1672. quelques autres legeres rencontres, ne portaffent pas grand préjudice aux Affiégeans, la vigueur des Affiégez ne laissa pas de les surprendre; ils furent même étonnés de voir fortir tout à la fois plus de deux cens hommes d'une place, où selon les avis qu'on leur en avoit donnés, il n'y en devoit pas avoir trente en état de combattre. Le Prince d'Orange fit rembarquer aussi-tôt sur la Sambre sa grosse Artillerie, pour la renvoyer à Namur, & une partie de ses Troupes décampa le 20. du mois, & le reste suivit bientôt, de forte que deux jours après ce Siège, ou pour parler comme ceux du Pays, cette feinte fut tout-à-fait confommée. J'oubliois de dire que les premiers jours que les Troupes de Hollande furent arrivées devant Charleroy, le Marquis de Montpoüillan, alors au service des Etats, avoit été détaché du Camp avec quelques Regiments pour aller attaquer Binche, petite Vilie du Hainault François, qui n'étant point fortifiée étoit aussi le plus fouvent sans Garnison; il est vrai qu'au bruit de la marche des Hollandois, le Maréchal d'Humieres y avoit en- 1672. voyé deux Compagnies d'Infanterie Françoise & une de Suiffes. 2 Ce peu de gens firent d'abord affez bonne contenance; mais les Habitans, foit par la crainte du canon, foit par l'envie de retourner sous la domination Espagnole, se révolterent contre les François, & le Major qui les com mandoit n'en pouvant être le maître fut forcé de capituler aux conditions que les Officiers auroient la liberté, & que les Soldats demeureroient prifonniers de Guerre. Le Prince d'Orange vint prendre poffeffion de cette Conquête & recevoir le ferment de fidelité de ces nouveaux Sujets. Dès que les Hollandois furent entrés dans le Hainault; le Maréchal d'Humieres, qui, comme j'ai dit, avoit assemblé quelques Troupes vers Courtray, eut ordre de marcher à Ath, avec ce qui se trouveroit en état de lè suivre ; il ne put mener à ce rendez-vous que 13. ou 14. Bataillons de Compagnies, de differens Corps, & la plupart de nouvelles levées, ce qui joint à 10. ou 12. Compagnies de Cavalerie mal équipées, & 300. Che 1672. vaux des Milices du Boulonnois, ne parut pas fuffifant pour rien entreprendre de considerable. En effet, on n'eût jamais ofé se commettre avec des Ennemis plus lestes & plus nombreux, si le Marquis de Louvois qui se rendit à Ath dans le même tems, n'y eût apporté de la confiance, & n'eût rafluré cette frontiere, que le voisinage d'une Armée Ennemie, & les menaces des Partisans d'Espagne avoient épouvantée. Ce Ministre étoit parti de la Cour fur la nouvelle du Siège de Charleroi; & on ne douta pas que sa préfence n'eût beaucoup contribué au secours de cette Place, si le Prince d'Orange eût continué de l'attaquer ; il y avoit peu d'apparence qu'on hazardât une action de cette importance, fans avoir pris des mesures convenables à la grandeur de ce dessein. Car il n'étoit pas vrai-semblable, que celui qui se trouvoit chargé du détail de toute la Guerre, tentat une pareille entreprise, sans quelque esperance de succès. On avoit déja dépêché divers Couriers au Comte de Duras qui commartdoit doit un affez grand Corps de Cavale- 1672. rie entre la Meuse & le Rhin, afin de marcher vers le Hainault, & de s'y poster de maniere qu'en incommodant les Ennemis occupés au Siége, -il pût aifément se joindre aux Troupes du Maréchal d'Humieres. Le Roi donna les mêmes ordres au Prince de Condé & au Vicomte de Turenne dont les Armées se trouvoient alors, ou fur le Rhin, ou fur la Mozelle; S. M. se préparoit à s'avancer en personne fur la frontiére, & les Troupes de fa Maifon avoient déja ordre de s'y rendre, de même que beaucoup d'autres Corps; mais par la retraite des Hollandois toutes ces mesures devinrent inutiles, & les Troupes des differens Partis ne fongerent qu'à se separer pour y prendre des quartiers d'hyver. Durant le séjour du Marquis de Louvois & du Maréchal d'Humieres à Ath, on proposa quelques courses dans les terres d'Espagne pour faire repentir cette nation, d'avoir si hautement assisté les Hollandois, & de les avoir peut-être engagez dans les Siéges qu'ils venoient de tenter; mais, C د 1672. les choses propofées furent jugées ou trop difficiles, comme le dessein d'insulter Condé, ou de si peu de conféquence, que l'avantage qui auroit pû en revenir, ne paroissoit pas af fez confiderable pour avancer la rupture de la Paix qui duroit encore entre les deux Couronnes, ne s'agiffant alors que d'enlever quelques Compagnies de Cavalerie du Regiment d'Holstein logées dans Leffine, dans Chïevres ou dans Joignies. Dans ce même tems les Hollandois abandonnerent Binche, & ne joüirent que fept ou huit jours du fruit des Conquêtes de leur Campagne; le reste de l'hyver s'écoula sans qu'il se passat rien de memorable en Flandre. Il n'en fut pas de même du côté d'Allemagne où le fort de la Guerre sembloit se tourner: Car le Vicomte de Turenne y sçut si bien mettre en ufage les talens qu'une longue experience lui avoit acquis, qu'avant la fin du mois de Mars, il obligea nonseulement les Troupes que commandoit l'Electeur de Brandebourg à rer. passer le Veser, mais même qu'il réduifit ce Prince à se servir de fon en |