Images de page
PDF
ePub

Ces manifestations oratoires du ministre de la marine furent jugées sans doute également intempestives, d'autre part, au ministère des affaires étrangères et à la présidence du Conseil, car, le 22 septembre, M. Combes, Président du Conseil, se rendit à Matha, chef-lieu de canton du département de la Charente-Inférieure, qu'il représentait au Sénat, et, profitant d'un banquet que lui offraient un certain nombre d'amis politiques, il désavoua, sous l'apparence de le défendre contre les critiques dont il avait été l'objet, le langage du ministre de la marine.

Le Président du Conseil s'exprima notamment ainsi :

Une parole un peu sensationnelle échappe-t-elle des lèvres d'un ministre dans le feu d'une improvisation, dans la chaleur communicative d'un banquet ; n'eût-elle dans l'esprit de celui qui l'a prononcée que la valeur d'un ornement littéraire, d'une figure de rhétorique, elle devient aussitôt, pour les ennemis du cabinet, la parole même du gouvernement.

Puis il continua par l'exposé d'une théorie, commode peut-être dans la circonstance, mais des plus contestables en même temps que fort singulière, sur le peu d'importance qu'il convient d'attacher aux discours politiques des ministres, à l'exception du Président du Conseil.

Nos adversaires n'ignorent pas, ils ne peuvent ignorer, tant la règle est absolue et la tradition constante en cette matière, que, sous un régime parlementaire, le gouvernement n'est jamais engagé par les déclarations individuelles d'un ministre ; il n'est engagé que par les déclarations du chef de gouvernement. C'est le chef du gouvernement seul qui est responsable, devant les Chambres et devant le pays, de la direction donnée à la politique, et c'est lui seul qui a qualité pour faire connaître cette direction. Chaque ministre pris individuellement n'a compétence et autorité que pour l'administration de son département.

Ce désaveu des discours de M. Camille Pelletan par

le chef du ministère fut accepté sans récrimination et sans protestation par le ministre de la marine, dont la presse étrangère cessa désormais de s'occuper.

La presse française attacha plus d'importance à une lettre qu'au début du mois de septembre M. Jaurès, député socialiste du Tarn et l'un des directeurs de la majorité ministérielle de la Chambre, avait écrite à M. Andréa Costa, député socialiste italien, pour s'excuser de ne pouvoir assister à un Congrès socialiste italien. Dans cette lettre, M. Jaurès s'exprimait ainsi :

A l'extérieur, vous contribuez à un résultat historique immense, puisque la Triplice, nécessaire comme contrepoids à notre chauvinisme et aux fantaisies franco-russes, a perdu peu à peu son caractère agressif et que l'on commence à entrevoir le jour où un vaste groupement européen permettra le désarmement. Je ne puis croire que vous renonciez à une action dont la fécondité se révèle tous les jours. En France, quoi qu'on vous en dise, l'esprit de secte et d'orgueilleuse impuissance est frappé à mort.

Votre

JAURES.

Par cette lettre, le leader socialiste continuait, avec plus d'audace et plus de brutale franchise dans les termes, la campagne d'avilissement du sentiment national qu'il avait esquissée devant la Chambre, quand, au mois de juin 1902, il avait qualifié de « funestes » les espérances de réparation et de revanche, dont Gambetta s'était fait jadis l'admirable interprète.

Dans son impatience frénétique à supporter tout ce qui pouvait servir en France la cause du relèvement national, M. Jaurès ne s'était pas aperçu sans doute qu'il commettait la plus grossière des erreurs historiques en qualifiant la Triple-Alliance « de contrepoids néces<<< saire aux fantaisies franco-russes », car c'était, au

contraire, à la Triple-Alliance que l'Alliance francorusse avait été destinée historiquement à faire contrepoids.

Une longue polémique s'engagea à ce sujet entre le journal le Temps, d'une part, et M. Jaurès, d'autre part, dans son journal la Petite République.

Le 24 septembre, s'ouvrit à Commentry (Allier) le Congrès de la fédération nationale des mineurs.

Ce Congrès était chargé de se prononcer sur cette fameuse question de la grève générale des mineurs, qui revenait périodiquement à l'ordre du jour de chaque Congrès annuel.

Le Congrès de Commentry vota, à son tour, comme ses prédécesseurs, la grève générale. Toutefois ce vote ne fut acquis que par 45 voix contre 41 et 8 abstentions.

De plus, le Comité national des mineurs était laissé libre de fixer le moment où la grève générale passerait de la théorie dans les faits.

Le jour même de l'ouverture du Congrès de Commentry, un commencement de grève de plusieurs centaines d'ouvriers éclata dans les mines de l'Escarpelle, situées à Doriginies, près de Douai (Nord).

Ce fut le prélude d'un mouvement gréviste considérable.

Un grand nombre d'élections partielles, nécessitées pour la plupart par des invalidations prononcées par la Chambre, eurent lieu pendant les mois d'août et de septembre.

Le 3 août, l'élection de la 2e circonscription de Lille (scrutin de ballottage), se termina ainsi :

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Il s'agissait de remplacer M. Lorthiois, rép. libéral, décédé le jour même de son élection, le 11 mai dernier.

Au premier tour de scrutin les suffrages s'étaient ainsi répartis M. Bonte, 5.842 voix; M. Ghesquière, 5.125; M. Werquin, 1. 152. Ce dernier s'était désisté purement et simple

ment.

Le 10 août, eurent lieu deux élections législatives, conséquences de deux invalidations, l'une dans la circonscription de Saint-Flour (Cantal), l'autre dans la 2o circonscription de Pontoise (Seine-et-Oise).

Voici le résultat de l'élection de Saint-Flour:

Inscrits: 14.885.

MM. Hugon, radical....

Votants 12.333.

6.188 Elu. 6.099

Jean de Castellane, rép. libéral..

L'élection de M. Jean de Castellane avait été invalidée par la Chambre. Au scrutin du 27 avril dernier, M. Jean de Castellane avait été élu par 6.301 voix contre 5.887 à M. Hugon, député sortant.

Voici le résultat de l'élection de la 2e circonscription de Pontoise:

Inscrits 23.810.- Votants: 19.548:

MM. Roger-Ballu, nationaliste.
Aimond, radical ...

9.752 Elu.

9.641

L'élection de M. Roger-Ballu avait été invalidée. Aux élections générales, M. Roger-Ballu avait été élu au scrutin de ballottage par 10.272 voix contre 9.986 à M. Aimond, député

sortant.

Le 17 août eurent lieu deux élections, l'une sénatoriale dans le département d'Indre-et-Loire, dont voici le résultat :

Inscrits: 650. Votants: 648.

MM. Pic-Paris, maire de Tours, radical.....

Lemesle, conseiller général, républicain
progressiste...

435 Elu.

213

Il s'agissait de remplacer M. Nioche, décédé le 21 mai dernier. M. Nioche avait été nommé sénateur en 1888 et réélu, le 3 janvier 1897, par 381 voix sur 654 votants; il siégeait dans les rangs de la gauche républicaine.

L'autre élection du 17 août était une élection législative dans la 2o circonscription de Toulouse (Haute-Garonne) qui donna le résultat suivant:

[merged small][ocr errors]

MM. Serres, maire de Toulouse, rad. soc.

14.355.

8.461 Elu. 3.913

Labat, progres....

Rogalle, soc. guesdiste..

1.782

Il s'agissait de remplacer M. Calvinhac, socialiste, décédé. M. Calvinhac avait été élu, en février dernier, voix contre 5.880 à M. Gégout, nationaliste.

par 10.718

Il convient de signaler les élections municipales qui eurent lieu à Marseille, le 3 août, à la suite de l'annulation par le Conseil d'Etat d'un certain nombre d'élections de conseillers municipaux proclamées en 1900. M. Flaissières, maire socialiste de Marseille, depuis 1893, et ses compagnons de liste furent battus à 9.000 voix de majorité par M. Chanot, avocat à Marseille, et sa liste de concentration républicaine anticollectiviste qui groupa 36.000 suffrages contre 27.000 aux partisans de M. Flaissières.

Le 7 septembre, eurent lieu deux élections, l'une sénatoriale, l'autre législative.

L'élection sénatoriale eut lieu dans le département de la Haute Garonne et donna le résultat suivant:

« PrécédentContinuer »