La Bosnie a copié la loi autrichienne. En dehors des prescriptions du titre relatif aux rapports entre exploitants et ouvriers, nous constatons dans les pays que nous venons d'énumérer des institutions de prévoyance et des caisses de retraite légalement reconnues. La loi anglaise de 1872 interdit le travail souterrain aux femmes et aux filles : c'est un point sur lequel nous reviendrons, mais je relève ici, comme une disposition spéciale du régime minier anglais, que les salaires ne peuvent être payés dans les cabarets, et que si ces salaires dépendent du poids de la matière extraite, les ouvriers ont le droit de désigner un contrôleur du pesage. La Norvège prévoit la question de l'assistance dans les mines. Chaque exploitation minière constitue pour les ouvriers qui y sont employés un district des pauvres distinct du district communal; c'est l'assistance corporative, l'assistance à la charge de l'entreprise, ce qui implique que le travail doit faire vivre l'homme. J'ai tenu à relever ces détails pour montrer que la législation européenne s'achemine petit à petit et par des dispositions diverses vers la réglementation du travail dans les mines, non seulement au point de vue de la sécurité, mais aussi au point de vue de sa durée, de sa protection, de ses garanties humaines (1). C'est là un premier précédent pour la thèse que nous allons soutenir. Nous en trouvons un autre, un second, dans la conférence de Berlin. II. DE LA RÉGLEMENTATION A LA CONFÉRENCE DE BERLIN La Conférence de Berlin (1890) a donné une impulsion puissante à la législation du travail. Elle fait autorité; elle est un point de départ. (1) Voir pour ces dispositions diverses: Aguillon. Législation des mines. Il est donc utile de pouvoir s'appuyer sur elle, et c'est le cas pour la législation du travail des mines. L'article premier du programme envoyé aux adhérents de la Conférence portait ce qui suit : « Le travail sous terre doit-il être défendu aux enfants au-dessous d'un certain âge et aux personnes du sexe féminin ? » « La durée du travail dans les mines offrant des dangers particuliers pour la santé, doit-elle être soumise à des restrictions ? >>> A la première question la conférence répondit par le vœu unanime « qu'il soit interdit d'employer des femmes aux travaux souterrains et que la limite d'age d'admission des garçons soit progressivement élevée à 14 ans. » A la seconde question il fut répondu, d'une manière moins précise, par une déclaration qui est alambiquée et conditionnelle. << Il est désirable que - dans les cas où l'art des mines ne suffirait pas pour éloigner tous les dangers d'insalubrité provenant des conditions naturelles ou accidentelles de l'exploitation des mines ou de certains chantiers de mines la durée du travail soit restreinte. >>> Ce n'était point très affirmatif et cela donnait à entendre que la réglementation n'était pas commode et qu'en tout cas elle était subordonnée à des mesures de précaution et d'hygiène qui pouvaient en dispenser. Tout naturellement les compagnies houillères abondèrent dans ce sens et s'appliquèrent bien plus à rendre le travail hygiénique qu'à diminuer sa durée. Néanmoins les deux questions étaient posées solennellement devant l'opinion publique et devant la conscience des nations civilisées. Qu'a-t-on fait pour les résoudre ? TRAVAIL DES FEMMES ET DES ENFANTS DANS LES MINES est Nous pouvons dire d'une manière générale que le travail dans les mines le travail souterrain bien entendu assimilé par les législations européennes au travail de nuit, quand il s'agit des femmes et des enfants. Ce travail est fait dans les ténèbres, il est diurne par le temps extérieur qui le règle, il est nocturne par les conditions où il se fait rien de plus naturel par conséquent que de le régler, que de l'interdire comme le travail de nuit. C'est ce que nous trouvons dans les lois françaises, sur le travail des enfants, des filles mineures et des femmes. Art. 7, de la loi du 19 mai 1874. Aucun enfant ne peut être admis dans les travaux souterrains des mines, minières et carrières avant l'âge de douze ans révolus. Les filles et femmes ne peuvent être admises dans ces travaux. Les conditions spéciales du travail des enfants de 12 à 16 ans dans les galeries souterraines seront déterminées par des règlements d'administration publique. Le règlement d'administration publique prévu par cette loi parut le 12 mai 1875. II porte que la durée du travail effectif des enfants du sexe masculin de 13 à 16 ans dans les souterrains de mines, ne peut excéder 8 heures sur 24, coupées par un repos d'une heure au moins. Il y a aussi des restrictions pour la nature des travaux auxquels les enfants peuvent être occupés: pas d'abatage de charbons (c'est le travail des mineurs); seulement travaux accessoires et pas fatigants. La loi de 1874 a été remplacée par celle de 1892, laquelle, en ce qui concerne les travaux souterrains, porte la disposition suivante. Art. 9. Les filles et les femmes ne peuvent être admises dans les travaux souterrains des mines, minières et carrières. Des règlements d'administration publique détermineront les conditions spéciales du travail des enfants de 13 à 18 ans du sexe masculin dans les travaux souterrains ci-dessus visés. Dans les mines spécialement désignées par des règlements d'administration publique, comme exigeant en raison de leurs conditions naturelles une dérogation aux prescriptions du § 2 de l'article 4, ces règlements pourront permettre le travail des enfants à partir de 4 heures du matin et jusqu'à minuit, sous la condition expresse que les enfants ne soient pas assujettis à plus de 8 heures de travail effectif, ni à plus de 10 heures de présence dans la mine, par 24 heures. Le règlement d'administration publique du 3 mai 1893 porte ce qui suit : Art. 1. La durée effective du travail des enfants du sexe masculin au dessous de 16 ans, dans les galeries souterraines des mines, minières et carrières, ne peut excéder 8 heures par poste et par 24 heures. La durée effective du travail des jeunes ouvriers de 16 à 18 ans ne peut excéder 10 heures par jour ni 54 heures par semaine. Ne sont pas compris dans les durées précitées du travail effectif, le temps de la remonte et de la descente ni celui employé à aller au chantier et à en venir, ni les repos, dont la durée totale ne pourra être inférieure à une heure. Dans la loi anglaise de 1872, nous l'avons dit, le travail des mines est réglementé ou interdit pour les femmes et les filles, voici dans quelles conditions : 1o Le travail souterrain est interdit strictement. 2o Le travail au jour ne peut dépasser 10 heures par jour, ni 54 heures par semaine, ni se faire la nuit, ni le dimanche, ni le samedi après midi. Quant au travail des enfants il est interdit soit au fond, soit au jour avant l'âge de 10 ans; il est interdit au fond avant 12 ans, et, jusqu'à 16 ans, il ne peut dépasser 10 heures par jour ou 54 heures par semaine. La durée du travail au fond est comptée depuis le départ de la surface jusqu'au retour à la surface. Qu'on veuille bien ne pas oublier que les législations sur le travail des femmes et des enfants pour l'industrie dans son ensemble, s'appliquent aux mines. Mais les règlementations sont très différentes suivant les pays. Et j'éprouve quelque ennui à constater qu'en Belgique un certain nombre de femmes continuent d'être occupées aux travaux du fond dans les mines. Ces travaux ne sont en Belgique interdits qu'aux femmes mineures de 21 ans. Oh! je n'ignore point que si le nombre des femmes occupées à ces travaux était d'après une statistique qu'a publiée le Bulletin de l'Office du travail (no de janvier 1903) de 783 sur 5455 ouvriers mineurs, ce nombre va en diminuant. Les ingénieurs et directeurs montrent une réelle sollicitude pour remplacer progressivement les femmes par les hommes. Mais quand bien même ce nombre irait en décroissant jusqu'à se réduire à quelques femmes, à quelques filles, c'est toujours trop. En effet, il est plus désirable qu'on admette le principe de la suppression du travail souterrain des femmes que d'avoir seulement à enregistrer le fait de cette suppression. Dans le premier cas il y a un hommage légal rendu à une vérité, dans le second il y a une bonne action. Or les vérités sociales sont plus importantes que les actions individuelles. J'aime à croire que les catholiques belges qui ont la responsabilité du pouvoir sauront mettre un terme au travail des femmes dans les mines: d'autant plus que beaucoup de ces femmes sont occupées alternativement la nuit et le jour, et que la durée moyenne de leur travail est de 10 heures à 11 heures, ce qui est vraiment excessif. Ils étaient, avec nous, à Bâle, à la réunion de l'Association internationale pour la protection légale des travailleurs, au mois de septembre 1903. Leurs délégués se sont associés à la motion décidant qu'une conférence internationale serait provoquée dans le but d'interdire par voie de convention internationale tout travail de nuit des femmes dans l'industrie. Nous souhaitons vivement que le travail souterrain soit assimilé à ce travail nocturne, et comme il est plus facile |