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FAUX INCIDENT CIVIL.

cution de l'acte est suspendue par la mise en accusation, parce que le législateur suppose qu'on ne porte pas témérairement une plainte aussi grave, et parce que la mise en accusation du prévenu est une sorte de présomption de l'existence du crime : mais lorsque le faux est poursuivi incidemment à une contestation civile, il est laissé à l'arbitrage du juge d'ordonner, ou de ne pas ordonner un sursis à l'exé

cution.

On ne doit pas confondre la procédure en inscription de faux incident, avec celle qui est relative à la vérification d'un acte méconnu ou dénié.

Le but de l'une et de l'autre est bien différent, puisque l'une tend d'ordinaire à découvrir l'existence d'un crime, tandis que l'autre a seulement pour objet d'obtenir l'annulation d'un acte; l'une peut être dirigée contre un acte quelconque; l'autre ne peut atteindre que l'acte qui n'a aucun caractère d'authenticité: aussi ces deux procédures sont-elles l'objet de deux titres distincts dans le nouveau Code.

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Sous l'empire de l'ancienne législation, la manière de procéder à une vérification d'écriture était tracée par une déclaration du mois de décembre 1684, enregistrée au parlement le 22 janvier suivant (1). La marche à suivre dans l'inscription de faux, prise incidemment à une contestation civile, était réglée par l'ordonnance de 1737 : il ne sera pas sans intérêt d'en rapprocher les dispositions de celles de notre nouveau Code.

«La partie qui veut former la demande en faux incident doit présenter une requête au juge tendante à ce qu'il soit permis de s'inscrire en faux, contre la pièce ou les pièces qu'il lui indique: il faut, à peine de nullité, que cette requête soit signée par la partie, ou par le porteur de sa procuration spéciale (art. 3 de l'ordonnance). Le demandeur

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(1) Comme cette déclaration est peu connue, nous la donnerons au mot Vérification d'écriture.

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Ce

consigne ensuite une amende de 20 ou de 60 fr., suivant que l'inscription de faux est formée devant un tribunal ordinaire ou devant une cour souveraine (art. 4). —L'ordonnance doit porter que l'inscription sera faite au greffe par le demandeur, et qu'il sera tenu, à cet effet, dans trois jours, au plus tard, de sommer le défendeur de déclarer s'il veut se servir de la pièce maintenue fausse (art. 8). La sommation sera faite au défendeur au domicile de son procureur (art. 9). lui-ci fera sa déclaration dans le délai de trois jours (art. 11); faute parle défendeur de satisfaire à la sommation, ou à suite de sa déclaration, qu'il ne veut pas se servir de la pièce, le demandeur pourra se pourvoir à l'audience pour faire ordonner le rejet de la pièce maintenue fausse (art. 12 et 13). Au contraire, si le défendeur déclare qu'il veut se servir de la pièce, il doit la déposer au greffe dans les 24 heures; et, dans un semblable délai, le demandeur doit former son inscription de faux (art. 14 et 15).

Comme on le voit, la marche de la procédure tracée par l'ordonnance, est à peu près celle que le nouveau Code indique. Il n'y a de différence bien remarquable que relativement à l'introduction de l'instance; et, à cet égard, la forme iudiquée par le Code est beaucoup plus naturelle et plus simple; car l'autorisation de s'inscrire en faux, et la consignation d'une amende considérable, devaient être souvent inutiles sous l'empire de l'ordonnance, puisque le défendeur pouvait déclarer postérieurement, qu'il n'entendait pas se servir de la pièce arguée de faux. Aujourd'hui l'instruction commence par la sommation faite au défendeur, de déclarer s'il entend ou non se servir de la pièce prétendue fausse; et c'est d'après le résultat de cette déclaration, que le demandeur poursuit son action en faux incident ou qu'il y renonce.

Ainsi que le nouveau Code de procédure (art. 214), l'ordonnance de 1738 (art. 2), permettait de s'inscrire incidemment en faux contre une pièce, quoiqu'elle eût été vérifiée soit avec le demandeur, soit avec le défendeur en faux, à d'autres fins

que celles d'une poursuite en faux principal ou incident (1). (Coffin.)

La procédure en faux incident civil est certainement une des plus compliquées de toutes celles que règle le Code; et elle exige de la part des praticiens la plus grande attention. Nous avons recueilli soigneusement tous les arrêts, qui peuvent aider à résoudre les difficultés les plus importantes, auxquelles donne lieu l'application de la loi sur cette matière. Nous allons donner ici, sur la plupart des autres difficultés, quelques explications qui ne pouvaient pas trouver leur place

ailleurs.

Il n'est pas nécessaire que la sommation, prescrite par l'art. 215, soit signée par le demandeur lui-même (2). Le défendeur, au contraire, est tenu de signer ou de faire signer par un mandataire spécial la déclaration en réponse à cette sommation (3). Si par suite de la réponse du défendeur y a lieu pour le demandeur de s'inscrire en faux, il en fait la déclaration au greffe du tribunal où le procès est pendant, et le greffier en dresse procès-verbal (4).

il

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(1) Dans le cas excepté par le législateur il y aurait évidemment chose jugée. Mais faudrait-il décider si un débiteur solidaire demandait à que s'inscrire en faux contre un acte, que son codébiteur aurait déjà attaqué de faux, soit à fins civiles, soit à fins criminelles? Sur cette question et sur plusieurs questions analogues, on peut consulter MM. LEP. p. 184 et 185, CARB. t. 1, p. 552, no 861 et PIG. Coмм, t. 1, p. 452, not. 8.

(2) Mais il est prudent que l'avoué qui fait cette sommation, se munisse d'un pouvoir spécial. — V. MM. CARR. t. 1, p. 558, no 870; Delap. t. 1. p. 215, dernier alinéa; et F. L. t. 2, p. 560, col. 1, no 3, alinéa 4.

(3) Autrement on ne devrait pas y avoir égard. — V. MM. GARR. t. 1, p. 562, no 878; HAUT. p. 138, alin. 8; DELAP. t. 1, p. 216, alinéa 3, ct Pr. FR. t. 2, p. 114, alinéa 4.

(4) Il faut remarquer que la loi n'a fixé aucun délai au demandeur pour asser cette déclaration au greffe; mais le moyen de le contraindre à la faire, c'est de poursuivre le jugement du fond. —V. MM. CARR. t. 1, p. 566, no 884, et D. C. p. 170, alinéa dernier. S'il y avait plusieurs demandeurs en faux, et qu'ils se présentassent ensemble au greffe, pour s'inscrire contre

Lorsque le défendeur, après que l'inscription a été admife(1), néglige de déposer la pièce au greffe, le demandeur peut, s'il le juge plus convenable à ses intérêts, demander à la faire remettre lui-même, au lieu d'en poursuivre simplement le rejet (2). En effet, s'il réussit à la faire déclarer fausse, il empêchera ainsi que son adversaire s'en serve jamais contre lui (3). — Lorsqu'il y a minute de la pièce arguée de faux, le tribunal, par le jugement qui a admis l'inscription, ou postérieurement le juge commissaire peut, sur la requête du demandeur (4), ordonner l'apport (5) de cette minute. Si cependant le juge ne voulait pas prendre sur lui de prononcer à ce sujet, il pourrait en référer au tribunal : en tout cas, le défendeur doit être appelé (6), — La loi n'a déterminé aucun délai pour cet apport de la minute; c'est au tribunal ou au juge commissaire à le faire, en ayant égard aux circonstances, et en ayant soin de fixer 1° un délai au défendeur à l'effet d'agir vis-à-vis les détenteurs de la minute; 2o un délai

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la même pièce, un seul procès-verbal suffirait. V. M. CARR. t. 1, p. 567, n° 889.

(1) Par un jugement du tribunal, et non plus comme autrefois par une simple ordonnance du président. V. MM. CARR. t. 1, p. 565; D. C. p. 170, alinéa 5 et PIG. COMм. t. 2, p. 456, not. 3.

(2) A moins toutefois qu'il ne s'agisse d'une pièce dont il n'y ait ni minute, ni double; et que le seul original existant se trouve dans les mains du défendeur : il est évident qu'alors l'alternative n'a pas lieu. · V. MM. CAR. t. 1, p. 570, no 894; et D. C. p. 172, alin. 2.

(3) V. M. CARR. t. 1, p. 570, no 893.

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(4) Cette requête est nécessaire; et, à la différence de ce qui se pratiquait avant le Code, le juge commissaire ne peut plus l'ordonner d'office; il ne pourrait pas davantage provoquer d'office une décision du tribunal à cet égard. — V. M. CARR. t. 1, p. 571, no 895; V. pourtant M. DELAP. t. 1, p. 220 alin. dernier.

(5) Ou l'envoi selon les circonstances. V. MM. CARR. t. 1, p. 576, no 903; et F. L. t. 2, p. 561, alin. 7. V. aussi M. PIG. PRO. Civ. t. 1, page 351, n° 5.

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(6) Cela résulte de l'art: 70 du tarif. V. MM. CARR. t. 1, p. 572, no 897; et F. L. t. 2, p. 561,

col, 2,

alin. 2.

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à ceux-ci pour apporter les pièces (1). Le premier délai court du jour de la signification de l'ordonnance ou du jugement (2) à l'avoué du défendeur (3); le second, du jour de cette signification faite par le défendeur aux dépositaires de la minute. La pièce remise au greffe, il est dressé procès-verbal de son état matériel en présence de l'adversaire, ou lui duement appelé (4). Communication peut ensuite en être prise en tout état de cause, par le demandeur et le défendeur en faux (5), ou leurs avoués (6). Dans les huit jours qui suivent celui où est dressé le procès-verbal de l'état de la pièce (7), le de

(1) V. MM. CARR. t. 1, p. 575, no 901; et D. C. p. 173, alin. 3 et 174, alin. 6.

(2) De l'ordonnance, si c'est le juge commissaire qui a statué seul; du jugement, si c'est le tribunal, soit en même temps que l'inscription a été admise, soit postérieurement sur le rapport du juge commissaire. V. MM. CARR. t. 1, p. 574, no 900; et D. C. p. 174.

(3) Il est bon qu'il dénonce au demandeur qu'il a fait, dans ce délai, toutes les diligences nécessaires pour l'apport ordonné; car, faute par lui de les avoir faites, son adversaire pourrait se pourvoir à l'audience pour faire rejeter la pièce. V. MM. CARR. t. 1, p. 575, no 902; D. C. p. 174, in fine; et PB. FR. t. 2, p. 120 alin. 2.

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(4) Par une sommation qui lui est faite, après que le juge commissaire a fixé un lieu, un jour et une heure pour l'opération. V. MM. CARR. t. 1, p. 577, no 904; PIG. Pro. Civ. t. 1, p. .347, alinéa 5; et B. S. P. p. 278, not. 29.

(5) La loi ne parle que du demandeur; mais, puisque le défendeur est propriétaire de la pièce, on ne peut pas lui contester le droit d'en prendre communication quand il le veut. V. MM. CARR. t. 1, p. 579, no 908; et

F. L. t. 2, p. 562,

col. 1,
alin. 5.

-

(6) De ce que le Code a substitué le mot avoué à celui de conseil qui se trouvait dans l'ordonnance, on aurait tort de conclure que les parties ne peuvent pas se faire assister d'un conseil expert en écritures: cette interprétation restrictive de la loi irait contre son esprit. V. MM. CARR. t. 1, p. n° 907; et F. L. t. 2, loco citato.

578,

(7) Lorsque l'apport de la minute a été ordonné, si deux procès-verbaux ont été dressés conformément à la deuxième partie de l'art. 226, le premier pour constater l'état de l'expédition, le second pour constater celui de la minute, M. CARR. t. 1, p. 580, n° 909, pense que le délai ne court que du

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