MANUSCRIPTS 1. h* (BnF15204, ff.85-6). COMMENTARY 1 the abbé Raynal. * the marquis d'Argens; on 10 October Frederick had written to Le Chambrier 'Dites au Marquis Dargens que je me lasse de sa conduite et de ses ridicules voyages, que j'avois pris mon parti, ou qu'il doit retourner d'abord à Berlin ou que je lui enverrai sa démission, car je ne veux pas avoir à mon service des chevaliers errans'; and in later despatches the king inquires about Argens's whereabouts (MaéCp: clxii.46v, 110v, 114ν). D4248. Voltaire to Henri Lambert d'Herbigny, A Potsdam, ce 24 octobre [1750] Non seulement je suis un transfuge, mon cher Catilina1, mais j'ai encore tout l'air d'être un paresseux. Je m'excuserai d'abord sur ma paresse en vous disant que j'ai travaillé à Rome sauvée, que je me suis avisé de faire un opéra italien de la tragédie de Sémiramis, que j'ai corrigé presque tous mes ouvrages, et tout cela sans compter le temps perdu à apprendre le peu d'allemand qu'il faut pour n'être pas à quia en voyage, chose assez difficile à mon âge. Vous trouverez fort ridicule et moi aussi qu'à cinquante-six ans l'auteur de la Henriade s'avise de vouloir parler allemand à des servantes de cabaret; mais vous me faites des reproches un peu plus vifs que je ne mérite assurément pas. Ma transmigration a coûté beaucoup à mon cœur. Mais eile a des motifs si raisonnables, si légitimes, et, j'ose le dire, si respectables qu'en me plaignant de n'être plus en France, personne ne peut m'en blâmer. J'espère avoir le bonheur de vous embrasser vers la fin de novembre. Catilina et le Duc d'Alençon se recommanderont à vos bonnes grâces dans mon grenier3, et les nouveaux rôles de Rome sauvée arriveront à ma nièce dans peu de temps. Je n'attends qu'une occasion pour les lui faire parvenir. Comment puis je mieux mériter ma grâce auprès de vous que par deux tragédies et un théâtre? Nous étions faits pour courir les champs ensemble, comme les anciens troubadours. Je bâtis un théâtre, je fais jouer la comédie partout où je me trouve, à Berlin, à Potsdam. C'est une chose plaisante d'avoir trouvé un prince et une princesse de Prusse, tous deux de la taille de mille Gaussin, déclamant sans aucun accent et avec beaucoup de grâce. Mademoiselle Gaussin est à la vérité supérieure à la princesse. Mais celle-ci a de grands yeux bleus qui ne laissent pas d'avoir leur ) mérite. Je me trouve ici en France. On ne parle que notre langue. L'allemand est pour les soldats et pour les chevaux'; il n'est nécessaire que pour la route. En qualité de bon patriote je suis un peu flatté de voir ce petit hommage qu'on rend à notre patrie à trois cents lieues de Paris. Je trouve des gens élevés à Kænigsberg qui savent mes vers par cœur, qui ne sont point jaloux, qui ne cherchent point à me faire des niches. A l'égard de la vie que je mène auprès du roi, je ne vous en ferai point le détail. C'est le paradis des philosophes. Cela est au dessus de toute expression. C'est César, c'est Marc Aurèle, c'est Julien, c'est quelquefois l'abbé de Chaulieu, avec qui on soupe; c'est le charme de la retraite, c'est la liberté de la campagne avec tous les petits agréments de la vie qu'un seigneur de château qui est roi peut procurer à ses très humbles convives. Pardonnez moi donc, mon cher Catilina, et croyez que quand je vous aurai parlé, vous me pardonnerez bien davantage. Dites à César les choses les plus tendres. Gardez avec César un secret inviolable, cela est de conséquence. Bonsoir, je vous embrasse tendrement. D4249. Charles Jean François Hénault A Paris, 25 octobre [1750] "après le départ de Voltaire Les marques de votre souvenir, mon cher confrère, me sont toujours infiniment précieuses, même lorsqu'elles sont fondées sur les nouvelles les moins invraisemblables. Je ne suis pas historiographe: jamais cette pensée ne m'est venue et ce serait m'y prendre bien tard. Comment aurais je attendu jusqu'ici et si cette place m'avait été [?offerte] n'aurait ce pas dû être lorsqu'étant comme éteinte, on a cru la devoir faire revivre: c'aurait pu être alors qu'elle m'aurait convenu, mais que j'aille prendre la dépouille d'un autre c'est inusité, ce que je n'ai jamais imaginé. Lorsque Voltaire a abjuré la patrie et en a eu fait part, on a songé aux places qu'il laissait vacantes et plusieurs concurrents se sont présentés pour la place d'historiographe. Foncemagne s'est mis sur les rangs et il pouvait s'en flatter. Gresset a aussi demandé et l'un et l'autre se sont vu préférer Duclos1. Aussi, mon cher confrère, en vous remerciant de tout mon cœur de l'honneur de votre souvenir, trouvez bon que je vous désabuse sur une nouvelle qui n'était entrée ici dans la tête de personne. Les exemples des grands hommes sont bien pernicieux. C'est vous, permettez moi le rapprochement, qui avez fondé la nouvelle colonie de Berlin, c'est à l'abri de votre nom que l'on a osé former de pareilles démarches et l'on a cru que l'on ne pouvait pas s'égarer sur les pas de m. de Maupertuis. Vous me rendez justice et vous savez tout ce que ma vaine éloquence a tenté pour vous faire abandonner une entreprise si décisive. Mon cœur vous parlait alors et en vérité c'était au nom d'un grand nombre d'amis que vous laissiez ici. La vie, toute courte qu'elle est, est encore bien longue pour souffrir sans regrets de tels partis. Je souhaite, mon cher confrère, pour votre bonheur que vous ne regardiez jamais ce côté là, mais vous ne devez pas me savoir mauvais gré d'en conserver à jamais le déplaisir parce qu'il est bien vrai que je vous aime autant que je vous estime. M. de Voltaire n'était plus gentilhomme ordinaire quand il est parti de ce pays ci et j'apprends que dans une gazette de Cologne on lui donne le titre d'ancien gentilhomme du roi très chrétien. D4250. Voltaire to Charles Augustin Feriol, à Potsdam ce 27a octobre [1750] Mon historiograferie1 est donnée, mes anges, madame de Pompadour qui me L'écrit me mande en même temps que Le roy a la bonté de me conserver une ancienne pension de deux mille livres3. Je n'ay que des grâces à rendre. Le bien que je dis de ma patrie en sera moins suspect, n'étant plus historiografe je n'en serai que meilleur historien. Les éloges que le chambellan du roy de Prusse donnera au Roy de France ne seront que la voix de la vérité. Mon cher ) et respectable amy voicy le temps où il ne faut plus faire que de la prose. Un vieux poète, un vieil amant, un vieux chanteur et un vieux cheval ne valent rien. Il vous reviendra Rome sauvée, Zulime, Adelaïde. Cela est bien honnête, et je viendrai prendre congé sur le téâtre de mon grenier. J'espère que madame Dargental viendra nous entendre. Mes derniers travaux seront pour mes anges. Je voudrois déjà être auprès de vous; je voudrais me consoler avec vous de mon bonheur. Pourquoy faut il que je sois si heureux à Potsdam, quand vous êtes à Paris? pourquoy tous les êtres pensans, et bien pensans, les gens de goust, les bons coeurs ne font ils pas un petit peloton dans quelque coin de ce monde? Quand vous reverai-je? Il n'y a pas moyen de se mettre en route dans le terrain fangeux de l'Allemagne. On ne se tire point des boues dans ce temps cy, surtout dans les abominables campagnes de la Vestphalie. Il faudra absolument attendre les gelées, alors on va comme le vent du nord, et on n'a jamais froid, car on est tout fouré dans son carosse, et on ne descend que dans des étuves. Il ne fait froid qu'en France en hiver, parcequ'on y oublie au moins de juin qu'il y aura un mois de décembre. Je ne vous oublierai jamais mes anges, dans aucun mois de l'année, dans aucun lieu de la terre, mais encor une fois, et cent fois, je n'ay ny pu ny dû refuser les bontez du Roy de Prusse. Je vois tous les jours des gens qui s'en vont au diable pour de bien moins fortes raisons. Non seulement on les aprouve, mais on les regarde comme des gens favorisez de la fortune. Or je vous jure qu'il n'y a aucune comparaison à faire de mon état avec celuy de tous ceux qui s'expatrient pour aller dire le roy mon maitre. Comptez que j'ay touttes sortes de raisons et que je n'ay qu'un seul chagrin; je n'ay aussi qu'un seul désir. Tout cela sera tiré au clair au mois de décembre, et s'il geloit plutôt, je partirois plustôt. Moy qui redoutois tant le vent du nord je L'invoque àprésent comme les poètes grecs invoquoient le zéphire. Que faites vous cependant? avez vous reçu le Quien? y a t'il toujours des tracasseries à la comédie? aplaudit on toujours des sottises qui ont l'air de l'esprit? joue t'on des opera détestables? fait on de mauvaises chansons? qui esce qui fait un plat discours à l'académie en succédant à Gilles le philosofe? Duclos n'est il pas historiografe? mademoiselle du Menil boit elle toujours pinte? en perd elle sa santé et son talent? mademoiselle Gossin croit elle toujours être grande tragique? a t'elle quelque notaire ou quelque prince? Adieu adieu mes anges, aimez moy toujours un peu. NB bien que je mets toujours au nombre des anges, ceux qui mangent le soir la côtelette, ceux qui prennent leur lait etc. etc. etc. MANUSCRIPTS 1. h* (IiV162). TEXTUAL NOTES Lyublinsky i.356 is mistaken in altering this to 24. MSI e by Argental, who added 'Re le 13 nbre 1750'. 'not 163 as stated by Lyublinsky i.43. COMMENTARY 1 see Best.D3074, note 2. * see Best.D4249, note 1. * see also Best.D4239, D4243. ▲ probably Fontenelle, but the grand old man had still some years to live. D4251. Voltaire to Marie Louise Denis à Potsdam 28 octobre 1750 Je ne sais pas pourquoi le roi me prive de la place d'historiographe de France, et qu'il daigne me conserver le brevet de son gentilhomme ordinaire. C'est précisément parce que je suis en pays étranger que je suis plus propre à être historien, j'aurais moins l'air de la flatterie, la liberté dont je jouis, donnerait plus de poids à la vérité. Ma chère enfant, pour écrire l'histoire de son pays, il faut être hors de son pays. Me voilà donc à présent à deux maîtres. Celui qui a dit qu'on ne peut servir deux maîtres à la fois1, avait assurément bien raison; aussi pour ne point le contredire je n'en sers aucun. Je vous jure que je m'enfuirais, s'il me fallait remplir les fonctions de chambellan comme dans les autres cours. Ma fonction est de ne rien faire. Je jouis de mon loisir. Je donne une heure par jour au roi de Prusse pour arrondir un peu ses ouvrages de prose et de vers. Je suis son grammairien et point son chambellan. Le reste du jour est à moi, et la soirée finit par un souper agréable. Il arrivera qu'en dépit des titres dont je ne fais nul cas, je n'exercerai point du tout la chambellanie, et que j'écrirai l'histoire. J'ai apporté ici heureusement tous mes extraits sur Louis XIV. Je ferai venir de Leipzig les livres dont j'aurai besoin, et je finirai ici ce Siècle de Louis XIV, que peut-être je n'aurai jamais fini à Paris. Les pierres dont j'élevais ce monument à l'honneur de ma patrie auraient servi à m'écraser. Un mot hardi eût paru une licence effrénée. On aurait interprété les choses les plus innocentes avec cette charité qui empoisonne tout. Voyez ce qui est arrivé à Duclos après son histoire de Louis x12. S'il est mon successeur en historiographerie, comme on le dit, je lui conseille de n'écrire que quand il fera comme moi, un petit voyage hors de France. toire de son pays. Un auteur comme celui là peut dire ce qu'il veut sans sortir de sa patrie. Il use de ce droit dans toute son étendue. Figurez vous que pour avoir l'air plus impartial, il tombe sur son grand-père de toutes ses forces. J'ai rabattu les coups tant que j'ai pu. J'aime un peu ce grand-père parce qu'il était magnifique, et qu'il a laissé de beaux monuments. J'ai eu bien de la peine à faire adoucir les termes dans lesquels le petit-fils reproche à son aïeul la vanité Je corrige à présent la seconde édition que le roi de Prusse va faire de l'his |