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SCÈNE VI.

DORANTE, CLITON.

DORANTE.

Que dis-tu de l'histoire, et de mon artifice?
Le bon homme en tient-il? m'en suis-je bien tiré?
Quelque sot en ma place y seroit demeuré;
Il eût perdu le temps à gémir et se plaindre,
Et, malgré son amour, se fût laissé contraindre.
O l'utile secret de mentir à propos!

CLITON.

Quoi! ce que vous disiez n'est pas vrai?

DORANTE.

Pas deux mots:

Et tu ne viens d'ouïr qu'un trait de gentillesse
Pour conserver mon ame et mon cœur à Lucrèce.

CLITON.

Quoi! la montre, l'épée, avec le pistolet...

Industrie.

DORANTE.

CLITON.

Obligez, monsieur, votre valet.

Quand vous voudrez jouer de ces grands coups de maître,

Donnez-lui quelque signe à les pouvoir connoître;

Quoique bien averti, j'étois dans le panneau.

DORANTE.

Va, n'appréhende pas d'y tomber de nouveau;

Tu seras de mon cœur l'unique secrétaire,
Et de tous mes secrets le grand dépositaire.

CLITON.

Avec ces qualités j'ose bien espérer
Qu'assez malaisément je pourrai m'en parer.
Mais parlons de vos feux. Certes cette maîtresse...

SCÈNE VI I.

DORANTE, CLITON, SABINE.

SABINE.

Lisez ceci, monsieur.

DORANTE.

D'où vient-il?

SABINE.

De Lucrèce.

DORANTE, après avoir lu.

Dis-lui que j'y viendrai.

(Sabine rentre, et Dorante continue.)

Doute encore, Cliton,

A laquelle des deux appartient ce beau nom!
Lucrèce sent sa part des feux qu'elle fait naître,
Et me veut cette nuit parler par sa fenêtre.
Dis encor que c'est l'autre, ou que tu n'es qu'un sot.
Qu'auroit l'autre à m'écrire, à qui je n'ai dit mot?

CLITON.

Monsieur pour ce sujet n'ayons point de querelle;

Cette nuit, à la voix, vous saurez si c'est elle.

DORANTE.

Coule-toi là-dedans; et de quelqu'un des siens
Sache subtilement sa famille et ses biens.

SCÈNE VI I I.

DORANTE, LYCAS.

LYCAS, lui présentant un billet.

Monsieur...

DORANTE.

Autre billet!

(après avoir lu tout bas le billet.)

J'ignore quelle offense

Peut d'Alcippe avec moi rompre l'intelligence;
Mais n'importe, dis-lui que j'irai volontiers.

Je te suis.

SCÈNE IX.

DORANTE.

Hier au soir je revins de Poitiers, D'aujourd'hui seulement je produis mon visage, Et j'ai déja querelle, amour, et mariage. Pour un commencement ce n'est point mal trouvé. Vienne encore un procès, et je suis achevé.

Se charge qui voudra d'affaires plus pressantes, Plus en nombre à-la-fois, et plus embarrassantes, Je pardonne à qui mieux s'en pourra démêler. Mais allons voir celui qui m'ose quereller.

FIN DU SECOND ACTE.

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ACTE TROISIÈME.

SCÈNE I.

DORANTE, ALCIPPE, PHILISTE

PHILISTE.

Oui, vous faisiez tous deux en hommes de courage;
Et n'aviez l'un ni l'autre aucun désavantage.
Je rends graces au ciel de ce qu'il a permis
Que je sois survenu pour vous refaire amis;
Et que, la chose égale, ainsi je vous sépare :
Mon heur en est extrême, et l'aventure rare.

DORANTE.

L'aventure est encor bien plus rare pour moi,
Qui lui faisois raison sans avoir su de quoi.
Mais, Alcippe, à présent tirez-moi hors de peine.
Quel sujet aviez-vous de colère ou de haine?
Quelque mauvais rapport m'auroit-il pu noircir?
Dites; que devant lui je vous puisse éclaircir.

ALCIPPE.

Vous le savez assez.

DORANTE.

Plus je nie considère,

Moins je découvre en moi ce qui peut vous déplaire

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