tout l'éducation de la liberté et cette notion essentielle que chaque personnalité humaine porte en elle des droits inaliénables et imprescriptibles qui, dans un pays civilisé, ne sauraient faire l'enjeu d'aucune bataille électorale. Qui oserait affirmer que ce qui semble aujourd'hui à chacun le droit le plus certain et le plus respectable ne risque pas d'être menacé et, demain, irrémédiablement atteint peut-être, non seulement par le caprice de majorités politiques, mais aussi par l'arbitraire administratif? On peut, sans se tromper, rattacher à ce sentiment d'incertitude et d'inquiétude grandissantes, une part importante des insuffisances financières de l'exercice 1902. Tandis que l'exercice financier 1901 s'était terminé par un déficit minimum officiellement reconnu de 175 millions de francs, l'exercice financier 1902 s'est clos sur un déficit de 221 millions de francs et l'excédent des retraits sur les dépôts, dans les Caisses d'épargne, a dépassé 157 millions de francs. Le silence des peuples, disait-on jadis, est la leçon des rois; aujourd'hui, ce sont les mécomptes financiers qui constituent, pour les gouvernements infidèles à leur mission, la leçon des démocraties inquiètes. L'ANNÉE POLITIQUE 1902 JANVIER Voyage, à Saint-Etienne, de M. Waldeck-Rousseau, Président du Conseil, et des principaux membres du gouvernement à l'occasion de l'inauguration des bâtiments de la nouvelle préfecture et du monument élevé à Francis Garnier. Grand discours politique de M. le Président du Conseil. Discours de M. Millerand, ministre du commerce, à Firminy (Loire). Discours de M. Jules Méline, ancien Président du Conseil, à Remiremont. Ouverture de la session parlementaire ordinaire de 1902. Présidents de ces Assemblées. Allocutions des CHAMBRE Interpellation Guieysse au ministre de la guerre sur le rappel à l'activité du général Geslin de Bourgogne. Interpellation Cunéo d'Ornano sur « les violations des lois, décrets et règle<<ments militaires commises par le ministre de la guerre. » Interpellation Pastre « sur les persécutions dont sont victimes les instituteurs et professeurs républicains, socialistes et libres-pen seurs ». Discussion et vote des Suite de la discussion du budget de 1902. budgets des services pénitentiaires, des affaires étrangères, des chemins de fer de l'Etat, des travaux publics. Discussion et vote d'un projet de loi ordonnant de grands travaux. Commencement de la discussion du budget de l'agriculture.- Dis cussion et vote d'une proposition de loi de M. Lasies tendant à supprimer le boni de 14 0/0 de leur poids brut accordé aux mélasses. Adoption définitive du projet de loi, voté par le Sénat, sur l'admission temporaire des blés. Commencement de la discussion dela proposition de loi limitant à huit heures la journée de travail dans les mines. SENAT Interpellation de Cuverville sur l'arrêté du ministre de la marine relatif au service de la messe à bord des bâtiments de la flotte. Interpellation Farinole sur la situation de la Corse. Adoption de la proposition de loi, votée par la Chambre, interdisant l'affichage électoral sur les édifices et monuments artistiques. Discussion et adoption, avec modifications, de la proposition de loi votée par la Chambre relative au placement des ouvriers et employés des deux sexes. Adoption de la proposition de loi réglant la situation des sociétés de prévoyance. Avis du Conseil d'Etat sur la situation des écoles ouvertes par des membres de congrégations autorisées. La première manifestation politique importante de l'année 1902 fut le discours que prononça à Saint-Etienne, chef-lieu du département qu'il représentait au Sénat, M. Waldeck-Rousseau, Président du Conseil des ministres. Ce discours fut prononcé le 12 janvier dans un grand banquet organisé par souscription, à l'issue des fêtes données à Saint-Etienne à l'occasion de l'inauguration des bâtiments de la nouvelle préfecture et du monument élevé à la mémoire de l'explorateur Francis Garnier, le premier conquérant du Tonkin. Le chef du gouvernement avait tenu à donner à sa manifestation oratoire une portée particulière, car il s'était fait accompagner dans son voyage par les ministres de la guerre et de la marine et par M. Millerand, ministre du commerce, auxquels s'étaient joints dans la salle du banquet un nombre important de députés, pour la plupart radicaux et radicaux socialistes. La présence de M. Millerand aux côtés du Président du Conseil laissait suffisamment présager que, contrairement aux bruits qui avaient couru, le premier ministre n'entendait pas se séparer, à la veille de la consultation électorale de 1902, du parti socialiste qui l'avait pendant trois ans si fidèlement soutenu. D'autre part, il paraissait difficile que le chef du gouvernement se décidât à proclamer publiquement les avantages d'une telle alliance. Et cependant pour dresser un programme d'avenir ou établir une plate-forme électorale, comment ne pas prendre parti entre ces deux attitudes? Le Président du Conseil se tira de la difficulté en faisant un discours rétrospectif. Il rappela sur un ton dont la violence contrastait avec celui de ses discours habitels les périls qu'avait courus la République avant son arrivée au pouvoir et auxquels la politique suivie par son ministère l'avait, à son avis, soustraite. Qu'avait donc été cette politique ? Voici comment la définit l'orateur : Au regard de la réaction elle ne pouvait être qu'une politique d'offensive hardie, résolue et légale (très bien !); au regard des républicains elle devait être une politique de neutralité loyale, de désintéressement réciproque et dont aucune fraction du parti ne pût tirer avantage contre aucune autre. C'était là, à vrai dire, un devoir de probité et de loyauté politiques. (Applaudissements.) Rendre au pays la paix intérieure, opposer aux entreprises violentes la force supérieure des lois, donner au pays l'impression d'un gouvernement qui sait ce qu'il veut et qui prouve ce qu'il peut (applaudissements), et si le succès, messieurs, répondait à la sincérité de l'effort, faire l'inventaire de tant de promesses républicaines restées en souffrance, réaliser avant tout celles qui, n'ayant jamais semblé téméraires à aucun républicain, représentaient les éléments et pour ainsi dire tous les articles du programme commun; assurément, un tel programme n'était fait pour effrayer ni écarter per |