SPREHENBERG, ville d'Allemagne dans la Lusace. On lui a donné ce nom, à cause de sa situation sur une montagne, dont le bas est arrosé de la riviere de Sprée. * D'Audifret, Geogr. t. 1. 'S PRINCENLANDT: on nomme ainsi dans les PaysBas ce petit pays, qui confine au Finaert, situé le long de la riviere de Merck, qui vient de Breda, & qui touche à la mer. * Dict. des Pays-Bas. SPROTTA, riviere ou torrent d'Allemagne, en Silésie, dans la principauté de Glogaw. Cette riviere prend sa source dans la partie septentrionale de la principauté de Lignitz, & entre auffi-tôt dans celle de Glogaw, où coulant vers le nord occidental, elle forme un affez grand lac, d'où elle fort pour aller se perdre dans le Bober à Sprottaw. SPROTTAW, ville d'Allemagne, dans la Silésie, au duché de Glogaw, vers les confins de la principauté de Sagan. Elle est située au confluent du Bober & du Sprotta, à deux milles au dessus de la ville de Sagan. SPURN-HEAD, cap de l'Angleterre, sur la côte d'Yorckshire, au quartier oriental, ou d'Est-Riding. A l'orient de Hull, la terre s'avance dans l'Océan, & s'étrecit insensiblement jusqu'à ce qu'elle finisse en pointe, & forme au nord du Humber une presqu'ifle, qu'on nomme Holderneff, & dont la pointe fait un long cap avancé; c'est ce qu'on appelle Spurnhead; c'est-à-dire, le cap de l'Eperon. Sur ce cap il y a un village nommé Kelmsey, qui étoit anciennement une place plus considérable sous le nom d'Ocellus; & qui donnoit même son nom à toute la presqu'isle. * Dél. de la Gr. Bret. p. 237 & 238. SPYNTUMA, ville de l'Ethiopie, sous l'Egypte. C'est Pline, 1.6, c. 29, qui en fait mention. Le P. Hardouin, au lieu de Spyntuma, lit Spintum, sans dire le fondement de cette correction. SQUILLACE ou SQUILLACI, ville d'Italie, au royaume de Naples, dans la Calabre ultérieure, à une lieue du golfe de Squillace, à douze de Cofenza, & à quatorze de Girace. Elle est située sur le torrent de Favelone, qui va se rendre à trois milles delà dans la mer Ionienne. Caffiodore, dans une de ses lettres, attribue la fondation de cette ville au fameux Ulyffe: il y fait une charmante peinture de sa fituation agréable fur la mer Adriatique, qu'on appelle aujourd'hui mer de Sicile de ce côté-là, & qui y fait un golfe, qu'on nomme golfe de Squillaci " Cette ville, dit >> Caffiodore, s'éloigne du rivage, en s'élevant doucement, >> environnée d'un côté de fertiles campagnes, & de l'autre >> baignée de la mer; le soleil lui fait part de ses rayons dès >> qu'il se leve, & jamais ni nuages, ni brouillards, ne lui en >> dérobent la lumiere. L'air y est fort tempéré : l'on n'y >> éprouve point l'incommodité des saisons. C'est un char>> mant spectacle, continue-t-il, de voir de là la ville sans se >> lever de son siége, des vignes qui promettent une abon>> dante vendange, des aires pleines de riches moiffons, & >> des campagnes couvertes d'oliviers. " Cette description, qui a quelque chose d'étudié, marque affez l'inclination naturelle que ce grand homme avoit conservé pour sa patrie. Il en donna encore de plus fortes preuves parles grands travaux qu'il entreprit pour la décoration & pour la commodité de cette ville, lorsqu'il étoit préfet ou gouverneur de l'Abruzze & de la Lucanie, qu'on comprend aujourd'hui sous le nom de Calabre. Il fit travailler dans la ville de Squillaci, sa patrie, à ces merveilleux réservoirs qui étoient creusés dans la concavité d'un rocher, & remplis de l'eau de la mer, où l'on voyoit une prodigieuse quantité de poiffons de différentes espéces, & c'est dans ce même lieu qu'il bâtit depuis son monastère. Le nom de Squillaci ou Scillaci, se. lon quelques-uns, tire son origine du voisinage de Scylla, ce fameux écueil fi connu des historiens & des poëtes. On dit qu'Ulille fit naufrage en cet endroit, & qu'il y commença une ville du débris de sa flotte; c'est encore une ville épiscopale sous la métropole de Rhegio. Quoique cette fondation, qu'on rapporte à Ulifle, soit fabuleuse, on fait néanmoins que toute la Calabre a été autrefois habitée par des Grecs, & que même on appelloit ce pays, & tout ce qui est à l'extrémité de l'Italie, la grande Gréce. Strabon veut que Squillaci fut une colonie des Athéniens, qui en avoit conservé la politesse & les inclinations. On a la description du monaftère que Caffiodore fit bâtir à Squillaci, dans le livre de l'institution. " La situation du monastere de Viviers, dit>> il à ses moines, vous invite & vous engage à préparer >> bien des foulagemens pour les étrangers & pour les pau>> vres. Vous avez des jardins arrosés de plusieurs canaux, >> & le voisinage du petit fleuve Pellène, qui est fort pois>> sonneux. On a fu le conduire pour votre commodité, par>> tout où l'on a jugé ses eaux nécessaires. Il suffit pour arro>> fer vos jardins, & pour faire tourner les moulins de votre >> monastère. Il est, pour ainsi dire, dévoué à tous les mini>>> stères de votre maison, Vous avez aussi la mer au bas du >> monastère, & vous pouvez y pêcher commodément. >> Vous avez encore des viviers pour conserver en vie le >> poisson de votre pêche; car j'ai fait faire, avec l'aide de >> Dieu, des réservoirs où une grande quantité de poiffons >> peut être renfermée. Je les ai fait creuser dans la concavité >> de la montagne, de forte que le poisson qu'on y met ayant >> la liberté de s'y promener, d'y prendre sa nourriture ordi>>> naire, & de se cacher dans les creux des rochers, comme >> auparavant, ne sent pas qu'il est pris. On appelle, GOLFE DE SQUILLACI, une partie de la mer Ionienne, sur la côte de la Calabre ultérieure, entre le cap de Rizzuto & celui de Stilo, qui le sépare du golfe de Girace. * Vie de Caffiodore, par doin F. D. de fainte Marche. SQUINCII. Voyez SAMNITES. STA - IN - PACE. C'est le nom d'une tour de Sicile, dans la vallée de Noto, près de la côte, à huit milles de Syracufe, vers le midi. C'est aussi un reste d'une petite ville nommée anciennement Elorus & Elorum. * Baudrand, Dict. STAB'N-BAD ou STUBEN, ville de la haute Hongrie, dans la partie méridionale du comté de Turocz, aux confins de celui de Zoll, à trois milles de Neu-Zoll, & à deux de Chremnitz. On y voit, proche d'une petite riviere, plusieurs bains chauds fort estimés, & où il vient du monde: l'eau en est fort claire & fent le soufre, & le fond en est verd. Elle teint le bois, qui est dessus, en verd & en noir; mais elle ne change pas les métaux aussi-tôt que d'autres. * De l'Isle, Atlas. Il y a sept bains; le premier est le bain des nobles; le second des gentilshommes, le troisiéme des paysans; le quatriéme des paysanes; le cinquiéme des gueux; le sixiéme de ceux qui font attaqués du mal, qu'on appelle lues-venerea; & le septiéme le bain des Gypsies. Ils font tous dans une plaine entourée de montagnes, dont les plus proches sont du côté de l'orient; & c'est sur le sommet de ces mêmes montagnes, qu'on trouve tant de riches méraux. STABAEI. Voyez SABAI. STABATENSIS: fiége épiscopal d'Afrique: Maximianus, Stabatenfis episcopus, souscrivit au concile de Carbafufa. On ignore de quelle province étoit ce siége. STABERUS, non latin de la Segura, riviere. Voyez SE GURA I. STABIÆ, ville d'Italie, dans la Campanie. Elle ne subsistoit plus du tems de Pline, 1.3, 6.5, qui nous apprend qu'elle avoit été détruite, sous le confulat de Cn. Pompée, & de L. Caton, par Sylla, le dernier d'avril & qu'elle étoit réduite à un simple village. Pline le Jeune, 1. 7, Epift. 16, après avoir rapporté que son oncle, curieux d'examiner l'embrasement du mont Vésuve, dit à son pilote de tourner du côté de Pomponianus, ajoute que Pomponianus étoit à Stabie, bie, dans un endroit séparé par un petit golfe, que forme insensiblement la mer sur ses rivages, qui se courbent. Ovide parle de Stabia au quinziéme livre de ses métamorpholes: Vers 711. Herculeamque urbem, Stabiasque. On voit dans Gallien, 1.5, Meth. med. & dans Symmaque, l. 6, epift. 17, que le lait des vaches de Stabia étoit en usage dans la médecine. Columelle, 1. 10, 1.139, fait l'éloge des eaux & des fontaines de Stabie. Fontibus & Stabia celebres, & Vesvia rura. La table de Peutinger place Stabia entre Pompeii & Surrentum. C'est aujourd'hui Castel a mare di Stabia, ou fimplement Caftel a mare. STABLESIANI. On trouve ce nom dans la notice des dignités de l'Empire, & dans une ancienne inscription rapportée par Goltzius. STABULÆ, lieu de la Germanie: l'itinéraire d'Antonin le marque sur la route de Milan à Mayence, en prenant par les Alpes Pennines. Ce lieu étoit entre Cambete & Argentovaria, à fix milles de la premiere de ces places, & à dix-huit milles de la seconde. 1. STABULUM, ville de l'Asie mineure, dans la Mysie, selon Pline, 1.5, 0.30. 2. STABULUM OU AD STABULUM. L'itinéraire d'Antonin marque un lieu de ce nom sur la route des Gaules en Espagne, entre Salfula, & ad Pyreneum, à quarantehuit milles du premier de ces lieux, & à seize milles du fecond. 3. STABULUM-DIOMEDIS, lieu de la Thrace. Il est marqué dans l'itinéraire d'Antonin, sur la route de la Macédoine à Constantinople, entre Otopisium & Impara, à vingt-deux milles du premier de ces lieux, & à dix-huit milles du second. Voyez TINDA. 4. STABULUM-NOVUM, lieu de l'Espagne Tarraconnoife, felon l'itinéraire d'Antonin, qui le place entre Barcelone & Tarragone, à cinquante-un milles de la premiere de ces places, & à vingt quatre milles de la seconde. STACHIR, fleuve.de la Libye intérieure : Ptolomée, 1. 4, c. 6, dit que ce fleuve fort du mont Ryfadius, & qu'auprès de cette montagne il forme le marais Clonia. Marmol dit que ce fleuve est le Senega. STACHIRIS. Voyez TRACHIRIS. STACKY, lac d'Ecofle, dans la province de StrahNavern, & dans la seigneurie d'Edir-Dacheulis. Il y a près de ce lac un endroit où les cerfs ont la queue fourchue. * Délices de la Grande Bretagne, p. 1393. STADEN, ville d'Allemagne, dans la baffe Saxe, au duché de Brême, sur la petite riviere de Schwinge, qui se jette un peu au deslous dans l'Elbe. Cette ville passe pour une des plus anciennes de la basse Saxe. Le nom de Statio, que les Romains lui donnerent, vient de ce qu'ils y tenoient leur armée navale pour défendre les passages de l'Elbe. Après avoir eu des seigneurs particuliers, elle tomba au pouvoir des archevêques de Brême. Elle avoit alors titre de comté, & Henri le Jeune, duc de Brunswick, s'en étant rendu maître, prit l'archevêque Hardewic dans la ville de Brême. Quelques auteurs veulent qu'elle ait été libre & impériale; ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle a eu rang entre les principales villes Anféatiques. Cependant lorsque les Anglois eurent transporté à Hambourg le commerce de leurs draps, elle déchut fort de ses richesses. Le feu la confuma presque entierement en 1659. Les ducs de Brunswick-Lunebourg la prirent en 1676, & trois ans après ils furent obligés de la restituer au roi de Suéde, à qui elle avoit été accordée par le traité de Westphalie. Depuis elle a suivi le fort du duché de Brême. * D'Audifret, Géogr. t. 3. 1. STADIA. C'est l'un des noms que porta anciennement l'isle de Rhodes, felon Strabon. 2. STADIA, ville de la Turquie Européenne, dans le Comenolitari, sur le bord occidental du golfe Thessalonique, au midi de l'embouchure de la Platamona. Les anciens ont appellé cette ville Dium. * De l'Isle, Atlas. Baudrand. STADISIS, ville de l'Ethiopie, sous l'Egypte: Pline, 1.6, 6.29, la met près de la grande cataracte du Nil, dans l'endroit, dit-il, où ce fleuve se précipite avec un tel bruit, qu'il rend fourd les habitans du voisinage. C'est la ville Tasitia, Τασίτια, de Ptolomée. STADSBERG, ville d'Allemagne, dans la Westphalie, fur le Dimel, aux confins du comté de Waldeck. Les Suédois qui la prirent en 1645, en firent raser les fortifications. Cette ville étoit autrefois nommée, Eresburg, ou Eresberg & Mersperg. Les Saxons y avoient bâti un temple superbe à l'honneur de leur faux dieux Irminful ou Ermenful, qu'ils adoroient comme le protecteur de leur nation. On tient que c'étoit l'idole de Mars, à qui ce peuple, fort adonné à la guerre, rendoit un culte particulier. Charlemagne, après avoir vaincu les Saxons, fit abattre cette idole, & consacrer le temple au vrai Dieu. * Monumenta Paderbornens. STADT-WORBS, bourg d'Allemagne, dans la haute Saxe, au comté de Hohnstein, sur la riviere de Wiper. D'Audifret, Géogr. t. 3. STAECHADES. Voyez STOECHADES. STAFARDE, bourgade des états de Savoie, au marquisat de Saluces, à cinq milles de la ville de ce nom, sur la route de Cavours & de Pignerol. Cette bourgade, qui est située fur le Pô, a une riche abbaye de l'ordre de cîteaux. Elle est outre cela renommée par la fameuse bataille que M. de Catinat gagna proche de là, le 18 d'août 1690, contre les troupes du duc de Savoye, qui les commandoit en personne, & qui étoit secondé des Milanois & des Allemands au nombre de plus de trente mille. * De Seine, nouv. Voyage d'Italie. STAFFORA, riviere d'Italie, dans le Milanez. Elle arrose le Pavesan, & après avoir passé à Voghera, elle se perd dans le Pô. Quelques-uns la prennent pour l'ancienne Iria. STAFFORD, ville d'Angleterre, dans le comté auquel elle donne son nom, & dont elle est la capitale. Cette ville, située un peu au-dessus de l'endroit où le Penck se jette dans la Saw, est appellée Stafford, au lieu de Statford, & anciennement on la nommoit Betheney, à cause d'un certain hermite nommé Berthilin, qui avoit vécu en cet endroit dans une grande réputation de sainteté. La Saw mouille Stafford de deux côtés à l'ouest & au fud. La figure de cette ville est ovale ; & fon circuit peut être d'environ douze cents pas. Autrefois elle étoit bordée d'un marais au nord-est; mais on l'a desseché, & c'est aujourd'hui une belle & agréable campagne, moitié champs, moitié prairies. Edouard le Vieux fit bâtir en 914, un château pour la défense de Stafford; ce château ayant été ruiné, Guillaume le conquérant le fit relever. Les barons de Stafford en bâtirent aussi un fort beau vers le confluent de la Saw & du Penck. On peut dire que cette ville est agréable & bien bâtie. Elle est partagée en deux paroisses. Il y a une école publique. Aujourd'hui Stafford donne le titre de comte à un seigneur de la maison des Howards. * Délic. de la Gr. Br. p. 388. STAFFORDSHIRE, province méditerranée d'Angleterre, dans le diocèse de Lichfield & Coventry. Elle est bornée au nord-ouest par le comté de Chester; à l'occident par celui de Shrewsbury; au midi par ceux de Worcester & de Warwick, & à l'est & au nord-est par celui de Darby. Elle s'étend du nord au sud l'espace de quarantequatre milles, en a vingt-sept de large, & cent quarante de circuit. Ce terrein renferme huit cents dix mille arpens de terre. On y compte cinq hundreds ou quartiers, dixhuit villes ou bourgs à marché, cent trente églises paroisfiales, & environ vingt-trois mille sept cents cinquante maisons. Il y a quatre villes qui ont droit de députer au parlement, & quinze bourgs qui ont droit de marché. Les anciens habitans de ce pays ont été les Cornaviens, qui possédoient outre cela les terres comprises dans les comtés de Shrewsbury, de Worcester & de Chefter. Après eux ce comté fut le partage des Saxons Merciens. On voit dans cette province un nombre considérable de rivieres. Les plus grandes font la Trent, la Tame, la Dove, le Blithe & le Saw. Parmi les autres, moins considérables, on remarque le Hans, le Churnet & la Teane, qui se jettent dans la Dove & le Penck, qui tombe dans la Saw. La partie méridionale de cette province commence à s'élever, & Mmmm Tome V. l'on y voit la tête de cette chaîne de montagnes, qui, courant au nord, partagent l'Angleterre en deux parties égales, faisant comme un dos au milieu du royaume, jus qu'en Ecosse; ainsi la partie septentrionale du conté de Stafford est montueuse, ce qui lui a fait donner le nom de Moore-Land. Par là elle est plus froide que le reste, & même la neige y demeure assez long-tems sur la terre. On a remarqué dans ces quartiers que le vent d'ouest y amene la pluye, & que ceux de sud & d'est y apportent le beau tenis, ce qui est le contraire des autres endroits du pays. On attribue cela au voisinage de la mer d'Irlande. Le terroir y est bon pour les grains & pour les pâturages dans le voisinage de la Trent, & la campagne est couverte en quelques endroits de belles & agréables forêts. Mais la partie méridionale est la meilleure & la plus fertile à tous égards. Outre les pâturages & les grains, on y trouve des carrieres de charbon de terre, d'albâtre & de pierres de moulins. On y trouve aussi quelques mines de fer. Les rivieres abondent en poisson, fur-tout la Trent. Le Dove se déborde quelquefois au mois d'avril, & s'enfle pendant douze heures avec tant de violence, qu'elle entraîne les brebis & les vaches; douze heures après elle se rabaissfe & rentre dans son lit. Ces débordemens sont aussi avantageux que ceux du Nilen Egypte. Les terres s'en trouvent engraissées, & les prairies en tirent une belle verdure. Il n'en est pas absolument de même de la Trent: elle se déborde aussi quelquefois; mais quand elle a passe ses bords, elle n'y rentre qu'au bout de quatre à cinq jours; de sorte que la campagne voisine en est toute inondée pendant ce tems. Le Dove est par-tout bordée de carrieres, d'où l'on tire de la chaux. On la brule, & on s'en sert avec profit pour engraiffer la terre. L'eau de la riviere reçoit une telle graisse de la chaux qui est sur ses bords, que les prairies voisines en prennent une agréable verdure, qu'elles conservent même au milieu de l'hiver. On trouve aussi dans cette province des puits salés, dont on fait de beau sel blanc. Enfin il ya quelques mines d'un plâtre fort blanc, qui se durcit comme de la pierre. * Délices de la Grande Bretagne, p. 382. Les villes & bourgs où l'on tient marché font: STAGABAZA. Voyez TAGABAZA. STAGIRA ou STAGIRUS, ville de la Macédoine, au voisinage du mont Athos, sur le golfe Strymonique, entre Amphipolis & Acanthus. Etienne le géographe, qui écrit Stagira, orum, en fait la patrie d'Aristote, qu'il surnomme Σταγειρίτης, Stagirites. Hérodote, l. 7, c. 115, in Xerxis itinere, donne à peu près à cette ville la même position que nous lui avons donnée; car il dit qu'après que l'armée de Xerxès eut quitté le Strymon, elle passa par Stagirus, & arriva à Acanthus. Thucydide, l. 4, p. 311, dit que Stagirus étoit une colonie des Andriens, & que, conjointement avec la ville d'Acanthus, elle abandonna le parti des Athéniens. Prolomée la compte parmi les villes maritimes, & la marque entre le fleuve Strymon & le mont nt Athos, mais au lieu de Stagira, il écrit Stantira. Pline, comme Etienne le géographe, dit Stagira. Cette ville est appellée Libanova par Sophien, qui, dans un autre endroit, la nomme Orthagoria ; & Nicetas lui donne le nom de Macra. * De l'Isle, Atlas. Ortel. Thefaur. 1. STAGNARA, petite ville de la Turquie, en Europe, dans la Romanie, près de la côte de la mer Noire, entre Sifopoli & les bouches de la mer Noire, ou du détroit de Conftantinople. * Baudrand, Dict. 2. STAGNARA, Stagnum ou Develton-Stagnum. C'est un lac de Turquie, en Europe, dans la Romanie, près de la ville de Develto. STAGNO, Stagnum, petite ville de la Dalmatie, dans la partie orientale de la presquifle de Sabioncello, & dans la dépendance de la république de Raguse. Cette ville, qui est fortifiée, a un évêché fuffragant de l'archevêché de Raguse, & un petit port de mer, sur la côte du golfe de Venise, environ à trente milles de la ville de Raguse, vers la Tramontane, en allant vers le golfe de Na renta. STAGNO PICCOLO, dans la langue du pays MaliSton. C'est un bourg & une forteresse, à un mille de la ville de Stagno, dont il est parlé dans l'article précédent, avec une garnifon, toujours commandée par un noble de Raguse. STAGNUM. Procope appelle ainsi un port de la mer Méditerranée, sur la côte d'Afrique, à quarante stades de Conftantinople. Il dit que ce port est fort grand, & que l'entrée en est fort aisée. Ortelius croit que c'est de ce port dont parle Orose au livre quatrième, c. 22, & que c'est auffi le port de Carthage, simplement appellé Λίμνη par Appien, de Bel. Pun. * Wandalic, 1. 1, C. 20. STAGUS. Voyez STEGOS. STAIN, petite ville d'Allemagne, dans la basse Autriche, sur le Danube, où elle a un pont. STAINFORD-BRIDGE, bourg d'Angleterre, dans Yorckshire, au quartier oriental de la province. De Wighton, en tirant au nord-ouest, on passe dans le bourg de Pockligton, & l'on arrive à Stainford-Bridge, situé sur le Derwent. On appelle auffi ce bourg BATLEBRIDGE, c'est-à-dire, Pont de la Bataille, parce que ce fut là que Harald, roi d'Angleterre, défit en 1066, Harald, roi de Norwége, & gagna fur lui un si riche butin, qu'il s'y trouva de l'or pour la charge de douze robustes jeunes hommes; mais le pauvre roi fut battu lui-même, neuf jours après, dans un combat qu'il livra à Guillaume le Conquerant, & il y perdit la couronne avec la vie. * Délic. de la Grande Bretagne, p. 234. STAINTHORPE OU STAINDORPE, bourg d'Angleter re, dans la province de Durham, sur le chemin qui conduit de la ville de ce nom à celle d'Yorck, à quatre ou cinq milles de Bernard-Castle, au nod-est. Stainthorpe elt un bon bourg. On y voyoit autrefois une église collégiale. * Délices de la Gr. Bret. p. 250. STAINVILLE, bourg de France, au duché de Bar, fur la rive gauche de la Sault, dans le diocèse de Toul, office de Bar, & le chef-lieu d'une prévôté, qui ressortit au bailliage de Bar. Il y a à Stainville quatre chapelles, outre l'église paroissiale, qui est sous le titre de S. Matthieu. L'abbaye de Jouvilliers est dans le district de cette paroisse, auffi-bien que la ferme de Nantelle, qui dépend de cette abbaye. STALBO. Voyez REGENSES. 1. STALIA.C'est l'un des noms qu'Etienne le géographe donne à la ville de Gènes. 2. STALIA, lieu dont il est fait mention dans le cinquiéme concile de Constantinople. Il paroît, dit Orcélius, que ce lieu devoit être aux environs de la Cilicie. STALIMENE, ifle de l'Archipel. C'est la même que les anciens Grecs & Latins ont appellée Lemnos; mais qui à présent n'est connue parmi les Turcs, les Italiens & les Grecs modernes, que fous le nom de Stalimene ou de Sralimini. Les Turcs lui donnent aussi celui de Limio. Les Grecs lui donnerent le nom de Stalimene, parce qu'elle ressemble à un lac ou un étang, qui en grec signifie Λίμνη. On pourroit encore dire que c'est un mot formé de Stomalimne, qui signifie embouchure. de lac; car c'est ainsi que les anciens Grecs appelloient les étangs situés près de la mer, où ils se venoient décharger par leur embouchure. Belon tient Stalimene pour un mot italien, composé de Sta & Limni, & ce dernier pour un mot corrompu de Lemnos. Etienne le géographe dit que cette isle fut appellée Lemnos de la déesse Junon, que les anciens habitans de cette isle appelloient Lemnos, & à qui ils immoloient des vierges. Elle avoit autrement éré appellée Æthalie & Hypsipylée, d'une des filles du roi Thoas, qui avoit autrefois régné sur ses infulaires; & c'est aussi pour cette raifon qu'elle est appellée dans les anciens poëtes le pays d'Hypsipylée. * Dapper, Description de l'Archipel, p. 241 & suiv. L'isle de Stalimene est placée dans les cartes marines, à quatre lieues d'Allemagne, à l'occident de l'isle de Tenedos; à sept, à l'est quart au sud du cap sud-est, de l'isle de Lanio, par son cap fud-ouest; à huit, à l'ouest quart au fud du détroit des Dardanelles; à presque la même distance au feptentrion du pays de Thrace; à sept licnes an sud-ouest des ifles d'imbros & de Samandrachi, & environ à dix lieues au fud eft du mont Athos, qu'on nomme à présent Monte Santo. Belon la place à quatre lieues de France du pays de Thrace, & par un de ses caps, appellé Blava; à dix-huit de ces mêmes lieues du cap de l'isle d'Imbros, qu'on nomme Aulaca, & à quatre journées de navigation de Conftantinople, quand le vent est favorable, en traversant la Propontide ou mer de Marmora. Pline la met à quatre-vingt-fept milles, & Solin à quatre-vingt-fix milles du mont Athos, ou Monte Santo; à quatre-vingt-huit milles de l'ifle d'Imbros ; à vingt-fix milles de Samothrace, & à cinq milles de Thassos. Selon Pomponius Mela, elle est vis-à-vis du mont Athos, &, felon Etienne le géographe, près de Thrace. On donne à cette isle cent milles d'Italie, ou vingt-cinq lieues d'Allemagne de circuit. Elle est plus étendue en longueur d'orient à l'occident, qu'en largeur du nord au midi. Elle avoit anciennement deux villes, dont la capitale étoit appellée Hephastia, Hephastias ou Hephestia, parce que Vulcain y étoit adoré sous le nom d'Epheftios, & l'autre Myrina; de là vient qu'elle étoit appellée par les anciens Grecs Dipolis, c'est-à-dire, qui a deux villes. Quelques auteurs veulent qu'elle ait été située à l'endroit où l'on voit un petit village appellé Cochino, qui est près de la mer. Cependant Ptolomée appelle Hephatia une ville située au milieu des terres. Cochino a un fort beau port, qui fournit en tout tems aux vaisseaux une rade assurée. On y voit encore un vieux château presque entierement démoli, & dont les murailles, battues par les flots de la mer, tombent tous les jours en ruine. Les Pélasgiens ont autrefois habité une des deux villes de cette ifle, où ils se retirerent après avoir été chaslés de l'Attique par les Athéniens. Homére appelle Lemnos une petite ville bien bâtie; & dans ses Iliades il la nomme la petite ville du divin Thoas. La capitale de l'isle porte à présent le nom de STALIMENE, de même que toute l'ifle, & est située près de la mer. Il y en a qui tiennent que c'est l'ancienne ville de Myrina, que Ptolomée semble placer près de la mer, au lieu qu'il met celle d'Hephastia, au milieu des terres. Belon prétend que l'ancienne ville de Myrina est à présent nommée Lemno, & lifle de Stalimene. Cette ville est bâtie, suivant le témoignage du même Belon, fur le penchant d'une colline, qui se termine au bord de la mer, & en est environnée de deux côtés, de forte qu'elle est fort étroite à l'endroit où elle vient aboutir. Le côteau sur lequel la ville est bâtie est environné de vieilles murailles, & a au sommet un château occupé par une garnison turque, sous l'autorité d'un gouverneur qui y fait fon féjour. L'accès en est fort difficile; de forte qu'il semble être plus fort par son afliette que par ses fortifications. Les maisons de cette ville font bâties le long d'une côte, qui est toute plantée de vignes. Il y a des masures au bord de la mer, qui font affez connoître l'ancienne splendeur de ses bâtimens. Porcachi la place au milieu de lifle, & met au-dessous du côté du couchant, & près du rivage de la mer, un village nommé Sala. On compte, dans l'ifle de Stalimene, environ foixantequinze villages habités par des Grecs qui s'appliquent fort à l'agriculture. De tous ces villages il n'y en a que deux ou trois où l'on ne parle pas grec, & où il n'y a point de chrétiens. Porcachi, avec quelques autres, la fait baffle & toute unie, & en effet, elle n'est pas fort haute. Ses plus hautes montagnes sont situées du côté de la Macédoine vers le quartier de l'isle, qui est sur la gauche, en y allant. Quand on vient du côté du nord nord-ouest, du nordouest quart au nord, & du nord-ouest quart à l'ouest, & qu'on fait voile du côté de cette isle, on la découvre avec deux hautes montagnes; mais tout le reste paroît bas & uni. Une montagne de cette isle, appellée Mosychle par Hesyche & Nicander, vomit à son sommet des feux & des flammes; delà vient que l'ifle est appellée dans Sénéque l'ardente Lemnos, & que plusieurs anciens poëtes ont fait mention du feu qui y brule. C'est aussi en considération de ces vomissemens de feux qu'elle fut anciennement'appellée Ethalie, c'est-à-dire, brulante; car quelque auteurs forment ce mot du grec "Αιβεσθαι, qui signifie bruler. Cette ifle n'a point de riviere, mais seulement quelques fontaines & ruisseaux. Il y en a un qui fort d'un rocher à une demi-lieue de la ville, qui arrose toute la campagne des environs du port, & vient baigner les murailles de la ville. Sa source se précipite du haut du rocher en bas, formant une chute d'eau avec grand bruit, qu'on nomme communément cataracte. Il y a pourtant un autre ruisseau appellé Salinari, qui ne coule pas loin de Myrina ou Lemno. Stalimene a un beau port, appellé Porto S. Antoni. Il est au côté méridional de fon cap oriental entre deux montagnes, & il abonde en poissons. Il y a deux petites isles ou grands rochers près du cap occidental du port, qui est formé par la plus occidentale des deux montagnes dont j'ai parlé. Un écueil ou banc de sable, descend toutà-coup au-dessous de l'eau, & s'étend du cap oriental affez avant dans la mer. On peut être dans le port à l'abri de toute forte de vents, à la réserve du sud est, & du sudsud-est. Porcachi donne à cette isle plusieurs ports; mais il ajoute qu'on pourroit plutôt les appeller de petits golfes, que des ports. Les poëtes ont feint que Vulcain à cause de sa laideur & de fa difformité, fut précipité du ciel par Jupiter en l'isle de Lemnos, où il fut nourri par des finges, ou, comme d'autres le racontent, par Eurynome, fille l'Océan & de Thetis. C'est à cette chute qu'on a attribué le défaut qu'il avoit d'être boreux. lis ont aufli dit, qu'il avoit une forge en l'ifle de Lemnos, de même qu'en celle de Sicile. C'est pour cela que l'isle de Lemnos eft appellée dans les anciens Vulcania. C'est pour cela encore, que Vulcain est appellé dans Virgile le pere Lemnien & qu'Homére représente cette ifle comme une petite ville proprement bâtie, & que Vulcain chérit par dessus tous les pays du monde. Cette fiction poëtique a indubitablement pris son origine du mont Mosychle, qui vomit des Hammes dans l'ifle de Lemnos, comme nous l'avons ci devant remarqué, de même qu'en Sicile le mont Ætna. Quelques-uns ont appellé Tifle de Lemnos, les pays raboteux de Vulcain. Cette ifle produit plusieurs herbes & plantes, entre lesquelles il y en a qur nous font inconnues, dont Belon fait mention. Il y croît une herbe appellée chaméléon dont la racine étant appliquée sur la peau, y excite une fi grande démangeaison avec inflammation, qu'il n'y a point d'ortie, si piquante qu'elle soit, qui en puisse causer la centiéme partie. L'on ne sent pourtant pas d'abord la démangeaison qu'elle cause, mais seulement après une heure ou deux heures, & plus on se frote, plus on augmente la chaleur, la démangeaifon, & la rougeur; de forte qu'enfin toute la peau qui on a été touchée devient plus rouge que du fang. L'ifle est fort dépourvue d'arbres & de bois. Il n'y en croît guère, que près du village de Rapanidi, où il y a un bocage tout planté de hêtres; mais on ne les coupe pas pour bruler: on les conferve en considération d'un remede qui en découle, que les Grecs & les Italiens appellent Velanie. Ce reméde est fort estimé par les habitans de cette ifle, qui ne permettent pas qu'on le transporte hors de leurs pays. On se fert des glans & de l'écorce ou gouffes de cet arbre, qui eft toujours verd pour t taner les cuirs, & on appelle cette forte de tan de la velanie. Au lieu de bois ces infulaires se servent de tiges d'asphodèle, & d'une autre plante qu'ils nomment cachynopoda: on les brûle après les avoir fait fécher. Le terroir n'est même guère propre qu'à produire des arbres fruitiers & domestiques. Le quartier de l'ifle qui regarde l'orient est fort aride, mais celui qui est du côté du couchant & du midi, est un peu plus bas & plus verdoyant. Les lieux abreuvés de quelque humidité, & qui font situés entre des collines ne produisent que des arbres fruitiers, comme figuiers, noyers & amandiers, fort peu d'oliviers. Il y croît aussi de deux fortes de Siphisus, & un certain arbre appellé nérion, dont les infulaires parfément les fleurs sur les branches de grenadiers, où les attachent à ses rameaux, dans la pensée que ces fleurs étrangeres les empêchent de perdre les leur, ils s'imaginent même que cela empêche aussi les grenades de se fendre. Au défaut de l'herbe appellée oréga, on se sert d'une certaine plante qui croît entre les hayes & les buiffons; on la garde communément dans les maisons, & on s'en sert lorsqu'on veut manger du poisson frais ou falé, pour en relever le goût & y faire une sauce. Les Grecs d'au. jourd'hui l'appellent Lagochimeni, c'està dire, gite de lié. vre. Elle a le goût & l'odeur fort semblable à la marjolaine grosse, ou héracléorique. Ses feuilles approchent de celles de la mille feuille, sa semence est ronde, & toute la plante Tome V. Mmmmij a beaucoup de rapport avec celle que les anciens médecins Grecs & Latins ont appellé Ammi. Les hayes sont faites d'un certain arbrisseau, appellé par les Grecs anciens & modernes Rhamnus, nous le nommons Nerpun & Bourgépine. On prétend que ce pays est mieux entretenu depuis qu'il est sous la domination du Turc, parce que les habitans y jouiflent d'une paix & d'une tranquillité profondes. L'ifle nourrit différentes fortes d'animaux sauvages & domestiques. On y trouve beaucoup de ferpens de plusieurs especes, qu'on nomme en langue du pays Cenchriti, Laphiti, Ochendra, Amphisbena, Sagittari, Tephliti ou Tephlini & Nerofidia. Le Cenchritri eit le Cenchris des anciens, comme le Laphiti leur Elaphis & l'Ochendra, leur Echidna ou Echis, bien qu'il ne soit pas une véritable vipére. L'Amphisbena a retenu fon ancien nom: le Sagittari est celui que les anciens ont appellé Jaculus ou le Javelot, & le Tephlini se rapporte à celui qu'ils ont nommé Tephlinos. L'ifle de Stalimene est encore estimée, comme elle l'a été de tout tems parmi les medecins, à cause d'une certaine terre qu'on appelle terre sigelée ou Lemnia, & qu'on tire de cette ifle. Il y a une colline ou montagne, à quatre fois la portée d'un trait de la ville d'Hephastia, ou du village de Cochyno, entre laquelle & la ville, on découvre une chapelle appellée Sotira, qui confitte seulement en quelques murailles fort petites & fort basles, fur lesquelles pose les toit. Quand on est arrivé à cette chapelle, on rencontre deux chemins, dont l'un rend à droite, l'autre à gauche, vers deux fontaines situées à la portée d'un trait l'une de l'autre. Celle qui est à droite tarit en été; celle qui est à gauche coule toute l'année. Comme ce quartier est fort humide, il n'y croît que des joncs; au lieu qu'au chemin, qui conduit à la fontaine sur la droite, il y croît tout du long des carouges, des sureaux & des saules, qui couvrent la fontaine de leur ombre. Cette colline est renommée tant par la chute de Vulcain, que par la terre sigelée ou lemnienne qu'on en tire. Porcachi témoigne qu'on n'y voit croître ni herbe ni plante; mais, s'il en faut croire Belon, le bled y vient affez heureusement. On pratiquoit anciennement diverses cérémonies pour aller tirer des entrailles de la terre, & pour former cette terre sigelée de Lemnos, fur laquelle on a imprimé diverses marques & figures fuides vant les différentes circonstances fiécles, où l' l'on en a vû paroître dans le monde. Du tems de Dioscoride, qui a vécu long-tems avant Gallien, on avoit accoutumé de mê. ler du sang de bouc, dans les petits pains qu'on en formoit, & d'imprimer dessus la figure d'une chevre; mais cette coutume n'étoit plus en usage du tems de Gallien, comme il l'éprouva lui-même lorsqu'il alla à Lemnos pour s'en éclaircir. On avoit alors une autre maniere de préparer cette terre, & d'en former de petits pains; car avant toute chose, le prêtre montoit sur une colline, où après avoir répandu une certaine mesure de blé & d'orge, & pratiqué quelques autres cérémonies, il chargeoit un plein chariot de cette terre, qu'il faifoit conduire à la ville d'Hephastia, où on la préparoit ensuite d'une maniere bien différente de la précédente. Cependant il y a plusieurs fiécles que ces cérémonies ne font plus en usage, & qu'elles ont été entierement abolies : mais en leur place on en a introduit d'autres. Tous les principaux de l'isle, tant Turcs qu'ecclésiastiques, ou prêtres Grecs, qu'on nomme Caloyers, s'assemblent le sixiéme jour d'août, dans la chapelle de Sotira, où les Grecs, après avoir lu leur liturgie, & fait des prieres, montent tous ensemble, accompagnés des Turcs, vers la colline, où l'on arrive par des dégrés qu'on a faits. Quand on est parvenu au plus haut, cinquante ou foixante hommes se mettent à creuser jusqu'à ce qu'ils ayent découvert la veine de la terre qu'ils cherchent, dont les Caloyers remplissent quelques sacs faits de poile de bête, & les donnent aux principaux des Turcs, établis pour le gouvernement de l'ifle, comme le sous-bachi, ou le waiwode, qui se trouvent présents. Quand ils ont tiré de cette terre en quantité suffisante pour toute l'année, ils en font recouvrir la veine avec d'autre terre. Cependant le sous - bachi fait porter à Constantinople, & présenter au grand - seigneur une grande partie de ce qu'on a tiré, & vend le reste à des marchands. Il n'y a pas d'autre moyen d'en avoir & d'en acheter, que de s'adresler au sous-bachi ou gouverneur Turc. Car il est défendu à tous les infulaires, fur peine de la vie, d'en transporter la moindre partie hors de l'ifle; & fi quelqu'un étoit surpris avec le moindre petit pain, ou convaincu d'en garder dans sa maison, à l'insçu du gouverneur, il feroit condamné à payer une grosse amende. Il n'y a que le sousbachi, qui tire tous les ans au nom de l'empereur son maître, les revenus de l'isle, à qui il soit permis d'avoir de cette terre, & d'en vendre. Il ne seroit pas même facile, quand on auroit vingt ouvriers, & qu'on les feroit travailler toute la nuit, de pouvoir creuser pour la découvrir, outre qu'on les pourroit reconnoître, & remarquer facilement. Quoiqu'il ne faille pas douter qu'on pourroit trouver en d'autres quartiers de l'ifle de cette même terre, les Grecs ne s'en voudroient pas servir si on ne la tiroit en présence des caloyers & avec les cérémonies accoutmees. Ils ne voudroient pas même se servir de celle de la colline, ni permettre que les autres s'en ferviffent, fi elle avoit été tirée dans un autre jour que le sixiéme d'août; tant ils attribuent de vertu & de force à ces cérémonies, & au tems & à la maniere de tirer la terre de sa veine. Ils s'imaginent aussi que s'ils n'y étoient présens, & ne la voyoient tirer eux-mêmes, sa vertu en seroit moins forte. Les Turcs font dans ce point moins superstirieux, que les Grecs, ou les autres peuples, quoiqu'ils souffrent que les chrétiens Grecs faffent toutes ces grimaces & cérémo nies, & répandent leurs bénédictions fur cette terre; en quoi ils semblent eux-mêmes les seconder. Suivant le rapport des plus anciens habitans de l'ifle, cette coutume de choisir un certain jour de l'année, pour tirer cette terre de sa veine, a été introduite par les Vénitiens qui commencerent à la mettre en pratique lorsqu'ils étoient en poffeffion de cette ifle. Quand cette terre est hors de sa veine, on en forme de petits pains ronds, du poids d'environ deux dragmes, fur lesquels on voit seulement ces deux mots, en caracteres turcs & arabes, Tin Imachton, c'est-à-dire terre sigelée. Cependant ces lettres & ces caracteres ne sont pas femblables dans tout les petits pains; mais il en faut attribuer la cause à l'inégalité de l'écriture des Turcs, qui voulant exprimer une même chose se servent de différens caracteres, ou forment leurs lettres diversement, outre que plusieurs gouverneurs Turcs, en ayant eu en différens tems la conduite, ils ont fait aussi imprimer des sceaux différens. Au rapport des Grecs & des Turcs, la plus ancienne marque des différentes terres de cette nature, qu'on trou ve encore, est celle qui n'a pas plus d'un pouce de large, & qui ne comprend que quatre lettres. Il y a seulement au milieu du sceau entre toutes les lettres, quatre points. La terre de ce sceau est si grasse, qu'elle semble du suif, & qu'elle s'attache entre les dents quand on la mâche, sans qu'il paroiffe qu'il y ait le moindre sable. Elle est d'un rouge brun & enfoncé. Cependant la terre sigelée n'est pas toujours de la même couleur. Car il arrive souvent que dans une même veine elle est plus blanche, quelquefois un peu plus rouge, & d'autres fois d'un rouge clair. Elle a une vertu attractive & defficative qui résiste à la pourriture & au venin. Elle remet le sang figé dans sa consistance & fluidité naturelle, fortifie le cœur, & provoque les sueurs. Son principal usage est dans les fiévres malignes, dans la peste, dans la dyssenterie, & dans les piquûres & morfures de bêtes venimeuses, pour excentrer le venin, qui se pourroit infinuer, ou qui se seroit déja infinué dans le sang. Les anciens s'en servcient aussi, pour combattre & faire vomir le poison qu'on avoit avalé. Les anciens médecins, tant Grecs que Latins ont fort estimé cette terre qu'ils employoient à divers usages. On peut dire aussi que les médecins modernes n'en font pas moins de cas, puisqu'ils s'en fervent en diverses occafions extérieurement, & qu'ils l'employent, non comme un remede simple, dans les remédes composés. Le célébre & fameux Gallien s'embarqua dans l'isle de Lemnos, dans la seule pensée de pouvoir s'éclaircir sur la force & vertu de cette terre, qu'il espéroit de pouvoit pénétrer par une exacte & longue application. Il y trouva une perfonne, qui s'en servoit pour guérir les plaies invétérées & les morsures.de viperes, & par conféquent contre toutes fortes de piquûres venimeuses & mortelles, & pour guérir ceux qui |