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deux dispositions différentes, c'est qu'ils ne sont pas l'un et l'autre relatifs au même objet. Dans l'art. du Code civil, en effet, il s'agit de l'exécution de l'acte argue de faux ; et comme cette exécution dérive de la nature de l'acte et de la disposition même de la loi, on ne peut y mettre obstacle, que dans des cas extrêmement graves, c'est-à-dire, lorsque l'individu auquel on impute le faux, se trouve déjà en état d'accusation. Dans l'art. 250, C. P. C., au contraire, il s'agit seulement d'un sursis au jugement du procès; et comme un tel sursis peut avoir lieu dans des circonstances ordinaires, sans enfreindre aucune disposition législative, il n'y a aucun incon. vénient à l'ordonner, lorsque par le résultat d'une procédure criminelle l'acte qui servirait de base à ce jugement peut être annulé. On rentre alors dans l'application du principe consacré par plusieurs articles de notre Code que lorsque le même acte ou le même fait donne lieu à une action criminelle et à une action civile, celle-ci doit-être suspendue jusqu'à ce que la première soit terminée. D'ailleurs, ce serait exposer souvent les parties à des frais inutiles, puisque le jugement rendu par les tribunaux civils deviendrait nul et sans effet par l'annulation prononcée avant ou depuis, de l'acte qui lui servir ait de base. Tous ces inconvéniens disparaissent, si les juges déclarent que leur décision doit être indépendante de la pièce arguée aussi l'article 250 leur laisse-t-il l'option à cet égard. Relativement aux deux autres questions, je me dispenserai de donner aucun développement aux motifs lumineux de l'arrêt, qui les a résolues dans l'espèce suivante. (Coff.)

Un jugement du tribunal de police correctionnelle de Dax, sous la date du 9 décembre 1806, déclare nulle une saisie de moutons, faite au préjula dice du sieur Soulié, par les préposés des douanes. Sur l'appel interjeté par régie, devant la Cour de justice criminelle des Landes, Soulié, en concluant à la confirmation du jugement de police correctionnelle, déclare vouloir s'inscrire en faux contre le procès-verbal dressé par les préposés des douanes, le 2 septembre 1806. Un arrêt, sous la date du 7 avril 1807, donne acte à Soulié de sa déclaration, et lui ordonne de s'inscrire en faux dans la huitaine. Ce n'est qu'après l'expiration de ce délai, que Soulié porte devant la cour de justice criminelle sa plainte en faux principal. Le 13 juin 1807, par un nouvel arrêt rendu en la chambre du conseil, la Cour déclare l'intimé non-recevable dans sa plainte en faux, pour ne l'avoir portée qu'après le délai fixé par l'arrêt précédent. Pourvoi en cassation, incom pour pétence et excès de pouvoirs, et violation de l'art. 250, C. P. C. Le 13 août 1807, arrêt de la section criminelle, ainsi conçu : LA COUR; Vu et l'arl'article 14 du titre 2 de la loi du 24 août 1790, l'art. 250; C. P. C,, ticle 535, du Code des délits et des peines; - Attendu que la loi du 24 août 1790 veut qu'en toute matière civile ou oriminelle, les jugemens

soient publics; qu'il y a eu infraction manifeste de cette disposition, par la Cour de justice criminelle du département des Landes, en rendant à la chambre du conseil, sans la présence de toutes les parties et du public, l'arrêt du 13 juin 1807;- Qu'en déclarant par cet arrêt, qu'il n'y a lieu à recevoir la plainte de Joseph Soulié en crime de faux principal, contre les signatures du procès-verbal du 2 septembre 1806, la même Cour de justice criminelle est contrevenue aux règles de compétence, et a commis une usurpation de pouvoirs, la connaissance de cette plainte étant attribuée à la Cour de justice criminelle spéciale, suivant la disposition de l'art. 2 de la loi du 23 floréal an 10; - Qu'enfin, en n'examinant pas, lors de son arrêt du 13 juin 1807, s'il y avait lieu à pouvoir juger le procès-verbal au fond, indépendamment du procès-verbal du 2 septembre 1806, argué de faux, Du prononcer le sursis, comme le prescrit l'art. 250, titre du faux incident civil du Code judiciaire, la Cour de justice criminelle du département des Landes est contrevenue à cet article; — Casse,

etc.

13. On ne peut pas s'inscrire incidemment en faux contre une pièce sur laquelle est intervenu un jugement passé en force de chose jugée; la voie du faux principal est alors seule ouverte (1). 13 bis. L'inscription de faux incident ne peut avoir lieu qu'autant qu'il existe une instance principale (2),

Il semble d'abord qu'on pourrait invoquer, pour l'affirmative de la première question, la dernière partie de l'article 214, C. P. C., qui veut que la voie de l'inscription de faux soit ouverte, quoiqu'il soit intervenu un jugement sur le fondement de la pièce arguée. Mais on ne doit pas isoler cette disposition de celle qui précède immédiatement; ou plutôt, on ne peut l'invoquer qu'en faveur des parties dont le législateur a voulu régler les droits, c'est-à-dire en faveur de ceux qui prétendent fausse ou falsifiée une pièce signifiée ou produite dans le cours de la procédure. D'ailleurs, la qualification donnée à l'inscription de faux, dans cette circon.

(1) Voy. MM. CARR. t. 1., p. 550, not. 12; et p. 553, no 863, et B. S. P., p. 766, 27 d. Voy. aussi infrà, no 35, l'arrêt du 31 décembre 1812, qui repose sur le même principe Voy. cependant suprà, no 5, un arrêt du 11 fructidor an 12.

(2) Voy. infrà, no 36, l'arrêt du 19 décembre 1812. La plupart des commentateurs du Code s'accordent pour enseigner plus ou moins explicitement cette doctrine. Voy. MM. TH. DESM., p. 124, alin. dernier; HAUT., p. 138, alin. 1oo; Pig., Proc. Civ., t. 1, 337 et 338; B. S. P., p. 273, alin. 2 et 3 ; Pr. Fr., t. 2, p. 105, alin. 2; D. C., p. 168, alin. dernier; ct notamment F. L., t. 2, p. 560, col. 1 no 3. — Voy. cependant M. CARR., t. 1, p. 553, no 864; voyez aussi M. LEP., p. 186, quest. 4.

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stance, indique assez qu'elle se lie à une instance déjà pendante; car On ne pourrait appeler incidente une poursuite de faux, qui serait le seul objet d'une action principale. Enfin, si la voie de l'inscription de faux au civil était ouverte, pour faire anéantir une décision judiciaire passée en force de chose jugée; ou plutôt, si, après l'expiration des délais de l'opposition ou de l'appel, on pouvait prendre utilement l'une ou l'autre de ces voies, parce qu'il s'élèverait des présomptions de faux contre une pièce produite dans la procédure antérieure au jugement, il faudrait effacer de nos lois les dispositions qui attribuent une sorte d'irrévocabilité aux décisions émanées des tribunaux, lorsqu'on n'a pas pris les voies légales pour les faire réformer, ou lorsqu'on ne les a prises qu'après l'expiration des délais fixés. (Coff.)

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· PREMIERE ESPÈCE. Un jugement par défaut et en dernier ressort du tribunal civil de Nîmes, jugeant commercialement, avait condamné le sieur Dorée à payer au sieur Niquet la somme de 433 francs, montant d'une lettre de change. Ce jugement fut attaqué par la voie de l'opposition, après l'expiration des délais. Dorée, dans son opposition, prétendait n'avoir jamais écrit ai signé la lettre de change qui lui était attribuée. Un nouveau jugement du 12 décembre 1807, le déclara non-recevable, attendu que sa déclaration, qu'il n'avait jamais écrit ni signé la lettre de change, ne pouvait faire anéantir la chose jugée en dernier ressort. En interjetant appel, Dorée déclara qu'il voulait s'inscrire incidemment en faux contre la lettre de change, et prétendit qu'une telle déclaration faite devant les premiers juges, aurait dû rendre son opposition recevable, quoique faite après les délais. La Cour de Nîmes a prononcé en ces termes le 14 janvier 1808 : LA COUR; Considérant que l'opposition envers le jugement du 6 octobre 1806, ne pouvant être reçue par le premier tribunal, Dorée n'aurait pas pu prendre la voie du faux incident devant ce tribunal,tant que l'opposition n'aurait point été reçue, ainsi qu'elle ne pouvait l'être, parce que cette inscription de faux incident ne pouvant avoir d'autre objet, que de faire renverser le jugement du 6 octobre, puisqu'elle est dirigée contre le titre qui la fonde ; et ce jugement étant inattaquable par la voie de l'opposition, ce tribunal ne pouvait pas mieux accueillir l'inscription de faux, que l'opposition elle-même dont elle était le soutien; qu'il ne compétait d'autre voie audit Dorée contre la lettre de change, que celle du faux principal, dès qu'il n'y avait point d'instance reçue ni recevable à laquelle il pût être incidemment formé ; - Considérant que les mêmes motifs qui eussent empêché le tribunal de première instance de s'occuper du faux incident, existent pour en empècher l'admission devant la Cour, qui ne peut anéantir la force de la chose jugée obtenue par le jugement du 6 octobre 1806, d'ailleurs inattaquable par la voie d'appel; Met l'appel

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lation au néant; Rejette la sommation par laquelle Dorée s'est permis d'introduire par-devant la Cour, une demande en faux incident envers la lettre de change du 22 juillet 1806; - Ordonne que les jugemens des 6 octobre 1806 et 12 décembre 1807, seront exécutés selon leur forme et teneur; sauf à Dorée à prendre la voie du faux principal, s'il y échoit, contre ladite lettre de change; moyennant ce, déclare n'y avoir lieu de statuer sur les autres chefs. »

DEUXIEME ESPÈCE. Le sieur Desnos et la dame Dulard, avaient été en procès devant le tribunal de première instance et la Cour de Paris. Un arrêt, sous la date du 23 mai 1808, avait terminé ce procès en faveur de la dame Dulard. Pourvoi en requête civile, de la part du sieur Desnos, fondé sur ce que la Cour d'appel s'était déterminée d'après des pièces qui pouvaient être déclarées ou reconnues fausses; et pour parvenir à prouver cette fausseté, Desnos prend aussitôt la voie du faux incident civil. Le 17 décembre 1808, arrêt de la Cour royale de Paris, par lequel, « LA COUR; Atteudu que l'inscription en faux incident n'est admissible que dans le cours d'une procédure où des pièces sont produites, et que la Cour a déjà souverainement prononcé, sans que ce moyen ait été proposé ; Déclare Desnos non-recevable dans sa demande, afin d'admission de poursuite de faux incident, sauf à lui à se pourvoir par la voie principale.

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TROISIEME ESPÈCE.- Le sieur Lederich dirigeait des actes de poursuites contre les époux Kittler en vertu d'un acte exécutoire, lorsque ceux-ci y formerent opposition en faisant valoir contre l'acte des moyens tirés du fond.- Un premier jugement ayant ordonné la continuation des poursuites, les époux Kittler y formèrent une seconde opposition, motivée sur la prétendue fausseté de l'obligation, mais sans manifester l'intention de s'inscrire incidemment en faux.- Un jugement par défaut, du 9 novembre 1814, passé depuis en force de chose jugée, les débouta de cette nouvelle opposition. — En vertu de ces deux jugemens, qui crdonnaient l'exécution de son titre, le sieur Lederich provoqua l'expropriation forcée de quelques immeubles appartenant à ses débiteurs ; mais la dame Kittler intervint encore dans cette instance, pour demander acte de l'inscription de faux incident qu'elle venait de passer au greffe, en ce que l'obligation qui servait de base aux poursuites, énonçait faussement qu'elle s'était engagée avec son mari et y avait apposé sa signature. Le tribunal civil d'Alkirch rejeta ce nouvel incident par un jugement du 9 mai 1815, ainsi motivé : — Attendu qu'une inscrip. tion de faux incident ne peut avoir lieu qu'autant qu'il existe une instance principale, de laquelle cet incident devient alors accessoire; que ce principe dérive du texte littéral de l'art. 214, C. P. C.; - Que, dans l'espèce, il n'existe plus d'instance entre les parties, et qu'on ne pourrait plus en engager une nouvelle, sans qu'elle soit écartée par une fin de non recevoir insurmontable; qu'en effet, dès 1808, les conjoints Kittler formèrent une

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opposition à l'exécution de l'obligation dont il s'agit, soutenant que ce n'étaient pas eux qui devaient en acquitter le montant; - Que la futilité de cette assertion ayant été reconnue, il intervint, le 8 mai 1810, un jugement, confirmé depuis par arrêt, qui les débouta de leur opposition, et ordonna la continuation des poursuites, à défaut de paiement dans les termes et délais qui leur furent accordés; que, ne payant pas à l'échéance, une poursuite en expropriation devin: nécessaire; que les conjoints Kittler ont alors formé une nouvelle opposition par requête d'avoué, signifiée le 17 décembre 1813, dans laquelle ils ont allégué le faux, mais sans donner de suite à cette articulation; qu'un jugement par défaut, du 9 novembre 1814, rendu après réassigné, les a déboutés de leur nouvelle opposition, et que ce jugement n'ayant point été attaqué, est devenu irrévocable; que par ce jugement cette nouvelle instance d'opposition a pris fin; que cependant, c'est en la supposant encore pendante, que la femme Kittler a imaginé de recourir à une nouvelle chicane, celle d'une tentative d'inscription de faux ; qu'en la forme, cet incident est non-recevable, et que c'est d'autant plus le cas de le rejeter, que, si réellement il y eût eu, lors de la prestation de l'acte du 20 mars 1807, ou supposition de personne, ou falsification de signature, ce n'est pas après avoir procédé pendant six années, et après maints âveux judiciaires, que l'on songerait à faire sérieusement usage du moyen que l'on invoque en ce moment. »

« LA

La femme Kittler s'est pourvue en appel contre ce jugement devant la cour royale de Colmar, qui, le 17 mai 1816, statua en ces termes : COUR; Adoptant les motifs des premiers juges, met l'appellation au néant, avec amende et dépens. D

14. La seule plainte en faux principal contre un acte authentique ne suspend pas nécessairement le jugement des contestations civiles auxquelles cet acte peut donner lieu. (Art. 250, C. P. C.) Dans le cours d'une instance pendante devant la Cour de Colmar, entre les sieurs Roost et Blum, celui-ci déclara, par acte du 12 avril 1808, qu'il avait rendu une plainte en faux principal, reçue le 3 mars précédent, par M. le procureur général de la Cour de justice criminelle du Haut-Rhin, contre une pièce qui avait servi de base aux condamnations prononcées par les premiers juges; en conséquence, il demanda qu'il fût sursis à statuer sur l'appel, jusqu'à ce qu'il eût été prononcé définitivement sur sa plainte. Un arrêt sous la date du 3 mai 1808, le déclara nonrecevable dans sa demande en sursis, par les motifs suivans: LA COUR ; Attendu que l'art. 8 du Code des délits et des peines, du 3 brumaire an 4, porte, à la vérité : « L'action civile peut être poursuivie, en même temps, et devant les mêmes juges que l'action publique; elle peut aussi l'être sépa

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