1674. dui obéïr, ou qu'il voulût toûjours faire valoir la premiere opinion qu'il avoit, difoit-on, avancée dans le Confeil des Confédérez, il ne se rendit qu'après de longues résistances, aux follicitations empreffées des Généraux du parti. Ces derniers, à ce qu'on prétendoit, vouloient absolument réunir toutes leurs forces pour aller enfemble chaffer le Prince de Condé en France, & tâcher que ce Royaume devint enfin le Théatre de la guerre; mais on disoit que Souchez d'un autre sentiment, soûtenoit qu'en se tenant separés ils en devoient efperer de plus grands avantages, & qu'en remontant la Meuse sans la paffer jusqu'à Charleville, on pourroit se rendre maître de cette Place, ou peut-être de Mezieres, ce qui ne paroissoit pas être difficile, par le mauvais état de ces poftes, dépourvûs d'hommes & de munitions & n'ayant que de legeres esperances de fecours: il ajoûtoit, que si cette marche étoit heureuse, rien ne pourroit empêcher cette Armée de porter la guerre en Champagne & d'y faire de grands dé Que si le Prince de Condé marchoit de ce côté pour s'opposer à cette entreprise, le Prince d'Orange feroit alors le maître d'attaquer dans les Pays-Bas telle Place qu'il trouveroit à propos, ou de suivre les François avec le reste des Confédérez, & qu'alors fuperieurs en nombre, & furtout en Cavalerie, dans un Pays fort ouvert, il ne tiendroit qu'à eux de le combattre à leur avantage & de s'assurer la victoire : mais ce raifonnement quoique établi sur de bel les apparences ne prévalut pas, & Souchez fut obligé de paffer la Meufe, pour venir joindre le Prince d'Orange aux environs de Namur. Tandis que les Alliez perdoient ainsi le tems en deliberations, le Roi se-hâta de prendre Salins & quelqu'autres Forts qui restoient encore à conquerir en Franche-Comté. Cette prise le rendit enfin maître de toute la Province, dont il donna le Gouverne ment au Duc de Duras & S. M. après lui avoir laissé les ordres, neceffaires pour la conservation de cette Conquête, reprit le chemin de France, où d'autres affaires sembloient le rapeller. K 1674 1674. Le Prince de Condé resta tout le mois de Juin campé à Brugel, soit qu'il y trouvât à vivre plus commodément qu'ailleurs, soit qu'ayant deffein d'observer les mouvemens des Confédérez, il cherchat à se maintenir en ce poste pour y voir de plus près quelles pouvoient être les intentions du Prince d'Orange : mais ce dernier se tenoit toûjours du côté : de Vilvorde, couvert du canal qui va de Bruxelles à Malines, comme s'il n'eût ofé avec ses seules forces défier un ennemi d'une si grande réputation; mais ayant appris enfin que les Allemands & les autres Alliez s'avançoient pour le joindre, il crut qu'il devoit leur en faciliter l'occafion.. Outre que la faifon s'avançoit ;.. quelques-uns des Confédérez, qui peut-être n'étoient pas chargés de la conduite de la guerre, commençoient à crier contre l'engourdissement des Chefs de ce parti; mais ceux-ci, foite qu'il leur eût falu tout ce tems pour prendre leurs mesures ou que les murmures publics les eussent réveillés, se préparerent enfin à faire cette jonction Les Allemands après s'être long- 1674. tems maintenus dans differens quarciers du Pays de Liege, s'avancerent vers Dinan & commencerent à donner des jaloufies de ce côté : comme cet endroit étoit un des plus foibles de la frontiere Françoise, & que les premiers pas du Prince d'Orange avoient semblé se porter vers ces mêmes lieux, il ne fut plus si difficile de prévoir où se tourneroient les efforts de la guerre. Sur ces avis le Prince de Condé nė balança plus à lever fon Camp de Brugel, & reprenant le chemin de Binche, il alla se porter aux Eftinés: car il apprehendoit toûjours que les Troupes de Souchez ne se jettassent entre la Sambre & la Meuse, où les Places qué tenoient les François étoient les plus foibles & les plus dégarnies. Cela l'obligea de détacher de cé Camp cinq ou fix mille hommes fous les ordres du Duc de Luxembourg, avec ordre de fe mettre fous Philippeville & de raffurer par fa préfence les Peuples & les Garnifons de ce Pays que la prise de Dinan par les Allemands & le voisinage de tant 1674. d'ennemis épouvantoient. Lançon Brigadier de Cavalerie avec: fon Regiment, & celui des Dragons: de la Reine avoit déja pris la même route: mais l'allarme étoit trop forte pour être calmée par fr peu de Troupes. Le Roi qui donnoit ordre à tout', & dont la pénétration ne se trompoit pas, avoit envoyé en fortant de Franche Comté trente Escadrons & quelques Bataillons, la plupart Troupes de sa Maifon, qui sous prétexte d'aller fe rafraîchir entre Sedan & Stenai, devoient se raprocher de cette frontiere pour y demeurer aux ordres du Prince de Condé. L'Armée Françoise quittant le voifinage d'Ath pour se rapprocher de Binche, vers la fin du mois de Juillet; dans ce même tems les Confédérez commencerent à s'ébranler pour se mettre à portée de se joindre, le Prince de Condé ne demeura que sept ou huit jours dans fon Camp des Estines; car il y eut des nouvel les certaines que les Allemands ayant enfin paffé la Meuse, ne cherchoient que les moyens d'unir leurs Trou pes avec celles du Prince d'Orange.. |