Images de page
PDF
ePub

particuliere: ce qui déplut extrémement à ce religieux, AN. 1328. lui faifant foupçoner que le pape étoit irrité contre

lui.

L'année fuivante 1328. le famedi dans l'octave de 14 13:8 n.12. Pâques, c'est à dire, le neuvième d'Avril, le pape fit Rai, n. 61. venir Michel de Cefene en fa préfence & du cardinal Bertrand de la Tour, de frere Pierre de Prato miniftre de la province de S. François, de frere Raimond de Lados procureur de l'Ordre, & de frere Laurent de Coello bachelier d'Avignon. Le pape fit devant eux une violente réprimende à Michel, l'accusant d'être téméraire, opiniâtre, fauteur de Louis de Baviere & des hérétiques. Enfin ajoûta-t'il, vous avés été affés hardi pour établir dans le decret de votre chapitre général de Perouse l'opinion condamnée fur la pauvreté de J. C. pendant qu'on l'examinoit devant nous & les sup.liv. xc11, cardinaux. A ces reproches le pape ajoûta la défense réïterée de fe retirer de la cour. Michel répondit infolemment & refifta en face au pape : niant ce qu'il lui reprochoit, & foûtenant que la décifion de Péroule étoit catholique en tout, conforme à l'écriture & aux decrets des autres papes, particuliérement à celui de Nicolas III.

n.59.

Le pape Jean encore plus irrité affembla des doc- Vad. n 13. teurs pour examiner les réponses de Michel, le voulant faire condamner comme hérétique. Entre ces docteurs étoit Pierre Roger moine & abbé de Fefcamp depuis pape Clement VI. qui écrivit un traité fur ce fujet Or Michel fachant que la conclufion prife en cette affemblée ne lui étoit pas favorable, & craignant que le pape ne l'obligeât à fe rétracter ou à Jévoquer la décifion de Peroufe, il apella de la défense Tome XIX.

Iii

[ocr errors]

AN. 1328. que le pape lui avoit faite de fe retirer, des décrétales qu'il avoit publiées fur la queftion de la pauvreté ; & en général de tout ce que le pape feroit en cette affemblée contre lui & contre les frères mineurs.

8.14.15. &c.

Rain. n. 62.

Quelque indigné que fut le pape de ce procédé, il ne publia encore aucune fentence contre Michel. Il fe contenta de le retenir à Avignon, fans lui permettre d'aller au chapitre général, qui fe devoit tenir à Boulogne le vingt-deuxième de Mai, jour de la Pentecôte. Pour y préfider en fon absence il commit le cardinal Bertrand Poïet, légat en Lombardic, qui fuivant les inftructions secrétes du pape, voulut faire dépofer Michel & élire un autre général : mais le roi Robert follicita pour lui & il fut confirmé par le chapitre. En lui envoïant le decret de confirmation, on le prioit de faire affembler à Paris le chapitre prochain, pour fatisfaire au défir de la reine Jeanne de Bourgogne. Mais avant que les lettres du chapitre de Boulogne arrivaffent à Avignon, Michel de Cefene en étoit parti. Il s'enfuit le jeudi vingt- fixiéme de Mai sur le foir, avec Guillaume Ocam & Bonegrace de Bergame ; & monta dans une barque au port d'Aiguemortes, puis dans une galére armée qu'il s'étoit fait envoïer par Louis de Baviere.

Le pape l'aïant apris la nuit même, envoïa le lendemain le cardinal Jean de Cominges évêque de Porto avec quelques autres, pour ramener Michel de gré ou de force. Ils arrivérent avant que la galére fût partic: mais le patron amufa fi bien le cardinal qu'il ne pût voir Michel ni fes compagnons. On lui envoïa toutefois une citation à laquelle il répondit, qu'il ne vouloit point retourner vers le pape, qui le perfécutoit

fans raison, & qu'il apelloit de rechef de fes pourfui- AN. 1328. tes. Il partit ainfi & arriva bientôt à Pife auprés de l'empereur.

Peu de tems aprés fon départ arrivérent à Avignon les freres qui aportoient le decret du chapitre de Boulogne, pour le confirmer dans le généralat. Mais

le

a

pape étant en grande colére caffa ce decret & publia une fentence contre Michel, où il difoit en fubftance: Il a répandu, tant à Rome qu'ailleurs, plufieurs difcours contre la foi & en faveur des hérétiques. Etant apellé en justice il a emploïé diverses chicanes pour ne fe pas préfenter : il à maltraité les gens de bien & affectionés à l'églife, & avancé ceux qui prenoient part à de mauvais deffeins. Nous aurions pû justement le mettre en prifon pour tous ces crimes, mais nous avons épargné l'honeur de l'Ordre dont il étoit le chef, & nous nous fommes contentés de lui défendre de fortir d'Avignon. Mais enfuite aïant apris l'intrusion faite à Rome par Louis de Baviere d'un religieux de fon Ordre, à laquelle on dit qu'il avoit afpiré pour lui-même : il s'eft retiré d'Avignon nuitament & en cachéte avec quelques méchans fes complices, entre autres Bonnegrace du même Ordre, que nous avions arrêté en notre cour pour les fautes, & un Anglois nommé Guillaume Ocam, contre lequel étoit pendante une information commencée depuis long-tems par notre autorité, à caufe de plufieurs opinions erronées & hérétiques qu'il avoit écrites & enfeignées. C'eft pourquoi nous avons dépofé Michel de Cefene de la charge de ministre général des freres Mineurs, & de l'avis des cardinaux, nous en avons doné l'exercice à Bertrand de la Tour çardi

12. 63.

ΑΝ. 1328.

Vading.n 18.

Rain. n. 64;

LIV.

Pife.
Sup. n. 45.
J. vill. x. c.

104.

nal évêque de Tufculum: avec toute autorité pour réprimer les rebelles du même Ordre. La sentence est du treiziéme de Juin 1328. Bertrand de la Tour avoit été de l'Ordre des freres Mineurs.

Michel de Cesene aïant vû cette sentence du pape, en apella le dix-huitiéme de Septembre, tant en fon nom, que de tous les freres ses adhérans : adressant son apel à l'église catholique & au futur concile. L'acte signé de main de notaire fut pub ié solemnellement & affiché aux portes de l'églite cathedrale de Pife; & il l'envoïa en forme autentique au pape Jean: qui de son côté écrivit à tous les prélats & à tous les princes pour faire exécuter sa sentence & mettre en prifon Michel & fes complices. Mais ils étoient à Pise en fùreté, fous la protection de Loüis de Baviere.

Ce prince étant forti de Rome vint à Todi, & en Louis de B. à partit le dernier d'Août avec l'anti-pape, vint à Viterbe où il le laissa, & s'avança jusqu'à Corneto pour conferer avec Pierre de Sicile envoïé par le roi Frideric fon pere. Loüis en partit le dixiéme de Septembre pour aller à Pise, & dans cette marche le docteur Marfile de Padoüe mourut en un lieu nommé Montalte. Loüis arriva à Grosseto le quinziéme de Septembre & le vingt-uniéme à Pise, où il fut reçu avec grande joïe, & y tint sa cour le reste de cette année.

LV.

Philipe de
Maiorque.

Veang . 29.

Philipe de Maïorque oncle du roi Jaques, qui reRequere de gnoit alors, & dont il avoit été uteur, présenta au pape une requête où il prend la qualité de trésorier de S. Martin de Tours, & dit en substance: Defirant pratiquer non-feulement les préceptes, mais encore les conseils de l'évangile ; j'ai choisi la régle de S. François, à laquelle je veux m'obliger par vœu, & je vous

Rain. n. 82.

fuplic de me permettre, à moi & à mes compagnons AN. 1328. préfens & à venir, de l'obferver purement & fimplement fans glofe & fans être dans la focieté des frères Mineurs, qui font aujourd'hui, ni fous l'obéïflance des fuperieurs de l'Ordre: quoique je ne blâme point ceux qui ont reçû les éxpofitions & les déclarations des papes, parce que dans la voie de Dieu l'un marche d'une façon, l'autre d'une autre. Je demande donc que mes compagnons & moi, en quittant le fiécle, foïons. auffi-tôt admis à la profeflion, vû que nous avons tous fait une année ou plus de probation, étant en habit féculier.

Il déclare enfuite qu'ils prétendent obferver le tef-
tament de S. François comme fa régle & vivre non-
feulement d'aumônes, mais du travail de leurs mains;
ne s'établir nulle part que par la permiflion des évê-
ques, & n'y loger qu'autant qu'il plaira aux évêques
& à ceux qui leur auront doné le logement. Enfin il
conclut ainfi fa requête : Quoique je fois indigne de
la perfection que je demande, il feroit encore plus
indigne de me la refufer ; & comme ce chemin de per-
fection vient du S. Efprit, ceux qui conoiffent le prix
de la vie Chrétienne ne doutent pas que ce refus ne
vienne de l'efprit malin. Si donc on le refuse, que
refte-t'il? Le ciel entendra ce que je dis, & la terre écou-
tera les paroles de ma bouche. Le pape n'eut aucun 1.
égard à cette requête & quoique la conclufion
peu
refpectueuse puiffe avoir attiré ce refus, il femble mon-
trer au fonds qu'aprés l'expérience d'un fiécle, on ne
jugeoit pas la régle de S. François praticable au pié
de la lettre.

La même année le pape Jean accorda aux reli-
Iii iij

Deut. xxx11,

« PrécédentContinuer »