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DE LA

CORRESPONDANCE COMMERCIALE

CHAPITRE PREMIER

DES LETTRES.

Dès le berceau de la civilisation, l'homme a senti le besoin de transmettre ses désirs, ses craintes, ses espérances, sa tendresse. Il imagina les lettres pour être les interprètes de ses pensées et de toutes les émotions de son cœur. Une lettre, confidente de l'âme et des sentiments les plus intimes, adoucit les amertumes du cœur, rapproche les absents, et console ceux qui souffrent. Il n'est point de sentiments, point d'affaires, qui ne puissent fournir la matière d'une lettre. C'est donc avec raison qu'on a défini la lettre une conversation écrite destinée à remplir le vide de l'éloignement dans le commerce de la vie, à nourrir et à fortifier l'amitié, le premier de tous les besoins. Les lettres sont, en effet, un échange de sentiments et de pensées, où l'écriture remplace la parole. L'ensemble des lettres que l'on écrit et que l'on reçoit s'appelle Correspondance. C'est par la lecture des bons modèles; faite avec

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discernement, qu'on parvient à se former dans l'art du style épistolaire : c'est une source d'inspiration; et, quoi qu'en écrivant vous ne songiez à rien de ce que vous avezlu, votre composition se sentira de votre travail; son mérite ne sera pas celui d'un autre, mais sera un tout nouveau, créé un peu du mérite de chacun; de même que les parfums réunis en forment un seul qui ne ressemble à aucun.

L'art de la correspondance, qu'on est convenu d'appeler le style épistolaire, devrait entrer dans l'éducation de toutes les classes de la société; cependant, de nos jours encore, l'enseignement de cette science, que nul ne devrait ignorer, est négligé dans presque toutes les écoles.

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Les lettres sont soumises à plusieurs règles, savoir le style, les convenances, le cérémonial; chacune de ces règles fera l'objet d'un chapitre particulier.

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CHAPITRE II.

DU STYLE.

Le style est la manière particulière dont chacun. exprime sa pensée, soit en parlant, soit en écrivant. Ainsi, le style représente l'ensemble des idées qui naissent dans l'esprit.

Pour bien écrire, a dit Buffon, il faut posséder pleinement son sujet; il faut réfléchir assez pour voir clairement l'ordre de ses pensées et en former une suite, une chaîne continue, dont chaque point représente une idée.

Une des conditions essentielles à la formation du style, c'est l'arrangement des mots, qu'on appelle construction.

SI.

De la Construction.

La construction proprement dite est l'art d'arranger les mots en raison de la pensée qu'on veut rendre. De même que l'architecte, pour construire un édifice sur le plan qu'il s'est tracé, coordonne les pierres, les arrange, les taille en raison de la place que chacune d'elles doit occuper, de même l'écrivain arrange les mots pour construire l'édifice de sa pensée; car il en est des mots comme des pierres ; ils doivent être en harmonie entre eux, pour que de leur ensemble résulte un tout dont les parties se lient d'elles-mêmes entr'elles.

Il y a deux sortes de constructions, la construction grammaticale et la construction figurée.

Construction grammaticale. La construction grammaticale ou naturelle, est celle dans laquelle les mots sont placés dans l'ordre que semble indiquer la marche de l'esprit humain; or, la première chose pour exprimer sa pensée, c'est d'énoncer le sujet; la seconde de dire quelque chose de ce sujet; il en résulte qu'une pensée ne peut être complète qu'autant qu'elle est exprimée par un sujet et un verbe au moyen duquel on attribue à ce sujet une action, une possesion ou une manière d'être, qu'on appelle attribut.

Ainsi, dans l'ordre naturel, le sujet se présente toujours le premier avec ses modificatifs, ou déterminatifs; ensuite, le verbe, son complément direct, puis son complément indirect. Dans cette construction, tous les mots nécessaires à l'expression de la pensée y sont placés dans l'ordre de leurs rapports successifs.

Le discours se compose de propositions, de phrases et de périodes.

On appelle proposition l'expression d'une pensée ou l'énonciation d'un jugement; or, un jugement est cette opération de notre entendement par laquelle, après avoir examiné deux idées, nous trouvons qu'elles se conviennent entre elles ou qu'elles ne se conviennent pas. Si les idées se conviennent, le jugement est affirmatif. Exemples: L'avare est

malheureux; la vertu est estimable. Si les idées ne se conviennent pas, le jugement est négatif. Exemple: Le menteur n'est pas estimable.

De deux idées que l'on réunit pour le jugement, l'une est le sujet, car il ne peut y avoir un jugement sans un sujet à juger; et l'autre l'attribut, c'est-àdire l'idée que nous jugeons convenir au sujet ou ne pas lui convenir.

L'âme ne peut connaître la relation qu'elle trouve entre l'attribut et le sujet que par un mot qui indique l'action d'unir ou de séparer l'un et l'autre. Le mot qui exprime cette union est le verbe, qui est toujours le verbe être, soit distinct, comme dans cette phrase: La vertu est estimable; soit combiné avec le participe présent, comme dans celle-ci: Tu chantes, qui est pour Tu es chantant.

Aux trois parties logiques de la proposition, qui sont le sujet, le verbe et l'attribut, on en a ajouté une quatrième, qu'on a appelé complément, laquelle sert à compléter la pensée qui se rattache au sujet ou a l'attribut, comme dans cet exemple: La flatterie des courtisants fait souvent le malheur des rois.

On appelle raisonner, inférer ou tirer la vérité d'un jugement de sa comparaison avec d'autres jugements. Le raisonnement ne peut s'établir que par plusieurs jugements successifs qui en sont les éléments. Ainsi, de même que tout jugement suppose des idées, de même tout raisonnement suppose des jugements.

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