutions des pays, qu'ils ont habités ou parcourus. Ma curiofité ne déplut pas au Souverain: il parut même fi content de mes progrès, qu'il m'ordonna de continuer mes recherches. Je fentis tout le prix d'un commandement qui m'étoit fi glorieux, & je m'y appliquai avec toute la vivacité d'un homme de vingt-cinq ans ; mais je trouvai bientôt des obftacles qui m'arrêterent. Des noms géographiques ou entierement nouveaux pour moi, ou tellement défigurés, qu'ils n'étoient guères reconnoiffables, me mettoient fouvent à la torture. Je connus alors l'infuffifance des Dictionnaires latins d'Ortelius, de Ferrari, & de Baudrand. La Notice du monde ancien, par Cellarius, me tomba entre les mains. J'en admirai l'érudition & l'exa&titude; mais comme il ne vient que jusqu'au tems des Conftantins, il ne me pouvoit fervir à lever des doutes, qui regardent la géographie du moyen âge. Les gros ouvrages de Cluvier fur la Germanie, fur la Vindelicie, fur l'Italie & fur la Sicile, furent pour ainfi dire dévorés. Je me propofai de commencer l'étude de cette hiftoire par celle de la géographie, & je trouvai que c'étoit une matiere qu'aucun moderne n'avoit fuffifamment débrouillée. L'avidité avec laquelle je recherchois toutes les cartes & tous les livres qui pouvoient m'applanir ces difficultés, fit qu'en peu de tems j'assemblai une bibliothéque affez nombreuse pour la géographie ancienne, pour la nouvelle, & même pour celle du moyen âge. Cependant il arriva que tous ces préparatifs devinrent inutiles pour le but que je m'étois propofé. Le Souverain qui m'avoit appellé à fa cour étant mort, & le regne de fon fucceffeur étant troublé par des discordes inteftines, je me vis réduit à chercher ailleurs la tranquilité dont j'avois befoin, & que je préfere à tous les autres biens de la vie. Il ne fut plus question de mon premier plan; je ne pouvois l'exécuter fans des fecours, qu'on ne trouve que dans les pays que je quittois; mais je me crus en état & en obligation d'employer le loifir de ma retraite à un nouveau travail d'une utilité plus univerfelle, que ne peut être une hiftoire particuliere. Il fembla que mon étoile, qui me deftinoit à cette entreprise, ne m'avoit engagé dans le premier deffein, qu'afin de me préparer par là au fecond, que je n'aurois jamais conçu, li l'autre ne m'avoit pas fourni l'occafion de découvrir ce qui manquoit aux Dictionnaires géographiques. Je voulus d'abord en choisir un pour y joindre un grand nombre d'articles, tant anciens que modernes, & les remarques utiles que j'avois recueillies dans mes lectures. Mais, comme je le dirai ci-après, je fus rebuté par le défaut du plan dans les uns, & par celui de l'exécution dans les autres. Voici historiquement les réflexions que me fit naître l'examen que je fus obligé d'en faire.

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Le Tréfor d'Ortelius mérite de grandes louanges, par l'exactitude avec laquelle il a dé- Examen des Dipouillé presque tous les anciens auteurs des noms géographiques que l'on y trouve; il ne lui ctionnaires géoà manqué que d'en avoir des éditions plus exactes. Il pouffe même les recherches jusqu'à graphiques.

1

inférer les lieux dont on ne fait que le nom: plus louable en cela que Baudrand, qui les omet presque toujours dès qu'il n'a pas devant les yeux quelque moderne, qui ait nommé le peuple ou la ville, qui occupe préfentement à peu près le même terrein. On voit qu'Ortelius a lu attentivement les auteurs qu'il cite, & ils fourniffent à coup fûr ce qu'il leur attribue d'avoir dit, pourvu qu'on l'examine fur les éditions qu'il a pu confulter. Mais il n'eft pas affez plein pour la géographie du moyen âge. Il n'a abfolument rien de la moderne, & pour ce qui eft de l'ancienne, fon tréfor n'eft presque qu'une table géographique des auteurs Grecs & Latins. Il dispenfe rarement de chercher, dans les auteurs qu'il cite, les éclaircifiemens qu'il ne fait qu'indiquer. Pour être d'une utilité bien réelle, il doit être accompagné d'une bibliothéque affez nombreufe. Quoiqu'il ait publié beaucoup de cartes dans fon Théatre Géographique & dans fon Parergon, on ne voit pas qu'il ait poffédé la géographie mathématiquement. Son livre fe borne à la géographie hiftorique & grammaticale des anciens. Pour cette partie fon livre eft préférable à ceux des auteurs qui ont travaillé après lui; &, ce que ne devineroient jamais ceux qui ne l'ont point examiné, il eft bien plus ample à cet égard que les dictionnaires dont je vais parler.

Le P. FERRARI, religieux Servite, étant profeffeur royal des Mathématiques dans l'univerfité de Pavie, y publia en 1605, fon Epitome Géographique en quatre livres in-4°. Quatre ans après il publia à Venise une nouvelle Topographie du Martyrologe, & à Pavie une Topographie Poëtique. Il entreprit auffi un dictionnaire géographique. Il faut imputer aux diftractions que lui cauferent les grands emplois qu'il eut dans fon ordre, dont il fut deux fois général, favoir en 1609 & 1623, l'imperfection de fon ouvrage, dont il ne vit pas achever l'impreffion. Son livre contient quelque chofe de la géographie nouvelle, qui manque entierement à Ortelius; mais pour l'ancienne il lui eft bien inférieur. Il lui abandonne tité d'articles peu connus à la vérité, mais qui par cette raifon doivent encore plus que les autres fe trouver dans un dictionnaire. Ce pere feroit plus louable, fi ajoutant ion travail à celui d'Ortelius, il ne l'avoit pas tronqué d'une maniere, qui laiffe les deux ouvrages également imparfaits. Trente ans après l'édition de Milan, on le réimprima à Londres.

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M. BAUDRAND, qui avoit commencé à revoir ce dictionnaire que l'on vouloit remettre fous preffe à Paris, fut obligé d'aller à Rome avec le cardinal Antoine Barberin dont il étoit Secrétaire; mais étant revenu en France après le conclave de Clément IX, il recommença la nouvelle édition qu'il augmenta confidérablement. Elle parut enfin en 1670, fous le nom de Ferrarius; les additions de Baudrand furent diftinguées par un caractere différent. Ce dernier y cite rarement les auteurs ; ce qu'il ajoute regarde auffi bien l'ancienne géographie que la nouvelle ; cependant cette édition pour l'ancienne géographie eft bien au-deffous du tréfor d'Ortelius. Les cartes de MM. Sanfon, & quelques remarques faites en voyageant fourniffent presque tout ce qu'il y a de géographie nouvelle. En 1677, cette même édition fut réimprimée à Eifenach. Le nom de Ferrarius y paroît encore comme en ayant été le premier auteur. Celui d'Ortelius ne s'y trouve pas, quoiqu'il en ait fourni le premier fonds, mais bien celui de M. Baudrand avec tous les titres de fes bénéfices: on y lit qu'il a corrigé, éclairci & augmenté de moitié tout l'ouvrage, que l'on peut regarder comme nouveau. Enfin, cinquante ans après la premiere édition du dictionnaire du P. Ferrari, M. Baudrand qui avoit fait de nouvelles additions à l'édition de 1670, en donna une nouvelle en 1682. Le nom de Ferrari n'y paroît plus. Le titre eft changé, il n'y eft plus question que du nom de M. Baudrand,

Malheureusement pour lui, lorsqu'il étoit en Italie, il avoit fait graver fous fon nom des cartes géographiques de MM. Sanfon; du moins ils le lui reprocherent publiquement dans un livre imprimé avec permiffin. Guillaume Sanfon fit une critique amere du livre de l'abbé Baudrand. Il faut avouer que cet auteur avoit donné beau jeu aux cenfures, en ne confultant que rarement les anciens qu'il cite. On lui a prouvé dans la feule lettre A, cinq cens citations fauffes. N'y eût-il que ce défaut, c'en eft affez pour décrier le meilleur livre. Le public ne fe rebuta point, & la critique discontinuée, & presque fupprimée par les foins de M. Baudrand & de fes amis, ne fut pas à beaucoup près fi connue que l'ouvrage critiqué. Ce mélange spécieux de la géographie ancienne & de la moderne charma les lecteurs, qui n'ont pas toujours le loifir d'aller chercher dans les originaux un article que l'on met fur le compte de Pline ou de Ptolomée, quoiqu'ils n'y ayent jamais fongé. Ce dictionnaire a encore un défaut, qui ne laiffa pas de plaire aux gens qui fe contentent de l'apparence. On y donne pour noms latins une infinité de noms très-modernes avec une terminaifon quelquefois même très-mal latinifée. Par exemple S. George de la Mine, ou El-mina, comme difent les Hollandois, y eft rendu en latin Arx Sancti Georgii de Mina; jamais le mot Mina n'a été dit en latin pour fignifier une Mine. Il falloit dire Ad Mineram, ou plutôt ad Fodinas. On y trouve des villes imaginaires, pour lesquelles il cite des auteurs qui n'en parlerent jamais. Telles font Aba, ville de l'Arabie-Heureufe; Acernum, ville des Picentins; Axiace, ville de la Sarmatie, & Axium, ville de Macédoine, que l'auteur appuye fur l'autorité de Pline, quoiqu'il n'y en ait pas la moindre trace dans cet ancien. 11 n'y a que trop de ces citations impofantes dans tout cet ouvrage, & j'en releve beaucoup dans le mien.

En 1701, M. MATY, miniftre François d'une églife proteftante à Montfort auprès d'Utrecht, publia ce même dictionnaire traduit en françois, mais fans fe rendre esclave de l'original: il diminua le nombre des articles de l'ancienne géographie, qui entre pour peu de chofe dans fon deffein, & le fuivit, tant qu'il put, pour la nouvelle. Cette traduction dont l'auteur mit le nom de M. Baudrand dans le titre, & le fien feulement à la fin de l'épître dédicatoire, a fi bien porté le nom de M. Baudrand, qu'encore à prefent plufieurs libraires

ne la connoiffent & ne la vendent que fous ce nom. Elle a fait une fortune furprenante, & on l'a inférée dans les derniers fupplémens de Moreri, quoique les mêmes articles fe trouvent déjà traités dans les autres volumes, mais tirés d'autres Auteurs. On la revoit presque toute entiere dans le dictionnaire de M. Corneille, & dans le grand dictionnaire univerfel de Trevoux.

M. Baudrand avoit été follicité de faire un dictionnaire François pour la géographie nouvelle en faveur des perfonnes fans lettres, qui ne pouvoient profiter de fon livre latin. Il n'avoit pas connoiffance du livre de M. Maty, dont il ne vit point l'édition, puisqu'il étoit mort l'année 1700, au mois de Novembre. L'abbé Lenglet du Fresnoy parle ainfi du diction naire françois de M. Baudrand dans un catalogue de livres de géographie. * M. Baudrand ayand laiffé cet ouvrage imparfait, fa famille & les libraires l'ont fait revoir, & même corriger en bien des chofes par un moine Bénédictin. Sur cette garantie ayant eu occafion de publier mon fentiment fur ce dictionnaire, je m'expliquai en ces termes: On trouvera peut-être de la témérité à ce que je vais dire; mais je ne l'avance qu'après une mure & longue comparaison des deux ouvrages; le françois de 1705, n'eft pas une traduction, mais une corruption du latin de 1682. Je ne parle point ici par aigreur, perfonne n'a plus de respect que moi pour la congrégation de S. Maur, que je regarde comme un des plus grands ornemens de la France & de l'Eglife. Je ne connois point le Religieux qui a procuré cette édition, & je juis prêt de le louer fur toute autre matiere. Je m'abfliens même de décider files fautes qui fourmillent dans cette édition, font de lui ; je ne le blâme que de les y avoir laiffées. Je fuis bien éloigné de rétracter ce jugement: la feule chofe dont je me crois obligé d'avertir mes lecteurs, c'est que l'on m'a affuré depuis que le P. Bénédictin s'étant rebuté du mauvais état de ce livre, s'en est défifté, & que le libraire lui-même l'a achevé ou fait achever comme il a pu.

Trois ans après, c'est-à-dire en 1708, il parut un nouveau dictionnaire géographique en françois compofé par M. THOMAS CORNEILLE, Connu par les poëlies, & par fon théâtre imprimé conjointement avec celui de Pierre Corneille fon frere, & par d'autres ouvrages de poëfie ou de grammaire, Le plan en eft vaste, intéreffant & digne des plus grandes louanges, fi l'exécution y avoit répondu. Il embraffe la géographie ancienne & la moderne, les moeurs, le commerce, les particularités de chaque lieu, les productions, les animaux finguliers, les defcriptions des villes, &c. Mais les défauts énormes de l'exécution révoltent à chaque page, ceux même qui, comme moi, honorent le plus la mémoire de cet excellent vieillard. La géographie ancienne y eft horriblement défigurée. J'en donne trop d'exemples dans chaque volume pour en devoir rapporter ici. Le gros ouvrage de Davity, augmenté par Ranchin, les tables géographiques que le P. Lubin a compofées pour l'intelligence des vies des hommes illuftres de Plutarque, le dictionnaire cosmogra phique de Juigné, & quelques autres livres françois font presque les feules fources où M. Corneille prend ce qu'il dit de l'ancienne géographie: ce n'est pas qu'il ne cite quelquefois les anciens; mais il ne paroît guères qu'il les ait lus. Il les cite en fecond, ou même en troifiéme, & fe laiffe fouvent égarer par les mauvais guides à qui il s'abandonne trop. Dès qu'il y a une différence dans l'orthographe, il ne reconnoît plus un article qu'il a déjà donné auparavant, & multiplie ainfi les villes & les rivieres. On en voit dans fon livre de doublées, de triplées même, fans qu'il s'apperçoive, ou du moins fans qu'il avertiffe que c'eft le même lieu. Les définitions des termes de l'art lui manquent presque toujours; il n'en explique que les plus communs & les moins ignorés.

En récompenfe il y a une affez grande quantité d'articles très-curieux & fort détaillés, qu'il emprunte des relations de voyageurs eftimés. Et ce qui fait encore le principal mérite de fon dictionnaire, il y a des articles dreffés fur les lieux. Mais je ne faurois le louer de ce que pour ne pas citer M. Baudrand, de qui il emprunte cependant bien des articles, il fe jette fur l'atlas de Blaeu, dont quantité de cartes nomment rarement les lieux par leur vrai & les placent encore moins fouvent dans leur véritable point. Pour abréger un détail qui me meneroit trop loin, je me contente de dire que fon livre ne mérite, ni tout le bien qu'en ont dit des juges peu éclairés ni tout le décri où il eft malheureusement tombé.

L'an 1713, ALPHONSE LAZOR DE VAREA fit imprimer à Padoue un nouveau dictionnaire géographique fous ce titre: Univerfus terrarum Orbis Scriptorum calamo delineatus en deux volumes in-folio. L'auteur ajoute de magnifiques promelles dans fon titre, & n'en tient pas la centiéme partie. Ce n'eft qu'une lifte affez maigre, tirée de MM. Baudrand & Corneille, ornée de quelques mauvais plans très-anciens, & très-différens de l'état préfent des villes dont ils portent le nom : de petites cartes informes, des figures antiques d'hommes & de femmes, peintes, dit-on, par le Titien, & gravées fur le bois fans aucun goût, font disperfées dans ce livre, qui feroit commodément un volume in-4°. fi on en retranchoit les amples catalogues ajoutés à un certain nombre d'articles. Ce font des liftes des livres où l'on a traité ou parlé en paffant de la matiere, ou du lieu dont il est question. Je dis de la matiere; car, par exemple, aux mots IMPERIUM & REGNUM, on voit les titres d'une bibliotheque dont la plus grande partie n'a pas le moindre rapport avec la géographie; par exemple, Jean Baudouin, le prince parfait, Paris 1650, in-4°. Pierre Bertius, deffein du fou Jagement des peuples, ou les vertus royales d'un jeune prince, Paris 1648. in-4°. & une infinité d'autres; qu'ont-ils de commun avec des définitions & des defcriptions géographiques? Ce font, fi je ne me trompe, les dictionnaires géographiques, qui ont eu quelque ré

* Ce catalogue eft ajouté à la Méthode pour étudier la Géographie, tom. 3. p. 386.

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