>> M. Thouret ajoute: que ses commettans l'ont chargé de demander la conservation des assemblées secondaires ; que la Normandie en a retiré des avantages ; et que si l'on n'admettoit que cent vingt départemens, sans aucune sous-division, le ressort moyen auroit environ neuf cents communautés, ce qui formeroit certainement une trop grande étendue. >> Je réponds que nous ne pouvons pas écouter le mandat d'une province plutôt que celui de toute autre; que la Normandie retirera plus d'avantages de dix grandes assemblées que d'une foule de petits districts sans activité et sans pouvoir; et d'ailleurs, il est impossible que le ressort moyen d'un département soit, je ne dis pas de neuf cents communautés, mais de trois cents et deux cents. Chaque département, en les supposant égaux en population, ne sera que d'environ deux cents mille ames; or, c'est déjà beaucoup d'admettre que deux cents mille ames forment plus de deux cents communautés, un village étant compensé par l'autre, et les petites agrégations étant compensées par les villes. ➤ Je dis plus ! Il y aura au moins vingt cinq départemens sur cent vingt, qui n'auront qu'une grande ville et quelques villages. D'autres ne seront formés quc de vingt, que de trente communautés ; comment de pareilles assemblées auroient-elles besoin de neuf sous-divisions, dont chacune seroit divisée elle-même en neuf autres divisions? >> Que l'on place dans un département quelconque Marseille, Lyon, Bordeaux, Rouen, Rennes, Nantes ou Toulouse : comment parviendroit-on à former neuf communes parmi les petites agrégations qu'il faudroit joindre à chacune des villes? >> J'ajoute encore que si deux cents mille ames supposoient neuf cents communautés ou collectes, comme le dit M. Thouret, chaque communauté n'auroit donc que deux cent vingt-deux personnes, c'est-àdire, trente-sept citoyens actifs; encore faudroit - il supposer que les communautés fussent égales. Mais il est inutile de prouver que les sous - divisions en sept cent vingt communautés ne sont pas nécessaires, lorsque je puis démontrer qu'elles sont impossibles. >> Si les quatre-vingt départemens étoient Ra 1 égaux, ils auroient chacun trois cents mille ames; mais comme dans le plan du comité l'on n'a égard qu'au territoire pour fixer l'égalité respective des départemens, il est permis de supposer qu'il y aura telle de ces divisions où la population sera quatre fois moindre que dans une autre : un tel département n'auroit donc alors que soixantequinze mille ames. Si l'on divise maintenant cette population en neuf communes, et chaque commune en neuf cantons, on n'aura que cent cinquante citoyens actifs par canton, et treize cents quatre-vingt-huit par commune. >> Ce n'est point assez : il est encore possible de supposer qu'il y ait des communes égales en surface, et quatre fois moins peuplées que d'autres; elles n'auroient donc alors que trois cents quarante-sept citoyens actifs, et chaque canton n'en auroit que trente-six. >> M. Thouret ne s'est pas moins trompé, lorsqu'il a cru que la division actuelle de la Provence en vigueries pourroit autoriser la division par communes. En effet, si les assemblées des vigteries sont utiles en Provence, c'est qu'il n'y a dans ce moment qu'une grande assemblée admi nistrative pour huit cents mille ames. >>> J'ai dit, en second lieu, qu'une seule des vigueries de la Provence avoit en étendue environ le quart de sa valeur foncière: et de-là je conclus que ces districts ne seroient plus nécessaires si on établissoit quatre départenens principaux dans la Provence. Il me restoit à répondre à la dernière partie du systême de M. Thouret; il a prétendu que le plan que j'ai proposé étoit conforme à celui du comité, et qu'ainsi ces deux plans ne pouvoient pas être opposés l'un à l'autre. >> Veut-on parler d'une conformité dans les principes, j'avoue que j'admets plusieurs principes du comité de constitution; mais je ne reconnois point que les moyens proposés par les comités soient les meilleures réductions de ces mêmes principes, > Veut-on parler d'une conformité dans les moyens d'exécution: nos deux plans sont sous les yeux de l'assemblée; elle pourra décider que le plan du comité doit être préféré; mais elle ne décidera certainement point que deux plans aussi oppo sés soient les mêmes...、 >> Je finis cette trop longue discussion ; votre décision est attendue des provinces ; elle l'est même avec inquiétude. Jamais la situation des affaires publiques n'exigea plus de sagesse, plus de facilité dans les moyens d'exécution, et, j'ose le dire, plus de ces ménagemens heureux que sa prudence sait concilier avec les principes». Mirabeau avoit demandé un jour pour réfuter M. Thouret, M. Thouret en demanda un à son tour; ce dernier, en relevant dans sa réponse les principales objections faites au plan du comité, s'attacha (1) à en défendre les principes. Quoique nous ayons cru devoir rapporter jusqu'ici non-seulement les décrets auxquels Mirabeau a eu part, mais même ceux qui ont été rendus contre son opinion, le plan du comité sur la division du royaume, dont les bases ont été adoptées, a donné lieu à un si grand nombre d'articles, que nous nous bornons à renvoyer au décret général du 22 décembre 1789 sur la formation des assemblées représentatives et des corpa administratifs. (1) Dans la séance du 11 novembre 1789. |