verbe Τρέπομαι, je mets en fuite. Les Latins en firent leur mot Tropheum, les François en ont fait celui de Trophée, les Italiens & les Espagnols celui de Trofeo. On entend par ce mot les dépouilles d'un ennemi vaincu. Les Grecs, qui semblent avoir été les inventeurs des trophées, ôtoient toutes les branches du premier arbre qu'ils rencontroient, après avoit gagné une bataille, y attachoient les boucliers, les casques, les cuiraffes, &c. des vaincus. Les Romains, plus jaloux de leur gloire, en firent des monumens plus durables: ils élevoient des édifices solides, sous le titre d'arcs de triomphe, & y faisoient sculpter les armes des vaincus. Cet usage a paffé chez nous. Les historiens & les géographes nous ont confervé un certain nombre des anciens trophées des Romains, dont voici la litte. TROPHÉES D'AUGUSTE. Voyez au mot TROPEA, l'article TROPAA-AUGUSTI. TROPHÉES DES BRUTIENS Voyez au mot TROPÆA, l'article TROPÆA, no. 3. TROPHÉES D'ÉMILIEN, en latin Tropaum Q. Fabii Maximi Emiliani. Strabon, l. 4, p. 18.5, nous apprend que près du lieu où l'Isere se jette dans le Rhône, Q. Fabius Maximus Æmilien, dont l'armée n'étoit pas de trente mille hommes, défit deux cents mille Gaulois, & éleva fur le champ de bataille un trophée de pierre blanche. Comme Strabon, dans cet endroit, décrit la rive gauche du Rhône, il sembleroit que le champ de bataille & le trophée dont il est question, auroient été de ce côté là; mais un peu plus bas il dit que ce combat se donna chez les Arvernes, près de l'endroit o où le Rhône reçoit l'Isere, & dans le canton où le mont Gebenna s'approche du Rhône; par où il désigne la rive droite de ce fleuve. C'est ce qui a engagé Ortélius à marquer ce trophée dans sa carte de l'ancienne Gaule, aux confins des Helviens & des Arvernes, près du Rhône à la droite. TROPHÉES DE POLLUX. Ces trophées étoient dans la ville de Sparte. Quand on a paflé le temple d'Esculape, dit Paufanias, on voit les trophées que Pollux, à ce qu'on dit, érigea lui-même après la victoire qu'il remporta fur Lyncée. PHEA. TROPHÉES DE POMPÉE. Voyez POMPEIA TROTROPHÉES DES ROMAINS & DE SYLLA. Dans la plaine de Chéronée en Bœotie, dit Paufanias, 1. 9,039, on voit deux trophées qui ont été érigés par les Romains & par Sylla, pour une victoire remportée sur Taxile, général de l'armée de Mithridate. TROPHÉES DE SEXTUS-POMPEIUS. Voyez Tro TROPHONIUS. (Le bois sacré de) Il étoit dans la Boeotie, à une petite distance de la ville de Lébadée. On disoit, selon Paufanias, 1. 9, c. 39, de la traduction de l'abbé Gédoyn, qu'un jour, Hercine jouant en ce lieu avec la fille de Cérès, laissla échapper une oie qui faisoit tout son amufement; cette oie alla se cacher dans un antre sous une groffe pierre. Proserpine ayant couru après, l'attrapa, & de dessous la pierre où étoit l'animal, on vit aufli-tôt couler une source d'eau, d'où se forma un fleuve, qui, à cause de cette aventure, eut auffi le nom Hercine. On voyoit encore du tems de Paufanias, sur le bord de ce fleuve, un temple dédié à Hercine, & dans ce temple la statue d'une jeune fille qui tenoit une oie avec ses deux mains. L'antre où ce fleuve avoit sa source, étoit orné de deux statues debout, tenant une espece de sceptre avec des ferpens entortillés à l'entour, de forte qu'on les auroit pris pour Esculape & Hygéia; mais peut-être que c'étoit Trophonius & Hercine, car les ferpens ne sont pas moins consacrés à Trophonius qu'à Esculape. On voyoit aussi sur le bord du fleuve le tombeau d'Arcéfilas, dont on disoit que les cendros avoient été apportées de Troye par Leïtus. Ce qu'on trouvoit digne d'attention dans le bois sacré, étoit, 1o. le temple de Trophonius avec sa statue, ouvrage de Praxitèle. Cette statue, aussi-bien que la premiere dont il a été parlé, ressembloit à celle d'Esculape; 2°. le temple de Cérès surnommée Europe, & une statue de Jupiter le Pluvieux, qui étoit exposée aux injures du tems. En descendant, & fur le chemin qui conduisoit à l'oracle, on trouvoit deux temples, l'un de Proferpine, conservatrice, l'autre de Jupiter, roi; ce dernier étoit demeuré imparfait, foit à cause de son excessive grandeur, soit à cause des guerres qui étoient survenues & qui n'avoient pas permis de l'achever; dans l'autre on voyoit un Saturne, un Jupiter & une Junon; Apollon avoit aussi son temple dans ce bois. Quiconque vouloit descendre dans l'antre de Trophonius, étoit obligé de paffer quelques jours dans une chapelle dédiée au bon génie & à la fortune; il employoit ce tems à se purifier par l'abstinence de toutes les choses illicites & par l'usage du bain froid, car le bain chaud lui étoit interdit, & il ne pouvoit se laver que dans l'eau du fleuve Hercine; il se nourrisloit de la chair des victimes dont il faifoit lui-même les frais, car il étoit obligé de sacrifier à Trophonius & à ses enfans; à Apollon, à Saturne, à Jupiter, roi, à Junon Heniocha & à Cerès surnommée Europe, qu'on disoit avoir été la nourrice de Trophonius. Un devin, sur l'inspection des entrailles, jugeoit si Trophonius agréoit le sacrifice, & s'il étoit disposé à rendre ses oracles; mais les entrailles les plus sures étoient celles d'un bélier, que l'on immoloit sur la fosse d'Agamède, la nuit même qu'on vouloit descendre dans l'antre. Les autres victimes, quelque espérance qu'on en eût conçue, étoient comptées pour rien, si le bélier n'étoit tel que l'on en pût tirer un au gure aufli favorable; alors on descendoit sans crainte & l'on se promettoit un heureux succès. Voici néanmoins quelques cérémonies qui se pratiquoient auparavant. Cette même nuit on étoit conduit fur le bord du fleuve Hercine. Là on étoit frotté d'huile, & nettoyé par deux enfans de la ville, âgés de treize ans, qu'on nommoit des Mercures. On étoit ensuite conduit par des prêtres auprès de deux fontaines, l'une nommée Léthé, l'autre Mnémosyne; elles étoient proche l'une de l'autre. Après ces préparations on vous montroit la statue du dieu faite par Dédale, car c'étoit un privilége réservé uniquement à ceux qui venoient confulter l'oracle. On faisoit ses prieres devant cette statue, & ensuite on marchoit vers l'antre vêtu d'une tunique de lin, ornée de bandelettes, & chauslé à la maniere du pays. Cet antre étoit dans une montagne au-deslus du bois sacré ; une balustrade de marbre blanc régnoit autour. Cette balustrade n'avoit pas deux coudées de haut, & l'espace contenu au-dedans formoit une très-petite place. On avoit élevé sur la balustrade des obélisques de bronze qui étoient comme attachés par un cordon de même métal; la porte d'entrée étoit au milieu de ces obélisques. Au-dedans de l'enceinte il y avoit une ouverture que l'art avoit pratiqué avec beaucoup d'industrie & avec une forte de proportion; car on l'auroit prise pour un four creuse sous terre. Cette espece de four pouvoit avoir environ quatre coudées de lar geur, & huit de hauteur, mais il n'y avoit point de marches pour y descendre. Quand on y vouloit entrer, on apportoit une échelle fort légere; l'on descendoit premierement dans une folle qui étoit entre le rez-de-chauffée & la caverne. Cette fotfe avoit deux empans de largeur & un de hauteur; on tenoit à la main une espece de pâte pêttie avec du miel, & on glissoit dans la fosse, en y passant d'abord les pieds, puis les genoux ; & lorsqu'on avoit paffé tout le corps, on se sentoit emporter au fond de l'antre avec autant de rapidité, que si c'eût été un grand fleuve qui cût entraîné. C'est alors que l'avenir étoit revelé en plus d'une maniere; car on voyoit, ou l'on entendoit. Lorsque la curiosité étoit satisfaite, on remontoit par le même chemin & avec la même peine, en passant les pieds les premiers, comme on avoit fait pour descendre. On disoit que de tous ceux qui étoient descendus dans l'antre de Trophonius, aucun n'y étoit mort, si ce n'est un satellite de Démétrius, qui avoit négligé les cérémonies usitées en l'honneur du dien, & qui étoit venu, moins pour confulter l'oracle, que pour emporter l'or & l'argent qu'il croyoit trouver en ce lieu. Son corps fut jetté hors de l'antre, non par cette ouverture sacrée par laquelle on descendoit, mais par une autre issue. Quand on étoit forti de l'antre, les prêtres faifoient affeoir sur le trône de Mnémosyne qui étoit auprès; ils demandoient ce qu'on avoit vu ou entendu, & après qu'on leur en avoit rendu compte, ils mettoient entre les mains de gens qui reportoient dans la chapelle de la bonne fortune & du bon génie. On étoit là quelque tems à reprendre ses esprits; car au sortir de l'antre on étoit si troublé, qu'il seinbloit qu'on eût perdu connoiffance; mais peu à peu on revenoit & on se trouvoit dans son état naturel. L'oracle de Trophonius étoit autrefois ignoré dans la Beotie; voici comment il devint célébre. Le pays fut affligé RRrrrrij d'une fi grande sécheresse, qu'en deux ans il n'y étoit pas tombé une goutte de pluie. Dans cette calamité, les Beotiens envoyerent des députés de chaque ville pour confulter P'oracle d'Apollon. Ces députés ayant demandé du reméde à leurs maux, la Pythie leur répondit que c'étoit de Trophonius qu'il en falloit attendre, & qu'ils allaffent le chercher à Lébadée; ils obéirent: mais comme ils ne pouvoient trouver d'oracle dans cette ville, Saon le plus âgé d'entr'eux, apperçut un eslaim de mouches à miel, & observa de quel côté il tournoit; il vit que ces abeilles voloient vers un antre, il les suivit & découvrit ainsi l'oracle. On disoit que Trophonius l'avoit instruit lui-même de touzes les cérémonies de son culte & de la maniere dont il vouloit être honoré. TROPIANA, ville d'Italie, dans la Calabre. Il en est parlé dans le fixiéme concile de Constantinople, tenu sous T'empereur Constantin. Ortelius croit que c'est la même que POSTROPEA, & que le nom moderne est Trapaa. Voyez TROPAS, POSTROPEA, & TROPEA. TROPINA, lieu de l'Inde, selon Pline, 1.6, 6.20. TROPIQUE.(le) Terme de la géographie astronomique. Il vient du grec Τροπή, Converfio, en françois retour: du verbe Τρέπειν, tourner, changer, retourner, &c. On appelle Tropiques, dans la sphére, deux cercles paralleles à l'équateur dont ils sont éloignés de 23d & demi. On les marque sur les cartes par un cercle de deux lignes, afin d'en faire mieux remarquer r le trait. L'un de ces Tropiques est septentrional, & passe par le point solstitial de l'écrevifle ou du cancer, d'où on le nomme TROPIQUE DU CANCER, où de l'écrevisse. Le soleil le décrit quand il entre au premier degré de l'écrevisse, c'est-àdire le plus long jour d'été pour nous, & pour tous ceux qui font situés au nord du même Tropique. Ainsi on le nomme aufsi par cette raison Tropique D'ÉTÉ, mais Tropique d'hiver pour les peuples qui sont au midi de l'équateur. Comme le soleil arrive au Tropique au point solstitial de J'écrevisse, & qu'il retourne de là vers l'équateur, il s'enfuit que, se reculant de nous chaque jour, les jours dimimuent à proportion de son éloignement jusqu'à ce qu'il foit arrivé de l'autre côté de l'équateur à la même distance de 23d 30. Alors il passe par le solstitial du capricorne, & ce Tropique est nommé pour cela le TROPIQUE DU CAPRICORNE. Le soleil le décrit lorsqu'il entre au commencement du capricorne, c'est-à-dire le plus court jour de l'hiver; par cette raifon on le nomme aussi le TroPIQUE D'HIVER, ce qui ne doit s'entendre que par Tapport à nous & aux autres peuples situés au nord de d'équateur, car pour ceux qui font au midi c'est leur Tropique d'été. Chaque Tropique peut être nommé cercle du solstice, parce que le soleil étant au tropique du cancer ou du capricorne, retourne auffi-tôt en s'approchant de l'é quateur.. Au solstice d'été, le soleil étant au Tropique du cancer, est à midi par rapport à nous, dans sa plus haute élévazion au-dessus de l'horizon, d'où ce Tropique septentrional peut être appellé le cercle du HAUT SOLSTICE. Au solstice d'hiver, le soleil étant au Tropique du capricorne, est à midi, par rapport à nous, dans la plus basse situation & dans la plus grandesproximité de l'horizon; ce qui est cause que ce Tropique méridional peut être appellé le CERCLE DU BAS SOLSTICE. J'explique le mot de SOLSTICE en fon lieu. Ces deux cercles sont les bornes que Dieu a posées au chemin annuel que le soleil fait, ou semble faire, du midi au septentrion, depuis le solstice d'hiver jusqu'au solstice d'été & du septentrion au midi, depuis le solstice d'été jusqu'au solstice d'hiver. Ces cercles semblent des barrieres qui l'enferment dans une carriere, & qui l'obligent, quand il y est arrivé, à reprendre la route par laquelle il s'est avancé jusques là. C'est pour cela qu'ils font appellés Tropiques, du mot grec que nous avons déja expliqué. La distance de chaque Tropique à l'équateur est d'environ 23d 30', parce que l'obliquité de l'écliptique à l'égard de l'équateur, n'étant pas plus de 23d 30', le soleil qui ne quitte jamais l'écliptique, ne peut ni plus ni moins s'écarter de l'équateur, ou, pour parler comme les astronomes, ne peut ni plus ni moins decliner, ce qui fait que cette distance de 234 30 est appellée la plus grande déclinaison du foleil. , Les deux Tropiques étant à distance égale de l'équateur, font par conféquent égaux l'un à l'autre. L'équateur étant le plus grand cercle que le soleil décrive sur le globe terrestre, & tous les cercles qui sont paralleles à l'équateur étant plus petits à mesure qu'ils s'éloignent de l'équateur, il s'enfuit que les Tropiques qui font paralleles à l'équateur, comme il est aisé de le voir dans une mappemonde, font les plus petits cercles que le soleil décrive par fon mouve ment diurne. Ceux qui suivent l'ancien système de Ptolo mée, en concluent que le soleil étant dans les Tropiques, se meut avec moins de vîtesse que lorsqu'il est dans l'équateur, puisqu'en vingt-quatre heures, ou environ, il ne parcout qu'un cercle moins grand, auquel il emploie néanmoins autant de tems que pour parcourir le plus grand cercle; cela étant, il fait donc ces circonvolutions inégales en tems égaux; ce qu'on ne peut expliquer que par un mouvement plus lentou plus vite; mais ceux qui préférent le systême de Copernic, & qui tiennent que la terre fait elle-même par son mouvement les apparences que les autres attribuent au cours du soleil, ont une explication plus commode. On suppose un corps sphérique attaché par deux pivots à deux extrémités diametralement opposées, de forte que ce corps sphérique puisse tourner librement autour de ces deux pivots; fi ce corps, d'un pivot à l'autre, est marqué au milieu par une ligne qui le divise en deux parties égales, & que de chaque côté il y ait entre cette ligne & les pivots d'autres lignes marquées paralleles à celle du milieu, il est certain que la ligne du milieu a le plus de circonférence, & que les autres en ont moins à proportion qu'elles s'écartent davantage des deux pivots. Cependant lorsque le corps sphérique fait un tour, chacune de ces lignes parcourt un cercle inégal, quoiqu'elles y employent un tems égal. Je passe divers usages astronomiques des Tropiques, ce seroit fortir de la géographie. Le Tropique du cancer ou de l'écrevisse coupe le premier méridien entre les Canaries & les ifles du Cap-Verd, & passe à l'entrée d'une anse qui est entre le cap Bojador & le cap Blanc, & y partage en deux l'isle aux Hérons. Il traverse ensuite le Sara ou désert de Barbarie, passe au midi de Teffet, au pays de Berdoa, partage l'Egypte, passe sur la fontaine alumineuse de Cheb, sur la montagne d'Elhad, fur le Nil, un peu plus haut que la grande cataracte, arrive à la mer Rouge assez près & au midi du cap de Ramos; coupe l'Arabie heureuse dans l'état du chérif de la Mecque, passe à Alféré, quitte l'Arabie heureuse à Mascate, traverse la mer des Indes jusqu'à l'embouchure de la riviere de Paddar, traverse les pays de Guzurat, de Chitor, de Malva, le royaume de Bengale, qui sont de l'Indoustan, coupe le royaume de Tipra & la province d'Osul, qui sont du royaume d'Ava, le petit Laos, le Tonquin, & enfin la Chine, par les provinces de Quansi & de Quanton. Il partage l'isle de Formose environ par le milieu: de-là traversant toute la grande mer du sud il passe à la pointe méridionale de la Californie, coupe le nouveau Mexique dans les provinces de Chiametlan & de Panuco. Il sépare le golfe du Mexique en deux parties, passe entre la presqu'ifle de la Floride & l'ifle de Cuba, coupe le grand banc de Bahama, rase la partie septentrionale de l'isle d'Yumeta, l'une des Lucayes, & vient enfin à travers la mer du Nord à l'endroit de l'Afrique où j'ai commencé d'en décrire le circuit. Le Tropique du capricorne passe à l'isle Dos Picos près du premier méridien pris à l'isle de Fer, partage l'Afrique, dont elle laisse la pointe méridionale entre Angra do Ilbeo, l'anse de l'Islot & le cap Rostro da Piedra, & court de-là au royaume d'Inhambane, passe à la baie de SaintAugustin dans l'isle de Madagascar qu'il coupe de même, par la mer des Indes, il arrive aussi dans la la nouvelle Hollande, vers les terres de Wit & d'Endracht; passe au midi des isles de Salomon assez près de l'isle des Negretes; & par la mer du Sud il gagne la côte du Pérou à son extrémité méridionale entre Morro Moreno & le Morne de Saint-George: de-la passant au désert d'Atacama, au pays de Chaco & de Guayra dans le Paraguai, au petit état de Saint-Paul, & dans la capitainie de Saint-Vincent au Brésil. Le point où le soleil se leve à notre égard, lors qu'il est au Tropique du cancer, est notre orient d'été : celui où il se couche le même jour est notre occident d'été. Le point où le soleil se leve à notre égard, lorsqu'il est au Tròpique du capricorne, est notre orient d'hiver ; & celui où il se couche dans la même saison, est notre occident d'hiver. Ce point est toujours le même, & à la même distance de l'équateur; ou s'il y a quelque différence, ce n'est qu'une minutie astronomique qui n'a aucun effet sensible pour la géographie. Ce point étant fixé à un petit permanent de l'horizon, il s'enfuit que tous les hommes placés sur un même méridien ne voient pas tous l'orient d'été ou l'occident d'été sur le même rumb de la boussole, quand même il n'y auroit aucune variation de l'aimant dans toute l'étendue de ce méridien, depuis le pole arctique jusqu'à l'équateur. TROPIS, isle dont parle Etienne le géographe, qui cite Artémidore. TROPPAU, Oppavia, ville d'Allemagne, dans la haute Siléfie, & la capitale du duché de ce nom. Elle est grande & bien bâtie, enfermée d'une forte muraille, proche de laquelle passent d'un côté la riviere d'Oppa, & de l'autre celle de Mohr. Ses fauxbourgs font fort spacieux. Elle est située dans une plaine agréable & divertissante. Entre les églises de cette ville, la grande paroisse de saint George eft la plus belle, elle a plusieurs ornemens au-dedans; entr'autres le chœur, les autels, le baptistere, & la chaire méritent d'être vus. Il y atrois cloîtres, & une commanderie de Malte. La maison de ville est un grand bâtiment, & les maisons des bourgeois sont presque toutes bâties de pierres propres & élevées. Le terroir y est fertile en bled & en fruits; les pâturages y font excellens. L'ancienne famille des ducs de Troppau s'est éteinte l'an 1480. Ce duché ayant été dévolu après leur mort à la couronne de Bohéme, l'empereur Matthias en donna l'investiture l'an 1614, au prince Charles de Lichtenstein. En 1620 il se donna ici un combat en l'air entre des corneilles qui se battirent de telle façon, que les paysans en porterent plusieurs facs remplis dans la ville. Ce fut un présage des désastres qui y arriverent les années suivantes. Les Danois prirent la ville de Troppau en 1626. Les Impériaux la reprirent en 1627; elle fut alors fort endommagée par le canon. En 1642, les Suédois s'en rendirent maîtres, & bien-tôt après les Impériaux la regagnerent fur eux. Enfin le général Suédois Wirtenberg l'attaqua encore l'an 1646, mais fans succès. * Zeyler, Topog. Sil. p. 186. TROPPIA. Voyez TRIOMPA. TROSLEIUM, lieu de France, en Picardie, célébre par les assemblées qui y ont été tenues. Voyez TROSLY. TROSLY OU TROLY, en latin Trosteium, village de France, au diocèse de Soiffons, où se sont tenus plusieurs conciles. Sa véritable position a paru incertaine aux auteurs du traité des palais de nos rois inféré dans la diplomatique. On s'est trouvé embarrassé à choisir dans les deux Trofly qui sont situés au diocèse de Soissons. Valois, en sa notice des Gaules, a cru que c'étoit Trosly sur le rivage gauche de la riviere d'Aisne, en allant de Soiffons à Compiegne, mais plus près de Compiegne que de Soiffons. Dom Mabillon & dom Germain se sont déterminés pour l'autre Trosly, qui est voisin de Coucy, & à l'extrémité du diocèse de Soiflons en allant à Blerencour, à distance à peu près égale de Soisfons & de Noyon. Le pere Sirmond leur a paru avoir eu en vue ce dernier Trofly. Ils ont vu le premier sans y rien remarquer ce qui indiqua une maison royale; dans le second, au contraire, on y trouve un double Trofly; le Trosly le haut, & Trosly le bas, comme dans un grand nombre d'autres terres royales. Il y a deux églises paroissiales, l'une dédiée à faint Pierre, l'autre à saint Martin, & entre les deux on voit les vestiges de l'ancien château. Il y a outre cela plus d'apparence que ce dernier Trofly est celui des conciles, parce que les routes, les forêts, & la supériorité de ce domaine au-dessus des autres lieux du voisinage, indiquent que cette terre a été autrefois particulierement diftinguée. Les conciles qu'on dit avoir été tenus à Trosly, sont des années 909, 921,924, & 927. Zuentibold, roi d'Austrasie, se trouva aussi en ce lieu l'an 895, & y accorda un diplôme à l'abbaye de saint Mihel sur Meuse, pour désigner le Trofly dont il est question; le chancelier ou notaire de la suite de ce prince, mit Actum in vico Droslei juxta Novionam civitatem. C'est ce qui prouve qu'il ne faut aucunement penser à Trofly for Aisne pour la tenue des conciles. Quoique Trosly ne soit pas plus proche de Noyon que de Sois fons, on le nomme Noyon dans cet acte, parce que le prince étranger étoit venu apparemment à Trofly par la route de Noyon qui est très-belle & facile, & non par celle de Soislons. M. le duc d'Orléans est seigneur de Troflysaint-Pierre; les hameaux qui en dépendent, se nomment Cenay, Loire, Carlin, Prefle. Le nom de Carlin paroît tenir quelque chose de nos rois de la seconde race. Le vrai nom de l'autre Trosly, voisin de Compiegne, est Breuil. Trofly n'est que le nom d'un hameau. S. Hilaire est patron de l'église. * Mém. de Lebœuf. TROSMIS. Voyez TRISMIS. TROSSULUM, ville d'Italie, dans l'Etrurie, au voisinage du pays des Volsques, selon un ancien commentateur de Perse. Un corps de cavalerie romaine s'étant emparé de cette ville, on donna aux cavaliers le nom de Trossuli; mais selon Pline, L. 33,6.2, qui rapporte la même chose, ce titre d'honneur devint bien-tôt un titre d'ignominie, dont les cavaliers eurent honte, à cause de l'équivoque du mot; car dans ce tems-là Trossulus signifioit un homme délicat & efféminé. Festus met la ville de Trossulum dans la Toscane, & rapporte le même trait d'histoire. Le nom moderne est Trossulo, selon Léandre. Voyez TROILIUM. TROSTBERG ou TRONSPERG, bourg d'Allemagne, dans la Baviere, sur la riviere d'Altza, à quatre milles de Rosenheim, & à trois de Burckhausen, dans le ressort de laquelle il est. Ce bourg a une jurisdiction dont dépendent un monastère, un château, trois maisons seigneuriales, quatre bourgades & quelques autres terres. Quelques-uns donnent à Trostberg le titre de ville. * Zeyler, Topogr. Bavar. p. 82. TROTEBEC, petite riviere de France, dans la basle Normandie, au Cotantin. Elle a sa source dans la forêt de Brix, & tombe dans les Miéles, près de Cherbourg. * Corn. Dict. Vaudome, MS. geogr. TROTILUS OU TROGILUS. Voyez TROGILUS. TROU, (Le petit) lieu de l'Amérique septentrionale, dans la nouvelle France, à la côte méridionale du quartier du sud, dans l'ifle de S. Domingue, à moitié chemin du fond de l'isle à Vache, au cap Altavela ou de Mongon. TROU-BORDÉ, paroisse françoise de l'Amérique septentrionale, dans l'isle de S. Domingue, située à une lieue du fond du cul-de-sac de Saragua. TROU-CHARLES-BONBON, lieu de l'Amérique septentrionale, dans la nouvelle France, à la côte occidentale du quartier du sud de l'isle de S. Domingue, à huit ou dix lieues à l'occident du petit Goave. TROU-AU-CHAT, habitation dans l'Amérique septentrionale de la Martinique, dans la paroisle du bourg du fort Royal. Ce lieu est situé à un quart de lieue de la mer, au fond du cul-de-fac-Royal; c'est un passage à travers les montagnes pour aller au cul-de-fac-Robert, à l'anse du Gal. lion, & au cul de-fac à Vache. TROU-DU-DIABLE. On appelle ainsi un endroit du Danube, à fix milles de la ville de Lintz, & que des rochers qui traversent cette riviere dans ce lieu-là, rendent extrêmement dangereux. * Corn. Dict. TROU-JÉRÉMIE, lieu de l'Amérique septentrionale, dans la nouvelle France, à la côte occidentale du quartier du sud de l'isle de S. Domingue, vis-à-vis les Caymites. TROUBRIDGE, bourg d'Angleterre, dans la province de Wilts. Il a droit de tenir marché public. * Etat présent de la Gr. Bret. t. 1. TROUCEY ou TROUSSEY, village de France, dans la Lorraine, au diocèse de Toul. Ce lieu est assez confidérable; il est situé sur le rivage gauche de la Meuse, à deux lieues de Toul. C'étoit autrefois le chef-lieu d'une prévôté du domaine de l'église de Toul, & qui étoit du pays de Blois, contrée de ce diocèse, dite en latin pagus Blesensis. On lit que Viard de Gondrecourt ayant déclaré la guerre au chapitre de Toul, il brûla l'église de Troucey où la plûpart des habitans s'étoient réfugiés, & y fit périr deux cents cinquante personnes. Le chapitre de la cathédrale de Toul est seigneur de cette terre. Il est aussi patron de la cure pendant six mois, & le pape pendant les autres fix mois. L'église est sous le titre de saint Laurent. * Hist. de Toul, p. 80. TROUS (Les trois) de l'Amérique septentrionale, dans la nouvelle France, à la basse-terre de la Guadeloupe ; se Cont trois ravines d'eau salée & bleuâtre; elles passent entre les gotges des montagnes qui soutiennent la soufriere d'où ées caut descendent. Le premier est en venant de la riviere des grands Bananiets, & se nomme le Trou Madame; le second le Trou-au-Chien, & le troifiéme le Trouau-Chat. TROUVILLE-SUR-SEINE, paroisse de France, dans la Normandie, au Roumois, avec titre de baronnie. Elle est située à deux lienes au-dessus de Quillebœuf; son église paroittiale & ses maisons sont bâties sur la côte. On y recueille quantité de fruits pour les boissons, & des grains datis les campagnes qui s'étendent jusqu'à S. Ouen des Champs, S. Thurien, Sainte Opportune & autres. Les patoitfes de Quillebœuf, de S. Aubin, de Vieux-Port & de Trouville, forment cette baronnie qui appartient à l'abbaye de Jumiége. * Corn. Ditt. Mémoires dresses sur les lieux. 1. TROYA, cap d'Italie, sur la côte de Toscane, à l'entrée du golfe de Piombino à la droite. Du cap de Pionib:no, dit Michelot, Portulan de la Méditerranée, p. 104, au cap de Troya, il y a environ vingt milles vers le sud-eft. Entre les deux on trouve une espéce de golfe ou grand enfoncement d'environ treize milles en certains endroits, avec plages & in bas terrein templi de marécages & d'étangs, On appelle ce lieu-la la plaine de Calva Veilera; il y en a un autre du côté du sud-est dans un autre enfoncement nommé Stalino. Au bout de l'ouest du cap de la Troya est une petite ile allez haute, fur laquelle il y a une tout de garde ronde, éloignée de la côte d'environ un quart de lieue; entre cette ifle & la terre sont quelques écueils hors de l'eau. Sur cette pointe il y a une tour carrée, il y en a une autre un peu plus sur le terrein proche de la précédente, & un village dans le fond de la plage nommé l'Ifle. 2. TROYA OU TROIA, bourg d'Allemagne, dans la balle Carniole, sur le bord d'une petite riviere qui se jette dans la Saw. Ce bourg qui est situé au midi de Saaneck, est pris pat Lazius pour le Metulum des anciens. * Jaillot, Atlas. TROYE, en latin Troia ou Ilium, ville de l'Asie, la capitale de la Troade. Voyez ILION. On tient que cette ville qui étoit située sur le fleuve Scamandre ou Xanthus, à trois milles de la mer Egée, fut bârie par Dardanus, venu de Crete ou d'Italie, qui fut le premier roi des Troyens. Troye elt fort célébrée par les poetes, à cause du siege que les Grecs mirent devant cette ville; ils la brûlerent. Dardanus fonda cette ville l'an du monde 2524, & regna trente & un an; Erichthonius en regna foixante-cinq; Tros soixante & dix ; c'est de lui que cette ville prit le nom de Troye; elle se nommoit auparavant Dardanie. Iulus, qui lui succeda, régna cinquante quatre ans; c'est de fon nom que la fortereffe de Troye s'appella Iliam. Laomédon régna trente-fix ans; il båtit les murailles de Troye des trésors de Neptune & d'Apollon. Priam régna quarante ans. L'an du monde 2794, Paris, fils de Priam, enleva Héléne, femme de Ménélais, roi de Lacédémone. Les Grecs, après avoir demandé plusieurs fois qu'on tendît Héléne, déclarerent la guerre aux Troyens, & commencerent le fiége de Troye, qui fut prifé & brûtée dix ans après, l'an du monde 2820, avant l'ere vulgaire 1184. On prétend que cette guerre fi cruelle prenoit fon origine de plus haut. On dit qu'il y avoit une guerre hérédítaire entre la maison de Priam & celle d'Agamemnon. Tantale, roi de Phrygie, pere de Pélops, & bifaïeul d'Agamemnon & de Ménélaüs, avoit enlevé, il y avoit longtems, Ganymede, frere d'llus. Cet Ilus, grand-pere de Priam, pour se venger d'une injure qui le touchoit de fi près, dépouilla Tantale de ses états, & l'obligea de se refagier en Grece, où s'établirent les Pélopides qui donnerent le nom au Péloponnése. Paris, arriere-petit-fils d'Ilus, enleva Hélène par une espéce de représailles, contre Ménélaüs, arriere-petit-fils du ravissear de Ganymede. Il fant cependant convenir qu'il y a beaucoup de fables mêlées dans tout ce que les poëres nous disent du siége de Troye & des premiers héros de cette guerre, & qu'ainsi il ne faut pas trop compter fur ce qu'ils débitent d'Achille, d'Ajax, d'Ulyfle, de Paris, d'Hector, d'Enée & de tant d'autres, auffibien que du fameux cheval de bois, dont ils disent que les Grecs se servirent pour surprendre les Troyens qu'ils n'avoient pas pu réduire par la force. Le fameux cheval de bois, dit Paufanias, 1. 1, r. 23, eroit certaintinent une machine de guerre inventée par Epéus, & propre à renverfer les murs, telle que celles auxquelles on donna dans la fuite le nom de Belier; ou, continue Paufanias, il faut croire que les Troyens étoient des insentés, qui n'avolent pas oms bre de raifon. Il ne reste aucun vestige assuré de cette ancienne ville'; on voit à la vérité, dans le quartier où elle étoit, des ruines considérables; mais, quoi qu'en disent certains voyageurs, ce font plutôt les tuines de la nouvelle Troye, que celles de l'ancienne. On y trouve quantité de colonnes de marbres rompues, & une partie des murailles & des fondemens le long de la côte. Il n'y a rien d'entier, ce qui eft le moins ruine se trouve sur le bord de la mer. Un peu plus loin on voit le baffin du port, avec une grande & épaille muraille sur la côte: elle étoit, sans doute, ofnée de plusieurs colonnes de marbre qui sont à présent toutes brisées fut la terre, & dont les pieds, qui restent autour, font juger que le circuit da pott étoit d'environ quinze cents pas. L'entrée de ce port est aujourd'hui bouchée de sable, & il n'y reste presque pas d'eau. On ne fauroit dite que ce soit le port de l'ancienne Troye, ni que les antiquités que l'on voit foient de plus vieille date que le tems des Romains. Belon & Pietro della Valle affurent avec beaucoup de confiance, que ce sont les ruines de la fameuse Troye; mais c'est l'1lium moderne qu'Alexandre le Grand commença à bâtir, & que Lyfimaque acheva & appella Alexandtie, & qui fut enfuite une colonie des Romains. * Wheler, Voyage du Levant, tom. 1, p. 118. Spon, Voyage du Levant, t. I, p. 118. Un peu au-delà du port on trouve divers tombeaux de marbre, avec la tête d'Apollon sur quelques-uns, & fur d'autres des boucliers fans aucune inscription. Spon a remarqué que ces tombeaux sont de la même forme que ceux des Romains qui font en France, dans la ville d'Arles, ce qui fait juger que ce ne font pas les tombeaux des premiers Troyens, comme Pietro della Valle se l'est imaginé. Un peu plus au midi du port, il y a deux colonnes couchées par tette; elles ont chacune trente pieds de long; une troiliéme en a trente-cinq; celle-ci, qui est rompue en trois morceaux, est de marbre granite d'Egypte, & a un diametre de quatre pieds neuf pouces. Le grand seigneur (Mahomet IV) fit enlever de ce lieu une grande quantité de colommes pour la fabrique de la mosquée neuve de la sultane mere. En allant encore plus le long de la côte, on trouve les débris d'un aqueduc qui conduisoit l'eau au port. A quelque distance de-là est un canal ou foffé, long, étroit & pro. fond, fait apparemment pour laisser entrer la mer, afin que les vaisseaux allassent jusqu'à la ville; mais il est aujourd'hui à fec. Droit au dessus, un peu à la droite, on voit d'autres mafures très-considérables qui découvrent la grandeur de la ville. Il y a un théâtre, des fondemens de temples & de palais, avec des arcades autour, & des voûtes fous terre. On y trouve encore debout une partie d'un petit temple rond, qui a une corniche de marbre au dedans. Tout proche font trois carreaux de marbre faits en façon d'autel ou de piédestal, avec des inscriptions qui ne different que dans les derniers caractères, comme vic. VII. VIC. VIII. & vic. ix. Il suffit de rappotter l'une des trois. DIVI JULI FLAMINI Ces inscriptions font à l'honneur de Caïus Antonins Rufus, fils de Marcus, de la tribu Voltinie, prêtre de Jule & d'Augufte Cefar, fait chef de la colonie d'Apri, par Claudius, & de Philippi par Julius, comme auffi de la colonie Parium par Julius, & mestre de camp de la cohorte XXXII, des volontaires, commandant de la légion XIII, appellée Germina, & capitaine de la premiere aîle de cavalerie valerie des Scubuli. La derniere ligne de chacune de ces inscriptions n'est pas aisée à expliquer. Spon a cru pourtant que VIC. VII. VIC. VIII. & VIC. IX. signifioient ViCUS SEPTIMUS, VICUS OCTAVUS & VICUS NONUS, c'est-à-dire, la septiéme, la buitiéme & la neuvième rue où ces statues avoient été placées, à l'imitation des rues de Rome. Troye, colonie des Romains, fondée par Auguste, & qui en avoit pris le nom de Colonia Augusti Troas, avoit apparemment ses quartiers & ses tribus, comme la ville de ! ! Rome. Selon les apparences, le quartier le plus habité de la ville étoit sur le plus haut d'une colline que l'on monte insensiblement depuis le rivage, environ à deux milles de la mer. On voit en cet endroit quantité de masures, de temples, de voûtes & un théâtre, mais particulierement trois arcades & des pans de murailles qui restent d'un bâtiment superbe, dont la fituation avantageuse & l'étendue font connoître que c'étoit le palais le plus considérable de la ville. Je ne crois pas, dit Spon, comme le disent ceux des environs de Troye, que c'étoit le château de Priam; car je ne le tiens pas plus ancien que le tems des premiers empereurs romains. Ce bâtiment étoit presque tout de marbre, & les murailles ont douze pieds d'épaisseur. Au-devant de ces arcades, qui paroiffent avoir foutenu une voûte, il y a une si prodigieuse quantité de quartiers de marbre entaffés les uns fur les autres, qu'on peut aisément juger par-là de la hauteur & de la beauté de ce palais. Le terroir des environs de Troye est inculte, à la réserve de quelques endroits où il croît du coton. Le reste n'est que broisailles, ronces, épines & chênes verds, & on peut dire aujourd'hui ce que Lucain disoit de son tems : Jam Sylva steriles & putres robore trunci On y trouve des lievres, des cailles & des perdrix en abondance. On y voit aussi un oiseau de la grosseur de la grive, ayant la tête & la gorge d'un jaune éclatant, le dos & les aîles d'un verd gai, comme un verdrier, le bec & la tête comme la grive, & aufli gras que les ortolans en France. On y trouve encore un autre oiseau à peu près de même grosseur; mais il est fait comme un héron, & tacheté comme un épervier, avec un long bec, de longues jambes, des griffes & une créte de longues plumes sur la tête. TROYEN ou tHUYS VAN TROVEN, c'est à-dire, la maison de Troyen. Stokius, ad ann. 1300, donne ce nom à un château de la province de Zéelande, sans dire dans quelle isle de cette province il étoit. Stokius ajoute que les ennemis abandonnerent ce château à l'arrivée du fils de Jean de Hanau, comte de Hollande. * Alting. Not. Germ. inf. part. II. p. 185. TROYES, Tricassium, ville de France, dans la Champagne, la capitale & le plus ancien titre des comtes de Champagne, & qui est estimée encore aujourd'hui la premiere ville de la province, quoiqu'elle n'ait à présent aucune prérogative au-dessus de plusieurs autres villes. Elle a pris son nom des peuples Celtes Tricaffes ou Trecaffes, que Céfar a'a point connus, mais qu'Auguste a dû établir en corps de peuple ou de cité, puisque c'est lui qui est le fondateur de leur principale place qu'il appella Augustomana ou Augustobona, nom qui a été en usage jusqu'au cinquiéme siècle. Pline fait mention des Tricasses parmi les Celtes, sans nommer leur ville Augustobona, que Ptolomée a marquée; en quoi il a été suivi des autres anciens jusqu'à l'an 450, après quoi le nom du peuple a prévalu comme ailleurs, & a été corrompu dans le sixieme siécle de Tricaffes en Treca; ce qui se voit, parce que Grégoire de Tours emploie l'un & l'autre ; & les écrivains qui font venus après lui appellent toujours Troyes Treca. Durant la diffipation de l'empire romain, cette ville passa au pouvoir des François, & après la division de la France en Austrafie & Neustrie, Troyes fut de la Neustrie; ensorte que les rois de la Neustrie en ont toujours eu la propriété ou la souveraineté. Lorsqu'on inftitua une quatriéme Lyonnoise, sur le déclin de l'empire romain, la ville de Troyes fut mise sous cetre province; de sorte que les évêques de Troyes ont toujours, jusqu'à présent, reconnu celui de Sens pour leur métropolitain. * Longuerue, Description de la France, I part. p. 32. La ville de Troyes est située sur la riviere de Seine, & environnée de beile & grandes prairies, entrecoupées de canaux, que le comte Henri I fit tirer de la riviere : ces canaux, outre l'utilité qu'en reçoivent les ouvriers de différens métiers & manufactures qui font en cette ville, ne contribuent pas peu à en rendre la situation agréable. C'étoit autrefois une des principales & des plus riches villes du royaume, à cause du grand commerce qu'elle avoit avec les étrangers, particulierement les Allemands. Le roi y est seul seigneur, comme étoient autrefois les comtes de Champagne. Le nom de Troye est en latin Tricaffium ou Treces, comme qui diroit Tres Arces, trois Châteaux; en effet, on y voit encore les restes de ces trois châteaux, dont le plus considérable subsiste en partie, & il ne reste presque que les ruines des deux autres. Le premier étoit le lieu le plus ordinaire de la réfidence des comtes, & fert aujourd'hui de palais où l'on rend la justice. L'église de saint Etienne, qui joint ce palais, en étoit la sainte chapelle, ainsi qu'il est énoncé dans la bulle du pape Alexandre III, qui révoque les priviléges de cette eglife. Il y a, derriere, un hôpital appellé l'Hôtel-Dieu-leComte, qui faisoit partie de ce château, où l'on voit encore une motte de terre assez élevée, d'où les comtes pouvoient voir au-dessus de tous les bâtimens de la ville. Ils ne permettoient à personne d'en élever de plus hauts que cette motte, que pour des sommes considérables: ce qui a fait dire que ces princes vendoient l'air. Le second de ces châteaux est presqu'entierement abattu, & on n'y voit plus que les restes d'une tour, & quelques murailles, qui font un cercle derriere le couvent des cordeliers, & la prison qui faisoit autrefois partie de ce château ; sur quoi on peut faire cette remarque, que s'il y avoit de belles prifons, celle ci tiendroit sans doute un rang confidérable parmi elles. On voyoit encore dans l'une de ces chambres, une très-ancienne cheminée, qui a été détruite depuis peu, sur laquelle il y avoit pour armes, dans un écuflon à l'antique, trois crapauds, sur quoi les curieux & les critiques feront telles observations qu'il leur plaira. L'église de faint Blaise, que l'on nommoit autrefois faint Jean le Châtel, servoit à ce château de chapelle : elle étoit desservie par des bénédictins. Le troisiéme château étoit entre l'église de saint Nicolas au Marché & la porte de Belfroy, aujourd'hui la place de la Vicomté. Ce fut dans ce château que, vers l'an 878, Louis le Bégue, roi de France, régala le pape Jean VIII, après avoir reçu de sa main la couronne impériale, dans un synode tenu dans l'église de Troyes, où se trouverent la plus grande partie des évêques de France. L'église de saint Nicolas s'appelloit, en ce tems, fanctus Nicolaus in Castro, parce qu'elle servoit de chapelle à ce troifiéme château. Il fut ruiné par un incendie en 1524. Les jardins des comtes de Champagne étoient grands & bien ornés.* Baugier, Mém. hist, de Champagne, t. 1, p. 239 & suiv. Les murailles de Troyes font assez bonnes, & de grande étendue, mais mal entretenues. Cette ville n'est environnée d'aucune montagne, l'air y est bon. Son terroir produit toutes fortes de grains, des vins, des fruits en abondance, & toutes les choses nécessaires à la vie; mais elle manque de bonne eau, & celle dont usent les habitans cause les écrouelles. Ceux qui sont un peu aisés en font apporter de la Seine. L'utilité du public demanderoit qu'on y fit des fontaines. La source d'eau vive, qui forme le ruisseau nommé la Vienne, seroit d'un grand secours pour cette entreprise. Les sept pairs de Champagne avoient leurs hôtels à Troyes, où ils logeoient, lorsque les comtes tenoient leurs états, ou qu'ils venoient lui faire leur cour. Cette ville a donné la naissance au pape Urbain IV, qui fut baptisé dans l'église de Notre-Dame-aux-Nonains. Il étoit fils d'un cordonnier nommé Jacques Pantaléon, qui fut inhumé dans la même église, & fa mere dans celle de Notre-Dame-des-Prés, ordre de câteaux. Lui-même a reconnu la bassesse de son extraction dans une lettre qu'il écrivit, à son avénement au souverain pontificat, à l'abbesse de Notre-Dame de Troyes, où il dit que la providence l'a tiré de la poufliere, pour l'élever au plus haut degré d'honneur où un homme puisse monter. On voyoir Tome V. $sffff 1 |