plutôt meilleure qu'en partant. Il est toujours aussi gai, aussi déterminé. Il me racontait que, lorsqu'on a annoncé au régiment qu'on revenait sur le théâtre de la guerre, il y avait eu un enthousiasme général! Tous les hommes jetaient leurs képis en l'air, avec des cris de joie! Braves soldats français, vous n'êtes pas dégénérés! Cela fait du bien à entendre, pour opposer aux désertions, aux défaites. J'ai voulu vérifier l'état des pauvres pieds qui avaient tant souffert. Il y a encore quelques croûtes; il s'est trempé un instant dans l'eau tiède; pour ne les pas amollir, je l'ai frotté avec de l'eau-de-vie, parce que l'on assure que cela fortifie beaucoup.. Nous lui avons donné une jolie chandelle pour obvier aux inconvénients des longues marches possibles, et nous étions tous heureux de le servir, croyant qu'il allait repartir, qu'il fallait se hâter! Nous le reconduisions en bande, comme nous avions fait avec son frère, et l'émotion de ce prompt passage m'avait un peu cassé les jambes, je dois te l'avouer, ma chère bonne Sœur; mais, en arrivant à la caserne, on nous a dit qu'il ne partait pas, et nous espérons qu'il y aura peut-être un campement ici. Nous revoilà en possession de notre joli militaire..., et nous allons pouvoir le soigner, le reposer à fond pendant ces jours de grâce. N'es-tu pas tentée, ma chérie, de venir le voir pendant ce temps; il a déjà commencé à l'employer, en se remettant au plus vite au piano. Je viens de l'y trouver, avec sa petite cousine, faute d'un accompagnateur plus habile, et son ardeur guerrière n'a nui en rien à son lyrisme, je t'assure. Je n'ai que le loisir de t'embrasser. TA SŒUR. Antonin à sa Mère. « Tours, « Chère Maman, novembre 1870. « Nous voilà rentrés à Tours, ce « qui n'est pas malheureux!... Enfin, « je vais atteindre mon but! Engagé « pour la durée de la guerre, uni« quement afin d'aller à l'ennemi, « on m'avait expédié d'abord aussi « loin de lui, que si je ne m'étais « enrôlé qu'afin de le fuir. Il est << singulier qu'il faille entrer dans « l'armée pour trouver un refuge << contre les Prussiens! Pour vous, « je sais que vous êtes en plein pays « envahi. Espérons qu'ils ne rava<< geront pas trop nos campagnes, « qu'ils ne se porteront pas du côté « d'Arrou. Je ne sais si vous avez <<< établi une ambulance à la Brune« tière, comme vous comptiez le << faire: cela pourrait vous être d'un << grand secours. Du reste, ma chère « Maman, je ne crois pas que vous « ayez rien à craindre personnelle<< ment, et quant aux jeunes gens, « il n'y a d'honneur et de plaisir « que devant l'Allemand. Je brûle « de marcher contre lui, et il est à « croire qu'un de ces quatre matins << mes vœux vont être exaucés. J'ai << reçu quelques nouvelles qui m'ont << fait bien plaisir : la nouvelle de la « défense de Châteaudun, fort hono<< rable pour notre pays, et de la |