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ble, c'est qu'on trouve toûjours un Ecrivain impartial; il ne diffimule ni nos pertes, ni les fautes de nos Troupes. Il louë Montecuculi, le Prince d'Orange, le grand Condé, & M. de Turenne. Il n'y a ni fadeur ni bassesse dans ses loüanges; ce ne font que de petits traits qui semblent lui échaper; il loüe dignement ses Heros par les actions. Enfin il s'exprime avec tant d'impartialité, qu'on diroit que l'Auteur n'est que Citoyen de l'univers, & par consequent libre de tout préjugé national.

L'Auteur de ces Mémoires n'est point du nombre de ces Officiers qui font profession d'ignorance; à l'occasion des villes dont il parle, il cite differens traits historiques, qui y ont rapport; mais il évite en

même tems les digressions, & porte la delicatesse jusqu'à s'abstenir de celles qui en piquant la curiosité, lui feroient perdre de vûë son sujet. Outre cela, il donne le plan des Places, & fait le détail des Fortifications. Tout ce qui regarde la situation des Villes est exactement detaillé, & l'on peut dire qu'on ne trouve dans aucun autre livre, une description plus circonstanciée des pays dont il parle. Un autre avantage, c'est que l'Auteur représente toûjours fi delement les campemens, la disposition des troupes dans les Siéges, les divers mouve-mens des Armées. Il critique quelquefois certaines démarches, & fait voir les avantages qu'on auroit pû tirer, en prenant une route contraire; mais dans le temps même qu'il don

ne des preuves signalées de sa capacité dans l'Art Militaire, il employe les expressions les plus mesuréés; bien différent de ces guerriers qui épuifant l'admiration sur eux-mêmes, fonť toûjours prêts à blamer la conduite d'autrui. Iln'oublie pas de remarquer les expériences heureuses qu'on a faites pour la premiere fois, les différences notables des divers sieges d'une même Ville,& ce qui en a empêché ou facilité la prise. Les personnes habiles fentiront encore mieux les réflexions importantes de l'Auteur, sur le progrès de l'Art Militaire

Il s'est abstenu de faire des portraits de ses Heros; mais il les loüe ou les blâme par leurs actions; le Prince d'Orange, par exemple, se peint mieux

lui - même, qu'il ne pourroit être peint par un nouveau Tacite. Il est bien plus difficile de donner de la vie aux actions d'un homme, que de l'accabler de traits de fatire ou de loüange.

Ceux qui liront cette partie fi curieuse du Regne de LOUIS XIV. s'appercevront qu'étant remplie des plus beaux faits d'armes, elle ne pouvoit être bien écrite que par un homme versé dans lascience de la guerre. Car enfin comment traiter un pareil sujet, lorsqu'on est dénué de certaines connoissances? Si un Auteur qui ne seroit que bel esprit, se fut chargé de cette entreprise, toutes ces brillantes Campagnes auroient seulement été relevées par quelques faillies heureuses, & l'on auroit ignoré les progrès qu'on

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avoit fait dès ce tems-là dans l'Art Militaire. La valeur de la Nation Françoise n'auroit brillé que par quelques épigrammes & quelques antithéses ; au lieu que dans ces Memoires elle se dévelope successivement par les prodiges qu'elle ne cesse d'operer. Que sçai-je, on auroit peut-être fait joüer à LOUIS XIV. le rôle d'un Heros insensible à la gloire qui s'acquiert par les armes ? C'est ainsi que de nos jours un de nos plus beaux esprits a presque travesti en Aristote, le Heros du Nord, quoiqu'il ne fût qu'Alexandre; & en cela on peut dire qu'il a eu égard à ses talens: un Ecrivain entierement étranger dans la science des armes n'auroit pû bien représenter le Heros guerrier; il a donc fallu en faire un Philosophe.

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