Remise réelle. La remise réelle est celle qui éteint entièrement la dette. Comme elle est une pure libéralité, il en ré sulte 1o Qu'elle ne peut être faite que par des personnes capables de disposer de leur bien; 2o Qu'elle ne peut l'être qu'à des personnes capables de recevoir de celui qui la fait *. Elle s'effectue ou tacitement ou formellement: Tacitement, lorsque le créancier livre au débiteur l'acte sous seing privé qui faisoit l'unique titre de sa créance. Cette action du créancier fait preuve de la libération (1), parce qu'on doit nécessairement supposer que celui qui se dessaisit ainsi du titre sans lequel il ne peut agir contre le débiteur, tient la dette pour acquittée. La remise réelle s'opère formellement, lorsque le créancier renonce par un acte au droit d'exiger la dette. Cette convention peut se faire par lettres missives (2). (1) Code Napoléon, art. 1282. -(2) Pothier, Traité du Contrat de change, n° 176. * Sur les incapacités de donner et recevoir, voyez Code Napoléon, livre III, titre II, chap. II. TOME II. 22 L'effet naturel et nécessaire de la remise réelle faite à l'un des codébiteurs solidaires est de libérer tous les autres et de dégager aussi les cautions(1); car il ne peut plus y avoir ni cautions ni débiteurs là où il n'y a plus de dette. Ceci prouve que cette sorte de remise ne peut être faite qu'aux tireur, accepteur ou endosseurs, parce que ce n'est qu'alors qu'elle anéantit l'obligation principale. Si elle étaite fait au donneur d'aval, elle n'anéantiroit que l'obligation accessoire du cautionnement, et ne seroit plus qu'une remise de la garantie. Mais à qui demeurera la propriété de la somme remise ? Cette somme se trouve entre les mains de l'accepteur si la provision a été faite; Elle se trouve entre celles du tireur s'il n'y a pas provision. Dans ce dernier cas, il n'y a pas de difficulté; mais, dans le premier, le tireur pourra-t-il la reprendre? Je n'en fais pas de doute. Le remise réelle anéantit la dette au profit de tous, et non, comme la remise personnelle, au profit d'un seul. L'ac (1) Code Napoléon, art. 1285. cepteur ne peut donc pas prétendre qu'elle ne doit profiter qu'à lui, quand même la déclaration de remise lui auroit été adressée, et qu'il l'auroit acceptée au nom de tous ses coobligés. Les choses sont rétablies dans le même état que s'il n'y avoit jamais eu de dette. Or, l'accepteur étoit le mandataire du tireur; et le mandat n'ayant plus d'objet, la somme confiée au mandataire pour l'exécuter doit être rendue au mandant. La remise réelle n'a ses effets qu'autant qu'elle est véritable, libre et acceptée. Il faut qu'elle soit véritable, c'est-à-dire le résultat de la volonté du créancier. Si donc l'effet n'étoit tombé dans la main du débiteur que par suite d'ou vol ou du hasard, le créancier seroit fondé à soutenir que la dette n'est pas éteinte. C'est ce qu'explique parfaitement le Code Napoléon lorsqu'il ne donne qu'à la remise volontaire du titre l'effet de prouver la libération (1). La remise doit être libre et non forcée. Elle n'existeroit pas dans l'hypothèse ou l'accepteur, ayant fait faillite et obtenu des remises des trois quarts de ces créanciers, feroit déclarer le contrat commun avec le porteur de la lettre de change. (1) Code Napoléon, art. 1282. Cette circonstance n'empêcheroit pas le porteur d'exercer son recours pour la totalité de la dette contre le tireur et les endosseurs. Enfin la remise de la dette étant l'effet d'une convention, ne devient valable qu'au moment où elle est acceptée par l'un des codébiteurs solidaires. Elle demeureroit donc sans effet si le créancier ou le codébiteur venoit à décéder avant que l'effet renvoyé, ou la lettre qui contient la décharge, fût parvenu à ce dernier. La remise conventionnelle n'a pas d'effet à l'égard des tiers. L'accepteur, le tireur et les endosseurs seroient obligés de payer l'effet à celui auquel le créancier l'auroit négocié depuis la convention.Ilsauroient seulement leur recours contre ce créancier. Pothier, dont je rapporte ici l'opinion, n'applique cette règle qu'au cas où la remise a été faite par lettre missive, parce que, dit-il, la lettre peut avoir été antidatée (1). Je pense qu'il faut l'appliquer même au cas où la remise auroit été donnée par un acte, fût-il notarié, attendu que cet acte n'est pas connu du Public, et que les effets de commerce, qui sont une espèce de mon (1) Pothier, Traité du Contrat de change, 19 176. noie, doivent pouvoir être pris avec une entière sécurité. Remise personnelle. La remise personnelle est celle qui ne libère que la personne à laquelle elle a été accordée, et laisse subsister la dette à l'égard de tous les autres obligés, moins la part du débiteur libéré (1). Comme la remise réelle, elle n'a de force que quand elle est accordée librement et acceptée. Elle ne peut être faite que par acte ou par voie de correspondance, et non parla simple restitution de l'effet au débiteur; car cette restitution, mettant le créancier hors d'état d'exercer son action opère toujours la remise réelle. 2 La remise personnelle, faite avant l'échéance, n'est pas toujours une remise de la dette; elle n'a, en effet, ce caractère que quand elle est accordée au débiteur direct et actuel, et non quand elle ne tend qu'à libérer un des garans d'un recours qui peut-être ne s'ouvrirajainais. Dans ce dernier cas, il n'y a plus remise que de la garantie. Il faut donc distinguer : S'il y a acceptation, l'accepteur est l'obligé (1) Code Napoléon, art. 1285. |