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a une petite tour de garde & quelques magasins de pêcheurs fur le bord de la mer: ce mouillage n'est propre que lorsqu'on va du côté de l'ouest; on y est à couvert, par la pointe de Bégu, des vents, depuis le sud-fud-est jusqu'à l'ouest.

TOURMANSINE, bourg de France, dans l'Anjou, élection de Montreuil-Bellay.

TOURMENTE, riviere de France, dans le Querci, Elle est formée de trois gros ruisseaux, dont deux viennent du côté de la ville de Souillac, & l'autre du Limoufin. Elle va se perdre dans la Dordogne à Floriac.* Coulon, Rivieres de France, p. 532.

TOURMENTIN. Voyez au mot Car, l'article Car

TOURMENTIN.

TOURNANS ou TOURNAN, gros bourg de France, dans la Brie, fur un côteau, à trois lieues de Brie-ComteRobert, à quatre de Rosoy & à huit de Paris, avec une tour, dite DE GANE, qui étoit anciennement destinée pour donner les fignaux. L'église paroissiale porte porte le titre de faint Denys. On fait un commerce de bled dans ce bourg, & tous les lundis on y tient un gros marché. André du Chêne, qui écrit TOURNAN OU TOURNEM, dit que c'est une prévôté & un châtellenie, qui a procureur du roi & autres officiers, pour l'administration de la justice en premier reffort. Près de Tournans est un beau chateau appellé HARMENVILLIERS. Ce château appartient au marquis de Beringhem, seigneur de Tournans. Il est accompagné d'un grand parc fermé de murailles, & dans l'enceinte du château, on voit un canal fort long formé d'eau de source. Corn. Dict. Mémoires dressés fur les lieux

en 1707.

TOURNAY, ville des Pays-Bas sur l'Escaut, qui la coupe en deux. C'est la capitale du Tournesis : elle est située à cinq lieues de Lille, & à sept de Douay & de Mons. Tournay, en latin Turnacum, ne se trouve point marquée dans les plus anciens auteurs, comme César, Pline ou Ptolomée, ni dans les historiens qui ont écrit avant Constantin & ses enfans. Saint Jérôme néanmoins, qui a vécu du tems de Constantius, fils de Constantin, antin, & des empereurs ses successeurs, jusqu'au regne d'Honorius, marque Tournay comme une des principales villes des Gaules, ravagée par les Barbares au commencement du cinquiéme siècle. Il en est fait mention aufli dans l'itinéraire d'Antonin & dans la carte de Peutinger, dont les auteurs ont vécu du tems de saint Jérôme. Tournay fut prise, sur les Romains, par Clodion, roi des François. Son petit-fils Childéric y demeuroit, y mourut & y fut enterré, Son tombeau ayant été trouvé au siécle paflé dans le fauxboug de cette ville, lorsque l'archiduc Léopold d'Autriche étoit gouverneur des Pays-Bas, ce prince emporta, en Allemagne, le sceau de ce roi, & les autres choses qu'on avoit trouvées dans son tombeau; mais depuis elles furent envoyées à Louis XIV, qui le fit mettre dans la bibliotheque royale de Paris. Saint Ouen nous apprend, dans la vie de saint Eloi, que Tournay a été autrefois la capitale des rois de France: Quondam regalis extitit civitas. Les évêques de Tournay & de Noyon étoient seigneurs -de la ville, sous les premiers rois Capétiens, & ils avoient au-dessous d'eux des avoués & des châtelains qui étoient leurs vassaux. Les habitans jouissoient de fort grands priviléges, & vivoient dans une entiere liberté, ne s'étant jamais soumis aux comtes de Flandre, & reconnoiffant toujours la fouveraineté des rois de France. Ils se soumirent entierement à Philippe Auguste l'an 1187, & depuis ce tems, les évêques ne purent recouvrer leur autorité temporelle. Ils avoient néanmoins la haute - justice de Tournay & du Tournesis, qu'ils conferverent jusqu'en 1320, que Philippe le Long acquit, de Gui d'Auvergne, évêque de Tournay, les droits de justice, avec les fiefs qui appartenoient à ce prélat & à son église, le roi ayant donné en échange, à l'évêque, huit villages dans la châtellenie de Lille. Lorsque Charles VII fut contraint de céder tant de places, en Picardie & ailleurs, à Philippe, duc de Bourgogne, par le traité d'Arras, ce roi se réserva, & à la couronne, la ville de Tournay, dont les habitans se maintinrent en liberté sous la souveraineté de la couronne de France. Aussi Charles VII avoit folemnellement uni Tournay & le Tournesis à perpétuité à sa couronne, par ses lettres patentes données au commencement de fon regne en 1422, & confirmées par d'autres

lettres dans les années 1426 & 1436. Louis XI, après la mort de Charles, duc de Bourgogne, se rendit maître absolu de Tournay, & y mit garnison en 1477; & depuis ce tems, les habitans obéirent au roi comme fes autres sujets jusqu'à l'an 1513 que la ville fut prise sur Louis XII par Henri VIII, roi d'Angleterre. Les Anglois rendirent la ville aux François en 1517; mais quatre ans après, la guerre ayant été déclarée entre l'empereur Charles V & François I, la ville fut affiégée & prise par l'armée impériale. L'empereur voulut que le Tournefis fit une province séparée de la Flandre & du Hainaut; & enfuite, François I ayant été fait prifonnier à la bataille de Pavie, il fut contraint, par le traité de Madrid, de céder, en 1525 & 1526, Tournay, avec ses dépendances & fes annexes, à l'empereur & à ses héritiers fucceffeurs en toute fouveraineté; ce qui fut confirmé par le traité de Cambrai en 1529, par celui de Crepi en Laonois en 1544, & par celui de Cateau Cambresis en 1559. Louis XIV affiégea & prit cette ville en 1667, & elle lui fut cédée l'année suivante, 1668, au traité d'Aix-la-Chapelle; il augmenta les fortifications de la ville, & y fit bâtir une très forte citadelle. L'une & l'autre furent alliégées & prises, en 1709, par l'armée des Alliés. Louis XIV céda ensuite ses droits fur cette ville à la maison d'Autriche, par les traités d'Utrecht, de Radstad & de Bade. Les Etats Généraux ont néanmoins la garde de la ville & de la citadelle, par le traité de la Barriere, conclu en 1715 avec l'empereur Charles VI. J'ai dit que l'Escaut coupe Tournay en deux parties, dont l'une s'appelle la Vieille Ville, & l'autre la Neuve. La vieille est à la gauche de la riviere, du côté de la Flandre, & la neuve est à la droite. Celle-ci est dans le Hainaut, avec sept villages qui en dépendent, & qui appartiennent, depuis plusieurs fiécles, au Tournefis; mais pour le spirituel, cette partie de la ville de Tournay, avec les villages d'au-delà de l'Escaut, font jusqu'à présent du diocèle de Cambrai. Toute la ville est entourée d'une ancienne muraille, qui fut élevée en 1297, & fur laquelle il y a cinquantecinq tours rondes. Louis XIV a fait construire, fur cette enceinte, un rempart, garni d'un bon & fuffisant parapet. Cette enceinte est défendue par neuf bastions détachés, & par un ouvrage à cornes, avec un bon chemin-couvert, le tout revêtu de maçonnerie. C'est ce qui compose la moitié des fortifications de la ville au nord-est. La plupart de ces ouvrages sont sur un fond de roche, ce qui rend l'approche de la ville assez difficile. Le grand folfé de ce côté peut être inondé par les écluses qui retiennent l'Escaut au haut de la ville. L'autre moitié de la place, au sud-ouest, est fortifié de six bastions détachés de l'enceinte, d'un fer à cheval, de trois ouvrages à corne, dont deux font traversés, outre deux pâtés casematés & garnis de galeries, qui ont communication avec la citadelle; le tour revêtu de maçonnerie, & défendu par un bon chemin-couvert. Le grand foffé est sec,& a plusieurs traverses pour le défendre. On entre par sept portes dans la ville. A l'entrée de l'Escaut, Louis XIV a fait bâtir quatre moulins, qui ont fait subsister une armée de cent mille hommes pendant la derniere guerre. Chaque moulin peut moudre cinq rasieres de bled par heure, & le bâtiment en est des plus solides. On fit, en 1635, sur l'Escaut, un très-beau quai, de treize cents pas géométriques de longueur, de trente de profondeur, & quatre-vingts de largeur ; & les deux rives sont appuyées de très-fortes murailles. Il y a fix ponts de pierre, qui ont été construits dans les années 1297,1315, 1318, 1550 & 1685. Les écluses, dans la basse ville, qui servent à faire descendre les bateaux, furent construites, en 1562, aux dépens des villes voisines. * Longuerne, Description de la France, part. 2, p. 77.

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La citadelle est beaucoup plus forte que la ville; c'est un pentagone régulier, dont le diamétre est de deux cents cinquante toises. Elle est environnée d'une bonne fauffebraie. Chaque courtine est défendue par une demi-lune, à contre-gardes coupés; tous les fosses sont secs, & fous la faulle-brate, il y a, tout autour du corps de la place, une galerie dans l'épaifleur de la muraille, au niveau du fosse, pour conduire les mines sous l'ouvrage capital, avec une autre galerie croisée sous chaque bastion. Les deux bastions du côté de la ville ont des souterreins, qui fervent pour l'hôpital & la boulangerie, confiftant en quatre four

neaux. Au milieu de la place, il y a un grand puits, où aboutit une galerie qui coupe la ciradelle en deux. Les cafernes & les pavillons des officiers sont affez commodes. La maison du commandant est fort propre; mais l'église a été entierement ruinée par le dernier fiége. Sous la contrescarpe, dans l'épaisseur de la muraille , regne une galerie au niveau du fosse, & à tous les angles saillans de cette contrescarpe, il y a des créneaux dans la muraille, pour flanquer le foflé capital. Environ à cinquante pieds

Catherine & sainte Marguerite; mais la premiere fut démo lie en 1672, lorsque Louis XIV y fit bâtir la citadelle. Celle de sainte Marguerite fut donnée alors aux chanoines réguliers de l'abbaye de faint Médard, qu'on nomme auffi faint Nicolas des Prés, & qui y avoient perdu leur maison. Cette abbaye fut fondée en 1126, par Simon de Vermandois dernier évêque de Tournay, résidant à Noyon. Les autres maisons religieuses de Tournay font, l'abbaye des PrésPorciens, qui appartiennent à des religieuses de saint Augu

de cette galerie, il y en a une autre sous le glacis paral-stin, fondées par Wautier de Marvis, cinquante & uniéme

léle à la premiere, qui regne aussi tout autour, qui comprend tous les ouvrages extérieurs, & qui a des galeries de communication de distance en distance. De cette galerie paralléle, il y en a d'autres qui avancent sous le glacis bien avant, pour conduire les mines de tous côtés. Les foffés des demi-lunes sont relevés, & défendus par des coffres, où l'on monte de la galerie qui régne sous la contrescarpe. Tous les ouvrages, jusqu'à l'intérieur du parapet & de la banquette, sont revêtus de maçonnerie. Dans plusieurs endroits, il y a des souterreins pour loger la garnison en cas de nécessité. Outre la porte qui conduit dans la ville, il y en a une autre de communication vers la campagne. Cette citadelle est l'ouvrage du fameux ingénieur M. de Mégrigni, qui en étoit gouverneur lorsqu'elle fut prise par les alliés. La garnison fut obligée de se rendre prisonniere de guerre; mais on lui accorda de sortir avec ses armes, tambour battant, & drapeaux déployés. Lorsque cette citadelle fut achevée, Louis XIV vint la visiter. M. de Mégrigni lui ayant demandé s'il la trouvoit à fon gré, ce monarque lui répondit, qu'elle lui plaisoit fi fort, qu'il voudroit seulement qu'il y eût quatre roues, pour la pouvoir transporter où bon lui sembleroit. Cet ouvrage fut commencé en 1668, & depuis ce tems-là, jusqu'au 24 avril 1674, la dépense montoit à deux millions cinq cents vingt-sept mille soixante dix-sept livres; & ce que ce roi y a fait ajouter depuis, a fait augmenter cette fomme jusques à quatre millions. En confidération de cette dépense, la ville fit, à deux différentes reprises, un don gratuit de trois cents mille forins à

Louis XIV.

La cathédrale, dédiée à Notre-Dame, est d'une trèsbelle sculpture, & ornée de quatre clochers. On y voit quantité de riches chapelles, & divers tombeaux magnifiques, soit en marbre, soit en airain. Le chapitre est compoté d'un doyen, de deux archidiacres, l'un pour Tournay, l'autre pour la Flandre: d'un chantre, de deux tréforiers, d'un grand pénitencier, d'un écolâtre, d'un chancelier & de trente-deux chanoines; ce qui fait en tout quarante-deux prébendes, dont quarante sont à la dispofition de l'évêque, & deux, l'écolâtre & le chanoine hôtelier, à la disposition du chapitre. Le chanoine hôtelier est ainsi appellé, parce qu'il est chargé de la direction de l'hôpital de Notre Dame, qui dépend du chapitre pour le temporel & pour le spirituel.

L'abbaye de saint Martin, de l'ordre de saint Benoît, est remarquable par la beauté de fes édifices, & pour la grandeur & la magnificence de fon église. Louis XIV & MarieThérese d'Autriche, son époute, y mirent la premiere pierre en 1677. L'abbaye fut commencée vers l'an 656, par S. Eloi, évêque de Tournay & de Noyon, en l'honneur de faint Martin, évêque de Tours, qu'on croit avoir prêché l'évangile en ce lieu, & y avoir reffuscité un mort. Cette abbaye devint dans la suite très-puissante, & les religieux se mirent fous la regle de saint Benoît au commencement du douziéme fiécle; ils avoient auparavant suivi celle de saint Auguftin.

La ville de Tournay est maintenant divisée en dix paroisses; la cathédrale de Notre-Dame, saint Piat, faint Jacques, faint Quentin, faint Pierre, faint Nicaise, sainte Marie Magdelaine, saint Brice, saint Jean & faint Nicolas. Les sept premieres, qui se trouvent dans la partie la plus considérable de la ville, du côté de l'Escaut, qui regarde la France, font de l'évêché de Tournay, ainsi que les fix cures qu'on nomme suburbicaires : les trois dernieres, situées dans la plus petite partie de la ville, du côté de l'Escaut, qui regarde le Hainaut, sont de l'archevêché de Cambrai; & il y a un doyen de la chrétienté, dit de faint Brice, qui exerce la jurisdiction de cet archevêque dans la ville de Tournay. Il y a cu encore deux autres paroisses dans la partie de la ville qui reconnoît l'évêque de Tournay; fainte

évêque, les trinitaires, les croisiers, les carmes-chauffés & déchauffés, & les recollets, les dominicains, les Auguftins, les capucins, une maison de prêtres Irlandois, les carmelites, les sœurs-griles, les repenties & autres. Les jéfuites y ont deux maisons; l'une où ils enseignent les humanités, l'autre où ils tiennent le noviciat de la Flandre Gallicane. Cette derniere a été dotée du revenu du prieuré d'Englos, de l'ordre de saint Benoît. Ce prieuré avoit été abandonné à cause des révolutions du pays. Il y a encore le collége de saint Paul, où des prêtres féculiers enseignent les humanités; & le féminaire de l'évêque, où les peres jésuites enfeignent la théologie depuis 1705.

La foi chrétienne a été reçue plus tard dans le diocèse de Tournay que dans la plus grande partie de la Gaule Belgique. Grégoire de Tours fait mention de S. Piat qui prêcha l'évangile dans ce pays, & y fut martyrisé; mais il ne dit rien de S. Eleuthére, que la tradition du pays met du tems de Clovis en entre les apôtres de cette ville. Les légendaires qui en parlent dans sa vie, & dans celle de faint Médard, ne méritent aucune créance, ayant écrit cinq cents ans après ces deux faints, & donnant des marques de leur ignorance dans l'histoire. Ce qui est certain, c'est que faint Médard, évêque de Noyon, fut aussi pasteur de l'église de Tournay, & qu'il prêcha & établit l'évangile dans ce pays, comme firent ses succesleurs jusqu'à S. Eloi. C'est pour cela que les évêques de Noyon conserverent toujours l'évêché de Tournay, dans lequel plusieurs grandes villes furent fondées, comme Gand, Bruges & Lille : ce qui engagea faint Bernard à travailler à la séparation de ces deux églises jointes depuis le tems de faint Médard. S. Bernard obtint en 1148, du pape Eugene III, qui avoit été son disciple, la désunion de ces siéges; de sorte qu'Anselme, moine bénédictin, abbé de saint Vincent de Laon, fut créé cette année premier évêque de Tournay, & que cet évêché se trouva d'une fort grande étendue jusqu'à l'érection des siéges de Gand & de Bruges. En 1559 l'évêché de Tournay fut fait fuffragant de la nouvelle métropole de Cambrai. Cette ville étoit retour. née presque entierement à l'idolatrie, après la mort de faint Piat, sur-tout lorsqu'elle fut tombée entre les mains des Barbares. * Baillet, Topograph. des saints, page

497.

Le diocèse de Tournay est divisé aujourd'hui en huit doyennés, & contient deux cents vingt-trois cures, dont cinq ou fix font unies à d'autres fous un même curé. Les doyennés sont :

Tournay, Saint-Amand, Courtray,
Lille, Helchin-Wallon,
Werwick.
Seclin, Helchin-Flamand,

Le gouvernement civil & politique de la ville de Tournay consiste en deux corps, dont le premier eft le bailliage ayant à la tête un grand-bailli pour le Tournefis. Le second corps est divisé en deux tribunaux ; l'un composé du prévôt & des jurés qui décident les affaires criminelles; l'autre formé du mayeur & des échevins qui gouvernent les affaires civiles, & la police de la ville. Dutems que cette ville étoit foumise aux Espagnols, le magistrat seul y exerçoit toute la jurisdiction; il étoit renouvellé tous les ans par des commissaires du roi, & les causes alloient par appel au conseil provincial de Flandre, & de là au parlement de Malines; mais lorsque Louis XIV s'en fut rendu maître, il y érigea au mois d'avril 1668, un conseil souverain, qui étoit composé de deux présidens, de sept conseillers, d'un procuteur général, d'un greffier & de cinq huissiers. Le roi créa aufli deux chevaliers d'honneur, avec droit d'entrée, de rang & de séance dans ce conseil, immédiatement après les présidens & avant les conseillers.

En 1680, le roi, pour autoriser & faire respecter davantage ce conseil, lui donna le titre de parlement. En 1709, lorsque la ville se rendit aux alliés, commandés par le prince Eugene, le parlement se retira à Cambrai, & l'année suivante il eut ordre d'aller s'établir à Douai, où il s'est toujours tenu depuis.

Louis XV prit Tournay en 1745, fit démolir la plus grande partie de la citadelle, & des fortifications de la ville. Il la rendit à la reine de Hongerie, par le traité d'Aix laChapelle.

2. TOURNAY, bourg de France, dans le bas Armagnac, élection d'Astarac, sur l'Arroz, aux confins du comté de Bigorre, à quatre lieues de Tarbes, au sud-eft.Il y a dans ce bourg une justice royale. Ce bourg n'est pas dans le bas Armagnac, mais dans le pays de riviere haute.

TOURNE, ville de Macédoine. Elle a un grand commerce & de belles, foires ; & est à trois lieues de LaTiffe.

TOURNEBU, lieu de France, dans la basse Normandie, entre Thuri & Falaise, à cinq lieues de Caen. C'est une ancienne baronnie qui appartient à la maison de Tour nebu, l'une des plus considérables de la province.

TOURNECOUPE, bourg de France, dans le bas Armagnac, élection de Lomagne. Il y en a qui lui donnent le nom de ville.

TOURNESIS, (Le) petit pays de Flandre, & qui prend fon nom de la ville de Tournay, sa capitale. Le Tournesis n'est autre chose que la châtellenie de Tournay, qui est d'une assez grande étendue; car elle renferme environ cinquante villages ou bourgs, dont la justice ressortit au conseil provincial de Flandre, d'où l'on peut appeller au parlement de Malines. Les rois de France ayant institué le bailliage de Vermandois y avoient joint Tournay & le Tournefis; mais en 1383, Charles VI érigea un bailliage royal à Tournay, auquel il soumit cette ville & le Tournelis, avec des terres de Mortagne & de Saint-Amand, qui relevoient auparavant du bailliage de Vermandois ; & l'union de ces terres à ce bailliage a duré jusqu'au tems de la paix d'Utrecht, par laquelle tout la terre de Saint-Amand a été séparée du bailliage de Tournefis, & laiffée à la France; mais les neuf villages, qui dépendoient de Mortagne, ont été laissés à la maison d'Autriche. * Longuerue, Descript. de la France, part. 2, p. 78.

TOURNHOUT ou TURNHOUT, petite ville des Pays. Bas, dans la Campine, avec seigneurie. Elle a été bâtie par Henri IV, duc de Brabant, vers l'an 1212. On y voit une église collégiale dédiée à S. Pierre, & dont le chapitre fut fondé en 1398, par Marie de Brabant, duchesse de Gueldre. Il est composé d'un doyen & de douze chanoines. Des chanoines réguliers du prieuré de Corsendonck y enseignent les humanités depuis 1644. On voit encore à Tournhout un couvent de recollets & un beguignage.

L'empereur Charles V donna cette ville en 1545, à Marie, reine de Hongrie, sa sœur, pour en jouir sa vie durant. En 1648, & après la paix de Westphalie, le roi Philippe IV donna la même ville à la princesse Amélie de Solms, veuve de Frédéric Henri de Naslau ; & c'est par-là que cette feigneurie eft entrée dans la maison d'Orange. Après la mort de Guillaume III, roi d'Angleterre, cette seigneurie fut adjagée en 1708, par arrêt de la cour souveraine de Brabant au roi de Prusse, moyennant cent mille florins qu'il a dû donner à Jean Guillaume de Frise, prince d'Orange.

En 1596, le comte de Varax, général de l'artillerie d'Espagne, fut défait près de cette ville par le prince Maurice de Nassau. Les Espagnols y perdirent deux mille cinq cents hommes avec leur général. Le prince n'avoit que huit cents chevaux, & le comte de Varax en avoit fix mille; nonobstant cette inégalité, un mouvement fait à contre-tems fut cause de la perte de l'armée du comte.

Le QUARTIER DE TOURNHOUT est de la dépendance de Ja ville d'Anvers, & il comprend quinze villages.

TOURNI, village de France, dans le Vexin Normand. Voyez TOURNY.

1. TOURNON, ville de France, dans le haut Vivarais, fur la rive droite du Rhône, vis-à-vis de Thain, à trois lieues de Valence & à quatre d'Annonay. Elle est petite & peu considérable; mais elle est ancienne. Tournon eft bâtie fur le penchant d'une montagne au haut de laquelle il y a un château. Le collége où étoient les jésuites eft fameux, & un des plus beaux du royaume. Le couvent des carmes est une affez belle maison. Il y a encore un couvent de capucins, de Cordeliers & de religieuses. Corneille étoit mal informé

lorsqu'il a dit dans son dictionnaire géographique, qu'il y avoit une université à Tournon. Il y en avoit une autrefois fondée par le cardinal de Tournon, mais elle n'existe plus. Pierre d'Avity, auteur d'une description du monde, en fix volumes in folio, étoit né dans cette ville l'an 1592, & mourut à Paris en 1655. La ville & terre de Tournon a appartenu à une maifon de même nom jusqu'en 1644, qu'elle fut éteinte. Elle passa dans celle de Montmorenci, puis dans celle de Levi-Ventadour, & enfin dans celle de RohanSoubise. * Piganiol, Description de la France, t. 4, p. 401.

2. TOURNON, bourg de France, dans le Berri, élection de le Blanc.

3. TOURNON, petite ville de France, dans l'Agenois, élection d'Agen, avec justice royale. Cette juftice comprend les trois paroisses de S. Jean de Carabese, de S. Jean de Suman, & de S. Basile du Toureil.

TOURNOUX ou TORNOSCO, caftrum de Torono, lieu de France, dans le Dauphiné, au diocèle d'Ambrun. C'est la plus ancienne paroisse de la vallée de Barcelonette. On croit qu'il y avoit autrefois un temple dédié à Jupiter.

1. TOURNUS, ville de la Gaule Celtique, dans le pays des Eduens, qui avoient Autun pour leur capitale, étoit comprise dans l'ancienne province lyonnoise, & faisoit partie de l'ancien royaume de Bourgogne. Cette ville est située sur le bord, à la droite & au couchant, de la riviere de Saône, entre Mâcon & Châlon, 46d 34' de latitude septentrionale, & 22d 30' de longitude. Elle a toujours été du diocèse de Châlon, & dépendoit autrefois du comté de la même ville; mais aujourd'hui elle est du comté de Mâcon, au bailliage & présidial duquel ses causes ressortiffent, & par appel au parlement de Paris. Le territoire des environs abonde en bled, en vin, en pâturages & en arbres fruitiers. La situation de Tournus est agréable. L'origine de cette ville est inconnue; on n'en voit rien dans l'histoire jusqu'à l'arrivée de saint Valerien, qui y souffrit le martyre sous l'empire de Marc-Aurele, l'an de Jesus-Christ 177. Les actes de ce faint nous apprennent qu'en ce tems Tournus étoit un magasin de provisions pour les troupes romaines, horreum caftrenfe. Les anciens ont donné à Tournus le nom de caftrum, qui ne signifioit pas chez eux un château, mais une petite ville ou un bourg fortifié. Les anciens appelloient un château caftellum. Paris, Dijon, Châlon, Mâcon, &c. ont porté le titre de caftrum. Quant au nom propre qu'ils ajoutoient à celui de caftrum, en parlant de Tournus, ils l'ont écrit différemment, aussi-bien que les écrivains du moyen âge. César, Strabon & Ptolomée n'en parlent point. L'itinéraire romain la nomme Tinurtium; la table de Peutinger, Tenurtio; un martyrologe attribué à saint Jérôme, Ternocium; saint Grégoire de Tours, Trinurcium; Bede ou Flore & Adon dans leurs martyrologes, Trinorchium & Trenorcium. On trouve encore Turnocium, Tenocium, Tornocium, Turnucum, &c. Dès le neuviéme siècle, & long-tems après on a donné des noms différens au château, à la ville & à l'abbaye. Caftrum Trenorcium, dit Charles le Chauve dans sa donation, & Tornucium villam. Quant à l'abbaye, il la nomme abbatiam sancti Valeriani martyris. Les prélats de la province, en confirmant la donation, l'appellent monafterium Tornucium, auffi-bien que le pape Jean VIII dans ses bulles. Aujourd'hui l'on ne se sert plus guères que du nom latin Trenorchium ou Trenorcium, qui étoit celui du château, & en françois du mot Tournus, qui s'est formé du nom de la ville, Turnucium. Ce qui eft compris maintenant sous le nom & dans l'enceinte de Tournus, étoit autrefois divisé en trois parties ; l'une étoit l'ancien château situé au midi, vers la porte de la ville, par laquelle on entre du côté de Mâcon, & que l'on appelle encore la porte du châtel. Il occupoit presque toute cette partie de la ville qui fait à présent la paroisse de sainte Magdelaine. On y voit encore des vestiges de murailles & de tours, & une citerne qui étoit, sans doute, à l'usage de cet ancien château. La deuxième étoit cette partie de la ville qui fait à présent la paroisse de saint André. La troisième étoit le monastère, & auparavant l'église de saint Valerien. Aujourd'hui que le château ne fub. siste plus, & que la place en a été renfermée dans l'enceinte de la ville, rien n'est plus distingué de celle-ci que l'abbaye dont elle dépend, & dont nous parlerons. La ville est divisée en deux paroiffes, celle de saint André, qui est la plus considérable, & celle de la Magdelaine. L'une & l'autre eft dellservie desservie parun curé & une société de prêtres qui doivent tous être nés dans la ville. Il y a à Tournus un hôtel-de-ville, composé d'un maire perpétuel, de quatre échevins choisis & nommés par l'abbé, entre douze que le corps de la ville lui présente, d'un procureur du roi & d'un secrétaire. Paul Merula, Paradin, de Rubis & Cafaubon croyent que la bataille entre l'empereur Severe & Albin, fon competiteur à l'empire, se donna auprès de Tournus, parce que Spartien, dans la vie de Severe, dit qu'elle fut donnée apud TiKurtium; mais comme Dion & Herodien, contemporains de Severe, affurent qu'elle se donna près de Lyon, dont Tournus est éloigné de quinze grandes lieues, il y a plus d'apparence que ce fut du côté de Trévoux, comme le veut le pere Chifflet, qui traite plus au long cette difficulté dans le chapitre 2 de son hiftoire, où il fait voir que, selon Herodien, il n'y eut qu'une bataille entre les competiteurs, quoique, selon Dion, il y ait eu deux chocs.

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2. TOURNUS, abbaye célébre, hors l'enceinte, & à l'extrémité de la ville du même nom, du côté du septentrion; elle n'en est pourtant léparée du côté qu'elle la touche que par ses propres murailles. Elle est située dans le lieu le plus élevé de Tournus; elle est bâtie en forme ronde, avec ses murs, ses crénaux, ses tours, ses fossés qui font déja presque tous comblés, & elle ressemble plutôt à un fort qu'à une abbaye. Il n'y avoit autrefois qu'une grande porte avec un pont-levis & un ravelin du côté de la campagne, & du côté de la ville une autre porte que l'on nommoit la Poterne anciennement la porte Orbe; mais celle-ci fat murée en 1656, après que l'abbé Louis de Chandenier eut fait faire une autre grande porte, & ouvrir la rue qui conduit à S. Valerien. L'abbaye doit son origine au tombeau de ce faint qui y souffrit le martyre, & fur le tombeau duquel on bâtit d'abord une église, laquelle fut depuis érigée en abbaye, que le roi Charles le Chauvre donna en 875, avec le château, la ville & tous les habitans aux religieux bénédictins de S. Philibert ou de Noirmoutier. Ceux-ci l'ont poflédée jusqu'à l'an 1623, qu'elle fut fécularisée & changée en collégiale; elle est à présent composée d'un abbé titulaire & d'un collége de douze chanoines, dont trois sont en titre de dignité, le doyen, le chantre & le trésorier. Il y a outre cela fix demi-chanoines & fix enfans de chœur. Le chapitre est soumis à la jurisdiction de l'évêque de Châlons, mais l'abbé a été conservé dans tous ses anciens priviléges & dans fon indépendance de l'évêque; il releve immédiatement du saint siége; il est à la nomination du roi; il n'est point obligé à résider. Quoique la simple tonsure suffise pour rendre habile à posséder ce bénéfice, l'abbé a droit d'user de la crosse, de la mitre & des autres ornemens pon. tificaux, non-feulement dans l'abbaye, mais aufli dans la ville. Il a sa mense séparée de celle du chapitre, auquel il est obligé de faire livrer annuellement une certaine quantité de bled, de vin & d'argent. Il est seigneur haut jufticier de la ville de Tournus & des villages d'Huchisi, Plotes, Presti, la Crot, S. Romain, Azé, Champagne, &c. Sa justice est exercée dans l'enclos de l'abbaye, qui a son auditoire & fes prisons établies. Le chapitre jouit encore des terres, des dîmes & des autres droits qui dépendoient des offices réguHiers avant la fécularisation. Le doyen en est institué par l'abbé sur l'élection du chapitre. L'abbé seulnomme & inftitue les autres chanoines, & le chapitre feul les demi-chanoines. Il y en a qui prétendent que les abbés de Tournus faifoient autrefois battre leur monnoie dans la tour des Echelles, appellée aussi tour de la Monnoie. Autrefois les habitans ne pouvoient convoquer aucune assemblée sans la permiffion expresse de l'abbé & du couvent, & ils les tenoient alors dans l'abbaye. Depuis l'an 1660, l'abbé leur a permis de s'assembler dans la maison de la prévôté, qui est aujourd'hui l'hôtel-de-ville. Quatre auteurs ont écrit sur P'histoire de Tournus, outre Machoud & les auteurs des trois Gaules chrétiennes, Falcon, moine de l'abbaye de Tournus dans l'XIe fiécle, Pierre de Saint Julien de la maison de Baleurre, gentilhomme du voisinage de Tournus dans le XVIe fiécle, le pere Pierre-François Chifflet, jésui te, & Pierre Juénin, chanoine de l'abbaye de Tournus. M. le cardinal de Fleury étoit abbé de Tournus.

TOURNY, bourg de France, dans la Normandie, au diocèse de Rouen, avec château & titre de marquisat. Il est dans le Vexin-Normand, au milieu d'une très-belle campagne, fertile en bons bleds, chanvres & autres den. rées, à neuf lienes de Rouen, & à deux de Vernon, d'An

dely & de Saint-Clair sur Epte, entre les paroisses de Mezieres, Forêt, Guitry, Fontenay, Fours, Civiere, Escos, Haricourt & Panilleuse. L'église paroissiale, dédiée à Notre-Dame, est affez bien bâtie & affez propre. Le prieu ré simple, situé au hameau de la Troudiere, en dépend, & a sa part sur les dixmes, aulli bien que le prieuré claustral des chanoines réguliers de Sausseuse, qui est dans le voisinage. Il y a dix-sept fiefs nobles, & fix en roture, qui relevent du marquisat de Tourny ; & l'an 1702, le roi accorda ses lettres patentes pour l'établissement d'un fiége de justice royale en ce lieu-là. Le commerce y confifte en grains & en toiles blanches qu'on y fabrique. On y tient foire le jour de la fête de faint Matthieu. Le château est flanqué de quatre tours aux quatre angles. * Corn. Dict. Mémoires dresses sur les lieux en 1703.

TOUROBIN ou TUROBIN, petite ville de Pologne, dans le palatinat de Lublin, selon Corneille, qui cite les mémoires du chevalier de Beaujeu, & dans le palatinat de Ruilie, selon de l'Isle. Cette ville, ajoutent les mémoires du chevalier de Beaujeu, est située à trois lieues de Chebrechin, elle ses portes, & plusieurs maisons bâties de briques, avec une espéce de rempart de gazon, pallilladé de planches en haut en forme de parapet. Elle a aussi une place & des églises exhaussées, qui la font remarquer de loin. Cette ville est des dépendances de Zamosch.

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TOUROTTE ou TOROTE, village de France, en Picardie, au diocèse de Soillons, & néanmoins fur le rivage droit de la riviere d'Oise, où les autres paroisses sont du diocèse de Noyon & de Beauvais. Les seigneurs de ce lieu sont célébres dans l'histoire. Alberic parle, dans sa chronique, d'un Jean de Thorote, châtelain de Noyon, qui épousa la veuve d'un comte à Soiffons; de ces Tourote descendit Jean de Torote, archidiacre de Soiffons, qui, au commencement du treiziéme siécle fonda un chapitre en l'église de Notre-Dame de ce lieu, du consentement de Nevelon de Cherify, alors évêque de Soiffons. Ce chapitre fut composé de fix chanoines, & la présentation aux prébendes fut donnée au doyen de la cathédrale; cependant, sur les remontrances d'un chapelain de saint Pierre, nommé Roger, que le même Nevelon lui avoit accordé un beau droit sur cette église, le chapitre de la cathédrale accorda que ce chapelain & ses successeurs nommeroient à une de ces fix prébendes, un clerc de leur chœur, & que le même chapitre recevroit huit livres annuelles de l'église de Torote. Aujourd'hui il ne réside aucun chanoine à Torote, vu la modicité des revenus. La maison de Torote a donné des évêques aux églises de Lyon, de Langres, de Verdun & de Liège. Les seigneurs de ce lieu quitterent ce qu'ils avoient de bâtimens à Paris devant le portail de Notre-Dame, à Maurice de Sulli, évêque au douziéme siécle, pour y former une rue, qu'on a appellé depuis la rue Neuve Notre-Dame. On dit qu'il ya, dans l'église de Notre-Dame de Torote, des reliques de faint Denys. Ce lieu n'a environ que quarante feux.

TOUROUVRE, en latin Torrum Robur, bourg de France, dans le Perche, du diocèse & de l'élection de Chartres, a mille deux cents habitans. Il y a eu anciennement, dans l'étendue de la paroisse de ce nom, qui est très-vaste, une ville nommée Mezieres, dans les vestiges de laquelle on trouve encore très fréquemment des médailles d'or, d'argent & de cuivre du bas empire. Cette terre, qui a été érigée en marquisat, appartient, depuis plus de trois cents ans, à la maison de la Vove, dans laquelle elle est entrée par mariage.

TOURS, ville de France, dans la Touraine, à laquelle elle donne fon nom, & dont elle est la capitale. Elle eft située au midi de la Loire, entre ce fleuve & la riviere de Cher, nommé en latin Carus ou Caris, qui pasle au midi de la ville, & va ensuite se jetter dans la Loire. L'ancien nom de Tours elt Cafarodunum, comme on voit dans Ptolomée & dans la carte de Peutinger; le mot Dun, signifiant, dans la langue gauloise, une montagne ou colline, Casarodunum veut dire montagne de César. Il n'y a néanmoins à Tours aucune montagne, ni apparence qu'il y en ait eu, la ville étant située dans une grande plaine, en lieu fort bas, entre deux rivieres, de forte que ce mot Dun doit avoir signifié une montagne & une forteresse, comme parmi les François & les Italiens, le mot Rec ou Rocca, signifie, non-feulement un rocher Tome V. LLIILI

mais une forteresse. Tours, sous la domination des Romains & des rois Mérovingiens, étoit beaucoup moins grande qu'elle n'est aujourd'hui, puisque Grégoire de Tours affure que l'église de saint Martin étoit éloignée de la ville de cinq cents trente pas, & ce ne fut que dans de neuvième siécle qu'on enferma de murailles cette église & le bourg voisin, pour le garantir des ravages des Normands. On appelloit encore, au commencement du douziéme siécle, ce quartier Caftrum Novum, Châteauneuf, comme le témoigne l'auteur de l'histoire des comtes d'Anjou. Le nom de CHATEAUNEUF lui fut apparemment donné, à cause du château ou fort que Richard, roi d'Angleterre, y fit bâtir, malgré Philippe-Auguste, & qui, felon Froiffard, donna lieu à la guerre sanglante qui fe fit entre ces deux rois. Deux villes si proches l'une de l'autre, se joignirent enfin par l'accroiffement qu'elles prirent, & cette jonction fut approuvée par des lettres patentes du roi Jean de l'an 1354. Tours, à ce que l'on prétend, est la premiere ville du royaume qui ait eu des priviléges, & en faveur de laquelle les rois de la premiere race ont donné les premieres lettres patentes. Ce fut aufli la premiere qui envoya des députés au roi Henri III, après les barricades de Paris, & ce fut en cette considération que ce prince y transféra le parlement & les autres cours supérieures de Paris l'an 1583. Pendant le séjour que ces tribunaux firent à Tours, cette ville s'accrut d'un tiers, & l'on y joignit les fauxbourgs, par une nouvelle enceinte que l'on fit en vertu de lettre patentes de Henri IV, du mois d'avril 1591. Aujourd'hui on entre dans Tours par douze grandes portes, & on y remarque cinq fauxbourgs, qui font ceux de la Riche, de Saint Eloi, de Saint Etienne, de Saint-Pierre, des Corps de Saint Symphorien. Les maisons sont bâties d'une pierre extrêmement blanche, qui leur donne beau aucoup d'apparence, & toutes couvertes d'ardoises. Les rues y font aflez belles & fort nettes, à cause des différens ruisseaux que forment fix fontaines publiques. J'ai déja infinué qu'une des portes de la ville s'appelle la porte Hugon, que le peuple, par corruption, nomme la porte Fourgon, pour dire la porte de feu Hugon. Hugon, selon Eginhard, dans la vie de Charlemagne, & felon quelques autres historiens, étoit comte de Tours. Il y a apparence, que s'étant rendu redoutable par sa méchanceté, & par la férocité de ses mœurs, on en a fait, après sa mort, l'épouvantail des enfans & des femmelettes, & le canevas de beaucoup de fables. De Thou, malgré sa gravité, n'a pas dédaigné d'en parler dans son histoire, l. 24, Casaroduni, dit ce célébre historien, Hugo rex celebratur, qui noctu pomaria civitatis, obequitare & obvios homines pulsare & rapere dicitur. Ainsi on menace à Tours du roi Hugon, comme à Paris du moine Bouru, à Orleans du mulet Odet & à Blois du Loup-garou. D'Avila & quelques autres historiens ont cru que les calvinistes ont été appellés huguenots, parce que les premiers qui embrasferent cette croyance dans la ville de Tours, s'assembloient la nuit dans des caves qui étoient auprès de la porte Hugon. Dansle tems que les manufactures de Tours étoient dans leur plus grande réputation, on a compté dans cette ville jusqu'à foixante mille habitans, mais ce nombre est aujourd'hui réduit à environ trente-trois mille. Cette ville eft franche, & ne paye point de taille. La maison de ville est composée d'un maire, érigé en titre d'office par lettres patentes de Louis XIV, dus de février 1696, en vertu de l'édit de création de 1692, de douze échevins, de deux assesseurs, d'un procureur du roi, d'un substitut, d'un veur, d'un greffier en titre d'office, & de quatre élus de ville. * Longuerue, Descript. de la France, I partie, pag. 105.

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L'église cathédrale a un beau portail, accompagné de deux belles tours, & orné au milieu d'une rose très-délicatement travaillée. Cetre église a été premierement batie par faint Martin, & dédiée à faint Maurice, dont elle a long tems porté le nom, & qu'elle n'a quitté que pour prendre celui de faint Gatien, son premier évêque. L'an 1096, on l'appelloit encore l'église de saint Maurice. La bibliotheque de cette église occupe toute la longueur du côté du cloître. Elle est remplie de manuscrits enchaînés sur des pupitres. Les deux plus curieux sont un pentatenque de mille ans, écrit en lettres majuscules, & les quatre Evangiles écrits en lettres saxoniques. On croit ici que

ce dernier a douze cents ans d'antiquité, & qu'il a éré écrit par saint Hilaire, évêque de Poitiers; mais le savant auteur du voyage liturgique croit qu'on se trompe, & que ce manuscrit ne passe point mille ans.

L'église de saint Martin est une des plus vastes du royaume; elle est flanquée, du côté du nord, par une grande tour appellée Tour de Charlemagne, & du côté du midi par celle de l'horloge; on les voit de plus de dix lieues à la ronde. Le tombeau de saint Martin est derriere le grand autel; il est de marbre noir, blanc & jaspé, & n'est élevé de terre qu'environ de trois pieds. Le quai royal fur la riviere est le plus bel endroit de la ville, & fort spacieux. Le château est près du grand pont de la riviere de Loire, & fon donjon étoit autrefois très fort. C'est dans ce château que fut mis le duc de Guise, & d'où il trouva les moyens de s'évader au mois d'août de l'an 1591.

L'abbaye de Marmoutier est dans le fauxbourg de SaintSymphorien, & est fameuse par saint Martin son fondateur, & par la sainte Ampoule qu'on y garde. Sulpice Sévére, qui avoit été disciple de saint Martin, & qui a écrit sa vie, dit que ce saint s'étant froiflé & bieffé à mort, par une chute violente qu'il avoit faite, un ange vint la nuit essuyer ses plaies & les oindre d'un beaume céleste, qui le guérit si parfaitement, que faint Martin se trouva le lendemain aussi sain que s'il n'avoit jamais eu aucune incommodité. Il est parlé de cette fainte Ampoule dans les canons quarante-quatre & quarante-cinq du second concile de Châlons, & c'est avec son beaume que le roi Henri le Grand fut sacré dans l'église cathédrale de Chartres, le 27 février de l'an 1594.

Le mail passe pour être le plus beau du royaume; il a plus de mille pas de longueur, & est orné de deux allées d'ormes de chaque côté. La ville de Tours est si jalouse de cet ornement, que les magistrats ont défendu d'y jouer & de s'y promener, lorsqu'il a plu, jusqu'à ce qu'il soit sec, sous peine de dix livres d'amende.

Nos rois ont convoqué plusieurs fois les états à Tours, Louis XI en 1470, Charles VIII en 1484, & Louis XII en 1506, pour le mariage de madame Claude de France sa fille, avec François de Valois, duc d'Angoulême. On a aussi assemblé plusieurs conciles dans cette ville. Meffire Jean le Meingre, dit Boucicaut, maréchal de France sous Charles V & Charles VI, reçut les honneurs de cette dignité dans la ville de Tours, pendant que le roi Charles Vétoit logé dans la maison paternelle de ce seigneur. Chriftophle Plantin, fameux imprimeur, & le pere Rapin, jésuite, étoient nés à Tours.

Le Pleffis-les Tours est une maison royale bâtie par Louis XII, dans un lieu appellé auparavant les Montils. Ce prince en trouva le séjour si agréable, qu'il y passa une partie de sa vie, & y mourut l'an 1483. Ce château eft de briques, & a de beaux appartemens pour ce tems-là; il est situé entre un grand parc & de beaux jardins. Louis XI fonda en ce lieu une église collégiale & un couvent de minimes, qui est le premier que ces religieux ayent eu en France. La situation de ce couvent est d'autant plus belle, qu'il est sur un canal de la riviere du Cher, que le roi même fit faire.

L'ifle de Saint Côme est aux portes de Tours, & est formée par deux bras de la riviere de Cher. C'est ici que Berenger & Ronsard ont été inhumés; le premier étoit natif de Tours, fut trésorier & écolâtre de l'église de saint Martin, puis archidiacre d'Angers. Ce fut dans cette derniere ville qu'il commença à dogmatiser & à foutenir, que le facrement de l'Eucharistie n'étoit que la figure du corps de Jesus Christ. Il fut condamné dans plusieurs conciles; mais ayant comparu dans celui qui fut tenu à Rome en 1078, il y signa une nouvelle profession de foi. Il y a apparence qu'il retomba dans son erreur, car il fut encore accufé au concile de Bordeaux, en 1080, & obligé d'y rendre compte de sa foi. Depuis, il passa le reste de ses jours dans l'ifle de Saint-Côme, où il mourut le 6 janvier 1088, catholique, selon les uns, & hérétique, felon les autres.

L'archevêché de Tours a eu des prélats dès l'an 250. Saint Gatien en fut le premier évêque, & mourut vers la fin du troifiéme siècle. Saint Lidoire lui succéda en 338, après une interruption de plusieurs années. Saint Martin fut fait évêque l'an 371, & mourut l'an 397. Saint Brice

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