la séparation anéantit les effets de la dotalité à l'égard de l'inaliénabilité des fonds constitués en dot, aussi bien qu'à l'égard de leur imprescriptibilité : ce que ne pouvaient se dispenser de faire les législateurs, sans introduire dans leur législation une disparate vraiment choquante; car il en résulterait qu'après la séparation, les mêmes fonds, qui avaient été dotaux, continueraient de l'être, et comme tels inaliénables, et deviendraient néanmoins prescriptibles, quoique leur imprescriptibilité fût fondée sur leur inaliénabilité; en un mot, la séparation ferait cesser les effets de la dotalité pour une moitié, et les laisserait subsister pour l'autre moitié. Mais on objecte que l'art. 1554 porte que les immeubles constitués en dot ne peuvent être aliénés pendant le mariage; la séparation ne rompt pas le mariage: donc elle laisse subsister l'inaliénabilité des fonds dotaux. Toute la force de cette objection ne consiste que dans l'équivoque des mots pendant le mariage, qu'on suppose signifier ici, pendant que subsiste le lien du mariage, qui n'est point en effet dissous par la séparation; mais il est évident que ces mots, pendant le mariage, ne s'appliquent ici qu'aux cas ordinaires, c'est-à-dire aux cas où le mariage, considéré sous le rapport des biens, n'a reçu aucune atteinte par la séparation qui, comme nous l'avons dit ci-dessus, a la force de dissoudre les effets des conventions matrimoniales quant aux biens. Le lieu même où est placé Part. 1554 suffirait pour le prouver; tous les articles précédens ne parlent que de ce qui suppose que le régime dotal est en pleine vigueur et sans avoir reçu d'atteinte ni de modification. Or, l'inaliénabilité des fonds dotaux est le premier effet, l'effet principal de ce régime. Ce n'est que dans le dernier article de la section qu'il est enfin parlé de la séparation, et il n'en est parlé que pour renvoyer les effets de la séparation aux ar ticles 1443 et suivans, qui sont le siège de la ma tière. Il faut donc y recourir, et appliquer au cas de séparation sous le régime dotal, comme à la séparation sous le régime en communauté, la disposition de l'art. 1449, qui permet à la femme séparée d'aliéner ses immeubles, sous quelque régime qu'elle ait été mariée, ainsi que l'exige la nature de la séparation qui a rescindé ou dissous les conventions matrimoniales des époux, quant aux biens, pour les replacer dans l'état où ils étaient auparavant. Si la femme est mariée en communauté, cette communauté est dissoute par la séparation. Si elle est mariée sous le régime dotal, la sépa ration résout tous les droits du mari et la constitu tion dotale, qui est désormais comme non écrite, ainsi que tous ses effets; car il impliquerait que le lien qui résulte d'une convention bilatérale fût dissous pour une partie et non pour le tout. Nous persistons donc, avec une pleine convic tion, à penser que, dans les principes du Code, la séparation de biens dissout le lien de la constitution dotale, de même qu'elle dissout le lien de la communauté, et que la femme séparée, sous 1 quelque régime qu'elle ait été mariée, recouvre, par la séparation, le droit de vendre ses immeubles avec l'autorisation de son mari ou de la justice. On peut voir sur ce point une dissertation fort bien raisonnée de M. Bazile, conseiller à la Cour de Nîmes, dont un extrait avec un arrêt de la même Cour rendu le 23 avril 1812, sont imprimés dans le Recueil de Sirey, tome XIII, 2o part., page 229 et suiv. Pour l'opinion contraire, on peut voir plusieurs arrêts dans le Traité de la dot de M. Benoît, tome 1o, page 463 et suiv. Au reste, on ne peut se dissimuler que le plus ou moins d'importance qu'on attache à l'inaliénabilité des fonds dotaux, influe beaucoup sur l'opinion de ceux qui ne voient dans la faculté, rendue à la femme séparée, de disposer de ses biens dotaux, qu'une porte ouverte à la collusion entre époux, pour éluder la précieuse rigueur de la loi, qui prohibe l'aliénation des biens dotaux; qu'un moyen de préparer une facile cause de séparation et de la faire prononcer, pour avoir ensuite la faculté d'aliéner des biens primitivement frappés d'inaliénabilité. En un mot, ce serait un moyen d'éluder la précieuse rigueur de la loi (1); et M. Sirey, tome xIII, 2. part., page 213, dit que l'opinion de ceux qui pensent que la femme séparée peut aliéner ses fonds dotaux, l'étonne et l'effraie presque, et qu'il ne conçoit pas que le (1) Benoît, Traité de la dot, tom. I, pag. 471. dérangement du mari pourrait autoriser sa femme à aliéner, pour lui complaire, tandis que c'est précisément pour préserver la femme de ce malheur, que les familles, en s'unissant, ont préféré le régime dotal au régime de la commu. nauté. Ainsi, ces auteurs ne voient dans la faculté, rendue à la femme par la séparation, d'aliéner des biens qui furent dotaux, que le danger de voir la femme les vendre, pour complaire à son mari; tandis que l'effet ordinaire des séparations de biens est de brouiller les époux. Cependant, il n'est pas impossible, quoique très rare, que les époux concertent et préparent de longue main un moyen détourné de frauder la loi, moyennant une séparation frauduleuse; mais cette possibilité ne devait pas détourner, et n'a point en effet détourné le législateur de son but d'unifor mité, en laissant la nature de la séparation la même dans les deux régimes de la communauté et du régime dotal. SECTION III. De la restitution de la dot. SOMMAIRE. 254. La dissolution du mariage et la séparation donnent ouverture à la restitution de la dot. 255. Elle doit être faite à la femme ou à ses héritiers; 256. Qui doivent, pour la restitution, s'adresser directement au mari, ou à ses héritiers, ou à ceux qui s'en sont rendus garans, expressément ou tacitement : 257. Par exemple, les père et mère en mariant leur fils franc et quitte. Explication de cette clause. 258. La présence du père au contrat ne suffirait pas, quand même il aurait promis de surveiller l'emploi de la dot, à moins qu'il n'eût donné une hypothèque. 259. Le Code, ou la loi du 30 ventose an x11, a abrogé les coutumes qui faisaient gagner la dot au mari survivant; 260. Quand même la femme serait convaincue d'adultère. 261. La femme mineure à la dissolution du mariage doit se faire nommer un curateur, sans quoi elle ne peut recevoir la restitution de sa dot. 262. La séparation seule, pendant le mariage, donne ouverture à la restitution; la restitution faite en vertu de convention ne libérerait pas le mari. 263. Le mari ne peut refuser de restituer la dot, sous prétexte qu'il a découvert que l'objet constitué appartient à un tiers et non à la femme. 264. On peut, dans tous les cas, fixer le temps et le mode de la restitution de la dot. 265. S'il n'y a point de convention à cet égard, les immeubles et meubles non estimés doivent être restitu is se délai. 266. Si la dot consiste en une somme d'argent, ou en meubles mis à prix par le contrat, la restitution n'en peut étre exigée qu'après un an. 267. Les meubles dont la propriété était restée à la femme, |