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de toute la côte de la mer du Sud. A trois lieues vers l'est de la pointe de la Galere est un morne, appellé Morro Gonzales, sur lequel il y a une baterie : au nord - est quart du nord de ce morne, il y en a un autre nommé Morro Bonifacio. Aces deux mornes commence l'embouchure de la riviere de Baldivia, qui peut avoir environ quatre lieues de largeur en cet endroit; mais les deux côtés venant à se rapprocher vers le fud-fud-est, ne forment plus qu'un goulet d'environ demi-lieue de large, & dont l'entrée est défendue par quatre forts, deux de chaque côté ; & particulierement par le premier de babord, appellé le FORT DE NIEBLE, qu'il faut ranger de fort près pour éviter des bancs de fable, qui s'avancent à tiers canal depuis le pied de la MARGUE, qui est celui de tribord. Si l'on veut ensuite mouiller au port de CORRAL, on vient en arondissant le tribord, jusqu'au pied du fort de même nom, mouiller sur quatre brafses d'eau ; fi on veut aller devant la ville, c'est-àdire au lieu le plus près, on passe entre le fort de Nieble & celui de Manfera, qui est sur l'isle de ConStantino Perez, en rangeant la côte du sud d'une grande Ifle, derriere laquelle, en terre ferme, est un port si commode, qu'on y débarque les marchandises sur un ponton, fans le secours des chaloupes.

Depuis le Port du CORRAL, les chaloupes ont un chemin la moitié plus court, par le canal que forme la grande isle & la terre de babord. Les navires n'y paffent pas de crainte des bancs qu'il y a vers le milieu. En quelque endroit qu'on soit mouillé, on est toujours en sûreté de tous vents, parce que la tenue y est bonne, sur un fond de vase dure, & qu'il n'y a point de mer, excepté auprès du port du Corral au vent de Nord. On y fait par-tout de l'eau commodément: le bois y eft en abondance, tant pour brûler , que pour construire des navires, le terrein y étant cultivé & très-fertile en grains & légumes. Les raisins n'y mûrissent pas; mais on peut fuppléer au défaut de vin par le cidre; car il y a une si grande quantité de pommiers, qu'il s'en trouve de petites

forêts.

Les avantages de ce port ont engagé les Espagnols à faire plusieurs forts pour en défendre l'entrée aux Nations étrangeres, parce qu'ils le regardent comme la clef de la mer du Sud. Les Hollandois ont voulu s'y établir, pour s'assurer une retraite qui pût leur faciliter l'entrée dans cette mer. En 1643, ils s'en rendirent maîtres; mais la difette, les maladies, & particulierement la mort de leur Général les ayant affoiblis, ils furent contraints de se retirer & d'abandonner leur bagage, avec trente piéces de canon, parce qu'ils avoient été informés du secours qu'envoyoit le Marquis de Mansera, Viceroi du Pérou. Aujourd'hui il y a plus de cent piéces de canon, qui se croisent à l'entrée. Le fort de Mansera en a quarante; celui de Nieble trente, celuide Margue vingt, celui du Corral dix-huit; & la plupart sont de fonte. Pour ne pas laisser ce port dépourvu, on y envoye les blancs du Pérou & du Chili, condamnés à l'exil pour quelque crime; de forte que c'est une espece de Galere. On les occupe aux fortifications, & aux besoins de la garnison, qui n'est composée que de ces fortes de gens, qu'on fait Soldats & Officiers, même pendant le temps de leur punition. Le Viceroi doit envoyer tous les ans trois cens mille écus pour l'entretien des fortifications & des Troupes. Cette somme n'est pas toujours bien exactement fournie; aussi le Président du Chilli ne manque point d'envoyer tous les ans un bon secours, dont les Gouverneurs profitent; de forte que ce poste est le plus recherché de toute la côte pour le revenu, quoiqu'il doive être désagréable par la mauvaise compagnie qu'on y trouve, & fort ennuyant pendant près de fix mois de pluies continuelles tous les Hivers.

VALDONE, Prieuré de Filles, en Funce, dans la Champagne, à deux lieues au nord de Joinville, & à trois au Levant de Vaffy, dans un valon fort étroit, & entouré de hautes montagnes. Quelquesuns donnent mal à propos à ce Prieuré le titre d'Abbaye. Il est de l'Ordre de Saint Benoît, de la dépendance de Molême. Il fut érigé en titre de Prieuré

à l'honneur de la Sainte Vierge & de Saint Robert, environ l'an 1116. ou 1140, par Geofroi, ou Go defroi, Seigneur de Joinville, Félicité de Brienne son épouse, son fils Guy, Archidiacre de Langres, & fon frere Robert, comme il paroît par le titre dé fondation, qui eft fans date. Hugues de Grex donna enfuite la moitié de la Terre du Monastere, l'autre moitié ayant été donnée par Geofroi. Ce Monastere a été plusieurs fois pille & brûlé pendant les guer res. Les montagnes dont il est environné l'incommodent extrêmement lorsque les neiges viennent à fondre. Cet inconvénient avoit fait prendre la résolution de le transférer à Vassy; mais on transféra en 1702, les Religieuses au Village de Charenton, à deux lieues de Paris, une personne charitable ayant acheté pour cet effet, de la Communauté des nouvelles Catholiques de Paris le 2. Octobre 1700, la place où étoit le Temple des Réformés, à condition d'y établir à perpétuité une Confrairie de l'adora. tion perpétuelle du Saint Sacrement. Il y avoit dans ce Monastere, au temps de leur translation, trentecinq Religieuses sous une Prieure titulaire, & le revenu étoit d'environ quatre mille livres. * Baugier, Mém. de Champagne, t. 2, p. 177.

VALDORÉ, valée de France dans la baffe Picardie, entre la ville d'Ardres, & le château de Guines. Elle est remarquable par l'entrevue que le Roi François premier eut avec Henri VIII, Roi d'Angleterre, l'an 1520. On y montra de part & d'autre tant de magnificence, qu'on donna à cette valée le nom de camp du drap d'or. Mém. dứ Temps.

VALENA, ville de la Haute Pannonie. Ptolomée, l. 2, c. 15, la met au nombre des villes qui étoient éloignées du Danube. Cependant Villeneuve & Mollet veulent que ce soit aujourd'hui la ville de Gran; selon Lazius, c'est Valbach. Quelques exemplaires de Proomée , au lieu de Valena, lisent Valina.

VALENÇAY. Voyez VALENCÉ.

1. VALENCE, Royaume d'Espagne: il tire fon nom de la Capitale, & s'étend du nord au fud de la longueur d'environ soixante-fix lieues, sur vingt-cinq dans sa plus grande largeur; de forte qu'il est long & étroit. La mer méditerranée le borne à l'orient & au midi, ce qui lui donne près de soixante lieues de côtes; au nor-est, il est borné par un coin de la Catalogne; au nord, par l'Aragon; & au couchant, par la Castille nouvelle, & par le Royaume de Murcie. C'est le Pays qu'habitoient anciennement les Celtibériens, les Contestains & les Lufons. * Délices_d'Espagne, p. 544.

Le Royaume de Valence a trente-cinq rivieres, tant grandes que petites; elles coulent à l'orient ou au fud - eft. Les principales font, en commençant par l'occident, la Segura, qui baigne deux Royaumes, celui de Murcie, qu'elle traverse, & celui de Valence, où elle mouille Origuela, & se décharge dans la mer près de Guardamar: le Xucar, qui prend sa fource de la nouvelle Castille, y traverse la petite Province de la Sierra, où il reçoit deux petites rivieres, le Cabriel & l'Algarra, après quoi il vient arrofer le Royaume de Valence en largeur de l'occident à l'o rient, & va se perdre dans la mer, près d'une petite: place nommée Cullera, qui donne fon nom à un cap voisin: le Guadalaviar, ainsi appellé par les Maures d'un mot qui veut dire eau pure, naît aux confins de l'Aragon & de la Castille nouvelle, à quelques milles de la ville d'Albarrazin, près de la source du Tage: il arrose le Royaume d'Aragon, traverse celui de Valence, de l'occident à l'orient, & se jette dans la Méditerranée, au-dessous de la capitale: le Morvedro, qui traverse le Royaume de Valence de l'occident au fud - eft, & se perd dans la mer, audessous d'une ville dont il porte le nom ; & enfin le Millas, Miglias, ou Millares, qui paffe à Onda, & entre dans la mér, au-dessous de Villa-Real.

A trois lieues de Murcie se trouvent les confins du royaume de Valence, & l'on voit dans cet en droit une grosse pierre, mise sur une hauteur, pour marquer la borne des deux royaumes. Cet endroit

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étoit autrefois dangereux, rempli de bandits, à cause de la facilité qu'ils avoient de passer d'un Royaume à l'autre, d'abord qu'ils avoient fait quelque méchant

coup.

es

On convient que le Royaume de Valence est l'un des mieux peuples de toute l'Espagne. On y compte sept cités, soixante - quatre villes murées, grandes ou petites, mille villages, & quatre bons ports de mer, dont le plus considérable est Alicante. C'est auffi l'un des plus agréables Pays de la Monarchie. L'air y est doux, & fi temperé, qu'on y jouit presque d'un printems continuel. La grande quantité de rivieres & de ruisseaux, dont il est arrosé, le rend extrêmement fertile, particulierement en vins & en fruits. Les valées & les plaines sont couvertes de toutes fortes d'arbres fruitiers, qu'on voit en toutes saisons chargés de fruits, ou parés de fleurs. On y recueille aussi du riz, du lin fort précieux, du chanvre, de la foie, du miel & du sucre. Il est vrai que le pays eft entrecoupé de montagnes fort rudes, & la plupart stériles. On y nourrit cependant des troupeaux; & il y a des mines d'alun, de fer, comme autour du cap Martin. On en trouve aussi quelquesunes d'argent & d'or, de même que des carrieres d'albâtre, de chaux, de plâtre, de calamine, d'argile, dont on fait de très-beaux vafes, & de pierre de lapis. La mer y fournit diverses especes de bons poisfons, particulierement des alloses & des tons.

Ce pays fut érigé en Royaume l'an 788, par Abdalla, gouverneur de Valence, qui se tira de la fujection du du Roi de Cordouë, auquel néanmoins il fut contraint de payer annuellement un tribut de dixsept mille maravedis. Le dernier Roi de Valence fut Zahen, qui fut dépossédé de sa capitale dans le treifiéme fiécle, & contraint de se retirer, avec cinquante mille Maures.

Quoique le Royaume de Valence soit un des mieux peuplés de l'Espagne, il l'étoit encore davantage autrefois. C'est-là qu'étoit la plus grande partie des Maures, qui furent chassés de l'Espagne en 1610. Aujourd'hui encore les Habitans sont fort mêlés de Chrétiens vieux, & de nouveaux, comme on parle en Espagne: de là vient que le langage y est très-impur, & plus mêlé d'Arabe que par tout ailleurs. Les descendans des Maures, font bons Laboureurs, appliqués au travail, & fort sobres.

2. VALENCE, ville d'Espagne, & la Capitale d'un Royaume, auquel elle donne fon nom. Cette ville est fort ancienne. Elle fut donnée l'an de Rome 616, près de cent quarante ans avant Jesus-Christ, à de vieux Soldats, qui avoient servi sous le fameux Viriatus: de là vient que les habitans prenoient le nom de Veteres, ou de Veterani, comme il paroît par l'inscription suivante, qu'on a trouvée dans la ville:

:

C. VALENTI HOSTILLIANO. MESSIO. QUINCTIO. NOBILISSIMO. CAS. PRINCIPI JUVENTUTIS VALENTINI.

VETERA. ET. VETERES.

Pompée détruifit cette ville dans le temps de la guerre de Sertorius; mais elle fut rétablie dans la suite. Les Maures, qui s'en étoient saisis, la perdirent dans le onziéme fiécle, par la valeur du fameux Héros Rodrigue, furnommé le Cid. Ils la reprirent après sa mort, & s'y maintinrent jusqu'en 1238, que Jacques I. Roi d'Aragon, la leur enleva pour toujours. * Delices d'Espagne, p. 558. & fuiv.

Cette ville est située à trois milles de la mer, au bord du Guadalaviar, dans une campagne extrêmement agréable & fertile. On y jouit d'un air fi doux, & fi temperé, qu'on n'y sent jamais d'hiver, & l'on y trouve en abondance toutes les choses qui fervent aux besoins & aux délices de la vie. La ville est grande: elle contient environ douze mille feux dans fon enceinte, fans compter les fauxbourgs & les jardins de plaisance, qu'on voit au tour, & qui en font bien encore un pareil nombre. Elle est le fiége d'une Université & d'un Archevêché, qui y fut fondé

en 1492, par le Pape Innocent VIII, à la priere des Rois catholiques & du Cardinal Roderic Borgia. L'Archevêque a trente à quarante mille ducats de.

rente.

Valence ayant été reprise par les chrétiens dans le treiziéme fiécle, & abandonnée des Maures, qui furent contraints de la leur céder, on y envoya une peuplade d'Espagnols, prise de l'Aragon & de la Catalogne, jusqu'au nombre de huit cens quatre-vingtquatre chefs de familles, qui se sont multipliés avec le temps. Les Habitans font fort civils & fort gais. Les femmes y passent pour les plus belles, & le plus galantes du Royaume. La ville eft fort belle, très-agréable, & ornée de très-beaux édifices: de là vient qu'en Espagne on la nomma VALENCIA HERMOSA, Valence la Belle. On y remarque l'Eglise cathédrale, dont le clocher est élevé de cent trente pieds. L'un des côtés du chœur eft tout incrusté d'albâtre, & orné de très-belles peintures; dont les sujets font tirés des histoires de la bible. Le grand autel, qui est tour couvert d'argent, est éclairé de quatorze lampes de même métal, fuspendues au devant. Il y a un riche trésor dans cette Eglise. L'Archevêque est vêtu comme un Cardinal, & les Chanoines portent l'habit violet, & ont le rochet & le camail dans les cérémonies de l'Eglife. Les canonicats valent chacun trois mille écus.

On pourroit dire qu'il y a autant de palais que de maisons à Valence, tant les bâtimens y font magnifiques. La Maison de ville, le palais de la Ciuta, & celui de la Députation, font les plus beaux. On traite dans ce dernier des affaires qui regardent le royaume. Le palais du viceroi, appellé la Real de Su Eccellencia, est de l'autre côté de la riviere. Son architecture fait voir qu'il a été bâti du temps des Maures. Ses tours sont bordées de creneaux, comme les murailles qui le ferment. Les jardins font admirés pour la diversité de leurs grottes, de leurs bocages, & des lieux remplis d'eau, qui les rendent toujours verdoyans.

Toutes les rues de Valence font longues & bel les, à l'exception de celles qui font du côté du marché au poisson, où est la rue des orfévres. La grande, appellée Calle de la Mar, commence à la Porte de Saint Vincent. C'est dans cette ruë qu'on trouve l'Eglise de Saint Martin, ornée d'une haute tour carrée, & voisine du grand marché. La Longa de la Seda, autrement la bourse, est dans cette place. C'est un grand palais où s'assemblent les marchands pour parler de leurs affaires, dans une sale foutenue de plusieurs hautes colonnes très-bien travaillées. On voit de là la belle Eglise des Jésuites, qui est couverse d'un dôme, & celle de Saint Jean qui est près d'une autre place. Il y aussi dans cette ville plusieurs colléges : ceux de Saint Thomas de Villanova, de Philippueri & del Patriarcha font les plus considérables, avec le collége de l'Université, où sont les classes des écoliers, qui y viennent de tous les autres Colléges. Celui du patriarche est une congrégation de trente prêtres, fondée par un Archevêque de la Maison de Guevara. C'est un très-beau bâtiment, avec une grande cour carrée, au milieu de laquelle est une fontaine qui passe pour une des plus belles de toute l'Espagne à cause de fon baffin de marbre, & des figures qui l'e

te tous les jours le Service en musique dans l'Eglise de ce college, où il y a un beau Crucifix, qu'on ne découvre que les vendredis, avec beaucoup de cérémonie. On voit dans les chapelles plusieurs tombeaux d'Archevêques & de Cardinaux ; & on admire de tous côtés les peintures & les dorures, principalement celles du maître autel. Le Couvent royal de l'Ordre de Saint Jerôme est hors de la Ville. On l'appelle San Miguel del Rey, à cause que Philippe III. le fit bâtir, & le dota d'un grand revenu. Cette Eglife est un lieu de dévotion pour les bourgeois, & fes grands cloîtres, & ses jardins en font une de promenade.

Lorsque Jacques I. roi d'Aragon, conquit la ville de Valence sur les Maures, elle avoit seulement mille pas de tour, & quatre portes, savoir, la Boatellane, la Baldine, la Templaire, ou la Porte des Templiers, & la Xareane; mais dans la fuite on l'agrandit de beaucoup, & de ronde on la fit carrée. Préfentement il y a douze portes, dont les principales font celles du Réal, des Juifs, de Rusase, des Innocens, de los Saranos, & de los Tintes. Il y a dix mille puits ou fontaines d'eau vive, & cinq grands ponts sur la riviere de Guadalaviar; ; entre lesquels celui qu'on appelle Réal est le plus beau. Celui de la porte Serance, qui est enfuite, mene au palais du Viceroi. Ces ponts ont quinze pas de largeur & trois cens de longueur.

Valence n'est pas une Place forte. On y fait de très-bonnes draperies, qui font fortes, d'un bon ufage, & propres à résister à la pluie. On y fait auffi quantité d'étoffes de foie: de-là vient que les mûriers y font d'un gros revenu pour les habitans. La beauté du lieu, les agrémens de fa fituation, la fertilité du terroir, la douceur de l'air, le voisinage de la Mer, tout cela ensemble fait que Valence est habitée par la plus grande partie de la Noblesse du Royaume, & par un très-grand nombre de Marchands qui y font fleurir le commerce. L'Université y attire auffi beaucoup de gens d'étude.

Cette ville a l'honneur d'avoir produit deux Papes de la Maison de Borgia, savoir Alfonfe & Roderic: le premier prir le nom de Calixte III, & le second celui d'Alexandre VI. Le savant Louis Vivès étoit aussi de Valence. Les Rois y tenoient ci-devant un Viceroi, commandant de leur part, & qui régloit les affaires de ce Royaume avec douze Conseillers qu'on lui donnoit pour Affeffeurs. Le Roi pouvoit dispofer de cette Charge en faveur de qui il vouloit: mais il étoit obligé d'aller à Valence, & d'y préfenter son fils aux Etats pour Prince. Cet usage ne fubfifte plus. Philippe V. dépouilla en 1705. ce Royaume de ses priviléges, pour avoir tenu le parti de l'Archiduc, & il a réuni le Royaume de Valence à celui de Castille, dont il doit être désormais une Province. La ville a un gouverneur pour ses affaires particulieres, & il se nomme Corregidor. La Noblesse fait un corps à part, & a de même une Chambre particuliere, qu'on appelle la Casa de la Députacion. Il ne faut pas oublier qu'on trouve à Valence un grand nombre de monumens d'antiquités, & que cette Ville a eu l'honneur de voir célébrer un Concile dans son enceinte l'an 524.

Tout près de cette ville, au midi, la mer forme un lac de trois lieuës de long, & d'une de large. Les habitans l'appellent Albufera, d'un nom retenu des Maures; les Romains le nommoient amanum Stagnum. Il est fécond en divers poiffons fort délicats: on y pêche entr'autres des thons, des aloses & des anguilles.

LE GOLFE DE VALENCE eft formé par la partie de la mer méditerranée qui baigne les côtes du royaume de Valence. Il s'étend depuis l'embouchure de l'Ebre, jusqu'au Cap nommé la Punta del Empo

rador.

3. VALENCE, ville de France dans le Dauphiné, & la capitale du Valentinois, auquel elle donne fon nom. Elle est située sur le bord oriental du Rhône, à sept lieuës de Die, à neuf de Viviers, & à onze de Vienne, entre ces deux dernieres vil les. C'est une des plus anciennes villes des Gaules, puisqu'elle étoit déja colonie Romaine du temps de Pline l'ancien qui vivoit sous Neron & Vespafien. * Longueruë, Descr. de la France, part. 1, p. 330.

Après l'inisttution des nouvelles provinces, Valence demeura sous la premiere Viennoise, & après la ruine de l'Empire Romain, elle fut foumise aux Bourguignons, & ensuite aux François Mérovingiens. Sous les Carlovingiens, elle fut du Royaume de Bourgogne & d'Arles, & reconnut ceux qui, n'étant pas de la race de Charlemagne, jouirent de ce Royaume.

Cette Ville n'étoit point sujette aux comtes de Valentinois. Les Evêques y étoient fort puissans; mais elle ne reconnoissoit pour véritable souverain que l'Empereur Roi de Bourgogne & d'Arles. Frederic Barberousse, étant dans la ville de Besançon,

donna la propriété & la seigneurie absoluë de la ville de Valence à l'Evêque nommé Eudes, & par ses Lettres, il voulut que tous les Monafteres & autres Eglises fuffent, pour la Jurisdiction temporelle, afsujettis à ce Prélat, qui ne devoit reconnoître audessus de lui, pour la ville de Valence, & pour tour ce qui appartenoit à fon Evêché, que l'Empereur seul. Depuis ce temps les Evêques prirent le titre de com tes de Valence, qu'ils confervent encore aujourd'hui. Ils ont eu le haut domaine de leur ville, jusqu'à l'an 1449, que l'Evêque, Louis de Poitiers, reconnur la fouveraineté de Louis, Dauphin de Viennois, Comte de Valantinois & Diois, à qui il fit hommage, ayant suivil'exemple de Jean Gerard, Archevêque de Vienne, fon Métropolitain; de forte qu'il n'est resté à l'Evêque que la seigneurie utile, & le Roi y établit un fiége Royal, & un préfidial.

Hofman dit que la ville de Valence a été ainsi appellée, à cause qu'elle étoit très-forte, Valentia à viribus & robore. Cette ville est d'une médiocre grandeur. Sa cathédrale est un assez joli bâtiment. Le chœur est plus élevé que la nef. La place des clercs, qui est vis-à-vis de cette Eglife, est affez grande; mais les maifons qui font autour n'en font pas belles. Il y a encore quelques autres Places dans la ville, entr'autres celle de la Pierre où se tient le marché. L'Evêché est une belle maison. Les vûes du jardin donnent sur le Rhône, & font fort étendues. La ci tadelle fut bâtie sous François I, & est peu de chose. Dans le cloître des Cordeliers on voit la représen tation d'un squelette de Géant, qui avoit quinze cou dées de haut. Une inscription latine, qu'on fit met tre au même endroit en 1648, nous apprend que ce Géant s'appelloit Buardus, & que c'étoit un tyran du Vivarez, dont les os ayant été trouvés en 1456, furent enterrés dans ce cloître. Les murailles de la ville font fort bonnes, & le mail est dans les fossés. On a tenu trois Conciles à Valence; le premier en 374; le second en 584, & le troifiéme en 855. * Piganiol, Defcr. de la France, t. 4, p. 58.

Il y a aujourd'hui dans la ville de Valence l'Abbaye de Saint Ruf, qui est chef d'Ordre, & dont les religieux font chanoines réguliers de Saint Augustin. Cet institut eut fon premier commencement à Avignon par certains prêtres, qui voyant la vie licentieuse du Clergé de ce temps-là instituerent un Ordre de cleres, lesquels (sans abandonner leur profession,) joignirent à la vie cléricale une partie des austérités des moines, en s'engageant par des vœux à la vie religieufe. Benoît, Evêque d'Avignon, leur donna l'ancienne Eglife de Saint Ruf, qui étoit fur la Durance; ils y demeurerent cent dix ans, après quoi l'Abbé Raimond transfera l'an 1162, ce monastere près de la ville de Valence, dans une isle du Rhône, nommée l'Esparviere.. Les réformés ayant ruiné de fond en comble cette Abbaye, sous Char les IX, l'Abbé & les religieux se retirerent dans la ville de Valence.

L'Evêché de Valence est fort ancien, puisque dès l'an 300, il y avoit un Evêque, appellé Emilien, dont il est parlé dans la vie de Saint Marcellin. Cet Evêché vaut environ quatorze mille livres, & a dans fon diocèse cent une paroisses, foixante & fix desquels sont en Dauphiné, trente-cinq en Vivarez. L'Eglife Cathédrale fut consacrée en 1006, par le Pape Urbain II, en l'honneur de Saint Corneille & de Saint Cyprien, quoiqu'elle porte aujourd'hui le nom de Saint Apollinaire. Son Chapitre est composé d'un Doyen, d'un Prevôt, de l'Abbé de Saint Felix, & d'un Archidiacre, qui font les quatre Dignités. Il y a un Précenteur & un Sacriftain, qui ont rang avanť les Chanoines, mais qui ne font que personnats. Les Chanoines font au nombre de quatorze. Leur revenu est différent suivant leur ancienneté. On les estime depuis trois cens livres jusqu'à onze cens cinquante. Le Chapitre de Saint Pierre du Bourg, eft auffi dans Valence, & est compofé de huit Chanoines, dont le premier est appellé le Prieur, & jouit de quatre cens livres de rente. Lerevenu des autres dépend auffi de l'ancienneté, & va depuis cent cinquante livres jus qu'à fix ou sept cens. Il n'y a dans ce diocèse que

1

:

deux Abbayes d'hommes, qui font celles de Saint Ruf, & celle de Saint Thiers de Saou, & deux de filles, celles de Vernaison, & de Soyon.

Les environs de Valence font agréables & arrofés par des fontaines, dont les eaux font très-pures. On monte sur un petit côteau qui fait un demi-cercle autour de la ville, & qui lui fert, pour ainsi dire, de cirque naturel, aussi exactement fait que si c'étoit un ouvrage de l'art.

A l'accafion du portrait du squelette gigantesque, qu'on voit aux Cordeliers de Valence, Spon, Voyage de Provence, l. 1, remarque qu'on en a transporté quelques os au cabinet du Roi, & qu'on en montre au Couvent de Saint Ruf, qui font d'une grandeur prodigieufe. On eft encore plus infatué de ces os de Géans à Soyons & à Charmes: ce font deux Villages près de Valence, au-delà du Rhône. On y montre de ces grands os, & dans la campagne on voit des pierres à peu près comme des pierres de moulin trouées au milieu, dont les femmes de ces Géans, à ce que disent les bonne gens de ce pays-là, se servoient pour mettre au bout de leurs fuseaux. Près de Charmes il y a une petite montagne, à la cime de laquelle se trouve un tombeau antique, avec une inscription. Le peuple entêté d'une dévotion indiscrette, va souvent visiter ce sépulcre, prétendant qu'il est de quelque Saint inconnu. Spon affure pourtant qu'il ne put y observer aucune marque de chriftianisme, comme font les Croix, les figures de la Bible, l'Alpha ou l'Omega. De dix vers qui y font gravés, on n'en peut lire que deux entiers, qui semblent être plutôt des productions d'un fiécle payen, que d'un fiécle chrétien. Le temps a effacé de la pierre le nom de celui qui y étoit enséveli. Dans la ville de Valence on fait voir un tombeau qu'on prétend être de l'Impératrice Justine, parce qu'on y lit dessus, D. JUSTINAM, ce que Golnitz dans son Itinéraire explique très-mal, Diva Justina Mater ; au lieu de Diis Manibus Justina; car la premiere & la derniere lettre vont ensemble, étant d'un caractere plus gros que le mot du milieu: c'est-à-dire que l'on recommandoit aux Dieux manes cette Justine, pour qui étoit fait ce tombeau. Comme le tombeau est petit, fans ornemens, il paroît que ce n'étoit qu'une jeune fille, dont les parens étoient pauvres, non une Impératrice Romaine. A côté de la porte de Saint Félix, on voit une tour ronde, qui avance beaucoup plus en haut qu'en bas; de forte qu'étant au pied on se trouve à couvert de la muraille. Quelques-uns croyent que c'est un chef-d'œuvre d'architecture comme la tour panchante de Pisfe, & celle de Boulogne, avec lesquelles elle n'est pas à comparer, ni pour la grandeur, ni pour la fabrique. Mais le peuple, à qui d'ordinaire tout ce qui est difficile à pénétrer, paffe pour miracle, dit que cette tour s'est courbée de la forte, lorsque Saint Félix & deux au-tres Martyrs entrerent dans la ville, comme pour se profterner devant eux.

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L'Université fondée à Grenoble par le Dauphin Humbert II, fut tranferée l'an 1454. à Valence, par Louis XI. Dauphin, & depuis Roi de France. Elle eft compofée de trois facultés, Théologie, Droit Civil & Canon, & Médecine. Il y a deux Profeffeurs en Théologie, quatre en Droit Civil & Canon, cinq Aggregés en Théologie, neuf en Droit, & cinq en Médecine. On compte parmi les Suppôts de cette Université Philippe Décius, Jean de Coras, Antoine Duman, Jacques Cujas, François Hotman, , Jules Pacius, & plufieurs célebres Jurisconfultes.

4. VALENCE, ville de France, dans l'Agénois, Election d'Agen, fur le bord feptentrional de la Garonne, vis-à-vis d'Aurignac, à trois lieuës au-desfous de Moissac. C'est une fort petite Ville.

5. VALENCE, ville de France, dans l'Armagnac, Election de ce nom, sur la Blaise, à cinq lieuës au Septentrion de la Ville d'Auch. Elle vaut à peine un bon bourg.

6. Valence, ville de France, dans le haut Languedoc, Recette d'Alby. Cette petite ville, située dans une plaine, est entourée de fossés pleins d'eau. C'est le Siége d'une Préfecture, & l'une des dou

ze principales préfectures du diocèse d'Alby.

7. VALENCE, Valentia. Abbaye d'hommes en France, de l'Ordre de Citeaux, filiation de Clairvaux, dans le Poitou, au diocèse de Poitiers, fur la petite riviere de Boulaye, à deux lieues au midi de Vivonne. Il paroît par quelques vestiges que c'étoit autrefois une magnifique maison. Elle fut commencée le huitiéme des Ides d'Août 1230. par Hugues de Lufignan, Comte de la Marche & d'Angoulême, qui lui céda neuf années après le droit de foires, avec péage & rente. Cette Abbaye est sous le titre de Notre-Dame, & l'Abbé jouit de deux mille cing cens

livres de revenu.

8. VALENCE, ou VALENÇA D'ALICANTARA, ville d'Espagne, dans l'Estramadoure, au sudouest d'Alcantara, aux frontieres du Portugal. Cette Ville, passablement grande, est ceinte d'une muraille antique, flanquée de quatre ou cinq petits bastions bâtis sur le roc, avec quelques tours, & un vieux Château au dedans, aussi bâti sur le roc. * Délices d'Espagne, p. 370.

9. VALENCE, ou VALENÇA DO MINHO, ville de Portugal, dansla province d'Entre Douro Minho, aux frontieres de la Galice, à l'Occident de Monçaon, vis-à-vis de Tuy. Cette place est située sur une hauteur, dont la pointe s'étend jusqu'au bord du Minho, & fortifiée de cinq bastions qui ne font pas revêtus. Valença do Minho est le chef-lieu d'un Comté qui appartient aux Marquis de Villaréal, de la maison de Menesés. * Délices de Portugal, p. 701. 10. VALENCE, ou VALENZA, ville forte d'Italie, dans le Duché de Milan, Capitale de la Laumeline, sur la rive droite du Pô, au-dessus de sa jonc tion avec le Tanaro. Cette ville est ancienne, puisque tous les géographes conviennent que c'est le Forum Fulvii, dont il est parlé dans la Notice de l'Empire, & le Forum Valentinum de Pline. Elle a souvent été prise, & reprise: en 1656. le Duc de Modene, & le Duc de Mercœur, s'en rendirent les maîtres le 16 Septembre. Delisle, Jaillot, Baudrand.

VALENCÉ, VALENÇEY ou VALENÇAY, ville de France, dans le Berry, au midi de Selles, fur la rive gauche du Nahon; les seigneurs du lieu écrivent VALENCÉ, à cause, disent-ils, que le château de ce nom est situé sur une éminence dont la valée ressemble à un C. Elle est du ressort de Blois, quant à la Justice & à la féodalité. Elle eft formée par trois gros bourgs, au milieu desquels le château est situé. Cette maison a été bátie sur un dessein donné par Philibert de Lorme, Architecte fameux sous le regne de François I. quoiqu'il n'y ait que la moitié de ce bâtiment qui soit achevée, elle peut être regardée comme une des plus belles maisons de France. Voici la description qu'en a fait un écrivain qui avoit été fur les lieux. On y arrive par trois avenues qui conduisent à quatre différentes cours faites en ovale , au côté desquelles font les pressoirs & les ménageries. De ces cours, qui font une agréable fimétrie, on entre dans le château, entouré de grands fossés à fond de cuve. L'entrée est décorée d'un fort grand pavillon, aux deux côtés duquel font deux groffes tours, l'une desquelles communique à un grand corps de logis double. Les tours & le Pavillon font bordés de Machicoulis sculptés de beaux ornemens, de même que le corps de logis. La cour eft carrée, & vis-à-vis du pavillon d'entrée, il y a une muraille à jour, quia vûe fur un valon en forme de C. Le côté qui fermela cour, vers le Nord, est un bâtiment qui a ses usages particuliers. La face du grand pavillon, & celle du grand corps de logis, ont du côté de la cour trois galeries les unes fur les autres, qui communiquent à tous les appartemens, & dont les Arcades font ornées de fort beaux trophées d'armes de bas relief. Sous ces galeries il y en a une fouterraine qui conduit aux offices, qui sont sous le grand corps de logis. Le dedans du château a un beau vestibule, & un bel escalier qui se communique à une grande falle, où il y a des ouvrages de peinture & de sculpture. Quelquesuns font de Pierre de Cortonne, & les autres de Jean Mofnier. On va du corps de logis par un Pont de pierre. pierre, qui traverse le foffé, sur une grande terraffe ornée de beaux ouvrages de sculpture, laquelle présente à la vue du côté gauche une perspective de prairies, de côteaux & de forêts, qui la bornent agréablemet; & à la droite est un grand verger, & un clos de vignes, séparés de la terraffe, par une longue allée d'ormes femelles, au bout de laquelle est une fortie, qui mene dans une agréable campagne. * Piganiol, Descr. de la France, t. 6, p. 480. * Bernier, Hist. de Blois, p. 224.

VALENCIENNES, ville de France, dans le Hai naut, entre Condé & Bouchain, fur les deux bords de l'Escaut, qui y devient navigable. Cette ville, dit Longuerue, Descr. de la France, part. 2, pag. 103. eft fort ancienne; elle étoit déja bâtie dans le commencement du cinquieme fiecle, sous l'Empereur Honorius; & il y y avoit des troupes qui prenoient le nom de cette Ville, & qui font marquées à la quarantieme section de la Notice de l'Empire, sous le nom de Placidi Valentinianici felices, & Valentinianenfes felices. Ces mêmes Valentinianenfes font marqués sous le général de la cavalerie des Gaules, tum viro illustri Magistro Equitum Galliarum; ce qui fait voir que cette place doit fon origine à un Valentinien, & non à Valens, qui n'a jamais eu aucun pouvoir dans les Gaules;& comme Valentinianæ étoit déjà un lieu connu & célebre avant la mort d'Honorius, on. doit attribuer son origine à Valentinien I, ou à son plus jeune fils, qui regna trois ou quatre ans dans les Gaules, & non pas à Valentinien III, successeur d'Honorius. Pour connoître ce qu'il y a de foible dans ce raisonnement. Voyez l'article VALENTI

NIANE.

Les rois de France avoient un Palais à Valenciennes, comme on le voit par une patente de Clovis III, qui y tint une assemblée des grands du royaume dans la troisieme année de son regne, Valentianis in Palatio noftro. Ainsi dès-lors le nom de de Valentiniance avoit été corrompu en Valentiane. On trouve néanmoins une patente de l'empereur Lothaire, fils de Louis le Débonnaire, donnée en la cinquieme année de son regne, Indiction VIII, c'est-à-dire, l'an 845, où on lit actum Valentinianis, Palatio regio. Dans ce temps-là, quoique Valenciennes eûr un palais royal, ce n'étoit qu'une fort petite ville ou bourgade, puisqu'Eginard, dans la relation qu'il a faite de la translation des corps des martyrs Marcellin & Pierre, l'appelle Pagi Fanomartensis Vicum, & Lothaire, dans sa patente dit, que Valenciennes étoit in Pago Panomartense. Ce lieu Farnomarte, qui est aujourd'hui un village nommé FANMARS, peu éloigné de Valenciennes, & qui a pris fon nom de quelque temple de Mars, est aussi marqué dans la Patente de Lothaire, qui dit que Valenciennes étoit in Pago Fanomartense; & ce village de Fanmars ayant donné le nom au Pays d'alentour, a dû être un lieu plus considérable que Valenciennes. Mais la fituation avantageuse de celle-ci l'a fait devenir une ville puissante & riche. L'Escaut qui la coupe par le milieu, & où il y a de belles écluses, y porte bateau. Comme cette riviere la divise en deux, la ville est aussi des deux diocèses, de Cambrai & d'Arras. C'est ce qui fait qu'elle a été attribuée par quelques auteurs au Hainaut, & par d'autres à la Flandre. Les empereurs, de qui Cambrai & le Hainaut relevoient, prétendoient avoir la Souveraineté de toute la ville; ce qui leur a été disputé par les comtes de Flandre, & les rois de France, de qui ces comtes relevoient.

Sous le regne de Lothaire, roi de France, un seigneur, nommé Garnier, qui étoit comte de Valenciennes, prit le parti de l'empereur Othon le Grand. Brunon, archevêque de Cologne, frere de l'empereur, donna à Garnier Mons & tout le Hainaut, parce que cet archevêque avoit la fur-intendance de rout le royaume de Lorraine, & il en dépouilla le comte Reinier au long cou. Après la mort de ce comte, son fils Reinier, fut rétabli en poffefsion du comté de Mons, & Garnier lui vendit l'an 973, son comté de Valenciennes; celui-ci le laissa auffi à fon fils: mais il en fut dépouillé par Godefroi, Tome VI.

parent de Garnier, qui prétendoit que la vente de Valenciennes étoit nulle. Il eut pour successeur Arnoul ou Arnold, qui fut chaffé de ce comté en 1002, par Baudouin le Barbu, comte de Flandre. Ce comte investit du comte de Valenciennes, Reinier, qui fut le dernier male de sa race, & à qui Baudouin céda, ou vendit les droits qu'il avoit eus de l'empereur Saint Henri. Ce comte & fa fille Richilde furent troublés dans la possession de Valenciennes, par Herman, de la race des anciens seigneurs de cette ville, qui s'en mit en poffeffion. Et ce ne fut qu'après sa mort que la comtesse Richilde & fon mari Baudouin, dit de Mons, comte de Flandres, pri rent poffeffion de Valenciennes, & en jouirent paifiblement, comme ont fait tous ses successeurs comtes de Hainaut, jusqu'à Charles II, roi d'Espagne, qui perdit cette ville en 1677. Le feu roi Louis XIV, quì avoit affiégé en personne cette importante place, s'en rendit maître; & elle lui fut cédée l'année suivante 1678, par le traité de Nimegue.

Outre le comte qui étoit le haut seigneur à Valenciennes, il y en avoit encore un autre, qui étoit le châtelain héréditaire, & ce châtelain étoit propriétaire de Bouchain, & de la plus grande partie de l'Ostrevand. Le premier châtelain héréditaire que l'on trouve se nommoit Hugues, & vivoit versl'an 1038. C'est de lui que descendoit, par måles, Godefroy, III du nom, châtelain de Valenciennes; & ce fut lui qui vendit en 1160 sa châtellenie & tous ses biens à Baudoüin, dit le Bâtisseur, comte de Hainaut.

La fituation de Valenciennes est extrêmement commode, à cause de l'abondance des eaux qui font portées par de petits canaux dans plusieurs maisons particulieres : cette ville est d'ailleurs sur un terrein un peu panchant: elle peut renfermer quatre ou cing mille maisons, & environ vingt-cinq mille habitans; les rues sont étroites, mal percées, & toutes tortues, enforte que c'est plutôt un labyrinte qu'une ville. Son enceinte est fort irréguliere, & composée en partie d'une vieille enceinte qu'on a réparée, & sur laquelle le maréchal de Vauban a fait conftruire plusieurs grands bastions. Quelques-uns de ces baftions sont surmontés de grands cavaliers, & même il y en a qui en contiennent d'eux l'un sur l'autre;le maréchal de Vauban a fait encore construire deux grandes contre-gardes, l'une desquelles sert de retranchement à un ouvrage à corne, qui est lui-même couver d'une demi-lune; plusieurs autres demi-lunes sont placées en différens endroits de la ville, surtout vis-à-vis des portes. Il reste encore deux anciens ouvrages à corne, que le maréchal de Vauban a fait réparer & cous vrir chacun d'une demi-lune. La citadelle est une des plus irrégulieres qu'on puiffe voir, & est divisée en trois parties; l'ancienne citadelle, elle-même très-irréguliere, a été réparée par le même Ingénieur. Tout autour regne un fossé plein d'eau. A mi-côte de la hauteur qui commande cette citadelle, s'éleve un grand ouvrage, qui fait la seconde partie, & qui est retranché d'un pâté environné d'un fossé plein d'eau. Cet ouvroge est couvert par la troisieme partie de la citadelle, laquelle est un grand ouvrage à couronne, qui est tout-à-fait fur la hauteur, & auffi de la construction du maréchal de Vauban. Ces trois parties se commandent l'une l'autre. Les deux fronts de l'ouvrage à couronne font couverts chacun d'une demilune, le tout environné d'un fosse sec, auffi-bien que les ouvrages qui l'accompagnent, & qui consistent en une demi-contregarde, couverte d'une petite lunette. Tout cela eft accompagné de son chemin cou vert & de son glacis. Plusieurs redoutes carrées & pentagonales sont placées aux environs de cette place. Elles sont belles & bien revêtues, entr'autres celle qui est dans l'Escaut & à laquelle on a donné une figure circulaire.* Piganiol, Desc. de la France, t. 7, p. 257.

Il se fait à Valenciennes une cérémonie qui n'est point en usage dans les autres provinces de France. Si-tôt qu'un Religieux a vécu cinquante ans en religion, on célebre son Jubilé, & on l'appelle le Pere Jubilaire. On met une couronne sur sa tête, un sceptre entre ses mains, & on prie à haute voix, qu'il puiffe C

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