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Pinnau, fe forme des eaux d'un petit ruiffeau nommé aujourd'hui Wackenbeck, & autrefois Wickfleet; il reçoit celui de Drebeck, baigne Pinnenberg, à laquelle il donne fon nom; &, après avoir reçu les petites rivieres de Relling. beck & le Bilfbeck, il fe rend dans l'Elbe entre Bisthorst & Hohenhorft. Le Lengelbeck, appellé autrefois Glefter ou Jefter, paffe au travers de Barmftede, prend le nom de Kroeckaw après avoir reçu la petite riviere d'Offenbeck, & entre dans l'Elbe au-deffous de Ceftermich. La petite riviere de Rin ou Rihn, fe forme de divers ruiffeaux, fe rend à Gluckstad, & s'y jette dans l'Elbe. Le Stoer, Stuer, anciennement Sturia, fert de borne entre la Stormarie & le Holstein propre. Il prend fa fource au village de Bornhoede, au-dessus du grand & du petit Kummerfeld, reçoit au-deffous de Wiltorp la Schwala & l'Eubeck. Il fe joint enfuite au Sarlow grofli des eaux des petites rivieres de Tapaw, d'Aw & d'Aspaw, & qui, avant que de les avoir reçues, porte le nom de Holtbeck : le Stoer reçoit après cela le Wimerbeck, le Bramaw, le Barmettede, le Schmalbeck, augmenté d'une petite riviere, le Barmbeck & le Lutzbeck, & ainfi accru il paffe à Itzehoe, où il environne la nouvelle ville. Enfin après avoir reçu le Wilfter, le Wolbursgaw, la Krempa, avec quelques autres ruiffeaux, & au bout d'une courfe d'environ douze milles, il fe jette dans l'Elbe, au-deffous de Boesfleth, par une profonde, mais étroite embouchure, où les navires marchands peuvent cependant entrer. La ville de Hambourg eft fituée dans la Stormarie, ainfi que la préfecture de Trittow, celle de Reinbeck, la grande partie de la préfecture de Segeberg, & le comté de Pinnenberg. Il y a la Stormarie royale & ducale, où font:

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Rutg. Hermanid. Descr. Daniæ, p. 1034.

Quelques auteurs ont écrit que la Stormarie avoit eu anciennement des feigneurs particuliers; mais il eft certain que depuis plufieurs fiécles elle n'en a point eu d'autres que les ducs de Holftein. Pontanus, l. 9, p. 565, rapporte dans fon histoire de Danemarck, que Henri, élu évêque d'Osnabrug, fut le premier de la maifon de Holltein, qui prit la qualité de feigneur de Stormarie : mais plufieurs autres écrivains affurent qu'au commencement du neuviéme fiécle Udon de Mayendorf en étoit feigneur : fa poftérité en jouit après lui, & enfuite les ducs de Saxe de la maifon de Billingen, & après eux les comtes de Schaumbourg, d'où elle paffa à ceux d'Oldenbourg; & même on obferve qu'elle fut toujours gouvernée par le frere du comte de Holftein régent.* D'Audifret, Géogr. t. 3.

STORNA, ville de l'Inde, au-delà du Gange: Prolomée, l. 7, c. 2, la donne aux Tangani.

STORTA, village d'Italie, dans le patrimoine de faint Pierre, environ à quatre milles au nord occidental de la ville de Rome. Storta ou la Storta eft la premiere pofte qu'on trouve fur la route de Rome à Florence. Ce village eft du diocèfe de Porto, & on tient que ce fut dans ce lieu que JESUS-CHRIST apparut à faint Ignace, & lui dit Ego vobis Roma propitius ero. En 1700 le pere Tirzo Gonzalez, Espagnol, fit bâtir une chapelle au même endroit, où l'on prétend que cette apparition fe fit. * Magin, Atlas tal. Corn. Dict.

STORTFORD, bourg d'Angleterre, dans la province d'Hertford. Il a droit de tenir marché public. * Etat préfent de la Grande Bretagne, t. 1. STORTHYNGA, promontoire d'Italie, felon Lycophron cité par Ortelius, Thefaur. qui dit qu'lfacius le prend pour le promontoire de Cryon, & entend par-là le promontoire Lacinium. Il ajoute que Canterus & Scaliger rendent Storthynga par Cacumen Voyez LACINIUM. STORTON, bourg d'Ecolfe, dans la province de Perth, fur le Tav, un peu au-deffous de Dunkeld. Ce bourg appartient à des feigneurs de la maison de Murray, en titre de vicomté. * Délices de la Grande Bretagne, P. 1291,

STOSSII, ancien peuple de la Sarmatie Européenne, felon Ptolomée, 4. 3, c. s, qui le place auprès de Velta.

STOUENSES. Voyez STOBI.

STOVINUS, ville des Liguriens, felon Etienne le géographe, qui remarque que le nom national est Sro

VINI.

1. STOURE OU STOWER, riviere d'Angleterre. Elle fort de l'extrémité orientale du comté de Suffolk, où elle forme un petit lac nommé STOURMERE, un peu au-dellous de fa fource; puis paflant entre cette province & celle d'Effex, elle fe partage en deux bras, & fait une petite isle près de Manytre ou Maningtre, après quoi fe rejoignant elle va fe jetter dans l'Océan, par une large embouchure, près de Harwich. Il fut réfolu dans le parlement de l'année 1706, de rendre cette riviere navigable depuis la ville de Manytre jusqu'à celle de Sudburg, dans le comté de Suffolk: & le 27 de février l'acte qu'on en avoit dreflé reçut l'approbation de la reine. Délices de la Grande Bretagne, p. 79.

2. STOURÉ ou STORT, riviere d'Angleterre. Elle cou. le au couchant de la province d'Effex qu'elle fépare du comté de Hartfort, & fe perd dans la Ley. On la nomme auffi la petite Stoure, pour la diftinguer de celle qui fait l'article précédent.

3. STOURE, riviere d'Angleterre. Elle fort du comté de Wilt, où elle reçoit les eaux de fix fources, & en entrant dans le comté de Dorfet, elle traverse la forêt de Gillingham, porte fes caux à l'occident de Shaftsbury, & coule droit au fud jusqu'à Stourminster, où on la paffe fur un pont de pierre. En fortant de Stourminster, elle tourne. au fud-eft, & va en ferpentant jusqu'à Blandford, d'où continuant fon cours au fud-eft, & puis tournant à l'eft, elle va laver les murailles de Winburnminfter. A un mille de Winburnminfter elle reçoit l'Alen, près de Cranford qu'elle baigne; après quoi elle va fe perdre dans la baye de Pool. Cette riviere eft féconde en diverfes fortes de poisfons; mais on y prend fur tout quantité de tanches & d'anguilles. Délices de la Grande Bretagne, p. 757 & fuiv.

4. STOURE, riviere d'Angleterre, en latin Soarus. Elle prend fa fource dans la province de Leycefter, à quelques milles au fud-oueft de la ville de Leycefter. Elle fe partage en deux branches, auprès de cette ville, & ces deux branches fe rejoignant bien-tôt après, elle coule au nord, arrofant divers petits lieux, comme Mont-Sorell & Barrow. Delà la Stoure, dont le nom eft corrompu de Soare, mouille Loughborough, & entre enfuite dans le comté de Nottingham, ou après avoir baigné Stanford elle va fe perdre dans la Trent.* Délices de la Grande Bretagne, p. 369 & 383.

STOURMINSTER. Voyez STURMINSTER.

STOW, bourg d'Angleterre, dans la province de Glocefter. On y tient marché public. * Etat préfent de la Grande Bretagne, t. 1.

STOW-MARKET, ville d'Angleterre, dans la province de Suffolc, avec droit de marché. Stow-Market eft une grande & belle ville, fituée fur l'Owell. On y fait beaucoup d'étoffes, & elle eft ornée d'une belle églife. * Etat préfent de la Grande Bretagne, t. 1, p. 113.

STOW-MERE, lac d'Angleterre, dans la province de Leycefter, près de Lichtfield. Ce lac ou étang eft double. Chaque lac peut avoir trois cents pas de longueur : & ils font joints l'un à l'autre par des chauffées, avec un canal de communication par-deffous, Celui des deux qui eft au nord, s'appelle STOW-MERE, & a bien cent pas de large en quelques endroits; mais l'autre, nommé DAMM-MERE n'a qu'environ cinquante pas de largeur. * Délices de la Grande Bretagne, p. 384.

STOW-ON-THE-WOULD, bourg d'Angleterre dans Glocestershire, aux confins du comté de Warwick, entre les rivieres d'Evenlode & de Windrush. Ce bourg, fitué fur l'ancienne voie romaine, tirée au pied des montagnes, pavée de groffes pierres, & connue fous le nom de Foffeway, eft bâti fur une hauteur & fort expofé à la fureur des vents. De Stow-on-the-Would, la voie romaine avançant au fud & au fud-oueft, coupe les rivieres de Lech, Coln, & de Chur, & arrive à Cirencester. * Délices de là Grande Bretagne, p. 658.

de

STOWER ou STOUR, riviere d'Angleterre, au comté de Kent. Elle y prend fa fource; &, coulant au nord, elle

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P. 1592.

STRABERG, (le Ratra ou Ratray) riviere d'Ecoffe, dans la province de Buchan, formoit autrefois à fon embouchure un baye appellée STRABERG. On y voyoit un trèsbon port, avec une petite ville qui portoit le nom de la riviere; mais l'Océan a comblé le port par les fables qu'il y a jettés, & la ruine du port a entraîné celle de la ville. * Délices de la Grande Bretagne, p. 1324.

STRABONIANENSIS-FUNDUS, campagne ou fonds Afrique. C'eft faint Auguftin qui en parle dans fa lettre deux cents trente-fixiéme.

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STRACCIACAPPA, lac d'Italie, dans l'Etat de l'Eglife, au patrimoine de faint Pierre, entre le lac de Bracciano & celui de Bacano, environ à deux milles de chacun de ces lacs. C'eft le Papirius ou Papirianus Lacus des

anciens.

STRADBALLY, baronnie d'Irlande, dans la province de Leinster. C'eft une des fept qui compofent le comté de Queenscounty.* Etat préfent de l'Irlande, p. 44.

STRADELLA, bourg d'Italie, au Milanès, dans le Pavefan, fur la petite riviere de Verfa, affez près du bord méridional du Pô, & à trois lieues de Pavie, en tirant vers le levant. Niger prend ce bourg pour l'ancienne Jelleia. *Magin, Atlas Ital.

STRADENSIS, lieu fitué aux confins de la premiere Moefie, felon la notice des dignités de l'Empire, où on lit: Stradenfis Claffis impofita Margo Moefia I.

STRAGIONI, bourgade de la baffe Egypte, fur la côte de la mer Méditerranée, à dix-huit lieues de l'embouchure du Nil, du côté de l'orient. Pinet le prend pour l'ancienne Oftracine de Ptoloméc.

STRAGNA, fleuve que Cédrene, cité par Ortélius met au voisinage de la Perfide. Ce fleuve eft nommé Stranga par faint Epiphane & par Curopalate.

STRAGONA, ville de la Germanie, felon Ptolomée, 1. 2, c. 11. Pierre Appien veut que ce foit préfentement Posnanie ou Pofen, ville de Pologne. * Ortelius Thef.

STRAKONITS, château du royaume de Boheme au cercle, & au couchant de Pileck. C'est le chef-lieu du domaine du grand priear de Boheme, de l'ordre de faint Jean de Jerufalem ou de Malthe. Il y a trente commanderies qui dépendent de ce grand prieuré.

STRALEK, château de Suiffe, au canton de Zurich. Ce château ne fubfifte plus. On n'y voit plus maintenant qu'une chapelle. Il étoit fitué au pied de la montagne d'Ammont, fur la côte feptentrionale du lac Walhlesftatt. *Etat & délices de la Suiffe, t. 3, p. 205.

STRALEN, village des Pays-Bas, dans le haut quartier de Gueldre, entre la ville de ce nom & celle de Venloo, prefque à pareille diftance de ces deux places. Cette ville étoit autrefois fortifiée; mais les François qui la prirent en 1672, ruinerent tous les ouvrages qui lui fervoient de défenfe. Jaillot, Atlas.

*

STRALSUND, Bunitium ville d'Allemagne, dans la Pomeranie citérieure, & dans la feigneurie de Bard. Elle est fituée fur la côte de la mer Baltique, vis-à-vis de l'ifle de Rugen, vers les 54d 25' de latitude. On croit qu'elle a été ainfi appellée de fa fituation fur le bord du canal, & près de la petite ifle de Stral: en vieux langage germanique les détroits font nommés Sundt. Les Danois commencerent à bâtir cette ville l'an 1211 des ruines d'Arcom. Elle devint enfuite libre & impériale; & c'eft aujourd'hui une des plus riches & des plus fortes villes de l'Allemagne. Elle eft presque ifolée par la mer & par le lac Franken; & l'on n'y peut aborder que par une chauffée étroite, dont la tête

eft défendue par un fort. Stralfund a trois portes, celle de Franck, celle de Knip, & celle de Triplée. Le côté, entre la porte de Franck & celle de Knip, regarde l'ifle de Rugen : celui qui eft entre la porte de Franck & celle de Triplée, regarde Gripswald; enfin celui qui eft entre la porte de Triplée & celle de Knip regarde Damgarten & le pays de Mecklen bourg. Ces deux derniers côtés font environnés de grands marais. Walftein, général de l'armée impériale, affiégea cette place en 1629, & fut obligé d'en lever le fiége. L'électeur de Brandebourg la prit en 1678, à la faveur du feu que ses bombes y avoient mis. Elle fe rendit par capitulation, après avoir eu la plupart de fes maisons brûlées, & elle fut reftituée aux Suédois l'année fuivante. Les alliés du nord ayant en 1715 foumis cette forterelle, les Danois en prirent pos feffion, & la rendirent aux Suédois par le traité de paix. Ses bourgeois font exempts des impôts dans toute la principauté de Rugen. Elle a le droit de battre monnoie, droit qu'elle a confervé malgré les uns & les autres. Son territoire eft d'une grande étendue, auffi eft-elle regardée comme la ville la plus confidérable de la haute Saxe. Lorsque l'Empire eft en guerre, elle n'est tenue qu'à la propre défenfe ; & fi elle contribue de quelque fomine c'eft librement. Les ducs de Pomeranie ne peuvent mettre de garni fon dans Stralfund, ni fatiguer les habitans par des logemens de gens de guerre. Ses magiftrats nomment le gouneur de l'ifle de Rugen, & fans leur confentement on ne peut en transporter le bled, ni y braffer la bière, n'y en vendre; ni y bâtir aucune ville. Stralfund a le fixiéme rang entre les villes anféatiques, & le premier dans les états de Poméranic. Zeyler, Descr. Pomer.

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*

STRAMBAE, ville de Thrace, felon Etienne le géographe. Il dit que le nom national eft Stagirita & Strambai; mais Saumaife veut qu'on life Stagirita & Strambai.

STRAMULIPA ou STRAMUZUPA, contrée de la Gréce, fous la domination du Turc. C'eft celle que les anciens nommoient Bootie. Elle a pour bornes au midi le duché d'Athénes, au feptentrion la province de Janna, à l'orient le détroit de Negrepont, & à l'occident la Livadie propre. Baudrand, Ďict.

STRAND-FRISEN, Frifia feptentrionalis, ou Frifia Cimbrica. C'étoit anciennement une grande contrée de la Cherfonnèfe Cimbrique. Elle eft maintenant renfermée dans le duché de Sleswic en Jutlande, & comprend les gouvernemens d'Eyderftad, d'Hufum, & une partie de ceux de Flensbourg & de Tonderen, le long de la mer d'Allemagne. *Baudrand, Dict.

STRANGA. Voyez STRAGNA.

1. STRANGFORT, port d'Irlande,dans la province d'Ulfter, au comté de Down. Ce port ou havre eft long de cinq à fix milles, & affez fûr; mais fon entrée eft traversée d'une barre de rochers, les uns cachés, les autres découverts, & qui font les uns & les autres fort dangereux. Il communique au nord-ouest à un grand lac, qu'on peut regarder plutôt comme un golfe que comme un lac. On le nomme ĈONE ou COIN. Il a bien trente milles de longueur, mais il n'en a que deux ou trois de largeur. La marée y entre, & s'y fait fentir régulierement d'un bout à l'autre avec beaucoup de violence, ce qui rend fon eau falée. Il est parfemé d'une fi grande quantité de petites isles, qu'on les fait monter au nombre de deux cents foixante. Il eft fort dangereux dans les grandes tempêtes, parce que les vaifleaux n'y font nullement à couvert. La ville de STRANGFORD, qui est situće vers le milieu de la longueur de ce havre, eft petite & peu confidérable. Entre le havre de Strangford & celui de Drondum, la terre forme une presqu'ifle nommée Lecale ou Lekeale. C'eft là qu'eft Down ou Down-Patrick, la capitale du comté, fituée au fond du havre de Strangford, & à la tête de l'ifthme, qui fait la presqu'isle. * Délices d'Irlande,

p. 1570.

2. STRANGFORT, ville d'Irlande. Voyez l'article précédent.

STRAPELLINI, peuples d'Italie, dans la Pouille. C'eft Pline, l. 3, c. 11, qui en parle. Le P. Hardouin lit Strabellini pour Strapellini.

STRANTAVER, ville d'Ecoffe, dans la province de Galloway, au fond du golfe de Rian. Blaew écrit STRONRAWYR, au lieu de STRANTAVER.

1. STRASBOURG, en latin Argentoratum & Strateburgum, ville de France, capitale de l'Alface. Son nom d'Argentoratum lui vient de ce qu'elle a succédé à l'ancien Argen

torate ou Argentoratum, que les Romains avoient fondé pour fervir de boulevart à leur empire contre la Germanie; & elle eft appellée Strasbourg, parce que dans l'itinéraire d'Antonin elle étoit le lieu où aboutifloient plufieurs grands chemins des Romains, ce qui prouve qu'elle étoit confidérable au commencement du cinquiéme liécle. On ne fait ni par qui, ni en quel tems elle a été bâtie. Le premier géographe qui l'a marquée eft Prolomée ; mais il étoit fi mal informé de cette ville, parce qu'elle étoit encore peu confidérable, qu'il l'attribue aux Vangions, quoiqu'ils ne fullent pas voifins, & qu'elle appartint aux Tribocques. Elle étoit fort célébre dans le quatrième fiécle; Ammien Marcellin dit qu'elle étoit connue par la défaite des Barbares, Cladibus Barbaricis ; & c'est là où Julien Céfar vainquit les Allemands & leur roi Chonodomar, ce qu'Ammien Marcellin décrit amplement au feiziéme livre de fon hiftoire ; & Julien en fait mention dans fa lettre aux Athéniens, où il nomme cette ville Argentora, & non pas Argentorate, en quoi il a été fuivi par Zofimme au troifiéme livre. On voit par la notice de l'Empire qu'il y avoit à Argentorate une manufacture de toutes fortes d'armes. * Longuerue, Descr. de la France, part. 2, p. 222.

Dans le cinquiéme fiécle, les Vandales, ayant paffé le Rhin, faccagerent les villes & le plat pays des Gaules l'an 407, & Argentor ate fut du nombre des villes dont les habitans furent enlevés & emmenés dans la Germanie; Nemetes (Spire) Argentoratus tranflati in Germaniam, dit S. Jérôme dans fa lettre à Ageruchie, en date de l'an 409. Ces villes, de la défolation desquelles faint Jérôme parle, furent rétablies; car la notice de l'Empire, faite fur la fin du regne d'Honorius, & au commencement de celui de Valentinien III, marque Argentorate, & fait mention de la manufacture de toutes fortes d'armes qu'il y avoit dans cette ville. Ainfi on ne doit attribuer la ruine entiere d'Argentorate qu'à Attila, qui entra dans les Gaules par l'Alface; car Sidonius Apollinaris, dans fon panégyrique à Avitus, dit que cette effroyable quantité de Barbares, qui fuivoient Attila, ayant abattu des bois de la forêt Hercinie, voifine de l'Alface, de l'autre côté du Rhin, en fit des barques pour pafler le fleuve.

Cecidit cito fecta bipenni

Hercinia in Lintres, & Rhenum texuit alno.

Attila repaffa le Rhin par le côté d'Argentorate, lorsqu'il s'en retourna en Pannonie, & c'eft alors que cette ville fut entierement détruite ; en forte qu'elle demeura déferte, & fans habitans, durant plufieurs années. On veut en ce pays. là que le grand Clovis ait commencé à rebâtir cette ville, & qu'il y fit bâtir une petite églife, ce qui ne fe prouve par aucun auteur digne de foi. Ce qu'il y a de certain, c'est que fes fils bâtirent fur la riviere d'ill, près des ruines du vieil Argentorate, une nouvelle ville fur le grand chemin, qu'on appelloit Strata dans la moyer ne latinité.

Ce mot étoit reçu dans l'ufage commur, au fixiéme fiécle. Procope, au commencement de fon hiftoire des guerres de Perfe, dit qu'un chemin pavé s'appelle en langue latine Strata de ce mot eft venu l'italien Strada, le teuton Strate, que les hauts Allemands prononcent & écrivent Stratz, & les vieux François Eftrées, qui eft resté à quelques noms de lieux. Les François nommerent cette ville Stratebourg : elle étoit déja une ville fous le regne de Childebert, fils de Sigebert; car Grégoire de Tours dit, au chapitre 36 du neuviéme livre de fon hiftoire, que ce roi demeuroit à Stratebourg, qui étoit alors une ville: Infrà terminum urbis morabatur, quam Strateburgum vocant; & au chapitre 19 du dixiéme livre, il dit que Gilles, évêque de Rheims, fut condamné à être exilé à la ville, qu'on appelloit autrefois Argentorate, & pour lors Stratebourg.

Cependant l'empereur Lothaire, dans les lettres-patentes, données en faveur du monaftère de faint Etienne de Strafbourg, datées de la huitiéme indiction & de la fixiéme année de fon regne en France, ( ce qui revient à l'an 845,) déclare qu'il a vu les titres de la fondation de ce monaftère, faite par le duc Adalbert, & le privilége du roi Childeric, fils de Clovis II, felon lesquels Adalbert avoit fondé ce monastère fur un fond qui lui appartenoit, & étoit de fon héritage, parmi les ruines de l'ancienne Argentoraté ; inter ruinas veteris Argentorati, à caufe que

le

lieu étoit fort propre pour un monaftère, parce qu'il étoit dans un lieu folitaire, c'eft-à-dire, où il n'y avoit point d'habitans, & fur la riviere de Brusch: Pro opportunitate fo litudinis, & juxta fluentis Brusci fluvii; de forte que l'ancien Argentorate, détruit & défert, dont le fond appartenoit en propre au duc Adalbert, étoit différent de la ville de Strasbourg, qui, dans le fiécle précédent, étoit déja une ville, où avoit demeuré Childebert, roi d'Au ftrafie.

L'empereur Lothaire marque dans fa patente, qu'il l'a donnée dans fon palais royal, ( car il y en avoit un en ce lieu depuis long tems.) Outre Childebert, mort fur la fin du fixième fiécle, il y a eu plufieurs rois d'Auftrafie qui ont demeuré quelquefois à Strasbourg, jusqu'au roi Żuentibold, fils de l'empereur Arnoul.

La ville étoit donc fort diftinguée entre celles du Rhin. Elle étoit auffi fort fidéle à fes rois; car Herman, qui étoit duc ou gouverneur général de Souabe & d'Alface, ayant pris les armes contre l'empereur S. Henri, ceux de Strasbourg oferent lui réfifter. Le duc Herman affiégea la ville, qui, n'ayant pas été fecourue, fut prife & pillée l'an 1003, comme nous l'apprenons de la chronique de Hermanus Contractus, & de celle de Hepidamnus, moine de S. Gall.

Elle fut réparée & s'accrut au point qu'il n'eft plus reflé de veftiges de l'ancienne Argentorate. L'Ill traverse à préfent la ville de Strafbourg, & fe jette à une licue au-desfous, dans le Rhin dans le Rhin, près la bourgade de Lavantznau quoique la ville ne foit qu'à un bon quart de lieue du Khin.

Le nom de la riviere d'Ill ne fe trouve marqué dans aucun des auteurs qui ont écrit fous les empereurs Romains;

dans la carte de Peutinger, c'eft une ville & non pas une riviere, qui eft marquée fous le nom de Hellelus, entre Argentovaria & Argentorate, & qui eft la même dont le nom eft écrit Helcebus dans la géographie de Prolomée, & Helvetus dans l'itinéraire. La fituation de Hellelus convient avec celle d'un lieu aujourd'hui nommé Ell, près de Sceleftat, & qui, felon l'opinion de Cluvier, a donné fon nom à la riviere qui y paffe.

Nous avons vu que Strasbourg, nommé Argentorate du nom de l'ancienne ville, corrompu dans les bas fiécles en Argentina) étoit une ville royale. Elle fe foumit avec peine à Othon le Grand, & fut depuis fort fidéle aux fucceffeurs d'Othon; car les ducs d'Allemagne n'en étoient pas fouverains, quoiqu'ils commandaffent dans la provin ce; & encore que les évêques y euffent de l'autorité, avec un fort grand crédit, durant long-tems, ils n'en étoient pas feigneurs temporels ou maîtres abfolus. L'empereur Lothaire, le Saxon, ayant été couronné à Liége par le pape Innocent II, l'an 1131, prit cette ville fous fa tection plus particulierement que les autres villes impériales, ce qui fut confirmé l'an 1629, par une patente de Ferdinand II.

pro

Maximilien I lui donna le droit de battre monnoie d'or, avec l'image de la Vierge, & cette inscription: Urbem, Virgo, tuam ferva: O Vierge, conferve ta ville, qu'on changea en ces mots : Urbem, Chrifte, tuam ferva; Christ, conferve ta ville, quand les habitans eurent quitté la religion catholique romaine. L'empereur Sigismond- lui donna le droit de tenir une foire franche à la S. Jean, par les lettres datées de l'an 1414 & 1436.

La ville de Strasbourg a un pont fur le Rhin, qui eft divifé en plufieurs bras par des ifles. Ce pont, qui eft de bois, a bien un quart de liene: il regne fur plufieurs des ifles du Rhin, dans quelques-unes desquelles on avoit conftruit de petits forts, qui, en conféquence de l'article fixiéme du traité de paix conclu à Bade le 7 de feptembre 1714, ont été entièrement rafés. * Piganiol, Descr. de la France, t. 7, p. 450.

Wenceflas, roi des Romains, donna la propriété de ce pont à la communauté; & afin qu'il fût mieux entretenu, l'empereur Maximilien II accorda à la ville un tribut für tous ceux qui pafferoient fur ce pont à pied, à cheval, ou en chariot, & ce droit fut augmenté par Rudolphe II, fils de Maximilien & fon fuccefleur. * Longuerue, Descr, de la France, t. 7, p. 450.

Autrefois le gouvernement étoit entre les mains des nobles; mais les roturiers ont pris le deffus depuis long-tems, & dès l'an 1332, les citoyens furent diftribués en tre..e

huit corps vingt.

de métiers, qui, dans la fuite, ont été réduits à

Le college des magiftrats eft divifé en plufieurs chambres: celles des treize, des quinze, des vingt-un, du grand & du petit fénat. La premiere connoît de toutes les affaires de conféquence; la chambre des quinze a la direction des revenus de la ville: celle des vingt-un n'a d'autre fonction que de fournir des fujets aux autres chambres. Le grand fénat eft compofé de trente magiftrats, dix nobles & vingt

roturiers: il connoît des affaires civiles & criminelles : les dernieres y font jugées en dernier reflort. Le petit fénat confifte en fix gentils-hommes & douze bourgeois : il connoît des moindres affaires avec appel à la chambre des

treize,

Le feu roi Louis XIV a maintenu ce college, & les trois ordres, favoir des treize, des quinze & des vingt-un; &, pour la confervation des droits royaux & du bien public, il a établi un préteur royal, qui eft le premier magiftrat, mais qui ne doit point porter de préjudice à ceux de la ville, lesquels on change tous les ans, & qui font élus fuivant les ftaturs & priviléges de la ville; par le feptiéme article de la capitulation, on a laiffé aux mêmes citoyens de Stras bourg la libre jouiffance du pont du Rhin, de toutes les villes, & de tous les bourgs & villages qui appartiennent à la ville, & qui font divifés en cinq bailliages ou feigneuries, Barr, Waffelheim, Herrenfteim, Marlenheim & Allkirih ou Illkirch.

Par le fixiéme article, le roi déclare les citoyens exempts de tous tributs & de toutes contributions, & a laiffé tous les impôts, tant ordinaires qu'extraordinaires, à la ville, pour la confervation, ce qui eft conforme aux priviléges donnés par les empereurs à cette ville, qui ne leur payoit aucun tribut, & n'étoit pas même obligée de leur rendre hommage, quoiqu'elle fût membre de leur empire.

L'univerfité, qui a été confervée à la ville par la capitu lation royale, a obtenu fes premiers priviléges l'an 1566, de l'empereur Maximilien II. Ils ont été augmentés par l'empereur Ferdinand II, l'an 1621, qui leur a donné le pouvoir de créer des docteurs & des licentiés en toutes les fciences. Elle eft compofée de quatre facultés, & régie par des profeffeurs luthériens, qui prennent les titres de prévôt, doyen & chanoines de S. Thomas, parce que les revenus de cette collégiale ont été unis à leur univerfité : ils conferent les degrés aux catholiques comme aux autres, à l'exception de ceux de théologie. Les jéfuites avoient à Stras bourg un beau college, dans lequel il y avoit trente-deux bourfes, pour des écoliers de philofophie & de théologie, dont il faut que vingt-quatre foient originaires de la province. Ce collége jouit de trente-fix mille livres de rente, compris les revenus des abbayes de Seltz & de Walbourg.

Strafbourg eft un gouvernement de place du gouver nement militaire d'Alface, avec état major. Les foldats de la garnifon font logés dans les cazernes bâties aux frais des habitans. Louis XIV a fait bâtir une citadelle entre la ville & le Rhin, & les ouvrages extérieurs s'étendent jusqu'au pont, où il y a du côté d'Alface un pont - levis, qu'on leve la nuit, comme les Impériaux en ont un de l'autre côté à Kehl en Ortnau; ainfi le pont qui appartient toujours à la communauté de Strasbourg,eft commun comme le Rhin entre les Impériaux & les Francois; quant aux ifles, on n'y peut faire aucun fort, &, en exécution des traités de Ryswick & de Bade, on a démoli ceux qu'on y avoit faits.

Les fortifications de la ville confiftent en une enceinte fort irréguliere, de figure presque triangulaire. On la distingue en deux différentes parties, l'ancienne & la nouvelle. L'ancienne a été réparée par le maréchal de Vauban, & la nouvelle a été conftruite felon la maniere de ce grand homme. La vieille enceinte, comme auffi une partie de la nouvelle, font entourées d'une fauffe braye, qui eft üné feconde enceinte au rez-de-chauffée. Le front, qui eft à l'occident, eft bâti fur le rideau de la grande plaine, & a de bons baftions, revêtus de gazon, depuis le rez-dechauffée de la faufle baye qui eft au pied, laquelle eft revêtue de maçonnerie avec un très-bon foffé auffi revêtu. En outre ce front eft défendu par des demi-lunes & contregardes de maçonneries, toutes fupérieures au terrein de la campagne, par un bon chemin-convert & par de bons glacis, foumis au feu des piéces qui font derriere. Le front

du midi, outre fa fortification, qui eft de la même qualité que celle du front précédent, ne peut être infulté, parce qu'on peut inonder tout le pays entre le Rhin, la riviere d'lll & la place, à plus de quinze ou feize cents toifes de distance, de maniere que perfonne n'y puifle paller.Cette inondation fe peut faire par le moyen d'une grande éclufe qui eft dans la ville,à l'entrée de la riviere d'Ill & celle de la Brusch. Cette éclufe eft un ouvrage qu'on ne peut affez eftimer, & par le moyen duquel on peut faire faire aux eaux des mouvemens furprenans. Le front du nord eft fortifié de la même maniere que le refte de la place, ayant même revêtement & même conftruction. Il a en outre un grand ouvrage à corne entierement revêtu de maçonnerie. Le terrein eft d'ailleurs fort foumis à la fortification, & par le mouvement des eaux dont je viens de parler, on pourra rendre l'attaque de ce côté très-difficile. Le front du côté du levant eft défendu par la citadelle, qui eft un pentagone régulier, construit à la maniere du maréchal de Vauban. Elle cft compofée de cinq baftions, comme je viens de dire, & d'autant de demi-lunes. Le bastion du côté du Rhin eft couvert par un grand ouvrage à corne, à la tête duquel eft une demi-lune, le tout bien revêtu, & entouré d'un foffé plein d'eau, dans lequel on peut jetter toute la riviere d'lll, par le moyen de l'éclufe dont j'ai parlé, & d'un chemin-couvert, qui communiquent l'un & l'autre à ceux de la place. Dans l'avantfollé au-delà du glacis, à la tête de l'ouvrage à corne, font placées trois redoutes, qui forment une espéce d'ouvrage à couronne, le tout enveloppé d'un foffe & d'un chemin couvert.* Piganiol, Description de la France, 1.7,. p. 448.

Quand à l'évêché de Strasbourg, l'origine en eft auffi obscure que celle de la ville. Saint Irenée, qui a écrit vers la fin du deuxième siècle, loue la foi orthodoxe des églises, qui étoient fondées dans la Germanie, ce que nous devons entendre de la Germanie Romaine, dont Argentorate étoit une ville des plus confidérables. Néanmoins, comme cette églife fut anéantie avec la ville dans le cinquiéme fiécle, il n'y eut plus d'évêques durant deux cents ans. On ne fait le nom d'aucun des pafteurs des chrétiens de ce pays-là fous les empereurs Romains. * Longuerue, Description de la France, t. 7, p. 448.

On tient à Strasbourg que faint Amand, évêque de Tongres, a été leur premier évêque; ce qui n'eft pas certain; car quoiqu'il ait prêché la foi en ce pays, il ne s'enfuit pas qu'il en ait été évêque.

Selon Meuriffe, le premier évêque de Strasbourg a été faint Argobafte, établi dans cet évêché en 639 par le roi Dagobert, & il gouverna long-tems cette églife fous le regne de Sigebert, fils de Dagobert, & de Childéric neveu de Sigebert. Il mourut fous Childeric, & eut pour fucceffeur faint Florent, du tems duquel Dagobert le jeune étant revenu de la Grande Bretagne, fut reconnu roi les Auftrafiens, fur la fin de 974. Saint Florent mourut fous le regne de Dagobert, qu'il avoit affifté pour retourner en fon pays natal, & recouvrer le royaume de fon pere Sigebert.

par

Ce roi, par reconnoiffance, voyant que les Anglois avoient chaffé & dépouillé de l'évêché d'lorck faint Wilfrid, lui voulut donner l'évêché de Strasbourg, au com mencement du printems de l'an 678, ainfi qu'on le voit par la chronique de Bede. Eddius Stephanus, disciple de faint Wilfrid, qui a écrit fa vie, appelle au chap, 28 cet évêché un très-grand évêché: Episcopatum maximum ad civitatem Streitburg pertinentem. Ce que Wilfrid refufa, ne voulant renoncer ni à fon pays, ni à fon églife d'Iorck.

On voit combien cette églife étoit alors illuftre. Elle avoit été fous l'empire Romain dans la premiere Germanie; mais les évêques de Mayence & de Cologne, capitales des deux Germanies, n'ont été métropolitains que fous le regne de Pepin & de Charlemagne. Ce fut fous cet empereur que Strasbourg fut foumife à la métropole de Mayence, comme elle a toujours été depuis.

Les rois Mérovingiens & Carlovingiens ont beaucoup enrichi cette églife, auffi bien que les Othons, faint Henri, & Lothaire le Saxon ; ce qui fit rechercher cet évêché par les princes, & même les places du chapitre, dont ils exclurent les roturiers long-tems avant le commencement du treiziéme fiécle, puisque le cardinal Conrad, évêque de Port, ayant en cette qualité donné une prébende de l'églife de Strasbourg à un roturier, le chapitre ne le vouluc

pas recevoir, & représenta au pape Grégoire IX que, par une coutume obfervée de tems immémorial, on ne recevoit perfonne dans ce chapitre, qui ne fût noble de pere & de mere: Nifi nobilem ab utroque parente illuftrem. Le pape n'eut aucun égard à cela, difant que c'étoit un abus, parce que Dieu n'avoit point d'égard à la nobleffe, & que la feule vertu, avec les autres talens néceffaires, lui étoient agréables. Ainfi il détermina que le défaut de noblelle n'empêcheroit pas celui qui étoit pourvu de jouir de cette prébende. Ce décret de Grégoire fut inféré au troifiéme livre des décretales, & au cinquiéme titre, où il est traité des prébendes & des dignités. Ce chapitre commence par ce mot Venerabilis. Le chapitre demeura ferme à maintenir fon ancienne coutume. Depuis ce tems ils ont été plus exacts, & les papes fucceffeurs de Grégoire n'y ont pas trouvé à redire.

Les évêques, qui étoient de grands princes, devinrent fort fuspects au peuple de Strasbourg, très-jaloux de fa liberté, dont il craignoit que ces prélats ne le privaffent, & les évêques s'étoient obligés de demeurer ordinairement dans leur ville de Saverne.

Les choses étoient en cet état, lorsque Martin Luther commença à prêcher contre le pape & les évêques qui lui étoient attachés. Dans le même tems, Zuingle prêchoit en Suiffe, & Capiton avec Bucer à Strasbourg. Guillaume de Hohnstein, comte de l'Empire en Thuringe, qui étoit évêque de Strasbourg, s'étoit rendu odieux au bas clergé, qu'il avoit voulu réformer, & obliger à vivre chafte

ment.

Le peuple, qui penchoit du côté de ces nouveaux prédicans, abolit la meffe, avec tous les cultes de la religion catholique romaine l'an 1529 ; & en mêms tems on chaffa les religieufes & les eccléfiaftiques qui y étoient attachés.

Le fénat établit une académie des fciences, à laquelle on attribua les biens du chapitre de l'églife collégiale de faint Thomas, & ils dispoferent des autres biens d'église dans leur ville & leur territoire.

L'évêque Guillaume ne rentra plus à Strasbourg, & demeura toujours à Saverne, où il mourut l'an 1542. Les chanoines affemblés dans cette ville, élurent évêque Erasme de Limbourg, qui poursuivit fi vivement les habitans de Strasbourg pour la reftitution de l'église cathédrale, & des autres dont ils s'étoient emparés, qu'ils furent obligés de tranfiger avec lui l'an 1550. Ils lui reftituerent l'églife cathédrale de Notre-Dame, & les deux collégiales de faint Pierre le vieux & de faint Pierre le jeune. Mais l'évêque confentit que l'églife de faint Thomas fut unie, avec tous fes revenus à l'école ou académie, que le fénat de Strasbourg avoit fondée ; ainfi ce prélat retourna à Strasbourg, & il s'y retira l'an 1552, à l'approche de l'armée de Henri II, roi de France : ce fut lui qui empêcha les habitans. d'ouvrir leurs portes aux François.

Après cela, il reçut dans la même ville, avec les magis trats, l'empereur Charles-Quint, lorsqu'il marchoit pour affiéger Metz, & il l'affitta de vivres, car il étoit zelé pour le fervice de fon empereur.

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Après l'abdication de Charles-Quint, quoique les chapitres catholiques paruffent être en fureté, tant par la tranfaction que l'évêque Erasme avoit faite avec le fénat & le peuple de Strasbourg, que par la tranfaction générale de Paffau, & par la paix religieufe, ils furent fi effrayés de le voir au milieu d'un grand peuple, qui leur étoit oppose qu'ils quitterent la ville, & fe retirerent à Molsheim, petite ville de la baffe Alface. L'évêque Erasme mourut l'an 1 568, & on élut à fa place Jean comte de Manderscheit, qui ne fit plus d'effort pour recouvrer fa cathédrale & les autres églifes, dont les luthériens fe faifirent après la défertion des catholiques.

Plufieurs chanoines avoient embraffé la confeffion d'Augsbourg, de forte que l'évêque Jean étant mort l'an 1592, les luthériens s'affemblerent dans la maifon capitu laire de Notre-Dame de Strasbourg, qu'on nomme le Bruderhoff ou la maifon des freres, & élurent administrateur Jean-George, prince de Brandebourg.

Les catholiques s'affemblerent à Saverne, & élurent le cardinal Charles de Lorraine, fils du duc Charles II, ce qui excita une guerre entre les deux élus. L'empereur Rodolfe II l'appaifa en divifant entre eux les revenus l'an 1593; mais dix ans après elle recommença,

& fat enfin terminée, parce que le cardinal évêque & le chapitre donnerent une grande fomme d'argent au prince de Brandebourg, & que le fénat de Strasbourg, abandonnant fon parti, reconnut que l'évêché appartenoit au cardinal, & le droit d'élire aux chanoines de fon parti. Après fa mort, arrivée en 1607, l'archiduc Léopold d'Autriche fut élu évêque de Strasbourg, auquel fuccéda Léopold, fils de l'empereur Ferdinand II. Léopold étant mort l'an 1662, François Egon de Furftemberg fut élu; enfin le 19 octobre 1681, il reprit poffeffion de fon église cathédrale en perfonne, & le chapitre y retourna. Toutes les autres églifes, tant féculieres que régulieres, font demeurées à ceux de la confeffion d'Augsbourg par la capitu lation.

Strasbourg eft à préfent une des plus confidérables villes du royaume, tant par fa fituation & fon étendue, que par l'importance des fortifications que Louis le Grand y fit faire, dès qu'elle fut fous fon obéillance. La riviere d'lll la traverfe, & y forme plufieurs canaux. On entre dans la ville par fix différentes portes, fur deux desquelles font les armes de France, & divers ornemens. En général les rues de cette ville font étroites; mais la grand'rue, celle du marché, & celle de la petite boucherie, font très-belles, grandes, droites & bien percées. La ville eft très-peuplée, & la plupart des maifons enferment trois ou quatre familles chacune; quelques-unes même ont jusqu'à quatre à cinq étages. Les bourgeois font plus curieux de la folidité de édifices, que des meubles & de l'ajuflement du dedans où l'on ne remarque guère que de la boiferie & de la menuiferie aflez belles. Comme la riviere d'Ill paffe au travers de Strasbourg, avant de fe jetter dans le Rhin, il y a fix ponts pour la communication des différents quartiers de la ville. Deux font de pierres, affez bien conftruits : les autres ne font que de bois. On ne boit à Strasbourg que de l'eau de puits: elle vient du Rhin par des fources fouterreines. & abondantes. On vante fa légereté & fa bonté, qui font telles, qu'elle ne fait jamais de mal, pas même aux étrangers. Tous les puits font publics, & entretenus aux dépens de la ville. * Piganiol, Description de la France, tom. 7,

p. 442.

Les principaux édifices de Strasbourg font bâtis de pierres de taille rouge, qu'on tire principalement des carrieres qui font du côté de Saverne & le long du Rhin. Ces carrieres fourniffent des pierres dures & folides, d'une gran deur furprenante. On en tire qui ont jusqu'à quatre toiles de longueur, fur une de large.

Les édifices publics font; le gouvernement, l'évêché, l'intendance, la comédie & l'arcenal.

L'hôtel-de-ville eft un grand bâtiment carré, terminé par des pavillons avancés, qui donne à cette maifon un air de grandeur. La façade eft décorée de dorures & de pein tures anciennes, avec quelques inscriptions en langue allemande. La cour eft très petite, & les bâtimens qui la forment font ornés de peintures & de dorures, & chargés d'inscriptions comme la façade de la maifon. Les escaliers font grands & beaux, & les fales fervent aux assemblées & féances du magiftrat. Elles font grandes, & tout autour regne un banc, garni de couffins verds, qui fervent de fiéges aux confeillers. Ces fales font ornées de quelques tableaux, parmi lesquels on remarque celui du roi : au deffous font ceux du préteur royal, & de l'ammestre régent.

L'évêché fait face à une des portes de la cathédrale, & en eft féparé par une petite place. La maison ett affez commode & logeable. L'hôtel de l'intendant eft un vieux bâtiment, qui n'a rien de fort remarquable, & dans lequel on a pratiqué depuis peu des appartemens à la françoile.

La comédie eft un bâtiment tout neuf, qui fervoit auparavant de magasin des vivres. Le théâtre eft un des plus beaux de l'Europe.

L'arcenal eft un grand & vieux bâtiment, où l'on voit beaucoup d'armes, & l'habillement du grand Gustave Adolphe, roi de Suéde. Le jardin eft affez agréable & bien entretenu. Les magafins de la ville font pour le bois, le bled & le vin.

L'hôpital des bourgeois eft une très-belle maison, où l'on admire un amas fort fingulier de vin & de grains, confervé avec bien du foin. On y goute du vin gardé, &. enregistré même fur les regiftres de la ville, depuis plus

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