Images de page
PDF
ePub

1673. état de tenir Garnison.

Peu de temps après ce Prince eut ordre de retourner à la Cour & de remettre le soin de cette frontiere au Maréchal de Bellefonds qu'on envoyoit y commander. Les premiers foins de ce dernier furent de visiter les Places & de s'instruire du nombre des Troupes qui les gardoient; il chercha enfuite les moyens les plus prompts & les moins rigoureux d'établir des contributions dont on tira de très-grands fecours tant que dura cette Guerre.

Le Comte de Monterey nommé depuis peu Gouverneur de ces Provinces quoique jeune, & fans avoir eû d'autre emploi que celui de Mestre de Camp, crut au commencement que la reconnoissance de cette diftinction l'engageoit à faire mieux que fes prédecesseurs, & qu'il ne devoit rien oublier pour empêcher autant qu'il pourroit, que les richesses du Pays ne servissent à l'assujetir, de forte qu'il ne menaça pas moins que de ruiner entierement les premieres Communautez qui s'accommode

zoient avec les Intendants François.

[ocr errors]

Le succès lui fit voir qu'il s'abu- 1673. foit; car depuis que les Habitans d'un Pays avoient goûté le repos & la fûreté par des contributions, il étoit impossible de les ramener à la garde de leurs Forts, & de leurs Eglifes, ni de leur ôter l'envie d'acheter avec un peu d'argent la conservation de leurs biens & de leurs familles; ainsi dès que le Maréchal de Bellefonds, qui n'avoit pas affés de Troupes pour former d'autres entreprises, eut envoyé faire quelques courses aux portes de Bruxelles, & brûler quelques maisons des Villages qui se croyoient le plus à couvert, la plupart des Peuples de la Campagne coururent aux Villes, dont ils avoient reçu les envoyés pour convenir de ce qu'ils devoient payer.

Il ne se passa pas autre chose en Flandre pendant les premiers mois de l'hyver, mais la guerre s'échauffa tout de bon en Allemagne, & Montecuculi qui voyoit tous les jours groffir ses forces par le concours des Alliez, ne voulut pas laisser échaper l'occasion de profiter de ses avantages, de maniere que se trouvant au:

1673. milieu des Armées Françoises dont il pouvoit à coup für empêcher la jonction, il ne douta point qu'il ne fût en état de se rendre maître des affaires, & de dominer le long dư Rhin.

Il ne restoit plus qu'à s'affûrer d'un poste qui, facilitant les communications des Confédérez, servit d'entrepos entre les Païs-Bas & l'Empire ; & comme l'Electeur de Cologne balançoit encore à quitter l'al liance du Roi, rien ne fut jugé plus propre à le determiner, & rien de plus glorieux pour les Chefs de ce Parti que de lui enlever à force ou verte la Ville de Bonne, dont il faifoit sa place de fûreté.

Cette Ville n'étoit alors ni bien munie, ni bien fortifiée, ce Prince n'avoit peut-être pas eû le tems ni les moyens de la mettre en meilleur état: Ainsi la facilité de la prendre en fir refoudre le projet. L'exécution en étant concertée avec le Prince d'Orange, celui-ci s'avança avec fes Troupes pour l'investir par l'un des côtés du Rhin, pendant que Monrecuculi en fit autant de l'autre avec fa Cavalerie; & que l'Infanterie, & le 1673. canon qu'il avoit embarqués defcendoient le long de la riviere. On ouvrit la tranchée le 8. de Novembre, il n'y avoit dans la Place que quinze ou seize cens hommes, les deux tiers des Troupes de Cologne, & le reste des François.

Le Maréchal d'Humieres que la conservation des Places du Bas Rhin, sembloit regarder particulierement comme le plus à portée, fit tenter à diverses reprises d'y jetter du secours; mais outre qu'il faloit que les Troupes qu'il envoyoit, partissent de loin, & fissent une longue marche dans un Pays occupé par les Alliez, il eût été difficile qu'un grand Corps eût fait ce trajet en cette saison ; de maniere qu'il n'y eut que St. Silveftre Major de Cavalerie, qui pût entrer dans la Ville avec environ cent chevaux; mais un si foible renfort ne fut pas capable d'empêcher que les Affiégez ne capitulassent six jours après avoir été attaqués.

Bonne se rendit aux Confédérez sans que le Vicomte de Turenne trop éloigné pût entreprendre de la secou

1673. rir, & il ne restoit pas au Maréchal d'Humieres affez de Troupes pour un semblable dessein : cette derniere victoire qui sembloit n'être dûë quà la fage conduite de Montecuculi, acquit beaucoup de réputation à ce Général & releva de beaucoup les efperances du Parti; ils virent avec plaisir que les Armées du Roi n'étant plus que fur la défensive, voient été contraintes d'abandonner la plus grande partie des Villes Conquises, & ne s'étoient reservées pour frontiere que Grave, Nimegue, & le Fort de Skink.

a

La suite des affaires fit affés connoître la sagesse de cette révolution, sans qu'il soit besoin de la justifier; il est aisé de voir que si l'on eût retiré de bonne heure les Troupes de tant de Garnisons, l'hyver y auroit formé des obstacles insurmontables, & l'union de toutes les forces des Alliez ne l'eût plus permis; ainsi la France se seroit trouvée hors d'état l'esté suivant, de mettre en campagne les grandes Armées qui luž furent neceffaires.

L'Infanterie que le Duc de Luxem

« PrécédentContinuer »