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Qu'est devenu ce peuple autrefois vertueux?
Son courage était noble autant qu'impétueux :
L'équitable Français l'admirait sans le craindre :
Ses guerriers expirans nous forçaient à les plaindre.
Anglais, vous fûtes grands dans vos malheurs passés,
De notre estime enfin vous êtes-vous lassés?

Où sont les sentimens que vous nous inspirâtes?
Héros à Fontenoi, sur les mers vils pirates,
Pour courir au pillage avec impunité,
Vous joignez la bassesse à l'infidélité!
Vous nous criez la paix, et nous livrez la guerre !
Lâcheté jusqu'à vous inconnue à la terre:
Vous nous tendez les bras, vers vous nous accourons,
Et vous nous trahissez quand nous vous secourons!

Mais d'un peuple effréné ces horreurs sont l'ouvrage.
En soupçonner son roi, c'est lui faire un outrage.
Roi d'Albion, Louis n'en appelle qu'à toi (1):
Il en est temps encor, juge et prononce en roi;
Sois complice ou vengeur, autorise ou répare,
Choisis..... Son choix est fait, et Fox (2) nous le déclare !

Louis, ta gloire enfin n'a plus à balancer,
Et l'offense impunie invite à t'offenser.
Venge ton pavillon, venge ton diadême.

O France! quels trésors n'as-tu pas en toi-même ?
Que Londre a peu connu ta force et tes moyens!
L'honneur sous un monarque a fait des citoyens.
Ame de nos conseils, ô puissante harmonie!
De l'Etat dans tes mains la force est réunie.

Tout n'a qu'un mouvement, qu'un centre, qu'une loi :
La France est un grand corps dont le cœur est son roi.
Mais quel trouble imprévu s'élève au sein de Londre!
Louis, dans ses projets tu viens de la confondre.
Si l'Autriche et la France ont dû se balancer,
S'affaiblir tour à tour, tour à tour s'abaisser;
C'était pour s'affermir dans un juste équilibre,
Et rendre en s'unissant le monde heureux et libre.
Aux desseins de Henri Louis a satisfait;

Il a fait ce qu'Armand dans ce siècle aurait fait.
France, Autriche, vos noms enlacés par la gloire,
Enchaînés par la paix, se suivront dans l'histoire.
D'une sainte union symboles révérés,
Et du bonheur public présages assurés,
Ces noms en traits de flamme ornent le frontispice
Du temple de Janus (3), fermé sous leur auspice.

(1) Réquisition du roi.

(2) Réponse du ministre d'Angleterre.

(3) Quand cette épître a été composée, il y avait lieu de présumer qu'aucune puissance de l'Europe ne serait assez ennemie du bien public et de ses intérêts particuliers, pour s'opposer aux vues pacifiques de la France et de l'Autriche. REINE, l'amour du monde ét l'exemple des rois, De Louis triomphant digne émule autrefois, De Louis désarmé plus digne amie encore, Le Français t'admira; désormais il t'adore. Les sujets de Louis sont devenus les tiens. Tes peuples à leur tour sont au nombre des siens. Leur amour pour leurs rois vient de former leur chaîne. Ils furent ennemis, sans connaître la haine; Ils sont rivaux encor de gloire et de vertu, Et s'aiment en héros, comme ils ont combattu.

Rois amis des mortels, tranquilles républiques,
C'est pour vous que sont faits nos liens pacifiques;
Sous les ailes de l'aigle, à l'ombrage des lis,
Goûtez des jours sereins par la paix embellis :
Tranquilles spectateurs, vous nous verrez combattre.
Sous ses coups imprévus l'Anglais croit nous abattre.
Il ne sait point encor, même après Fontenoi,
Ce que peut le Français lorsqu'il venge son roi.

Londre t'a méconnu, ton ardeur l'a trompée,
Peuple autrefois l'ami de Rome et de Pompée,
Marseille, tu fais plus qu'on n'ose demander:
Et Richelieu n'a pas le temps de commander.
Huit soleils ont produit les travaux d'une année :
Tout est prêt, on fait voile, et Minorque étonnée
Voit vingt mille guerriers s'élancer sur ses bords.
L'Anglais cherche en fuyant son salut dans ses forts.

Là, tout ce qu'inventa la prudence guerrière
Pour rendre une défense et longue et meurtrière,
Trois mille combattans sous un triple rempart,
Et la flamme et le fer, et la nature et l'art,
Nous avons tout à vaincre. Autour de ces murailles,
La terre sous nos pas endurcit ses entrailles.
La bombe dans les airs s'élève en mugissant,
Le boulet vole, tombe et roule en bondissant;
A travers les éclats du bronze et du salpêtre,
L'insatiable mort commence à se repaître :
Le Français l'envisage, et marche en l'insultant;
La voix qui le commande est tout ce qu'il entend;
Du front de Richelieu le calme et l'assurance
Sèment autour de lui la joie et l'espérance;
Il semble qu'il fait part, au milieu des combats,
De son génie aux chefs, de son cœur aux soldats.
Sage et malheureux Bing, il est temps de paraître :
Viens chercher ta ruine et ta honte peut-être.
Rome après la défaite honorait la valeur;
Carthage en un héros punissait le malheur :
Ta patrie a l'orgueil et la foi de Carthage:
Tremble; elle peut encor l'imiter davantage.
Il combat, et vaincu, préfère son de voir

A l'honneur dangereux d'un noble désespoir;
Il fuit: mais contre nous sa flotte ramenée
Peut secourir encor Minorque abandonnée.
Non, Français, ton ardeur saura la devancer,
Sans donner au destin le temps de balancer.
Est-il pour ce torrent d'obstacle qu'il ne donipte?
S'il ne peut renverser sa digue, il la surmonte.
Déjà Mahon chancelle, et prévoit son malheur:
Il résiste à la foudre, et cède à la valeur.
De l'Anglais consterné l'espérance est éteinte.
Ni de son triple fort la redoutable enceinte,
Ni le fossé profond qui nous tient séparés,
Ni les fourneaux sans nombre à nos pieds préparés,
Ni la foudre qui porte un mur inaccessible,
Ne lui semblent pour nous un obstacle invincible.
Il cède, il capitule, et des lis déployés

Il détourne en partant ses regards effrayés.
La Méditerranée à l'Europe est rendue;
L'univers applaudit, et Londre est confondue.

C'est ainsi que la honte est le fruit de l'orgueil. Quand le crime est heureux, la terre est dans le deuil : La terre est dans la joie, alors que la victoire Couronne la vertu des lauriers de la gloire.

CHANSON

Qui a été mise en musique par Albanèse.

LISE

ISE voyait deux pigeons se baiser,
Son cœur ému ne pouvait s'apaiser;
Le couple heureux s'envola vers la plaine;
L'instant d'après parut le beau Myrtil.
Ce fut trop tard, Lise était incertaine;
Myrtil u'osa lui parler de sa peine :
Un peu plus tôt que ne paraissait-il?

Un autre jour, assez loin du hameau,
Lise dormait à l'ombre d'un ormeau.
Un songe heureux la séduit et l'enchante :
A ses genoux elle croit voir Myrtil.
Tout en rêvant elle l'entend qui chante;
Elle s'éveille, et se lève tremblante :
Un peu plus tôt que ne l'éveillait-il?
Un autre jour sur un sable léger
Elle traçait le nom de son berger.
Il la surprit: alors plus de mystère,
Elle avoua sa défaite à Myrtil.

Il triomphait de sa rigueur sévère.
Lise à l'instant voit arriver sa mère :
Un peu plus tôt que ne triomphait-il ?
Loin du hameau Myrtil s'en est allé;
Trois mois après il se voit rappelé.
On les unit, et ce fut le plus sage.
Qui fut content? Ce fut Lise et Myrtil.
Mais de l'amour quand vint le premier gage,
On se disait tous bas dans le village:
Un plus plus tôt que ne l'épousait-il?

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Faits au nom de madame du Deffand, qui envoyait à madame la maréchale de Luxembourg, pour le jour de la sainte Magdeleine, sa féte, un jeu de loto en parfilage d'or.

JOUEZ avec assurance,

Le hasard vous est soumis;
Il m'a dit en confidence
Qu'il était de vos amis.
On croyait qu'à l'aveuglette
Il dispensait tous ses dons;
Vous prouvez qu'il est prophète,
Et que ses yeux sont fort bons.

Il vous donna la naissance;
Vous honorez vos aïeux.
Il vous donna l'opulence;
Pouvait-il la placer mieux?
Plus d'un malheureux s'étonne,
En recevant vos bienfaits,
Qu'il n'ait pas joint la couronne
Aux présens qu'il vous a faits.

Un autre dieu qu'on accuse
D'être aveugle comme lui,
Pour faire voir qu'on s'abuse,
Vous cite encore aujourd'hui.

Il vous fit à son image,
Et puis s'en alla chantant:
Magdeleine est mon ouvrage;
Qu'un aveugle en fasse autant.

De mes yeux, dans ma jeunesse,
Vous avez fait les plaisirs;
De mon cœur, dans ma vieillesse,
Vous remplissez les désirs.
Ce cœur plein de votre image,
Lui rend un culte assidu,
Et ce sens me dédommage
De celui que j'ai perdu.

COUPLETS

Pour madame la maréchale de Luxembourg, au nom de madame du Deffand, qui lui faisait présenter, le jour de sa féte, ZUFL bouquet en gimblettes d'or faites pour étre parfilées.

JE

AIR: Vous m'entendez bien.

E suis ignorant comme un roi,
Et c'est bien de l'honneur pour moi.
Quoiqu'à longues oreilles,
Eh bien!

Ce roi fit des merveilles,
Vous m'entendez bien.

On dit que tout ce qu'il touchait
En or à l'instant se changeait.
Que n'a-t-on sa recette,
Eh bien!

Pour remplir la cassette.....
Vous m'entendez bien.

Ma ressemblance avec Midas
M'a fait en bel or de ducats

Changer mes gimbelettes :
Eh bien!

Pour qui sont-elles faites?
Vous m'entendez bien.

Pour mon usage, les manger
Valait mieux qu'en or les changer;

Mais ma plus forte envie,
Eh bien!

Sera toute ma vie,

Vous m'entendez bien.

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