Par acte notarié, en date du 1er mars 1817, le sieur Garne, greffier en chef du tribunal civil de Meaux, céda et transporta, pour la sommé de 30,500 francs, au sieur Lavalley, son office de greffier, sauf toutefois l'agré. ment de l'autorité royale. Une ordonnance imprima le sceau de l'irrévocabilité à cette vente sieur Lavalley fut confirmé dans le titre de greffier. et le 'Depuis une année entière il en exerçait les fonctions, lorsqu'il refusa au vendeur le paiement du prix stipulé par l'acte de vente, attendu, disait-il, que les produits avaient été exagérés, et qu'on l'avait ainsi frauduleusement déterminé à acheter. Devant le tribunal de Meaux, le sieur Lavalley, assigné en reconnaissance de la signature apposée au bas de l'acte consenti le 1er mars 1817, offrit de payer, conformément à l'instruction ministérielle du 11 février 1817, l'équivalent du revenu du greffe pendant deux années. Par jugement rendu le 17 août 1818, le tribunal civil de Meaux rejeta cette offre et condamna le sieur Lavalley à exécuter les conditions de la vente. Ce jugement était ainsi conçu : « Attendu que l'art. 91 de la loi du 28 avril 1816 a créé, en faveur des titulaires qu'il désigne, et du nombre desquels sont les greffiers des tribunaux, le droit de présenter des successeurs à l'agrément de sa majesté; Attendu qu'avant la signature du traité du 1er mars 1817, le sieur Lavalley a eu connaissance de la circulaire de S. G..., le garde des sceaux, du 11 février précédent ; qu'il a été reçu par ordonnance du roi, sollicitée par lui, et qu'il exerce depuis plus d'un an les fonctions de greffier; « Attendu que le garde des sceaux, auprès duquel le sieur Lavalley ́a réclamé, jugeant que sa circulaire, instructive et non prohibitive, n'était pas de nature à faire modifier par la voie ministérielle un traité pleinement exécuté, a renvoyé les parties à se pourvoir devant les tribunaux, conformément au droit commun; « Attendu qu'il n'y a eu ni manœuvre ni artifice employés par le sieur Garne, pour tromper le sieur Lavalley; que le sieur Garne, en déclarant, lors de la signature du traité, que le produit da greffe de Meaúx était de 6,000 francs, année commune, a ajouté qu'il n'entendait, cependant, rien garantir à cet égard; que, d'ailleurs, le produit peut être évalué à cette somme de 6,000 fr., année commune; Attendu, au surplus, que les choses ne sont pas entières, et que le sieur Lavalley, qui s'est fait recevoir, et qui a déclaré formellement vouloir Voy. J. A., t. 35, p. 141, col. 2, no 12; et t. 4, p. 30, col. 1 n° 5. profiter de son traité et conserver le greffe, doit remplir ses engagemens. » Appel de la part du sieur Lavalley, et arrêt confirmatif de la Cour royale de Paris. du 28 janvier 1819. Le sieur Lavalley s'est pourvu en cassation contre cette décision ; 1° pour violation de l'article 1128 C. C., en ce que la Cour royale avait maintenu la vente d'un objet qui n'est pas dans le commerce, violation de l'art. 1599 du même Code, en ce que l'arrêt déclare valable la vente de la chose d'autrui, violation de l'article 91 de la loi du 28 avril 1816; 2o contraven. tion à la circulaire ministérielle du 11 février 1817; 3° violation de l'article 1116 du Code civil, en ce que la Cour royale aurait dû annuler la vente, comme entachée de nullité. - Le 20 juin 1820, arrêt de la section des requêtes par lequel: ➡e LA COUR; Sur les conclusions de M. Joubert, avocat général ; — Vu l'art. gi de la loi du 28 avril 1816;-Attendu, 1 que cet article attribue aux greffiers des tribunaux et aux autres officiers ministériels la faculté de présenter des successeurs à l'agrément du roi, comme un dédommagement du supplé. ment du cautionnement exigé d'eux ; que, par une conséquence naturelle, cette disposition autorise les arrangemens ou conventions nécessaires pour l'exercice de cette faculté; qu'ainsi, le sieur Garne, pourvu du titre de greffier près le tribunal de première instance de Meaux, a pu traiter valablement avec le sieur Lavalley, pour le présenter comme son successeur à l'agrément de sa majesté; Attendu; 20 que le sieur Lavalley a traité, en parfaite connaissance de cause, pour le prix de 30,500 francs; qu'il a été nommé par le roi aux fonctions de greffier du tribunal de Meaux ; qu'il les a exercées et les exerce encore ; qu'il a exécuté son engagement envers son prédécesseur, par le paiement de la moitié du prix convenu; que la circu laire de monseigneur le garde des sceaux, du 11 février 1817, instructive et non prohibitive, ne pouvait autoriser la résiliation ou la réduction d'un traité fait de bonne foi, et exécuté en partie de part et d'autre ; que, d'ailleurs, la circulaire citée ne saurait être obligatoire pour les tribunaux ; Attendu, 30 qu'il a été reconnu en première instance et en appel, qu'il n'y avait eu de la part du sieur Garne, ni dol ni fraude lors de la convention par lui formée envers le sieur Lavalley; que le jugement du tribunal civil de Meaux, du 17 août 1818, a au contraire formellement reconnu que les produits du greffe de ce tribunal, produits sur lesquels le sieur Lavalley a prétendu qu'il avait été induit en erreur, sont, année commune, de 6,000 fr. évaluation qui est précisément celle annoncée, d'ailleurs sans garantie, par le sieur Garne, lors du contratous seing privé, du 1er mars 1817; - Par tous ces motifs, rejette, etc. 43. Les ventes et adjudications faites en France d'immeubles si tués en pays étranger sont assujetties aux droits de rédaction et de greffe (1). Ainsi jugé le 11 décembre 1820, entre la régie et le sieur Kohlass, par arrêt de la Cour de cassation, section civile, motivé de la manière suivante: LA COUR; Sur le moyen présenté par la direction, et relatif à la restitution de la somme perçue pour droit de rédaction de l'adjudication du 23 janvier 1819; Attendu que le droit de rédaction étant formellement établi par la loi du 22 prairial an 7 (art. 2) et par l'art. 1er, no 2, du décret du 12 juillet 1808, le jugement attaqué, en ordonnant la restitution de ce droit qui n'était pas même demandé par le défendeur, a non-seulement prononcé sur chose non demandée, mais a formellement violé les articles précités ; Cassc.» 44. Le greffier en chef d'une cour royale étant seul responsable des faits de ses commis assermentés dans l'exercice de leurs fonctions, a le droit de les renvoyer quand il ne les juge plus dignes de sa confiance. Dans ce cas, la cour n'a point à apprécier les motifs du renvoi du commis-greffier, mais elle doit seulement examiner si elle agréera celui que le greffier en chef présente en remplacement. (Art. 58 et 59 de la loi du 6 juillet 1810.) Ainsi jugé par arrêt de la Cour royale d'Orléans, du 4 janvier 1823. (Extrait du Recueil de M. Colas Delanoue, t. 1, p. 163, no 294.) OBSERVATIONS. M. CARR. COMP., t. 1, p. 304, no 145, enseigne aussi que le droit accordé par la loi au greffier en chef de nommer ses commis, suppose en sa faveur celui de les révoquer, même sans le consentement du tribunal qui les a admis à prêter serment. Et cela doit s'entendre de tous les greffiers en général, non-seulement de ceux qui sont attachés aux cours ou aux tribunaux, mais aussi de ceux des justices de paix, ainsi qu'il résulte d'une lettre du ministre de la justice, du 24 pluviose an 12, rapportée suprà, no 6. Toutefois les commis-greffiers sont en même temps soumis à la surveillance du ministère public, et de la cour ou du tribunal au greffe duquel ils sont attachés. Les magistrats ont le droit de les avertir et de les réprimander, s'il y a lieu, et même de les révoquer après une seconde réprimande. (Art. 58 du décret du 6 juillet, et art. 26 de celui du 18 août, 1810.) V. MM. CARR. COMP., loco citato, n° 146; et F. L., t. a, p. 648, col. 1 nos 6 et 7. 45. Le greffier peut-il se refuser à recevoir le dépôt du jugement (1) V. suprà, no 20, le décret du 12 juillet 1808, art. 1, 2o. arbitral que l'un des arbitres lui présente lorsqu'il n'est pas enregistré, et cet arbitre peut-il être forcé à faire l'avance en propre des frais de l'enregistrement? La minute du jugement arbitral, dit l'art. 1020, sera déposée dans les trois jours par l'un des arbitres au greffe du tribunal. Certainement les arbitres, en recevant des parties le compromis, ne touchent pas ordinairement les frais d'enregistrement d'un jugement à émaner, dont ils ne sont pas à même alors en état de fixer le montant. Les arbitres feront-ils donc face du propre à ces faits? La défense prononcée à l'art. 43 de la loi du 24 frimaire an 7, de recevoir aucun acte non enregistré en dépôt, sous la peine de 50 fr., peut d'abord effrayer les greffiers. Mais serait-il juste de causer cet embarras à des personnes appelées par l'estime et la confiance aux fonctions de juge, d'autant plus qu'on ne voit pas la loi attentive à leur accorder des moyens prompts pour le recouvrement. de pareils déboursés ? a Ce surcroît de peine ne paraît donc pas dans les vues du législateur. En effet, le même art. 1020, vers la fin, prescrit « que les poursuites pour les frais du dépôt et les droits d'enregistrement ne pourront être faites que contre les parties. » D Sans doute, si les droits d'enregistrement du jugement devaient être payés par les arbitres, il n'y aurait plus question de les recouvrer contre les parties seules. Il faut donc convenir que dans ce cas le greffier n'encourra pas l'amende en recevant des arbitres le jugement non enregistré. Nous avons dit vraiment dans plusieurs questions que le Code judiciaire n'a pas touché les lois bursales. Ce principe ne cesse pas d'être vrai dans l'espèce, où il ne s'agit pas d'emporter ou d'atténuer les frais du dépôt et les droits d'enregistrement, mais seulement de régler le mode de recouvrement. Ici la loi a voulu imposer aux arbitres la charge du dépôt de leur jugement, qui auparavant était aux parties. Mais elle ne voulut pas leur endosser celle d'en payer les droits. L'on sait d'ailleurs que toutes les fois que les dispositions d'une loi postéricure ne peuvent nullement se combiner avec celles d'une autre antérieure, il faut de nécessité, dans le cas particulier prévu par la loi nouvelle, faire garder le silence à la précédente. Les greffiers pourront ainsi recevoir en dépôt des arbitres les jugemens arbitraux', sauf à poursuivre ensuite contre les parties les frais du dépôt et les droits d'enregistrement, suivant la méthode tracée à l'art. 57 de la loi du 24 frimaire an 7, pour les droits d'enregistrement des jugemens sujets à cette formalité sur les minutes. Nota. Nous adoptons entièrement l'opinion des jurisconsultes de Turin. Cet article est extrait d'un journal publié en 1810 par M. ROCCA, et nous avons conservé religieusement le style un peu étrange d'un nouveau citoyen français. 46. Auteurs qui ont parlé des greffiers. On peut consulter MM, CARR. Сoмp., t. 1, p. 302 et suiv.; B. S. P., p. 65 et 66; F. L., vo Greffier, et MERLIN, RÉP., cod. verbo. HUISSIER. On désigne, sous ce nom, l'officier ministériel, chargé de signifier les exploits et actes de procédure, et de mettre à exécution les arrêts et jugemens émanés des cours et des tribunaux. Quelques auteurs ont prétendu que le mot huissier dérive du mot huis, porte; parce qu'une de leurs fonctions consiste à garder les portes de l'auditoire; d'autres l'ont fait dériver de l'ancien verbe français hucher, qui signifie appeler; la première étymologie paraît mieux convenir aux personnes gagées, qui portent également le nom d'huissier, mais dont les attributions se réduisent, e. effet, à veiller à la porte des grands. L'autre étymologie indique l'acte le plus ordinaire aux huissiers près les tribunaux; car on sait, qu'autrefois, les assignations, pour comparaître en justice, se donnaient à haute voix, par un cri que les Romains nommaient in jus vocatio. Du reste, ces officiers ministériels se trouvent désignés, dans leurs lois, sous plusieurs noms différens. Quelquefois ils y sont appelés apparitores, cohortales; d'autrefois, executores, officiates; d'autrefois enfin, statores, cornicularii. Comme on le voit, ces deux dernières qualifications s'accordent parfaitement avec l'étymologie dérivant du mot hucher.. En France, les huissiers étaient anciennement appelés servientes, bedels ou bedeaux, et valeti curiæ : mais ces mots XIV. 15 |