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l'approche des Espagnols, & depuis on ne s'eft pas emprellé à les rebâtir. Il y a encore préfentement un petit fauxbourg de trente ou quarante inaifons hors la porte de Babafon. Elles fervent d'écuries aux Arabes & aux Maures, qui apportent des provifions fur des chameaux. Le tombeau des bachas eft hors de la porte appellée Babalouette, bâti en rond & vouré en maniere de chapelle. Ceux des bachas Afan, Sala, Sondo, Soliman & Musta pha, s'y font remarquer parmi les autres. Les fépulchres des Turcs moins confiderables, font dans cette même pleine. Chacun a le fien à part, & tous prefque font embellis par un chaperon de pierre. On y voit aufli des oratoires & des cellules pour des Marabous, que les femmes vont vifiter par dévotion tous les vendredis. Du côté de la mer, hors les murailles de la ville, eft un fort grand bâtiment de pierre, appellé Moglie en italien, & Mole en françois, du latin Moles. Il eft fait en demi cercle, & s'étend depuis la porte du Divan jusqu'à la pointe d'une petite ifle, & depuis l'autre pointe de l'isle jusqu'à la ville. L'entrée du port eft entre deux. Hairedin Barberoufle fit bâtir ce mole, auquel il donna fix ou fept cent pas de large, & plus de cent de long, afin que les flots euffent moins de violence, & que les vaiffeaux pusfeut demeurer fürement dans fon enceinte. Avant qu'il fut élevé, le havre d'Alger avoit plutôt l'apparence d'une rade que celle d'un port. Selon Marmol, ce fut le bacha Sala qui le fit bâtir, y faifant fervir les mafures de la ville de Metafuz. Au-deffous du mole, qui s'étend depuis la porte du même nom jusqu'au château, il y a d'un côté un quai de pierre, & de l'autre un rivage de fablons & de rochers. Če mole a pour défense un château de figure pentagone, bâti fur la pointe de l'ifle, & muni de quelques canons. De l'autre côté, à l'entrée du port, font pointés d'autres canons: on les tire la nuit pour diriger les vaiffeaux qui veulent entrer. Le port que forme le mole, peut contenir un grand nombre de vaiffeaux & de galeres, & les corfaires & les marchands y en ont toujours beaucoup.

Il y a fept forts, tant dedans que dehors la place; le premier eft à l'orient, fitué fur le fommet d'une monta gne, qui commande à toute la ville. Charles-Quint en jetta les fondemens en 1540, d'où il s'appelle le château de l'Empereur. On l'a achevé depuis, & l'on y entretient une garnison de cent hommes. Le fecond, eft le nouveau château. On l'appelle auffi la citadelle heptagone, par rapport à la figure. Il est à cent trente pas de la ville, & du château de l'Empereur. Le troiliéme eft l'ancien fort, nommé Alcaffave, bâti fur une hauteur dans l'enceinte de la ville. Le circuit eft fort grand, & fortifié de deux tours, où demeurent des Janillaires qui y font la garde, & annoncent par certain fignal le nombre des vaiffeaux qu'ils apperçoivent en mer. Du côté qui eft entre l'eft & le fud, les murailles de ce fort font partie de celles d'Alger, & il en eft féparé par un mur de l'autre côté. Le quatriéme eft le fort de Babalouette, bâti l'an 1596, fur la pointe d'une roche, proche de la mer. Le cinquiéme fort n'eft qu'un petit boulevard près de la porte du Mole, & de la grande Caflerie, où font pointées cinq piéces de campagne, qui empêchent que l'on n'entre dans le port. Le fixiéme eft le château du Mole, conftruit dans l'ifle où le Mole aboutit. Il est en forme de tour pentagone, & il y a auffi cinq canons pointés. Le feptiéme eft une petite tour ou batterie à l'entrée du port, où quelques Maures font la garde. On compte foixante-fix canons de fonte fur le Mole; mais la plupart ne font pas chargés. On ne les tient là que comme un trophée, & une marque de la victoire que les Algériens remporterent en 1617 fur les habitans de Tunis. Plufieurs boulevards défendent la ville; celui de Babafon, qui eft du côté de la mer vers l'orient; celui des Renégats, qui eft un peu plus avant vers le midi ; les deux d'Alcaffave, l'un fur la pointe orientale de cette fortereffe, l'autre fur l'occidentale; & le boulevard de Babalouette, vers la pointe occidentale de la ville, qui regarde fur la mer. Avec tous ces forts & ces boulevards, Alger eft fort expofé au canon de tous côtés, à l'exception de celui de la mer, à caufe d'un grand nombre de côteaux & de collines.

Les habitans naturels ont le teint à-peu-près blanc: ils font bien faits & robuftes. Le viceroi & les grands laiffent croître leur barbe. Ceux du commun fe la font

rafer auffi bien que les cheveux, & ne laiffent que les mouftaches & un toupet au deffus de la tête, par lequel ils s'imaginent que Mahomet les prendra pour les porter dans le paradis. Leurs alimens font du ris, des couscous & de la chair cuite. Ils ont aufli quelques fruits. Les Maures vivent, les uns de leurs revenus, les autres de leur travail, de leur négoce & de leurs pirateries. Les Janillaires vivent de la guerre, & les Arabes demeurent fous des tentes le long des rivieres, à caufe de la commodité de l'eau, ils ne fubfiftent que de friponeries. Les Grenadins s'adonnent à divers métiers, fur tout aux ou+ vrages en foie. Il y a environ dix-huit mille jardins autour d'Alger. Ce font comme autant de métairies que les Janitaires & les Maures, qui en font propriétaires, louent à des esclaves pour en labourer les terres, & y faire paître les troupeaux. Ces jardins portent de toutes fortes de fruits, & les vignes que les Maures de Grenade y ont plantées, rapportent beaucoup.

Les Chrétiens libres qui fe rencontrent à Alger font habillés à la maniere de leur pays, mais les efclaves portent un bonnet à la matelote & un habit gris. Les genst du commun, parmi les Maures, ont fur leur chemife des caleçons de toile ou de laine, & une robe de laine blanche avec un capuchon par derriere ou un habit qui leur vient jusqu'aux genoux. Il eft ordinairement noir & ils s'en enveloppent comme d'un manteau. En été ils ont deux chemifes larges. Leur turban eft ceint d'une toile claire. Les perfonnes diftinguées parmi les Turcs, font un peu mieux habillées, & portent des robes de foie ou d'autre étoffe à fleurs larges, de beaux turbans, & des bottes à la turque. Les habits des femmes ne différent pas beaucoup de ceux des hommes. Elles portent auffi des robes & des ceintures. Leurs chemifes descendent jusqu'aux talons, & leurs cheveux font bouclés. Elles ont des coliers, des bracelets, des bagues, des pendans d'oreilles de pierres précieufes, & une espéce de cape fur la tête. Quand elles vont par la ville, elles s'y mettent un linge qu'elles agraffent fur leur eftomac; de forte qu'il eft impoffible de les reconnoître que par le moyen de l'esclave qui les accompagne. Quoique la loi de Mahomet permette de prendre autant de femmes qu'on en peut nourrir, les Algériens fe contentent de deux ou trois. Ils fe marient fans avoir vû leur maîtreffe, fur le feul rapport qu'on leur en fait. Lorsque les conventions du mariage font faites, l'amant envoie quelques mêts rares à la maitrelle. Le jour des nôces ils le voient dans un repas qui eft fuivi de danfes. Celle qui doit fe marier eft aflife à terre au milieu d'une troupe de femmes, parée de beaux habits enrichis de pierreries, ayant les mains, les bras, & fouvent le vifage fardés & colorés. Le foir l'époux amene chez lui l'époufe couverte d'un voile, au fon des tambours & des flutes. Ils s'enferment tous deux dans une chambre, & les femmes qui l'ont accompagnée demeurent dehors, en attendant qu'on leur donne les marques ordinaires qui prouvent la vir ginité de la nouvelle mariée, qu'elles portent en triomphe par toute la ville. On fait fervir les malades par des perfonnes de leur sèxe, & lorsqu'ils font à l'extrémité,

on

les tourne du côté du levant, & on invoque continuellement Mahomet, jusqu'à ce qu'ils ayent expiré. Alors on lave le corps avec de l'eau chaude & du favon. On le revêtit d'une chemife, de caleçons blancs, d'un habit de foie & d'un turban. Il eft mis en cet état dans la biere, & porté dans la foffe hors de la ville. Quand le mort eft une perfonne riche, on grave fes titres, fes qualités & des fentences de l'alcoran fur la pierre du tombeau. On ne porte point le deuil, feulement les femmes fe mettent pendant quelques jours un voile fur le vifage. Les hommes ne fe font rafer d'un mois, & on eft trois jours fans allumer du feu dans les maifons. Pendant ce tems, les parens du mort vont visiter fon tombeau, diftribuent des figues & du pain aux pauvres. Ils portent aufli fur le fépulchre de petites pierres à feu qu'on trouve fur le rivage, & prononcent ces paroles en les jettant, Celem Alla, lumiere de Dieu; ce qu'ils accompagnent de pleurs & de lamentations.

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&

L'enterrement des grands ne différe de celui des autres que dans la pompe. On met le corps dans la biere, enveloppé de bandes, de portraits & d'autres ornemens. Des porteurs vêtus magnifiquement la chargent fur leurs épaules. Un marabou va devant, & les domestiques du

défunt fuivent la biere, portant fa lance & fon fabre, après quoi marche un grand nombre de chevaux & de chameaux. La tombe eft de pierre taillée fort proprement, enrichie de ftatues & de creneaux. Entre les tombeaux qui font hors la ville, on prétend y voir celui de la fille du comte Julien, qui fit paffer les Maures en Espagne pour se venger du roi Roderic, qui avoit ofé la violer. Les anciens habitans d'Alger parloient phénicien, & les Romains y avoient apporté le latin; les Arabes y ont enfuite introduit leur langue, & c'eft en arabe ou en turc que fe font tous les écrits publics. Les Maures, originaires du pays, parlent l'ancien moresque; mais à Alger, & presque dans tout le Levant, les Mahometans & les Chrétiens fe fervent d'un certain jargon, compofé d'italien, de françois & d'espagnol, qu'on appelle langue franque, par le moyen de laquelle on entend facilement les trois langues. La plupart des Algériens vont à pied dans les rues, & les feuls Alcaides, les gouverneurs & les perfonnes du premier rang ont droit d'aller à cheval. Les autres vont fur des ânes quand ils ne veulent pas aller à pied, & cette monture eft fur-tout à l'ufage des femmes de condition, qui s'y mettent dans un pavillon quarré. C'est une espéce de corbeille d'ofier, fur laquelle on jette une toile claire, peinte & dorée, au travers de quoi elles peuvent voir fans être vues. Plufieurs font le voyage de la Méque dans ces pavillons, où ils font à couvert de la pouffiére, du vent, de la pluie & du foleil. Deux perfonnes fe peuvent affeoir commodément dans ces corbeilles ; mais il faut y tenir fes jambes en croix, parce qu'elles ne font pas affez longues pour les y avoir pendantes, quoiqu'elles foient affez larges.

Alger eft très-peuplé. Il y a deux mille cinq cens familles maures, originaires du pays, que Barberouffe, bacha d'Alger, exempta de toutes charges, & qui jouiffent encore de ce privilége. Il y en a fix cens de Maures étrangers appellés Cabaylefes, cent des Afuagues, trois mille des Arabes & deux mille des Morifques ou Grenadins, qui ont enrichi la ville par leurs manufactures en foie & en laine. Il y a auffi fix cens familles turques qui s'y font venues habituer fur le bruit de fes richeffes, fix mille de Rénegats, trente- fix d'Alcaïdes, qui font les gouverneurs des provinces, des villes & des fortereffes, trois cents d'Arroiz ou capitaines de mer, cinquante de vieux foldats qui font hors de fervice, & qu'on appelle Spahis, & fix mille de Janiffaires. On y trouve à peuprès quatre-vingt-fix chérifs, qui, comme iffus de Mahomet, portent un turban de foie verte, pour marque de leur extraction, & huit cens pélerins qui font le voyage de la Méque, & que cela fait paffer pour des agi ou des faints. Les corfaires rempliffent Alger d'esclaves chrétiens. Il y a des marchands de diverfes nations, & on dit qu'il s'y en trouve jusqu'à trois mille familles, & deux mille boutiques dans les deux marchés. Le quartier des Juifs, qui occupent cent cinquante maifons, contient environ huit mille perfounes. Du tems de Juba, Alger étoit fort célébre, & la ville capitale de la Mauritanie. Elle perdit infenfiblement de fon luftre, & Conftantine qui en profita devint puiffante fous Caligula. Ce fut enfuite Bugie, & puis Hippone qu'on appelle aujourd'hui Bone. Enfin du tems des Mahometans, Trémecen devint la plus floriffante. Plufieurs fiécles après, Abuferez, roi de Tunis, conquit la province de Bugie, & l'ayant érigée en royaume, il la donna à fon fils Abdala Hufez. Abuferez étant mort, le nouveau roi de Bugie voulant aggrandir les bornes de fon état, força les Algériens à lui payer tribut.

L'an 1510, les Algériens voyant Pierre, comte de Navarre, foumettre les villes d'Oran & de Bugie à la domination Espagnole, tremblerent pour leur liberté. Pour fe mettre à l'abri du danger qui fembloit les mé-nacer, ils implorerent le fecours de Selim Eurimi, prince Arabe, qui habitoit la plaine de Motigia, & le général Espagnol n'ofa les attaquer; mais le roi d'Espagne, impatient des pirateries des Algériens, réfolut de les exterminer. Pour cet effet il envoya contr'eux le même comte de Navarre avec une nombreuse flotte & une armée formidable. A peine le fiége étoit - il formé devant Alger, que fes habitans, du confentement de Selim, demanderent une trève de dix ans, qu'on leur accorda à condition qu'ils n'écumeroient plus la mer.

L'appas du butin les engagea à rompre cette trève; pour fe mettre à couvert de la vengeance des Espagnols, ils firent alliance avec le célébre Barberouffe, qui fe rendit promptement à Alger, fit périr fecrétement Selim, prit le fceptre & força les Algériens à lui obéir. Le fils de Selim alla demander du fecours aux Espagnols qui envoyerent une flotte confidérablé devant Alger; mais la fortune travailloit pour Barberouffe. Un orage furieux brifa les vaiffeaux, fit périr les Espagnols. L'ufurpateur vainquit le roi de Tenez, s'empara de fes états, & bientôt après conquit le Talenfin. Peu de tems après les Espagnols attaquerent Barberouffe, le défirent proche la riviere de Hoexda, & firent proclamer Aruel, roi d'Alger, & de tous les états que Barberouffe avoit conquis. Après la mort d'Aruel, les Algériens proclamerent Chéredin qui, craignant les Chrétiens, envoya des députés à l'empereur Turc pour lui demander fa protection, & lui offrir de ne tenir le royaume d'Alger que comme un fimple bacha fous les ordres de fa hauteffe. Le Turc lui envoya deux mille hommes, & permit à tous fes sujets d'aller fecourir Alger, avec promeffe de leur accorder les mêmes immunités qu'aux janiffaires de Conftantinople. Depuis ce tems le grand feigneur s'en regarde comme fouverain.

Autrefois la bourgeoifie avoit part au gouvernement; mais les officiers de la milice s'en font emparés, & lé dey ou bacha, qui en eft le chef, a peu d'autorité. Il arrive même qu'ils le dépofent lorfqu'ils font mécontens de lui, & on n'ofe les punir, parce qu'on craint qu'ils ne fécouent tout-à-fait le joug. Ainfi c'est la milice qui a tout le pouvoir en main à Alger, & cela pareît par leurs édits & leurs ordonnances, qui portent ce titre : Nous Grands & Petits, Membres de la puiffante & invincible Milice d'Alger, & de tout le royaume, avons conclu & arrêté, &c.

agas

Les officiers des janiffaires, qui compofent le confeil d'état, s'affemblent dans l'Alcaffave le famedi, jour du grand divan. Les trois jours fuivans il s'affemble dans une grande cour qui eft au palais du bacha, lequel ne peut entrer dans le divan, fi le confeil ne le fait appeller par fes chioux ou huiffiers. Les confeillers font rangés en cet ordre. L'aga, qui eft le chef & le préfident, eft au haut bout, & fait les propofitions. Le bacha, s'il eft préfent, dit fimplement fon avis, & n'a pas plus de voix qu'un autre. La feconde place eft pour le fecrétaire du Divan, qui enrégiftre tout ce que l'on y conclut. La troifiéme eft occupée par les vingt-quatre ajabachis, les premiers officiers après l'aga: ils font affis dans une gaferie de la même cour, chacun felon fon rang. La quatriéme eft pour les bouloucbachis, & la cinquième pour les odabachis. Quand on a des affaires importantes traiter, on y appelle auffi les manfoul-agas, ou les qui font hors de charge. Le divan eft ordinairement compofé de fept ou huit cens perfonnes, quelquefois de quinze cens, parce que tous les officiers qui fe trouvent à Alger lorfqu'on le tient s'y rendent. Les odabachis & les bouloucbachis, qui forment la plus grande partie du confeil, demeurent debout au milieu de la baffe cour, chacun à fa place, tenant les mains croifées fur l'eftomach, fans changer de pofture, quelque tems qu'il faffe, fans défaire les mains, à moins d'une néceffité très-preffante, & fans porter d'épée, ni même de couteau, de peur de quelque tumulte. Ceux qui ont des affaires au confeil, fe tiennent devant la porte de la cour, où font poftés plufieurs chiaoux qui leur préfentent du caffé à boire. Toutes les affaires s'y traitent en langue Turque, ce qui oblige les Maures & les Chrétiens à avoir des truchemens pour expliquer en cette langue leurs plaintes & leurs requêtes. Voici de quelle maniere les voix fe recueillent. L'aga, après avoir fait la propofition, fe tourne vers le bacha, s'il a été appellé, puis vers les ving-quatre ajabachis. Enfuite quatre officiers, appellés Bachouldala, répétent la propofition de l'aga à haute voix, mais fans fortir de leur rang. Les officiers fe la redifent les uns aux autres. L'aga forme fa conclufion, felon que le nombre des voix font favorables ou contraires à ce qu'il a propofé. Ainfi la juftice ne peut être que fort mal adminiftrée dans cette affemblée tumultueufe, où les confeillers, qui font la plûpart des artifans, qui ne favent ni lire ni écrire, jugent de tout fouverainement, n'ayant fouvent pour loi que leur

portent une longue robe & un manteau par-dessus, qui leur couvre la moitié du corps.

paffion. Quand les femmes ont des plaintes à porter, elles viennent voilées, & quelquefois plus de cent enfemble, devant la porte du divan, criant de toute leur Les marchands Algériens ne fe fervent presque que force Char Alla, juftice de la part de Dieu. Toutes les de monnoie étrangere, comme font les fultanins d'or de formes qu'ils obfervent, c'eft d'entendre des témoins, Turquie, qui valent un ducat; les moticals de Fez, qui après quoi ils jugent. Quand on écrit les fentences, ce valent vingt fols de Hollande; les réales d'Espagne, les qu'on fait très-rarement, on ne les figne point, on les écus de France & les ducats de Hongrie. La monnoie marque feulement du fceau du vice-roi ou du cadis. On que l'on bat dans le pays eft de trois fortes, qui font les peut appeller du cadis, du bacha même & de fes offi- burbas, qui portent des deux côtés les armes du viceciers, à l'aga des janiffaires, & au divan, qui eft la cour roi, & dont fix faifoient autrefois un aspre : ils n'en fouveraine. Les femmes surprises en adultère font atta- font préfentement que la moitié d'un. L'aspre est une chées à une corde, qu'on tient par le bout avec un bâ- petite monnoie d'argent quarrée, & marquée de lettres ton, & on les laiffe dans l'eau jusqu'à ce qu'elles foient arabes. Quinze aspres font une réale d'Espagne, & il en étouffées. Il arrive peu fouvent qu'on puniffe les Turcs faut vingt-quatre pour faire un doubla. C'est une autre de mort, fi ce n'eft pour fédition ou pour révolte : on on espéce de monnoie d'argent, valant un peu plus d'un les étrangle, ou bien on les pend à un crochet. S'ils font écu. La monnoie d'or du pays fe bat principalement à quelque faute plus légere, on retient leurs gages, & Trémecen : c'eft delà que viennent les rubies, qui valorsqu'ils font officiers, on les remet au rang de fimples lent trente-cinq aspres; les médians, qui en valent cinjanillaires; enforte qu'il faut qu'ils montent de nouveau quante, & les dians ou zians, qui en valent cent. Ces d'office en office. On les étend quelquefois par terre, & trois piéces portent le nom du vice-roi, & font marquées on leur donne deux ou trois cens coups fur le ventre, de quelques lettres maures; elles font auffi de mife dans fur l'échine, fur les reins, & fous la plante des pieds. les royaumes de Couco & de Labez, quoiqu'ils ayent Quoique les Juifs ayent leurs magiftrats particuliers, leur monnoie particuliere. Les zians font l'ancienne qui jugent felon leur loi, le bacha, qui veut avoir de monnoie des rois de Télenfin ; c'est ce qui fait qu'il n'y l'argent, ne laiffe pas de condanmner à de fort groffes a que cette province qui ait le droit de la battre. Les amendes ceux d'entr'eux qui tombent dans quelque fau- Juifs ont l'intendance de la monnoie à Alger, & payent te. Les Chrétiens libres & de même nation font jugés pour cela une fomme d'argent au bacha. par leur conful lorsqu'ils ont entr'eux quelque différend. S'ils ont quelque chofe à démêler avec les Turcs & les Maures, ce font les commis de la douane, qui, avec le conful, leur rendent justice. On obferve les mêmes formalités & le même ordre entre les officiers dans les gouvernemens particuliers qui dépendent du royaume d'Alger. Il y a un gouverneur qui représente le bacha; un aga qui eft foumis à celui d'Alger, & un juge inférieur. Dans les adouars ou tentes des Arabes, le che que, qui en eft le chef, eft comme le Lieutenant de l'Aga; & dans les navires des corfaires, qui font comme des républiques à part, le capitaine, qu'ils nomment Arraiz, y fait le bacha, & choifit des confeillers entre les janiffaires ou les plus vieux foldats.

Les Mahométans d'Alger ont la même religion que les Turcs, mais ils font fujets à des fuperftitions trèsridicules. Ils croyent qu'en jeûnant fept ou huit mois on peut être affuré de fon falut; que les marabous les plus célébres font infpirés par un démon; que les foux & les fots font des faints & des élus de Dieu; que les péchés contre nature font des vertus ; que c'eft un honneur pour leurs femmes que d'être violées par des marabous; qu'en nourriffant des bêtes, & fe lavant dans la mer, on efface fes péchés; que c'en eft un de laiffer tomber de fon eau fur fes habits, de jetter du papier à terre, de porter l'alcoran fous la ceinture, de le laiffer toucher à quelqu'un du menu peuple, d'éternuer, de roter, de boire dans une bouteille à cou étroit, enforte qu'elle faffe le glou glou, de fermer les chambres la nuit, de battre du pied en jouant à la paume, d'écrire avec une plume, & non avec un rofeau, de manger des limaçons, parce qu'ils les tiennent faints, de garder des livres imprimés, des ftatues & des images d'hommes ou de bêtes, de fe fervir de cloches., de laiffer entrer des femmes & des Chrétiens dans leurs mosquées, d'échanger un Turc contre un Chrétien prifonnier, de toucher de l'argent, de fe mettre en défense, ou d'étancher le fang d'une plaie avant que la prière Sala foit achevée. Ils ne châtient leurs enfans qu'en leur donnant des coups de verges fous les plantes des pieds; les châtier autrement leur femble un péché. Ils s'imaginent que la nuit du premier jour qu'ils célébrent leur pâque, toutes les eaux fe repofent pendant demi-heure, & que ceux qui abordent durant ce repos, peuvent s'attendre à fe voir combler de toutes les bénédictions du ciel. Ils ont un fort grand respect pour leurs marabous, & lorfqu'on eft avec quelqu'un d'eux dans un voyage, on peut traverfer avec toute fûreté les bois les plus dangereux. Ils racontent mille fables de faint Jean & des autres apôtres, qu'ils ne laiffent pas de tenir pour faints. Ils font perfuadés qu'il eft deshonnête de fe mettre en chemin, ou d'aller habiter une nouvelle maison, fans avoir tué un mouton auparavant. Leurs marabous ne fe rafent jamais ni la tête ni la barbe, & font habillés modeftement: ils

LA BAYE D'ALGER eft fort grande, elle eft entre la pointe de Matifou & celle du cap Cascine. Entre les deux il y a un grand enfoncement d'environ cinq à fix milles : ce font toutes terres baffes, proche la mer, bordées de plages de fables, où coulent deux petites rivières, mais dans les terres il y a plufieurs montagnes. Le cap Matifou eft la pointe de l'eft de la baye d'Alger : il eft bas, & il y a auprès de ce cap plufieurs rochers hors de l'eau & fous l'eau, de forte qu'il ne faut pas s'en approcher de trop près, à caufe de ces roches. On y mouille du côté de l'oueft avec les galeres par 7, 8 ou 10 braffes d'eau, fond d'herbe vafeux, à portée d'un canon de terre. On y eft à couvert de nord-eft & nordnord-eft, mais on y eft tout à découvert de l'oueft & du nord-oueft, qui y caufe une très-groffe mer. Au bout de cette pointe, vers le nord oueft, environ deux milles, il y a un banc de roches fous l'eau, à quoi il faut avoir égard. Lorsqu'on vient du côté de l'eft, & qu'on veut aller mouiller, il faut alors faire un grand tour. Il y a un autre banc de roches fort dangereux au nord-nordoueft de la pointe de Matifou, environ deux milles; & à l'est-nord-est de la même pointe, environ quatre à cinq milles, il y a deux petites ifles, dont l'une eft fort haute: elles font éloignées de la côte environ un mille. On peut mouiller par toute la baie d'Alger, mais le meilleur eft vers l'eft-fud-eft de la ville, à une petite demilieue, par dix huit & vingt braffes d'eau, fond de vase, & un peu plus au large il y a vingt cinq à trente braffes d'eau. On y eft à découvert de tous les vents du large. Le nord-eft-nord & nord-ouest font les traverfiers: ils y caufent une groffe mer. La latitude eft de 36 d. 5o & la variation des à 6 d. nord-oueft. Portulan de la méditerrannée, p. 143.

ALGEZIR. Ce mot, dans la langue arabesque, fignifie une ISLE, & eft commun à plufieurs lieux ifolés, qui ont reçu leur nom des Arabes ou des Maures. Ce mot varie pour l'orthographe, & eft écrit par les uns ALGIEZIRA, par d'autres ALZEZIRA, & par d'autres ALGEZEIRA. Il faut remarquer de plus, avec les traducteurs d'Al Edrifi, que les Arabes n'ont point de mot pour fignifier une presqu'ifle, c'eft pourquoi ils donnent le nom d'ifle à des lieux qui ne font pas environnés d'eaux par-tout.

1. ALGEZIRA. Le géographe Al Edrifi, géog. Nub. 6, pars clim. 4, nomme ainfi la Méfopotamie, ou ce qui eft la même chofe, le Diarbeck. Les Arabes lui ont donné ce nom parce que ce pays eft comme une ifle enfermée entre les fleuves le Tigre & l'Euphrate, 2. ALGEZIRA. Voyez ALGER.

3. ALGEZIRA, ville d'Espagne, dans l'Andaloufie, avec un port de mer fur la côte du détroit de Gibraltar. Quoiqu'il y ait de grandes ruines, on n'en fçauroit inférer que ce foient les reftes d'une ville romaine; car on n'y trouve ni marbres, ni inscriptions, ni médailles,

comme le remarque Conduitt, de la fociété royale de Londres, dans un discours fur la fituation de l'ancienne Cartéia, dont l'extrait eft inféré dans les mémoires littéraires de la Grande - Bretagne, t. 1, part. 1, p. 107. Selon Baudrand, édit. 1705, les Maures en firent une fort bonne place, qu'ils garderent jusqu'en 1344, qu'elle leur fut prife après un long fiége, durant lequel elle fut fi maltraitée, qu'elle ne s'en eft pû remettre. Outre que ne s'en eft pû remettre. Outre que fon port eft gâté, & que Gibraltar, qui n'en eft qu'à deux petites lieues, s'eft accrû de fes ruines: on les voit encore à l'embouchure du ruiffeau de Palmones, & à quatre lieues au levant de Tariffe. On l'a auffi nommée quelquefois ALGEZIRE D'ALHADRA à caufe de deux petites ifles ou rochers qui font devant fon port. Ce port eft dans la partie occidentale de la baye de Gibraltar; delà vient qu'on l'appelle le plus fouvent le VIEUX GIBRALTAR : c'est le nom que lui donne de l'Ifle dans fa carte d'Espagne. Le portulan de la Mer Méditerrannée, F. 9, en parle ainfi : environ quatre à cinq milles vers le nord-quart-de-nord-eft de la pointe du cap Carnero il y a une petite ifle & entre cette distance il y a deux tours de garde fur le bord de la mer. Un peu en-dedans de cette ifle eft le village du vieux Gibraltar, fitué fur le bord de la mer, devant lequel on peut mouiller avec toutes fortes de bâtimens; mais il ne faut pas s'approcher de cette côte du côté de l'oueft, parce que le fond n'y eft pas net. Il s'y trouve des roches fous l'eau qui gâtent les cables; & fi on s'en éloigne, on y trouve une grande profondeur. Long. 12, 25, latit. 36.

4. ALGEZIRA, ville d'Espagne, dans le royaume de Valence, felon de Vayrac, Etat de l'Espagne, t. 1, p. 245, qui ne dit rien de plus précis fur fa fituation. L'atlas de Jaillot la nomme ALCIRA; celui de de l'Ifle ALCYRA; ceux de Blaeu & de Sanfon ALZIRA. Son nom lui vient de ce qu'elle eft dans une petite ifle de la riviere de Xucar, au-deffus de fon confluent avec la riviere dont la fource eft auprès de Siéte-Aguas. Long. 16, 50, latit. 39,8.

ALGEZUR, ville de Portugal, dans l'Algarve, fur la côte de l'océan occidental, au couchant & à fept mille cinq cens pas géométriques de Monchique. Les cartes de Jaillot & de Homan la nomment ALJECUR, celles de Sanfon & de de l'Ifle la négligent. Alfonfe III, roi de Portugal, la prit fur les Maures, qu'il chaffa de l'Algarve. Maugin, abregé de l'hift. de Portugal, pag. 92. Long. 8, 42, latit. 37, I 2.

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ALGHER, EL ALGER, felon les Espagnols; ALGIERI ou ALGERI, felon les Italiens : quelques-uns écrivent ALGUER, en latin Algara, Algaria, ville de l'ifle de Sardaigne, à l'occident de la province de Lugodori, avec un évêché, fuffragant de l'archevêché de Saffari. Elle eft fur une montagne, forte & affez peuplée; la fituation en eft agréable, & l'air fort fain: c'eft pour cela, dit le P. Briet, parall. 2 part. l. 6, p. 114, que les Catalans en faifoient beaucoup de cas. On a transféré à Algeri l'évêché d'Othane, ville ruinée. Alger est une nouvelle ville, ajoute ce même Pere, qui avoit dit auparavant qu'elle eft la même que CORAX, dont le port étoit nommé Carcacodes. Ptolomée, l. 3, c. 3, nɔmme un port Coracodes, dont la position ne s'éloigne guères de celle d'Algher; mais il y a de la contradiction à dire qu'une ville eft nouvelle, & qu'elle a pourtant été connue des anciens. Selon Corneille, dict. & Davity, le port de cette ville eft grand & long de fix milles, où les Catalans & les Génois abordent fouvent. Ce port eft nommé le Port du Coude. Le nom de Kopaxons an fignifie un rivage rempli de corbeaux. Algher eft marqué fur les cartes de van Keulen à 26 d. 36 de longit. & à 40 d. 21' de latitude. De l'Ifle le fait plus occidental d'environ trente-deux minutes, & ne lui donne que 40 deg. & environ 16' de latitude. Cette côte, felon Tawernier, voy. des Indes, eft renommée à caufe d'une pêcherie de corail, la plus eftimée de toutes celles qui fe trouvent dans la Mer Méditerrannée.

ALGIAR, felon Baudrand, édit. 1705, ville de l'Arabie Pétrée, dans la province de Hagias, & à l'embouchure de la riviere de Lankik dans la Mer Rouge, à 90 milles de Médine Tanalbi au couchant, felon Gollius, Not. in Alfargan, cité par Baudrand, qui donne pour fynonimes les noms d'Algiar & de Zaaram. Abulfeda, dans fa description de l'Arabie, dit qu'Adgiar eft un lieu

célébre, que c'eft le port de Medine du Prophéte, à la distance de trois ftations, (c'eft-à-dire de trois journées, dont chacune eft d'environ de 30 milles arabiques, de ces milles de 96000 doigt ou pouces,) & fuivant Ibn Haucal, cité par le même Abulfeda, depuis le rivage de Giohfah jusqu'à Algiar il y a trois stations, & d'Algiar à Ailah on compte vingt ftations. Il faut remarquer que Baudrand nomme mal Medine Talnabi, il faut dire Medine Al-Nabi, c'eft-à-dire la ville du Prophéte. La même faute fe trouve dans les atlas de Blaeu & de Witt: le premier écrit, comme Baudrand; le fecond joint le T fuperflu au nom Médina. L'atlas de Sanfon porte comme il doit y avoir. De l'Ile néglige ce lieu. Ni Algiar ni Médine ne font point dans l'Arabie Pétrée, mais dans l'Arabie Heureufe, dans les états du Chérif de la Méque, quoique de l'Ifle diftingue ces états de l'Arabie Heureuse, nom qu'il réserve à l'Yemen propre.

ALGIDUM, ancienne ville d'Italie, dans le Latium, au voifinage de Tusculum, & à 16 mille pas de Rome. Selon Tite-Live, L. 3, c. 50, elle n'étoit pas loin de la montagne appellée Vecilius mons.

ALGOIRE, bourg & château d'Espagne, en Catalogne. Il y a un fort beau couvent de filles fur une hauteur. *Baud.

ALGONKINS ou

ALGONQUINS. Les anciennes rélations écrivent Algoumequins. C'eft une nation fauvage de la nouvelle France, autrefois très-nombreufe, & aujourd'hui ne faifant presque plus un corps de nation. On les diftinguoit en Algonquins fupérieurs & Algonquins inférieurs. Les premiers étoient ceux qu'on trouvoit en remontant le fleuve S. Laurent au - deffus de Québec, & les autres comprenoient tous les fauvages qui étoient au-deffous de cette capitale. Parmi les Algonquins fupérieurs les plus connus font les Nipiflings & les Outaouais, & parmi les inférieurs c'étoit les Montagnais. Les Nipiflings qui font les vrais Algonquins, & parlent la langue algonquine dans toute fa pureté, avoient autrefois un grand nombre de villages autour du lac Nipiffing, dont ils avoient pris le nom. Du côté de Québec ils n'étoient connus que fous le nom d'Algonquins, & ils parloient auffi le vrai algonquin qui eft une langue mere, laquelle s'étend depuis le golfe de S. Laurent, la côte méridionale de la Nouvelle France, l'Acadie, l'Ifle Royale fort loin au nord, à l'oueft & au fud-oueft. Les fauvages de toutes ces contrées parlent des dialectes algonquines.

Les Algonquins ont été longtems les plus puiffans, & une des plus braves nations de l'Amérique feptentrionale; mais s'étant brouillés avec les Iroquois, ceux-ci prirent une fi grande fupériorité fur eux qu'ils les ont presqu'entierement détruits; à quoi a contribué beaucoup leur vie errante, & le peu d'ufage qu'ils avoient de cultiver la terre.

Journal d'un voyage fait dans l'Amérique feptentr. ALGOW, (l') pays d'Allemagne, dans la Suabe, dont elle fait une partie fort confidérable : fes bornes font au feptentrion. le Danube; au levant, le Leck; au couchant, le Hégow & le lac de Conftance; & au midi le comté de Tirol. Il renferme le marquifat de Burgaw; les comtés de Brégentz & de Montfort; les terres de l'évêque d'Ausbourg, de l'Abbé de Kempten, des comtes Foueres, (Fuggers) de Waldbourg, de Konigseck & de Mindelheim, avec les villes d'Ausbourg, de Kempten, de Memmingue, d'Isne, de Lindaw, de Biberac & de Wangen. Ce pays eft omis dans la plupart des cartes récentes; mais fur la carte de Suabe, par de l'Ifle, il eft très-bien nommé l'ALGOW ou l'ALMANGOW. C'eft l'ancienne demeure des Alemanni, dont j'ai fait un article particulier, & qui étoit un peuple différent de celui qui en a pris le nom. Algow femble abregé d'Almangow, qui fignifie pays des Almans ou Alemands. * Baudrand.

ALGUCHET ou ALGUÉCHET, lieu d'Afrique, dans le défert de Barca, fous la domination du Turc, mais de peu de conféquence: on croit communément que c'eft le lieu que les anciens nommoient la Grande Oafis. Voyez au mot OASIS. Ce lieu eft marqué dans la carte d'Afrique, dreffée par le Pere Coronelli, corrigée & augmentée par le fieur de Tillemont. Celles de de l'Ifle le négligent. Corneille, dict. fur l'autorité de la Croix, Hiftoire d'Afrique, t. 2, fait d'Alguechet une province

de

de la Lybie en Afrique. Elle eft, difent-ils, à quarante lieues de l'Egypte, au midi de Sertz. C'eft une grande contrée de palmiers où il y a trois villes & plufieurs villages. Les habitans font Áfricains noirs, vilains & avares quoique riches. Ils ont un commandant à qui ils obéillent comme à un roi. Ils ne laillent pas de dépendre des Arabes qui font maîtres de la campagne, & fi puiffans, qu'ils peuvent faire une armée de trente mille hommes. Corneille ajoute: plufieurs croyent que ce pays appellé par les Latins Alguechetum & Aiguchetum eft celui que les anciens ont nommé Oafis magna. Oafis étoit le nom de deux villes que l'on diftinguoit par les furnoms de grande & de petite. Perfonne n'avoit dit, avant Corneille, qu'Oafis für le nom d'une province; mais le peuple qui habitoit autour de la grande Oafis étoit nommé les Oafites. Mary, dont il a emprunté cette idée, ne dit pas ce pays, mais ce lieu; ce qui doit s'entendre d'une ville ou d'un bourg dont les environs portent le nom. Ce dernier auteur dit que Simler place Oafis magna à Gadamez (Gadamis) ville & défert du Bilédégurid. Corneille femble dire que Simler place Alguechet dans ce défert, ce qui eft très-différent.

ALGUEL, ville d'Afrique, dans la province de Héa, au royaume de Maroc : elle eft fermée de murailles, & a été bâtie par les Africains, de la tribu de Muçamoda, fur une montagne d'accès difficile, & environnée d'autres qui le font encore plus. Au pied paffent deux petits ruiffeaux qui viennent de ces montagnes; & aux terres d'alentour il y a des jardinages où font des treilles, des figuiers & des noyers. Cette ville habitée de laboureurs & autres gens de campagne qui nourriffent une infinité de chèvres, appartenoit à un maure nommé Cidi Bugima, de la tribu de Muçamoda, vaffal du roi de Portugal & ennemi des Chérifs. Ceux-ci ayant représenté aux habitans le tort qu'ils avoient de reconnoître pour feigneur un homme qui protégeoit les Chrétiens contre les Mahométans, firent fi bien qu'ils leur livrerent la ville ainfi ces Chérifs y établirent leur demeure, tenant leurs gens fur la frontiere pour réfifter aux Chrétiens qui, entr'autres places voifines, poffédoient Safi. Les Chrétiens mal fecondés par leurs alliés, firent des efforts inutiles pour la reprendre. * Marmol. t. 2, l. 3, 1.

c. 5.

1. ALGUER, ville de Sardaigne. Voyez ALGHER. 2. ALGUER, ville d'Afrique. Voyez ALGER. ALHALLOW, petite ifle au nord de l'Ecoffe: el eft une des Orcades, & fituée au feptentrion occidental de Mainland, entre cette ifle & celle de Raus. Une description des Orcades inférée dans l'atlas de Blaeu, la nomme ainfi en marge, & porte Enhailow dans le texte: on y ajoute qu'elle eft petite & fituée dans une mer étroite, mais furieufe; qu'elle eft fameufe pour la pêche, à caufe de la rapidité des courans qui la baignent de côté & d'autre. * Blaeu, Atlas.

1. ALHAMA, ville d'Espagne, à 7 lieues de Grenade,au royaume, & au fud-oueft à la fource du Rio-Frio: elie eft jolie & médiocrement grande. Quelques-uns croyent qu'elle a été bâtie par les Maures; d'autres prétendent qu'elle a exifté longtems avant que ces barbare inondallent l'Espagne, & qu'elle foit l'ancienne Artigis, furnommée Julia. Quoiqu'il en foit, elle eft fituée dans une vallée étroite, environnée de montagnes fort hautes & extrêmement escarpées. Le terrein y eft très - fertile en toutes les chofes qui fervent aux befoins & aux délices de la vie. Mais rien ne la rend fi célébre que fes bains, les plus beaux & les mieux entretenus qui fe voyent en Espagne. * Vayrac, état de l'Espagne, t. 1, p. 194. Long. 13, 38, latit. 36, 40.

LES BAINS D'ALHAMA, felon Vayrac, font un peu au-deffous de la ville. Ce font plufieurs fources qui jettent une eau fi claire & fi pure, qu'on verroit un fétu fur le gravier; elle eft d'une chaleur fi agréable, qui vient de la nature feule, & fi tempérée qu'on s'y baigne délicieufement. Elle n'a point de mauvais goût, & on la boit fans peine. De quelque maniere qu'on l'emploie, foit en la buvant, foit en s'y baignant, elle fait beaucoup de bien au corps, fortifie les nerfs foulés, & fert à la guérifon de diverfes maladies. On prend ces bains au printems & dans l'automne. Les rois d'Espagne y ont fait faire un vafte bâtiment, où l'on fe baigne dans des bains de pierre de taille dispofés par de

grés, pour pouvoir, plus ou moins, fe plonger dans l'eau, comme on le juge à propos. Lorsque la faifon du bain eft venue, on y voit arriver de toutes parts des gens, dont les uns vont chercher la fanté, les autres n'y vont que pour s'y divertir, & pour avoir le plaifir de fe baigner dans cette eau tempérée, qui ne fait jamais de mal. Un peu au deffus de ces bains paroiffent des rochers effroyables, entre lesquels le Rio-Frilo coule à grand bruit, formant plufieurs cascades naturelles. Son eau exceflivement froide paffe à côté des bains, fe mêle avec leurs eaux, & les entraine dans la mer. Le journal d'un voyage d'Espagne, cité par Corneille, porte que c'eft la premiere ville que prirent Ferdinand & Ifabelle; qu'elle eft fituée fur une croupe de rocher, autour duquel roule, entre des précipices, une petite riviere ou un torrent nommé Motril. Au haut il y a beaucoup d'eau que les Maures avoient conduite au château par un acquéduc, qui eft demeuré en fon entier, & qui fert encore préfentement à conduire l'eau dans la ville. Voici comment cet auteur parle des bains, à un quart de lieue deli vers le chemin de Grenade, on trouve la fontaine des bains chauds. Ce font trois grandes volites toutes pleines d'une eau fort bouillante; la fource de ces bains eft dans la troifiéme voûte, & l'on ne s'y baigne point à caufe que l'eau y eft trop chaude. Il y en a un peu plus haut que la ceinture.

2. ALHAMA, bourg d'Espagne, dans l'Andaloufie, fur les frontieres de l'Eltramadure & de la Caftille, au midi & affez près de Sierra Morena, au nord, & à neuf lieues de Cordoue, felon Baudrand. Quelques géographes prennent cette ALHAMA pour l'ancienne PHORNAcis, que d'autres placent à Hornacos, bourg de l'Estramadure fur la riviere d'Almonte, à fix lieues au-deffous de Truxillo. Long. 13, latit. 37, 52.

3. ALHAMA, felon Baudrand, village d'Espagne en Aragon, dans le territoire de Calatajud, fur la riviere de Xalon, à trois lieues au-deffus de la ville de Calatajud. Il eft connu par fes eaux minérales & par fes bains que l'on nomme en latin Aque Bilbilitanorum.

1. ALHAMBRA, felon Baudrand, nom particulier d'un des quartiers de la ville de Grenade, dans le royaume d'Espagne. Voyez GRENADE.

2. ALHAMBRA, bourg d'Espagne, dans la nouvelle Caftille. Boudrand dit que c'eft un château de la nouvelle Caftille, dans le quartier dit le Camp de Montiel, au pied des monts & fur la petite riviere de Roidera. Et il cite Ximene pour garant. De l'Ifle, dans fon atlas, le marque comme un village à l'occident & affez éloignée de cette riviere. Baudrand lui donne pour nom latin Flavium Laminitanum.

AL-HILET, Sin, défert de l'Arabie Pétrée, vers le mont Sinaï. Voyez SIN.

ALIACMON, felon de l'Ifle, atlas, ancien nom d'une riviere de la Macédoine, dont la fource eft au pied des montagnes nommées Cambuvii Montes par les anciens à l'extrêmité orientale de la contrée des Péneftes. Delà prenant fon cours vers l'orient, elle arrofoit les pays des Lynceftes, des Elymiotes, paffoit auprès de la capitale de ces derniers, d'où, entrant dans l'Emathie qu'elle traversoit aufli-bien que la Piérie, elle avoit fon embouchure dans le golfe Therméen, entre Pydna & Dium. On la nomme aujourd'hui PLATAMONA, & non pas Plata nova, comme écrit Corneille. Sophien la nomine Pelecas.

ALIADORA. Voyez ALIOLA.

ALIANA, ALIANORUM CIVITAS, ALIONA ALIONORUM CIVITAS. On trouve aufli fur une ancienne médaille AAIHNON, Dans le fixiéme acte du concile de Chalcédoine, il est fait mention de Cajus, évêque, Alianorum, qu'un ancien manuscrit latin traduit par Alion. On trouve auffi Axe dans la notice de Hiérocles, p. 27, felon la remarque de Holftenius, fur la géographie facrée du Pere Charles de Saint-Paul, p. 231, & Glocus évêque Alianorum, fouscrivit au Ve concile général de Conftantinople. Ce fiége étoit dans la Phrygie Pacatienne, fous la métropole de Laodicée.

ALIANUS, felon Ortel. Thef. ancien château de la Ligurie, aux environs de la ville de Gênes, comme il paroît par une ancienne inscription fur cuivre, trouvée en cet endroit; quelques géographes croyent que c'est à préfent FIACCONE, bourg de l'état de Gênes. * Baudr.

Tome I. X

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