Images de page
PDF
ePub

crite, on a, dans le cas dont il s'agit, substitué à cet acte un autre acte équivalent, c'est-à-dire une protestation * » (1).

[ocr errors]

Mais le Code préjuge, au contraire, la question dans le système qui exclut l'exception. En effet << on a arrêté que le protêt seroit fait dans un délai fatal **, et que par conséquent tous les cas, même ceux de la force majeure, seroient à la charge du porteur. Aucune exception n'a été admise « (2).

CC

La question est donc certainement décidée par la disposition qui, après le délai du protèt, refuse le recours contre les endosseurs précédens ***

» (3).

L'exception de force majeure nuiroit d'ailleurs à l'intérêt général du commerce; car, d'un côté, elle lui enlèveroit les avantages et l'utilité qu'il tire de la lettre de change; de l'autre, elle changeroit tellement la nature du contrat et la condition du tireur et des endosseurs, qu'on répugueroit à se servir de ce mode de négociation.

En effet, « comme dit Montesquieu, les exceptions naissent des exceptions, et les détails des

(1) M. Bégouen, Procès-verbal du 31 janvier 1807, no n° xv. - (2) M. Beugnot, ibid., no Iv. - (3) M. gouen, ibid., no vi.

* Voyez note 3 sur lart. 153. - ** Voyez l'art. 162 et note sur cet article. - *** Voyez art. 168.

/

détails: la lettre de change finiroit donc par perdre ses caractères essentiels, qui sont la célérité et la certitude du payementà l'époque convenue >> (1); << on verroit se multiplier les faux procès-verbaux d'événemens de force majeure, et il n'y auroit plus, par le fait, de déchéance dans le cas du protêt tardif » (2).

De là résulteroit que le tireur et les endosseurs demeureroient obligés au-delà de l'époque de l'échéance, terme fatal de leur engagement, (3).

Cependant leurs transactions, la société de commerce qu'ils ont formée, reposent sur la persuation qu'à cette époque ils seront libérés sans retour; et néanmoins, si la mort a empêché le porteur de la lettre de présenter change en temps utile, et qu'elle ait été retenue plusieurs années sous les scellés, il pourra arriver qu'elle n'apparoisse qu'après la dissolution de la société du tireur et des endosseurs, dans un temps où l'on ne saura plus ce que sont devenus plusieurs des sociétaires, enfin dans des circonstances où l'état des choses se trouvera entièrement changé. Que faire alors (4)?

(1) M. Beugnot, Procès-verbal du 31 janvier 1807, no IV. - (2) M. Bégouen, ibid., no v1. - (3) M. Regnaud (de Saint-Jean-d'Angely), ibid., n° xx. - (4) Ibid.

5o Système. Enfin on en vint à proposer un dernier système, qui concilioit les deux autres. Ils avoient le défaut d'être trop absolus : << une disposition exclusive eût été funeste >> (1).

Il ne faut pas que, dans une législation destinée, comme est celle du commerce, à tout régler ex æquo et bono, on trouve une disposition qui punisse invariablement le malheur >> (2).

A la vérité, « le porteur a son recours ouvert contre le tireur lorsque celui-ci ne prouve pas qu'il a fait la provision au moment de l'échéance « (3). Mais ce n'est pas assez : il est certain que, si le protêt eût été fait, il n'eût pas suffi au tireur de faire cette preuve; il auroit été indéfiniment responsable. Pourquoi sa condition changeroitelle, faute par le porteur d'avoir fait ce qu'il ne pouvoit pas faire >> (4)?

D'ailleurs, en principe général, il est difficile de décider que qui que ce soit répond de la force majeure, à moins qu'il ne se soit formellement soumis à la garantir, et encore l'a-t-on quelquefois relevé de cet engagement » (5).

Cependant il ne s'agit pas d'admettre formel

(1) Le Prince Archichancelier, Procès-verbal du 31 janvier 1807, no XIV. - (2) M. Defermon, ibid, ne VIII. (3) Ibid., no xv1. - (4) Ibid. - (5) Le Prince Archichancelier, ibid. , no xiv.

lement l'exception de la force majeure, (1); une disposition absolue pourroit entraîner tous les abus dont il a été parlé; il s'agit seulement « de trouver un moyen quelconque pour que le sort du porteur ne dépende pas d'une condition impossible » (2).

Ce moyen existe : ¶ qu'on permette aux juges de prononcer suivant les circonstances, (3), et que l'on ne gêne pas sa conscience (4) par une disposition absolue.

Que le juge, au surplus, soit difficile a ad. mettre l'exception de la force majeure (5): sans doute << on ne fera pas résulter l'impossibilité du simple retard d'un courrier, qu'aucun cas fortuit n'a arrêté dans sa route, mais d'événemens graves, tels qu'une épidémie, un siége, de ceux enfin qui interrompent toute communication, et les Tribunaux pèseront les circonstances >> (6).

Avec cette circonspection, et si l'on n'a égard qu'à l'hypothèse rare de l'impossibilité évidente, les inconvéniens dont on a parlé sont peu à crain

(1) M. Defermon, Procès-verbal du 31 janvier 1807, no XVI, - (2) Ibid. - (3) Ibid., no VIII. - (4) Le Prince Archichancelier, ibid., no xiv. - (5) M. Defermon, ibid., RO VIII. -(6) Le Prince Archichancelier, ibid., no XIV.

dre (1). « Au reste, aucun système n'est exempt d'inconvéniens >> (2).

Solution. On avait demandé que la question fût décidée d'une manière ou de l'autre (3), parce que, « sila loi se taisoit, elle laisseroit des doutes que le Conseil d'état seroit peut - être obligé de lever ensuite par un avis interprétatif (4).

Les membres du Conseil, qui tenoient pour le second système, et auquel il ne paroissoit pas douteux que la question se trouvoit décidée par l'article 168, observèrent, sur cette proposition, que « puisque la question s'étoit élevée, il importoit ou que le Conseil, se prouoncât de nouveau, parce que le procès-verbal de ses séances pourroit faire croire qu'il y a du doute » (5), ou << que la discussion ne fut pas consignée au procès-verbal >> (6).

On dit d'an autre côté, dans l'esprit du troisième système « qu'une disposition formelle étoit inutile, parce que les lois ne s'occupent que de ce qui arrive le plus communément » (7);

(1) Le Prince Archichancelier, Procès-verbal du 31 janvier 1807, no χιν. (2) M. Defermon, ibid., no VIII. - (3) M. Jaubert, ibid., n° v. (4) M. Regnaud (de Saint-Jean-d'Angely), ibid., n° xx. - (5) M. Bégouen, ibid., no VI. - (6) M. Merlin, ibid., no XVIII. - (7) Le Prince Archichancelier, ibid., no xiv.

« PrécédentContinuer »