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1673. dans les grandes affaires font toujours voir plus de prévoyance que de fermeté, apprehendoient que le Roi ne se fût engagé dans une expédition trop difficile, & que les perils où il s'exposoit à toute heure ne nous fissent acheter trop cher cette Conquête; ils ajoûtoient que cette Place étoit estimée une des meilleures de l'Europe, qu'elle feroit défenduë par une Garnison de 7. ou 8000. hommes de pied & de mille ou I 200. chevaux: Que dans ce nombre il y avoit de vieilles Troupes Espagnoles, & plusieurs Officiers réformés; que Fariol étoit dans la Ville, homme diftingué tant par la défense de Valencienne en 1656. que par l'expérience qu'il s'étoit acquise dans d'autres Siéges; que les dehors de la Place étoient affés bons & les magafins des Affiégez pleins de vivres & de munitions. Ils appuyoient ces difcours de quelques exemples malheureux, & ne concevoient que des espérances mêlées de beaucoup de crain

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D'autres combattoient ces fentimens, & foûtenoient qu'à la guerre

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il faut fouvent plus attendre de la har- 1673. diesse que de la prudence; ils comptoient fur la valeur des Troupes du Roi, fur la quantité de ses Officiers, fur l'ordre & la difcipline du Camp, où tout abondoit, l'argent, les vivres & le canon: à l'égard des fortifications de la Ville qui étoient imparfaites, ils di foient qu'il n'y avoit presque point de terre derriere le rampart attaqué, que les Troupes de cette Garnison ne devoient pas être plus aguerries que celles qu'on avoit chaffées de plus de 30. Places depuis le commencement de la guerre & qui pour la plûpart n'avoient ofé demander d'autre capitulation que celle d'être prifon niers; que les Troupes d'Espagne fe réduifoient à un Regiment; que fi Mastrich s'étoit si longtems défendu par le paffé, c'est qu'il étoit foiblement attaqué, & qu'il n'avoit pas à ses portes un si redoutable ennemi: enfin que ceux qui se connoissoient en fortereffes ne jugeoient pas que celle dont il s'agissoit, dût raisonnablement tenir plus de 14. ou 15jours de tranchée ouverte.

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Telles étoient à peu près les com

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1673. versations de la suite de la Cour

mais ces raisonnemens n'empêchoient pas que le Siége n'allât son train, & dès le sixiéme jour de l'attaque, les travaux se trouverent pouffés jusques au pied du premier glacis. Le lendemain on releva ce que les pluyes avoient gâté, & on commença de faire des contremines pour découvrir les fourneaux des Afliégez. Un Ingenieur nommé Paul eut d'abord l'Intendance de ces ouvrages; mais dès P'arrivée de Castelan homme d'une expérience confommée dans cette forte d'attaque ou de défense, ce dernier se chargea seul du soin de ce travail.

Le huitième jour le Roi commen çant peut-être à s'ennuyer de voir les Hollandois garder si longtems leurs premieres palissades voulut qu'on tentât de les en chaffer: Il choisit pour l'attaque de la droite fon Regiment que commandoit le Com te de Montbrun qu'il renforça de cent Moufquetaires de la premiere Compagnie & de cent Gardes du Corps: Le Regiment Dauphin cut la gauche avec un pareil renfort, le Duc de Monmouth Lieutenant-Gé- 1673néral de jour prit le premier poste & le Comte de Montal Maréchal de Camp le second.

Tout étant difpofé & les materiaux neceffaires à ces fortes d'actions ramaffés, les Troupes commandées fortirent & marchant aux Ennemis les chafferent fans peine de leurs postes avancés, & les poufferent fi vivement dans leurs autres ouvrages, qu'ils les contraignirent d'en abandonner une partie, entr'autres une demi-lune un peu trop éloignée du rampart, & qui n'étoit élevée que depuis le commencement du Siége..

Les François travaillerent à s'y établir & leur logement commençoit à s'affurer, quand un fourneau où les Affiégez avoient mis le feu en se retirant, les fit sauter; les Hollandois profitant de ce désordre revinrent à la charge, & regagnerent non-feulement la demi-lune, mais encore tout le terrein, qu'ils avoient perdu : II est vrai qu'ils ne le garderent pas longtemps, parceque les François revenant au combat, les en chaffe

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rent de nouveau malgré toute leur résistance, & un feu très-vif; ainsi les Affiégeans rentrerent dans cette demi-lune toute ruinée, ils s'y maintinrent jusqu'au jour, & affurerent si bien leur logement qu'il sembloit qu'on ne dût plus aprehender de le perdre.

L'attaque de la gauche ne réussit pas de même, if est vrai que ceux qui la tenterent n'avoient pas ordre de fe rendre maîtres du chemin cou vert, mais feulement d'y faire quelque diversion & d'y donner souvent des alarmes; cependant le bruit de la droite les animant, la chaleur les emporta, & fans confiderer qu'ils n'avoient presque rien de ce qu'il falloit pour entreprendre l'attaque d'une contrefcarpe, ils ne laifferent pas de le tenter; mais après mille vains efforts & avoir perdu beaucoup d'hommes, ils furent enfin contraints de se retirer.

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Le retour du jour, fit fucceder un grand calme à tout le fracas de la nuit; mais vers le midi les Hollandois revenant à l'attaque firent joüer un second fourneau sous la de

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