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temens; mais depuis l'an 1706 ils ont été fupprimés avec
grand nombre d'autres fouffleurs qui coupent à préfent les
glaces; ils travaillent la nuit comme le jour, & les four-
neaux ne s'éteignent jamais : c'eft une chofe très-curieufe à

voir.

TOURAINE, province de France, féparée en deux par la riviere de Loire. Elle eft bornée au feptentrion par le Maine, à l'orient elle a l'Orléanois, au midi le Berri, au couchant d'hiver le Poitou, & à l'occident l'Anjou. Tours eft fa capitale, & fes peuples appellés Tourangeaux, ont pris leur nom des anciens Turones ou Turoni, marqués entre les Celtes au dixième & au feptiéme livre des commentaires de Céfar. Comme les Tourangeaux ont habité un fort bon pays, ils ont paffé en tout fems pour ennemis de la guerre; & Tacite, au troifiéme livre de fes annales, les nomme Turoni imbelles. Je fais que quelques-uns veulent qu'il faille lire dans Tacite rebelles; mais Sidonius Apollina ris, qui étoit Gaulois, & dont l'autorité ne peut être rejet tée, refute cette leçon, rebelles, lorsqu'il dit dans le panégyrique de Majorien, qu'il avoit défendu contre les Goths, les Tourangeaux qui craignoient la guerre, bella timentes de fendit Turones. C'eft pourquoi on doit attribuer, non au mérite du peuple de Tours, mais à fa fituation avantageule & à la bonté de fon pays, la préférence que lui donna l'empereur Honorius fur les autres cités de la nouvelle province, ou troifiéme Lyonnoise qu'il inftitua, y ayant plufieurs de ces cités très-célébres, & entr'autres le Mans & les Man ceaux, qui avoient fait des conquêtes en Italie, où ils avoient établi une colonie qui portoit le nom de ce peuple, *qui avoit fondé la ville de Verone.* Longuerue, Description de la France, part. I, p. 104.

autres pays, la Touraine à Saint Louis, par le traité de 1259.

La largeur de la Touraine, dans fa plus grande étendue, du levant au couchant, depuis Valieres-les-Grands, jus qu'à Gande, n'eft que de vingt-deux lieues, & fa longueur du midi au feptentrion de vingt-quatre. Ce pays eft arrofé par dix-fept rivieres, dont les plus connues font La Creuse, Le Veude, L'Amaffe,

La Loire,
Le Cher,
La Vienne,
L'Indre,

Le Loir,

La Bresne
La Choifille,
La Branle,
La Ciffe, &c.

fans compter plufieurs ruiffeaux qui arrofent ce pays, & lui donnent beaucoup de commodité pour le commerce, & pour la communication avec les autres provinces. Son climat eft tempéré, & cette province en général eft délicieufe & agréable, ce qui lui a mérité, à jufte titre, la qualité de Jardin de la France. La bonté du terroir n'eft pas égale par-tout. LES VARENNES qui font le long de la Loire font des terres fablonneufes, faciles à cultiver, & toujours en labour. Elles rapportent du feigle, de l'orge, du mil, des légumes pour la province, & on en tire la gaude pour les teintures. LE VERNON eft une contrée à peu près femblable; mais le terroir eft plus gras, & dans une fituation plus élevée. On y recueille des bleds, des vins & de très-bon fruits, noix, amandes, & fur-tout des prunes, dont les habitans font commerce, de même que ceux de Sainte-Maure, de l'ifle Bouchard, & de SainteMarguerite. LA CHAMPAGNE eft une petite contrée entre le Cher & l'Indre. C'est un pays assez uni, dont les terLorsque l'empire romain fut entierement détruit en res font graffes & fertiles en bled, fur tout en froment. Occident, les Wifigoths s'étant rendus maîtres de toute la LA BRENNE eft une terre humide, marécageufe & pleine partie des Gaules qui eft au midi de la Loire, la ville de d'étangs. Les côteaux de la Loire & du Cher font charTours vint à leur pouvoir fous le regne d'Euric, & Tours gés de vignes qui donnent des vins en abondance; ceux étoit encore fous leur domination l'an 506, lorsque Ve- du Vouvray font les plus recherchés. Les forêts les plus rus, évêque de Tours, comparut pár procureur au concile confidérables font celles d'Amboife, de Loches, de Chid'Agde, compofé des évêques & des députés des églifes non, &c. On trouve en quelques endroits de la Touraine fujettes aux rois des Goths; mais l'année fuivante 507, des landes, dont quelques-unes fervent aux pâturages. La Clovis ayant vaincu & tué Alaric près de Poitiers, il fe GASTINE eft un pays fec, dont les terres font difficiles rendit maître de tout ce qui eft entre la Loire & les Pyré à cultiver. Enfin, les rivieres donnent des prés, & des pånées, & il affujettit aifément la ville de Tours, où il alla en turages pour la nourriture des beftiaux. On trouve des mi dévotion au tombeau de faint Martin, qu'on regardoit nes de fer en quelques endroits près de Noyers. Il y en a comme le faint tutelaire des Gaules. Après la mort de Clo- une de cuivre, dans laquelle on prétend qu'il y a de l'or. vis, les villes de Neuftrie & d'Aquitaine ayant été partagées On trouve auffi du falpêtre dans les côteaux de la Loire, entre les quatre fils, Tours échut a Thierri, roi d'Auftrafie: & expofés au midi, & en divers endroits des pierres de mouon voit, par Grégoire de Tours, que les rois qui régnerent à lage, dont on fait commerce avec les étrangers. Il n'y a, Mets dans la France orientale, pofléderent toujours cette de fontaines minérales, que celle de la Roche-Posay qui ville jusqu'au tems de Clotaire II, qui réunit la monarchie ait quelque réputation; fon eau prife au commencement de françoife. Depuis ce tems, Tours fut toujours fujette aux l'été, eft limpide & fans faveur. Auprès des favonnieres, à rois de Neuftrie, tant fous les Mérovingiens, que fous deux lieues de Tours, font ces fameufes caves que l'on a les Carlovingiens. Ceux de cette feconde race perdirent leur furnommées gouttieres, parce qu'il en dégoutte continuellepouvoir & leur autorité fous Charles le Simple, qui fut dé-ment de l'eau. Elles font dans le roc, & fi fombres, qu'on gradé de la dignité royale, & confiné dans une prifon perpétuelle.

Ce fut dans ce tems, que Thibaud, furnommé le Tri. cheur, comte de Blois & de Chartres, qui s'étoit rendu abfolu dans ces pays, au mépris de l'autorité royale, fe rendit maître auffi de Tours, que fes fucceffeurs pofféderent long-tems. Ils n'étoient pas néanmoins les maîtres abfolus du pays, car on voit dans l'ancienne hiftoire des feigneurs d'Amboife, que les feigneurs de cette ville, & ceux de Loches ou de Chinon, étoient ennemis du comte de Blois, & dépendoient du comte d'Anjou. Enfin, l'an 1037, Thi. baud, comte de Blois, étant avec fon frere Etienne, comte de Champagne, rébelle à Henri I, roi de France, & ayant ravagé les terres de Lifoius, feigneur d'Ambroife & de Chaumont, & celles de Roger, feigneur de Monthréfor & de plufieurs autres alliés ou vaffaux de Geoffroi Martel, comte d'Anjou. Ce comte Geoffroi Martel alla, avec une puiflante armée, au fecours de fes amis, & vainquit en bataille les comtes de Champagne & de Blois. Le dernier ayant été fait prifonnier, fut contraint de donner Tours, & de céder ce qu'il avoit en Touraine pour fa ran çon à Geoffroi Martel, qui laiffa tous fes états à fes neveux, fils de fa fœur, qui furent depuis nommés les Planrégenests, à cause de Geoffroi d'Anjou qui avoit porté ce nom, & dont le petit-fils, Jean Sans-Terre, roi d'Angleterre, fut privé par Philippe-Augufte des états qu'il avoit deça la mer. Enfuite Henri III, fils de Jean, céda, entre

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n'y entre qu'avec de la lumiere. L'eau qui tombe de leurs voûtes forme des ruiffeaux qui coulent fans ceffe, ou fe congele même dans les plus grandes chaleurs de l'été, de maniere qu'elle forme plufieurs corps transparens, & femblables au fucre candi. Elle fe convertit auffi en pierres & dures, qu'il eft difficile de les rompre à coups de marteau; les plus petites reffemblent fi fort à des dragées, que plufieurs perfonnes s'y font trompées. Dans ces congélations, où ordinairement chacun voit ce qu'il y veut voir, on prétend que tout le monde y remarque la forme d'un calvaire & une image de faint Martin à cheval, fides fit penes auctorem. Dans une plaine qui n'eft pas loin de Ligueil, l'on trouve une infinité de coquillages, dont les uns le réduifent en poudre, & les autres font fort durs. Les premiers fervent à fumer les terres. Il y a auffi aux environs de Ligueil un étang, dont on dit que l'eau pétrifie en très-peu de tems le bois qu'on y jette; mais, à parler vrai, elle n'y fait que des appofitions pierreuses.* Piganiol, Description de la France, t. 7, p. 1 & fuiv.

Cette province n'eft pas auffi peuplée que celles du voifinage, & on prétend que le Taffe a fort bien peint le caractère de fes bâtimens, Gierufalemme liberata, canto primo.

Non è gente robufta, ò faticosa,
Se ben tutta di ferro ella riluce.
La terra molle, e lieta, e dilettofa
Tome V. KK kkkkij

Simili à fe gli habitator produce:
Impero fà nelle battaglie prime;

Ma di leggier poi langue,& fi reprime.

Ce portrait que fait le Taffe des Tourangeaux, a été élégamment rendu par un Sicilien, qui n'étoit guère moins poëte que le Talle:

Turba licet Chalybis cataphracta horrore nitentis,
Agra laborc tamen, nec vivida robore: mollis
Blandaque terra fibi fimiles educit alumnos,
Scilicet: hi fub prima ruunt discrimina pugne ·
Præcipites, fed reftincto mox fulgure torpent.

Toute cette province eft du reffort du parlement & de la cour des aides de Paris. On y compte deux préfidiaux ; Tours & Châtillon fur l'Indre; trois fiéges royaux, Loches, Chinon & Langeais; & trois bailliages royaux, Amboife, Loudun & Montrichard. Le grand bailli de Touraine est d'épée, & a les mêmes fonctions & prérogatives que ceux des autres provinces. Par édit du mois de novembre 1639, le roi érigea Châtillon en préfidial, & créa en même tems un bailli d'épée qui a droit de commander la nobleffe de l'arriere-ban de fon diftrict. Sa majefté augmenta lors de cette érection l'ancien reffort de Tours, coutre lesquelles le roi donna encore le marquifat de Mézieres & la baronnie de Preuilly; mais ayant connu qu'il avoit trop affoibli le préfidial de Tours, il y remit Mézieres, compofé de douze paroiffes, & Preuilly, compofé de vingt-quatre, par fa déclaration du mois de mai de l'an 1643. Il y a cependant encore quelques paroifles de Mézieres contestées entre le préfidial de Tours & celui de Châtillon. Quoique la ville de Loudun & le Loudunois foient du diocèle de Poitiers, & que la plupart des géographes les mettent dans le Poitou, l'une & l'autre font néanmoins du reffort de Tours pour la juftice & finance; mais ils ont une coutume particuliere qu'on prétend n'être que locale. Le roi Henri III transféra le parlement & les autres cours fupérieures de Paris à Tours l'an 1583, où elles demeurerent jusqu'au mois de février 1594, que le roi Henri le Grand les rétablit à Paris. Pendant le féjour que firent ces cours fu périeures à Tours, cette ville s'accrut d'un tiers au moins, & cette raifon fait ardemment fouhaiter aux habitans qu'il plût au roi d'y établir un parlement. Il y a auffi une jurisdiction confulaire établie à Tours. Elle eft compofée d'un -grand juge, de deux confuls, qui font élus tous les ans par les marchands, & de douze confeillers qui font de Touraine, qui fut rédigée pour la premiere fois en 1460, & en dernier lieu le 8 octobre 1559.

La chambre des monnoies de Tours & celle de Paris font les plus anciennes de France: car il n'y avoit autrefois que Paris & Tours où l'on battit monnoie. La monnoie frappée au coin des feigneurs particuliers, n'étoit reçue que dans leurs feigneuries, ou dans celles des feigneurs avec qui ils étoient en confédération expreffe pour cela. La monnoie de Paris étoit plus forte d'un quart en fus, ou d'un cinquiéme au total que celle de Tours; ainfi le fol Parifis valoit quinze deniers tournois, & le fol Tournois n'en valoit que douze. L'ordonnance de 1667, a abrogé la différence du Parifis & du Tournois : car on ne peut plus ftipuler que la livre Tournois. La chambre ou l'hôtel des monnoies de Tours, eft compofée de deux juges gardes, d'un procureur du roi & d'un greffier. Il y a des monnoyeurs & des taillerelles qui travaillent à cette fabrique, & nos rois ont accordé ces droits à des familles particulieres. On trouve dans les anciens titres Parvi Turonenfes, deniers tournois, doubles tournois. Solidi Turonenfes étoient auffi de cuivre, & c'est ce que nous appellons un fou tournois. Libera Turonenfis étoit un denier d'or, & fouvent appellé francus aureus & · fcutatus aureus, & valoit vingt fols. Toutes ces espéces avoient pris leur nom de la ville de Tours, où elles étoient fabriquées, de même qu'on appelloit fous Parifis, livres Parifis, celles qui avoient été frapées à Paris. Le bureau des finances de Tours a été établi au mois d'octobre 1567, & eft compofé d'un premier préfident & de vingt-trois tréforiers de France, dont les quatre plus anciens prennent la qualité de contrôleurs généraux des finances, & deux receveurs généraux. La généralité de Tours comprend la Touraine, l'Anjou & le Maine. On y compre feize élections, & mille cinq cents foixante-dix-neuf pas

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Par édit du mois de février 1689, le roi créa un grand maître des eaux & forêts, au département de Touraine. Cette grande maîtrife des eaux & forêts, a une maîtrife particuliere établie à Tours, compofée d'un maître particulier culier, d'un lieutenant, d'un procureur du roi, d'un garde-marteau, d'un greffier & de deux gardes. Sa majeté a trois forêts dans cette province: celle d'Amboife qui contient feize mille arpens de bois, dont il y en a mille trois de haute futaye, & le refte en taillis; celle de Loches contient cinq mille arpens, tous en bois de futaie, & celle de Chinon environ fept mille arpens, tous en bois de futaie. Toutes ces forêts font plantées de chênes, parmi lesquelles il y a quelques hêtres. Sa majefté avoit auffi huit villes royales, qui faifoient partie de fon domaine; favoir,

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Mais le domaine de toutes ces villes eft engagé, à l'exception de celui de Tours. Toutes les impofitions, tant or dinaires qu'extraordinaires, qui fe font établies dans les autres provinces, ont lieu dans celle-ci.

Le principal commerce de cette province confifte dans le débit des marchandifes qui fe fabriquent dans les manufactures, dont, felon l'ordre de leur établisserment dans cette province, la draperie eft la plus ancienne, la tannerie vient enfuite, & enfin la foierie.

On trouve plufieurs réglemens qui concernent la draperie dans la coutume de cette province; mais elle ne fut établie à Tours qu'en vertu des lettres - patentes du roi Charles VII, données à Bourges le 6 mars 1460, avec exemption aux ouvriers pendant dix ans de guet, de garde des portes & d'aides. Les draps qu'on fabriquoit dans cette manufacture étoient autrefois fort eflimés, & on y a compté plus de deux cents cinquante métiers, & plus de cent vingt maîtres; mais la guerre, la mortalité & la difficulté des tems, ont presque anéanti en Touraine cette manufacture, qui ne s'eft foutenue que dans la seule ́ville d'Amboife, dont les étamines & les droguets font fort eftimés. La tannerie attiroit autrefois beaucoup d'argent dans la province, & a enrichi plufieurs familles. On tient qu'il y avoit plus de quatre cents tanneries en Touraine; mais il n'en reste aujourd'hui qu'environ cinquante-quatre dans toute cette province.

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La foirie eft la manufacture la plus confidérable & la dernière établie en Touraine. Louis XI envoya chercher à Venife, à Florence, à Génes & jusque dans la Grece les plus habiles ouvriers qu'il y eût, & les fit venir à Tours ea 1470. Il obligea d'abord les habitans de les loger, & de leur fournir l'uftenfile; mais en 1480, il leur permit par lettres patentes de faire un établiffement, & leur accorda des priviléges. L'induftrie de ces ouvriers fe perfectionna tellement, que dès le tems du cardinal de Richelieu, cette manufacture égaloit ou furpaffoit celle de Génes & d'Angleterre. On comptoit, pour lors, dans la feule ville de Tours, vingt mille ouvriers en foie, plus de huit mille métiers d'étoffes de foie, fept cents moulins à foie, & plus de quarante mille perfonnes employées à dévider la foie, à

l'apprêter & à la fabriquer, fans parler de la rubanerie, dont il y a eu autrefois, tant à Tours qu'aux environs, plus de trois mille métiers; il n'en tefte pas maintenant foixante plufieurs chofes ont concouru à réduire cette manufacture au point de diminution où elle eft à préfent. La cellation du commerce avec les étrangers, la fortie des ouvriers hors du royaume, l'obligation qu'on a impofée aux marchands d'acheter à Lyon les foies dont ils ont befoin, &c. Le léjour que le parlement de Paris fit à Tours, la fituation de cette ville dans un pays fertile, & la commodité de la riviere de Loire, donnerent lieu au deffein d'y établir une univerfité, qui fut créée par lettres patentes de Henri le Grand, données au mois de janvier 15945 mais comme le parlement fut rétabli à Paris un mois après, ces lettres n'ont point eu d'exécution. Les jéfuites avoient un collége à Tours où ils enfeignoient jusqu'à la théologie.

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Cette province a été érigée en gouvernement général l'an 1545, & aujourd'hui, elle a un gouverneur, un lieatenant général, un lieutenant de roi, & quelques gouverneurs particuliers. Le gouvernement de la ville & du château de Tours eft attaché au gouvernement général de la province, & la même perfonne eft revêtue de l'un & de l'autre. La ville de Loches a un gouverneur & un lieutenant de roi. Amboife a auffi un gouverneur particulier, qui eft le bailli de la ville & du château, & un lieutenant de roi. Beaulieu n'a qu'un gouverneur, & point de lieutenant de roi. Chinon a un gouverneur pour le roi, & le château en a un autre, qui eft à la nomination du duc de Richelieu, lequel en eft feigneur; mais il a des provifions du roi.

La maréchauffée générale étoit compofée d'un prévôt, de deux lieutenans, d'un affeffeur, d'un commiffaire aux montres, d'un procureur du roi d'un greffier, de deux exempts & de trente archers. La maréchauffée provinciale avoit un prévôt, deux lieutenans, un alfeflent, un commillaire aux montres deux exemts, un greffier & dix-neuf archers. Par la déclaration du roi, du 9 avril 1720, il n'y a plus pour la Touraine que deux lieutenans du prévôt général d'Angers, établis à Tours, avec un asfefleur, un procureur du roi, un greffier, &c.

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Il y a deux duchés-pairies dans ce gouvernement Montbazon & Luynes. On compte dans la Touraine vingt fept villes, dont il y en a huit royales, ainsi que je l'ai déja remarqué, & les autres appartiennent à de feigneurs particuliers. La plupart de ces dernieres ne font, à proprement parler, que des bourgs; mais on leur donne le nom de villes, parce que les feigneurs barons ont droit, par la coutume de Touraine, d'avoir villes clofes; ou bien parce que ceux du pays les qualifient les qualifient de villes. TOURAN. C'est l'ancien nom du pays de Turqueftan, qui tire fon origine de Tours, fils de Feridoun, roi de Perfe, de la premiere dynaftie, nommée des Pischdadiens. Tour avoit un frere aîné, nommé Irag', lequel eut, de fon pere, la Perfe en partage; de forte que Tour, fon cadet, fut contraint de patfer le Gihon ou P'Oxus, & d'aller régner dans les provinces Tranfoxanes. Les fuccefleurs de Tour, dont le plus célébre eft Afra fiab, ont toujours donné beaucoup d'affaires aux rois de Perle, fur quoi il faut voir les titres de Aferidoun ou Feridoun, & d'Afrafiab. On fe contentera feulement de remarquer ici, que depuis ce tems, les provinces, qui compofent aujourd'hui le royaume de Perfe, ont porté le nom d'Iran, que l'on prétend avoir été tiré de celui d'Irag', fils de Feridoun, & que toutes celles qui font au-delà du Gihon ou de l'Oxus, ont pris de Tour, autre fils de Feridoun, celui de Touran, & que dans les traités de paix, qui se faifoient autrefois entre les Perfans & les Turcs Orientaux, on mettoit toujours le Gihon ou Oxus, pour ligne de féparation entre ces deux grands états, qu'on nommoit l'iran & le Touran. L'auteur de l'hiftoire intitulée Moschtarek, écrit que les limites du pays de Touran font du côté du couchant, la province de Khouarezm, & du côté du midi le fleuve Gihon, depuis le pays de Badalkhschan, qui eft à l'orient, jusqu'à celui de Khouarezm, & que fes bornes font inconnues, tant du côté de l'orient que du côté du feptenurion. Le même auteur ajoute que la nation appellée Haiathelah, qui a fait de fi grandes irruptions dans la Perfe, fous Gobad & Nouschirvan fon fils, rois de Perfe,

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étoient fortis du pays de Touran. Ahmed Ben A'rabschad écrit auffi dans fon Akhbar Timour, que tous les pays qui s'étendent au-delà du fleuve Gihon, portent le nom de Touran, d'où les Arabes prétendent, quoique fauflement, que celui de Turkeftan foit dérivé. Le même auteur ajoute que le partage de l'Iran & du Touran fut fait entre Caïcaous, roi de Perfe, & Afrasiab, roi des Turcs, conformément à ce qu'en écrivent les hiftoriens de Perfe. Mirkhond écrit qu'il y a une ville du Mauaralnahar, fituée fur la rive orientale du Bahr Khozar, qui eft la mer Caspienne, qui fut bâtie par Tour, fils de Feridoun, duquel on vient de parler, & que c'eft de nom de cette ville que tout le pays, qui eft au-delà du fleuve Gihon, ou de l'Oxus, á tiré celui de Touran.* D'Herbelot, Biblioth. or. p. 395.

Selon l'auteur de l'hiftoire des Tatars, pag. 329, ce nom TOURAN eft pris quelquefois dans un lens oppofé au pays d'Iran, & en cette fignification, il défigne tous les pays qui font au nord de la riviere d'Amù, comme le pays d'Iran défigne tout ce qui eft au fud de la même riviere; mais dans fa véritable fignification, le pays de Touran comprend feulement cette étendue de pays qui eft renfermée entre la mer Glaciale, la riviere de Jeniféa & les montagnes du Caucafe; ce qui eft précisément la Sibérie. Enfin, Petis de la Croix dit, dans fon his toire de Timur Bec, l. 2, c. 30, que le TOURAN eft tout ce qui s'appelle la Grande Tartarie, depuis l'Oxus jusqu'en Moscovie, Sibérie & Chine. Timur, ajoute-t il; après avoir abfolument réduit fous fa domination les pays & royaumes du Touran, que Genghiz Kan avoit autrefois partagés entre fes deux enfans Touchi Kan & Zagatai-Kan, il les confia à la garde de fes lieutenans, & réfolut de conquérir l'empire de l'Iran ou de Perfe.

TOUBALÉ ou TOURBALI, village de la Natolie, au pays de Sarchan, environ à moitié chemin entre Smyrne & Aiafalouk, ou Ephefe. Spon, Voyage du Levant, liv. 3, fait entendre qu'il y a deux routes pour aller de Smyrne à Ephéfe; favoir, l'une qui eft le chemin ordinaire, & qui traverfe les rochers du mont Mimas, où il y a un paffage dans le roc, que les bonnes gens de ces quartiers difent que faint Paul coupa avec fon épée; l'autre route paffe par la plaine, & c'eft celle que prit Spon, comme la plus fûre. Après avoir paffé de grandes plaines traverfé la petite riviere Halis, qui alloit autrefois à Colophon, il vit à droite & à gauche les ruines d'un aqueduc, qui traverfoit le chemin, & alloit vers le village de Tourbalé, qui donne quelques marques d'avoir été anciennement une place plus confidérable qu'elle n'est préfentement, & qui étoit, peut-être, la ville appellée METROPOLIS, dont il pourroit fe faire que le nom de Tourbalé feroit venu. Voyez METROPOLIS.

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&

TOURBE, riviere de France, dans le Retelois. Elle prend fa fource à Somme-Tourbe, passe à Ville-Tourbe, & fe jette dans l'Aisne au-dessus du bourg d'Autri.*Coulon, Rivieres de France, p. 166.

TOURBILLON ou TURBEL, château du Valais, près de la ville de Sion, fur une montagne. L'évêque de Sion y fait ordinairement fa demeure. * Longuerue, Descript. de la France, part. 2, p. 305.

TOURIENNE, montagne de Turquie, dans la Romanie, au pied de laquelle eft le village de Tofbourg : il faut deux heures pour la traverfer,

TOURILLE, (plage de ) plage d'Espagne, fur la côte de la Catalogne, dans la viguerie de Girone. Michelot, pag. 47, dit, dans fon portulan de la mer Méditerranée : Environ cinq milles vers le nord, cinq degrés vers l'est de la pointe du nord de Bégu, font les ifles de Médes; entre cette pointe & ces ifles ett une grande anfe, bordée d'une plage de fable, qui a deux à trois milles d'enfoncement, appellée communément plage de Tourille, dans laquelle on peut mouiller, lorsqu'on a le vent à la terre ; toutefois, il ne faut point trop s'approcher de la plage, fur-tout proche le cap Bégu, vis-à-vis d'un petit vallon où font quelques magafins à pêcheurs ; pour le reconnoftre, on voit au dellus le vieux château & la tour que nous avons dit être au-dessus de Bégu, qui se voit de l'autre côté. On mouille, vis à-vis cette plage, à telle diftance que l'on veut; car à la petite portée du canon de terre," il y a dix, douze & quinze braffes d'eau, fond de fable valeyx. Vers le nord ouest du lieu où l'on mouille, il y KK kkkk iij

a une petite tour de garde & quelques magafins de pêcheurs fur le bord de la mer : ce mouillage n'eft propre que lorsqu'on va du côté de l'oueft; on y eft à couvert, par la pointe de Bégu, des vents, depuis le fud-fud-eft jusqu'à l'oueft.

TOURMANSINE, bourg de France, dans l'Anjou, élection de Montreuil-Bellay.

TOURMENTE, riviere de France, dans le Querci. Elle eft formée de trois gros ruiffeaux, dont deux viennent du côté de la ville de Souillac, & l'autre du Limoufin. Elle va fe perdre dans la Dordogne à Floriac.* Coulon, Rivieres de France, p. 532.

TOURMENTIN. Voyez au mot CAP, l'article CAP TOURMENTIN.

TOURNANS ou TOURNAN, gros bourg de France, dans la Brie, fur un côteau, à trois lieues de Brie-ComteRobert, à quatre de Rofoy & à huit de Paris, avec une tour, dite DE GANE, qui étoit anciennement destinée pour donner les fignaux. L'églife paroiffiale porte le titre de faint Denys. On fait un commerce de bled dans ce bourg, & tous les lundis on y tient un gros marché. André du Chêne, qui écrit TOURNAN ou TOURNEM, dit que c'est une prévôté & un châtellenie, qui a procureur du roi & autres officiers, pour l'adminiftration de la justice en premier reffort. Près de Tournans eft un beau châreau appellé HAR MENVILLIERS. Ce château appartient au marquis de Beringhem, (eigneur de Tournans. Il eft accompagné d'un grand parc fermé de murailles, & dans l'enceinte du château, on voit un canal fort long formé d'eau de fource.* Corn. Dict. Mémoires dreffés fur les lieux

en 1707.

lettres dans les années 1426 & 1436. Louis XI, après la mort de Charles, duc de Bourgogne, fe rendit maître abfolu de Tournay, & y mit garnifon en 1477 ; & depuis ce tems, les habitans obéirent au roi comme fes autres fujets jusqu'à l'an 1513 que la ville fut prife fur Louis XII par Henri VIII, roi d'Angleterre. Les Anglois rendirent la ville aux François en 1517; mais quatre ans après, la guerre ayant été déclarée entre l'empereur Charles V & François I, la ville fut affiégée & prife par l'armée impériale. L'empereur voulut que le Tournefis fît une province féparée de la Flandre & du Hainaut ; & enfuite François I ayant été fait prifonnier à la bataille de Pavie, il fut contraint, par le traité de Madrid, de céder, en 1525 & 1526, Tournay, avec les dépendances & les annexes, à l'empereur & à fes héritiers fucceffeurs en toute fouveraineté; ce qui fut confirmé par le traité de Cambrai en 1529, par celui de Crepi en Laonois en 1544; & par celui de Cateau Cambrefis en 1559. Louis XIV affiégea & prit cette ville en 1667, & elle lui fut cédée l'année fuivante, 1668, au traité d'Aix-la-Chapelle; il augmenta les fortifications de la ville, & y fit bâtir une très forte citadelle. L'une & l'autre furent affiégées & pri fes, en 1709, par l'armée des Alliés. Louis XIV céda enfuite fes droits fur cette ville à la maifon d'Autriche, par les traités d'Utrecht, de Radftad & de Bade. Les Etats Généraux ont néanmoins la garde de la ville & de la citadelle, par le traité de la Barriere, conclu en 1715 avec l'empereur Charles VI. J'ai dit que l'Escaut coupe Tournay en deux parties, dont l'une s'appelle la Vieille Ville, & l'autre la Neuve. La vieille eft à la gauche de la riviere, du côté de la Flandre, & la neuve eft à la droite. Celle-ci eft dans le Hainaut, avec fept villages qui en dépendent, & qui appartiennent, depuis plufieurs fiécles, au Tournefis; mais pour le fpirituel, cette partie, de la ville de Tournay, avec les villages d'au-delà de l'Escaut, font jusqu'à préfent du diocèle de Cambrai. Toute la ville eft entourée d'une ancienne muraille, qui fut élevée en 1297, & fur laquelle il y a cinquante cinq tours rondes. Louis XIV a fait conftruire, fur cette enceinte, un rempart, garni d'un bon & fuffifant parapet, Cette enceinte eft défendue par neuf bastions détachés,

TOURNAY, ville des Pays-Bas fur l'Escaut, qui la Coupe en deux. C'est la capitale du Tournefis : elle est fituée à cinq lieues de Lille, & à fept de Douay & de Mons. Tournay, en latin Turnacum, ne fe trouve point marquée dans les plus anciens auteurs, comme Céfar, Pline ou Prolomée, ni dans les hiftoriens qui ont écrit avant Conftantin & fes enfans. Saint Jérôme néanmoins, qui a vécu du tems de Conftantius, fils de Conftantin, & des empereurs les fucceffeurs, jusqu'au regne d'Honorius, marque Tournay comme une des principales villes des Gaules, ravagée par les Barbares au commencement & par un ouvrage à cornes, avec un bon chemin-cou du cinquiéme fiècle. Il en eft fait mention auffi dans l'iti- vert, le tout revêtu de maçonnerie. C'est ce qui compose néraire d'Antonin & dans la carte de Peutinger, dont la moitié des fortifications de la ville au nord-eft. La les auteurs ont vécu du tems de faint Jérôme. Tournay fut plûpart de ces ouvrages font fur un fond de roche, ce prife, fur les Romains, par Clodion, roi des François. Son qui rend qui rend l'approche de la ville affez difficile. Le grand petit-fils Childéric y demeuroit, y mourut & y fut enterré. follé de ce côté peut être inondé par les éclufes qui reSon tombeau ayant été trouvé au fiécle paflé dans le faux- tiennent l'Escaut au haut de la ville. L'autre moitié de la boug de cette ville, lorsque l'archiduc Léopold d'Autriche place, au fud-oueft, eft fortifié de fix baftions détachés de étoit gouverneur des Pays-Bas, ce prince emporta, en l'enceinte, d'un fer à cheval, de trois ouvrages à corne Allemagne, le fceau de ce roi, & les autres chofes qu'on dont deux font traverfés, outre deux pâtés casematés & avoit trouvées dans fon tombeau; mais depuis elles furent garnis de galeries, qui ont communication avec la citaenvoyées à Louis XIV, qui le fit mettre dans la biblio- delle; le tout revêtu de maçonnerie, & défendu par un theque royale de Paris. Saint Ouen nous apprend, dans bon chemin-couvert. Le grand foffé eft fec,& a plufieurs la vie de faint Eloi, que Tournay a été autrefois la ca- traverses pour le défendre. On entre par fept portes dans pitale des rois de France: Quondam regalis extitit civitas. la ville. A l'entrée de l'Escaut, Louis XIV a fait bâtir Les évêques de Tournay & de Noyon étoient feigneurs quatre moulins, qui ont fait fubfifter une armée de cent de la ville, fous les premiers rois Capétiens, & ils avoient mille hommes pendant la derniere guerre. Chaque mouau-deffous d'eux des avoués & des châtelains qui étoient lin peut moudre cinq rafieres de bled par heure, & le leurs vaffaux. Les habitans jouiffoient de fort grands pri- bâtiment en eft des plus folides. On fit, en 1635, fur l'Esviléges, & vivoient dans une entiere liberté, ne s'étant caut, un très-beau quai, de treize cents pas géométriques jamais foumis aux comtes de Flandre, & reconnoiffant de longueur, de trente de profondeur, & quatre-vingts Toujours la fouveraineté des rois de France. Ils fe foumi- de largeur ; & les deux rives font appuyées de très-fortes rent entierement à Philippe Auguste l'an 1187, & depuis murailles. Il y a fix ponts de pierre, qui ont été conftruits ce tems, les évêques ne purent recouvrer leur autorité dans les années 1297, 1315, 1318, 1550 & 1685. Les temporelle. Ils avoient néanmoins la haute juftice de éclufes, dans la balfe ville, qui fervent à faire descendre Tournay & du Tournefis, qu'ils conferverent jusqu'en les bateaux, furent conftruites, en 1562, aux dépens des 1320, que Philippe le Long acquit, de Gui d'Auvergne, villes voifines. * Longuerue, Description de la France, évêque de Tournay, les droits de juftice, avec les fiefs part. 2, p. 77. qui appartenoient à ce prélat & à fon églife, le roi ayant donné en échange, à l'évêque, huit villages dans la châtellenie de Lille. Lorsque Charles VII fut contraint de céder tant de places, en Picardie & ailleurs, à Philippe, duc de Bourgogne, par le traité d'Arras, ce roi fe réferva, & à la couronne, la ville de Tournay, dont les habitans fe maintinrent en liberté fous la fouveraineté de la couronne de France. Auffi Charles VII avoit folemnellement uni Tournay & le Tournefis à perpétuité à fa Couronne, par fes lettres patentes données au commencement de fon regne en 1422, & confirmées par d'autres

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La citadelle eft beaucoup plus forte que la ville; c'est un pentagone régulier, dont le diamétre eft de deux cents cinquante toifes. Elle eft environnée d'une bonne fauffebraie. Chaque courtine eft défendue par une demi-lune, à contre-gardes coupés; tous les foffés font fecs, & fous la faulle-braie, il y a, tout autour du corps de la place, une galerie dans l'épaifleur de la muraille, au niveau du foffé, pour conduire les mines fous l'ouvrage capital, avec une autre galerie croifée fous chaque baftion. Les deux baftions du côté de la ville ont des fouterreins, qui fervent pour l'hôpital & la boulangerie, confiftant en quatre

four

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neaux. Au milieu de la place, il y a un grand puits, où aboutit une galerie qui coupe la citadelle en deux. Les cafernes & les pavillons des officiers font affez commodes. La maifon du commandant eft fort propre ; mais l'églife a été entierement ruinée par le dernier fiége, Sous la contrescarpe, dans l'épaiffeur de la muraille, regne une galerie au niveau du foffé, & à tous les angles faillans de cette contrescarpe, il y a des créneaux dans la muraille, pour flanquer le follé capital. Environ à cinquante pieds de cette galerie, il y en a une autre fous le glacis parallèle à la premiere, qui regne auffi tout autour, qui comprend tous les ouvrages extérieurs, & qui a des galeries de communication de distance en distance. De cette galerie paralléle, il y en a d'autres qui avancent fous le glacis bien avant, pour conduire les mines de tous côtés. Les foffes des demi-lunes font relevés, & défendus par des coffres, où l'on monte de la galerie qui régne fous la. contrescarpe. Tous les ouvrages, jusqu'à l'intérieur du parapet & de la banquette, font revêtus de maçonnerie. Dans plufieurs endroits, il y a des fouterreins pour loger la garnifon en cas de néceffité. Outre la porte qui conduit dans la ville, il y en a une autre de communication vers la campagne. Cette citadelle eft l'ouvrage du fameux ingénieur M. de Mégrigni, qui en étoit gouverneur lorsqu'elle fut prife par les alliés. La garnifon fut obligée de fe rendre prifonniere de guerre ; mais on lui accorda de fortir avec fes armes, tambour battant, & drapeaux déployés. Lorsque cette citadelle fut achevée, Louis XIV vint la viliter. M. de Mégrigni lui ayant demandé s'il la trouvoit à fon gré, ce monarque lui répondit, qu'elle lui plasfoit fi fort, qu'il voudroit feulement qu'il y eût quatre roues, pour la pouvoir transporter où bon lui fembleroit. Cet ouvrage fut commencé en 1668, & depuis ce tems-là, jusqu'au 24 avril 1674, la dépenfe montoit à deux millions cinq cents vingt-fept mille foixante dix-fept livres ; & ce que ce roi y a fait ajouter depuis, a fait augmenter cette fomme jusques à quatre millions. En confidération de cette dépenfe, la ville fit, à deux différentes reptiles, un don gratuit de trois cents mille florins à Louis XIV.

La cathédrale, dédiée à Notre-Dame, eft d'une trèsbelle fculpture, & ornée de quatre clochers. On y voit quantité de riches chapelles, & divers tombeaux magnifiques, foit en marbre, foit en airain. Le chapitre eft compofé d'un doyen, de deux archidiacres, l'un pour Tourmay, l'autre pour la Flandre: d'un chantre, de deux tré. foriers, d'un grand pénitencier, d'un écolâtre, d'un chancelier & de trente-deux chanoines; ce qui fait en tout quarante-deux prébendes, dont quarante font à la dispofition de l'évêque, & deux, l'écolâtre & le chanoine hôtelier, à la dispofition du chapitre. Le chanoine hôtelier eft ainfi appellé, parce qu'il eft chargé de la direction de l'hôpital de Notre Dame, qui dépend du chapitre pour le temporel & pour le fpirituel.

L'abbaye de faint Martin, de l'ordre de faint Benoît, eft remarquable par la beauté de les édifices, & pour la grandeur & la magnificence de fon églife. Louis XIV & MarieThérefe d'Autriche, fon époule, y mirent la premiere pierre en 1677. L'abbaye fut commencée vers l'an 656, par S. Eloi, évêque de Tournay & de Noyon, en l'honneur de faint Martin, évêque de Tours, qu'on croit avoir prêché l'évangile en ce lieu, & y avoir reffuscité un mort. Cette abbaye devint dans la fuite très-puiffante, & les religieux se mirent fous la regle de faint Benoît au commencement du douzième fiécle ; ils avoient auparavant fuivi celle de faint Auguftin.

La ville de Tournay eft maintenant divifée en dix paroisfes; la cathédrale de Notre Dame, faint Piat, faint Jac ques, faint Quentin, faint Pierre, faint Nicaife, faiate Marie Magdelaine, faint Brice, faint Jean & faint Nicolas. Les fept premieres, qui fe trouvent dans la partie la plus confidérable de la ville, du côté de l'Escaut, qui regarde la France, font de l'évêché de Tournay, ainfi que les fix cures qu'on nomme fuburbicaires : les trois dernieres, fituées dans la plus petite partie de la ville, du côté de l'Escaut, qui regarde le Hainaut, font de l'archevêché de Cambrai ; & il y a un doyen de la chrétienté, dit de faint Brice, qui exerce la jurisdiction de cet archevêque dans la ville de Tournay. Il y a eu encore deux autres paroilles dans la partis de la ville qui reconnoît l'évêque de Tournay; fainte

Catherine & fainte Marguerite; mais la premiere fur démo lie en 1672, lorsque Louis XIV y fit bâtir la citadelle. Celle de fainte Marguerite fut donnée alors aux chanoines réguliers de l'abbaye de faint Médard, qu'on nomme auffi faint Nicolas des Prés, & qui y avoient perdu leur maison. Cette abbaye fut fondée en 1126, par Simon de Vermandois dernier évêque de Tournay, réfidant à Noyon. Les autres maifons religieufes de Tournay font, l'abbaye des PrésPorciens, qui appartiennent à des religieufes de faint Auguftin, fondées par Wautier de Marvis, cinquante & uniéme évêque, les trinitaires, les croifiers, les carmes chauffés & déchauffés, & les recollets, les dominicains, les Augustins, les capucins, une maifon de prêtres Irlandois, les carmelites, les fours-griles, les repenties & autres. Les jéfuites y ont deux maifons; l'une où ils enfeignent les humanités, l'autre où ils tiennent le noviciat de la Flandre Gallicane. Cette derniere a été dotée du revenu du prieuré d'Englos, de l'ordre de faint Benoît. Ce prieuré avoit été abandonné à caufe des révolutions du pays. Il y a encore le collège de faint Paul, où des prêtres féculiers enfeignent les humani-: tés; & le féminaire de l'évêque, où les peres jéfuites enseignent la théologie depuis 1705.

La foi chrétienne a été reçue plus tard dans le diocèfe de Tournay que dans la plus grande partie de la Gaule Belgique. Grégoire de Tours fait mention de S. Piat qui prêcha l'évangile dans ce pays, & y fut martyrifé; mais il ne dic rien de S. Eleuthére, que la tradition du pays met du tems de Clovis entre les apôtres de cette ville. Les légendaires qui en parlent dans fa vie, & dans celle de faint Médard, ne méritent aucune créance, ayant écrit cinq cents ans après ces deux faints, & donnant des marques de leur ignorance dans l'hiftoire. Ce qui eft certain, c'eft que faint Médard, évêque de Noyon, fut auffi pafteur de l'église de Tournay, & qu'il prêcha & établit l'évangile dans ce pays, comme firent fes fuccefleurs jusqu'à S. Eloi. C'est pour cela que les évêques de Noyon conferverent toujours l'évêché de Tournay, dans lequel plufieurs grandes villes furent fondées, comme Gand, Bruges & Lille : ce qui engagea faint Bernard à travailler à la féparation de ces deux églifes jointes' depuis le tems de faint Médard. S. Bernard obtint en 1148, du pape Eugene III, qui avoit été fon disciple, la défunion de ces fiéges; de forte qu'Anfelme, moine bénédictin, abbé de faint Vincent de Laon, fut créé cette année premier évêque de Tournay, & que cet évêché fe trouva d'une fort grande étendue jusqu'à l'érection des fiéges de Gand & de Bruges. En 1559 l'évêché de Tournay fut fait fuffragant de la nouvelle métropole de Cambrai. Cette ville étoit retour née presque entierement à l'idolatrie, après la mort de faint Piat, fur-tout lorsqu'elle fut tombée entre les mains des Barbares. Baillet, Topograph. des faints, page

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Le gouvernement civil & politique de la ville de Tournay confifte en deux corps, dont le premier eft le bailliage ayant à la tête un grand bailli pour le Tournefis. Le fecond corps eft divifé en deux tribunaux ; l'un compofé du prévôc & des jurés qui décident les affaires criminelles; l'autre formé du mayeur & des échevins qui gouvernent les affaires civiles, & la police de la ville. Du tems que cette ville étoit foumife aux Espagnols, le magiftrat feul y exerçoit toute la jurisdiction; il étoit renouvellé tous les ans par des commiffaires du roi, & les caufes alloient par appel au confeil provincial de Flandre, & de-là au parlement de Malines; mais lorsque Louis XIV s'en fut rendu maître, il y érigea au mois d'avril 1668, un confeil fouverain, qui étoit compofé de deux préfidens, de fept confeillers, d'un procureur général, d'un greffier & de cinq huiffiers. Le roi créa aufli deux chevaliers d'honneur, avec droit d'entrée, de rang & de féance dans ce confeil, immédiatement après les préfidens & avant les confeillers.

En 1680, le roi, pour autorifer & faire respecter davantage ce confeil, lui donna le titre de parlement. En

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