CHAPITRE X. REPONSES AUX DEMANDES DE RENSEIGNEMENTS. C'est une mission fort délicate que d'avoir à transmettre des renseignements sur une maison de commerce. On ne doit, dans cette circonstance, rien omettre tant sur les avantages particuliers qui distinguent cette maison, que sur ce qui peut lui être défavorable ou modifier son crédit; il faut donc passer scrupuleusement en revue chacun des points qui constituent la bonne ou la mauvaise maison de commerce: ainsi, on parlera de l'importance des capitaux, de l'habilité du chef de la maison, de sa prudence en affaires et de sa moralité, des incidents particuliers susceptibles d'influer sur son crédit. Mais ceci ne s'applique qu'aux renseignements qu'il s'agit de donner d'une manière approfondie et complète. Dans les cas ordinaires il suffit de dire en peu de mots: Cette maison est de tout crédit; ou: elle est mauvaise; ou: elle passe pour bonne; ou : elle est faible. La situation où se trouve le commerçant à qui l'on demande des informations est des plus délicates: s'il est probe, il doit se dépouiller de tout esprit de rivalité ou de concurrence; se défendre de l'entraînement inspiré par l'intérêt ou l'amitié, et donner, selon sa conscience intime, et avec franchise et sincérité, les renseignements qui lui sont réclamés, sur tout lorsque c'est un ami qui l'interroge. Nous avons dit, dans le chapitre précédent, que certains commerçants demandent des renseignements sur une note séparée, qu'ils annexent à leur lettre; dans ce cas la réponse doit être faite de la même manière, c'est-à-dire sur une note particulière; par ce moyen, on prévient les conséquences fâcheuses que le hasard, l'imprudence ou l'indiscrétion pourraient entraîner. MODÈLES. Réponse favorable à une demande d'information. Monsieur, Je suis en possession de votre lettre du 10 courant par laquelle vous me demandez des informations sur la maison C..., de notre ville. C'est avec une véritable satisfaction que je viens vous répondre qu'elle jouit ici du meilleur crédit; M. C... est très-honnête, et est, à juste titre, bien considéré : je n'hésiterais pas à lui accorder un crédit de 25,000 fr. Je suis heureux, Monsieur, de vous rendre service, en vous rassurant complétement sur un homme dont vous n'aurez qu'à vous louer, j'en ai la conviction. Agréez l'expression de mes civilités empressées. Renseignements défavorables. Monsieur, La maison dont est question dans votre lettre du 10 courant est généralement estimée. Toutefois, je dois vous dire en toute sincérité, que depuis quelques temps son crédit paraît avoir souffert par suite de lourdes pertes qu'elle a essuyées dans une entreprise. Je pense donc qu'il serait prudent à vous de ne pas trop vous lancer; ceci est entre nous, et n'a rien qui puisse porter atteinte à la considération personnelle dont a toujours joui la personne dont j'ai l'honneur de vous entretenir. Recevez, je vous prie, l'expression de mes civilités empressées. Monsieur, Renseignements mauvais. Nous avons reçu votre honorée du 15 courant, par laquelle vous nous demandez des renseignements sur M. H...; nous vous répondons, en toute sincérité, que M. H..., est un faiseur de dupes, qu'il ne paie ordinairement qu'après protêts, les lettres de change tirées sur lui, que sa réputation est des plus mauvaises et qu'il ne jouit ici d'aucune considération. Nous vous engageons à ne pas donner suite à la demande qu'il vous a faite. Nous comptons sur votre entière discrétion, et nous vous prions d'agréer nos salutations bien cordiales. Renseignements évasifs. Monsieur, Je viens, en réponse à votre demande, vous transmettre les renseignements que vous me demandez sur la maison G..., de notre ville. II n'est pas toujours facile de connaître bien exactement la position d'une maison; cependant 11 m'est agréable de vous dire qu'elle jouit, sur notre place, de la confiance et de l'estime générales. Je crois qu'elle les mérite à tous égards, et qu'il n'y a aucun risque à traiter avec elle. Je vous ferai remarquer toutefois que je ne veux encourir aucune responsabilité, et que mon avis est purement officieux. Je vous renouvelle, Monsieur, l'assurance de mon estime toute particulière et vous prie d'agréer mes cordiales salutations. Renseignements sur plusieurs maisons. J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser le 15 courant, et je m'empresse de vous transmettre ce que vous me demandez. La maison A... jouit d'une réputation sans tache sous le double rapport de la probité et de l'exactitude; mais je dois en même temps à la vérité de vous dire qu'elle n'a pas une grande fortune. Ses moyens ne sont malheureusement pas au niveau de la moralité qu'on lui attribue généralement. La maison B... jouit d'un assez bon crédit et fait ses affaires avec aisance. Je lui crois une belle fortune en immeubles, mais sans pouvoir la préciser. Les sieurs D... et E... jouissent d'une modeste fortune, mais ils sont très-circonspects dans leurs dépenses. Je n'hésiterais pas à leur accorder un crédit de 5 à 6,000 francs. La maison P... est dirigée par deux jeunes gens qui ont déjà fait de mauvaises affaires; appuyés par leur famille qu'on dit fort respectable, ils ont formé un nouvel établissement qui paraît marcher assez bien. Le sieur G... ne jouit pas d'une réputation libre de toute censure; ce qu'on lui reproche porte sur un manque de délicatesse et de scrupule dans les affaires. Voilà, mon cher Monsieur, les renseignements que je puis vous transmettre; je suis d'ailleurs à vos ordres pour tout ce qui pourra vous être utile et agréable, et vous prie d'agréer mon affectueux dévouement. Renseignements sur une demoiselle de comptoir. En réponse à la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, et par laquelle vous me demandez des renseignements sur le compte de mademoiselle... que vous avez l'intention de prendre en qualité de demoiselle de comptoir, je vous apprendrai sans dissimulation, quoiqu'il m'en coûte de dirc la vérité à son préjudice, que cette demoiselle n'est pas d'une conduite irréprocha ble et que son défaut de bonne mœurs lui a fait perdre la place qu'elle occupait chez Monsieur (on désigne la mai son), je n'irai pas jusqu'à porter des doutes sur sa probité, mais enfin cette jeune personne ne jouit pas d'une bonne réputation. L'intérêt que je vous porte m'a déterminé à vous donner cet avertissement, ce que, d'ailleurs, je n'aurais fait pour personne; car, si je voyais cette demoiselle placée dans toute autre maison de commerce, je garderais le silence, puisqu'il est possible qu'elle revienne un jour à des principes d'honneur et de sagesse. Agréez, etc. Renseignements sur un commerçant qui a convoqué ses créanciers. Monsieur, J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 15 courant, par laquelle vous me priez de |