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murs d'Athènes et ceux du Pirée, détruits par Lysandre, et fit dou à ses concitoyens de cinquante talents qu'il avait reçus de Pharnabaze.

V. Il arriva à Conon ce qui arrive à tous les hommes, de supporter le bonheur avec moins de sagesse que l'adversité. Se regardant comme le vengeur de sa patrie, après la défaite des Lacédémoniens, il forma des projets dont l'exécution était au-dessus de ses forces. Ces projets d'ailleurs n'avaient rien d'impie ni de blamable, puisqu'il préférait l'agrandissement de son pays aux intérêts du roi. Sa victoire de Cnide lui ayant • donné une grande influence non-seulement sur les barbares, mais sur tous les peuples de la Grèce, il travailla secrètement à faire rendre aux Athéniens l'Ionie et l'Éolie. Mais son dessein ne fut pas caché avec assez de soin. Tiribaze, qui commandait à Sardes, l'appela près de lui, sous prétexte de l'envoyer vers le roi pour une affaire importante. Conon, obéissant à ce message, fut, en arrivant, jeté dans une prison où il resta quelque temps. Plusieurs écrivains ont dit qu'il fut conduit à la cour. et qu'il y périt. Mais l'historien Dinon, celui qui me paraît le plus croyable sur les affaires de Perse, prétend qu'il s'enfuit. Il ignore si ce fut du consentement de Tiribaze ou à son insu.

quæ sub Lacedæmoniorum fuerat imperio, liberata est. Conon cum parte navium in patriam venit; muros dirutos a Lysandro, utrosque et Piræci et Athenarum, reficiendos curat, pecuniæque quinquaginta talenta, quæ a Pharnabazo acceperat, civibus suis donat.

V. Accidit huic, quod ceteris mortalibus, ut inconsideratior in secunda, quam in adversa, esset fortuna. Nam, classe Peloponnesiorum devicta, quum ultum se injurias patriæ putaret, plura concupivit, quam efficere potuit. Neque tamen ea non pia et probanda fuerunt, quod potius patriæ opes augeri, quam regis, maluit. Nam quum ma gnam auctoritatem sibi pugna illa navali, quam apud Cnidum fecerat, constituisset, non solum inter barbaros, sed etiam inter omnes Græciæ civitates, clam dare operam cœpit, ut Ioniam et Æoliam restitueret Atheniensibus. Id quum minus diligenter esset celatum, Tiribazus, qui Sardibus præerat, Cononem evocavit, simulans ad regem eum se mittere velle, magna de re. Hujus nuntio parens quum venisset, in vincula conjectus est: in quibus aliquandiu fuit. Inde nonnulli eum ad regem abductum, ibique periisse, scriptum reliquerunt. Contra ea Dinon historicus, cui nos plurimum de Persicis rebus credimus, effugisse scripsit: illud addubitat, utrum Tiribazo sciente, an imprudente, sit factum.

DION.

SOMMAIRE.

CHAP. I. Dion, allié et confident des deux Denys. - II. Disciple et ami de Platon. III. Il obtient le retour de Platon; il s'attire l'inimitié de Denys le jeune; Philistus traverse ses projets. IV. Il est déporté à Corinthe; Denys donne un autre époux à sa femme, et fait corrompre les mœurs de son fils. - V. Maître de Syracuse, il réduit le tyran à recevoir ses conditions. VI. Son affliction en apprenant la mort de son fils. Le meurtre d'Héraclide détruit sa popularité. VII. Il gagne les soldats par ses largesses, perd la faveur des grands, et reçoit le nom odieux de tyran. - VIII. 11 tombe dans les piéges de Callicrate. IX. Il est assassiné dans sa maison un jour de fète. - X. Après sa mort, tumulte, massacre; il est regretté.

I. Dion, fils d'Hipparinus, naquit à Syracuse, et se trouva, pour ainsi dire, complice de la tyrannie des deux Denys. Le premier Denys épousa Aristomaque, sœur de Dion, et en eut deux fils, Hipparinus et Nysée, et deux filles, Sophrosyne et Arété. Il maria la première à Denys son fils, auquel il laissa son royaume; et la seconde à Dion. A cette haute alliance, à la noblesse de ses ancêtres, Dion joignait d'autres avantages qu'il tenait de la nature; un génie souple, un caractère affable, un esprit facile et capable des plus hautes études, et ce qui n'est pas moins avantageux, un extérieur plein de dignité. Il avait en outre dé grandes richesses que son père lui avait laissées, et qui s'étaient accrues des libéralités du tyran. Il était très-cher à Denys à cause de ses mœurs et de

DION.

ARGUMENTUM.

CAP. 1. Dionysiorum affinis et intimus Dion. - II. Platonis discipulus et amicus. - III. Platonis reditum obtinet; Minorem Dionysium offendit; et Philistus adversatur. - IV. Corinthum deportatur. Uxor traditur alii; filius corrumpitur. V Syracusarum potitur; tyrannum ad pactiones adigit. - VI. Morte filii tristatur. Heraclidis cæde populum a se alienat. - VII. Largitionibus militem conciliat, amittit optimates, tyrannus non ferendus audit. - VIII. Callicratis insidiis decipitur. IX. Domi suæ die festo occiditur. X. Post ejus necem fit tumultus et cædes. Desiderium mortui sequitur.

I. Dion, Hipparini filius, Syracusanus, nobili genere natus, utraque implicatus tyrannide Dionysiorum. Namque ille superior Aristomachen, sororem Dionis, habuit in matrimonio: ex qua duos filios, Hipparinum et Nysæum, procreavit; totidemqué filias, nomine Sophrosynen et Areten; quarum priorem Dionysio filio, eidem, cui regnum reliquit, nuptum dedit; alteram, Areten, Dioni. Dion autem, præter nobilem propinquitatem, generosamque majorum famam, multa alia ab natura habuit bona: in his ingenium docile, come, aptum ad artes optimas; magnam corporis dignitatem, quæ non minimum commendatur; magnas præterea divitias a patre relictas, quas ipse tyranni muneribus auxerat. Erat intimus Dionysio priori, neque minus propter mores, quam affinitatem.

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leur parenté. Pour lui, quoiqu'il condamnat la cruauté de Denys, l'intérêt de sa propre famille et cette qualité de parent qui les unissait l'un à l'autre lui faisaient prendre soin de sa conservation. Il était consulté dans toutes les affaires difficiles, et le tyran suivait volontiers ses avis, lorsque la passion ne l'égarait pas. Chargé des ambassades les plus importantes, il couvrait par son exactitude à les remplir, par sa probité dans les négociations et l'affabilité de son caractère, ce qu'il y avait d'odieux dans ce nom de tyran. Lorsqu'il fut envoyé par Denys à Carthage, il inspira aux Carthaginois plus d'admiration et d'estime qu'ils n'en avaient jamais eu pour un Grec.

II. Denys ne l'ignorait pas, et sentait lui-même combien le mérite de Dion donnait d'éclat à sa couronne. Aussi l'aimait-il comme il n'aima jamais personne: il avait pour lui toute la tendresse d'un père. La nouvelle s'étant répandue en Sicile que Platon était arrivé à Tarente, il ne put refuser au jeune Dion, qui brûlait du désir de l'entendre,

sur le partage du royaume, parce qu'il lui semblait juste que les enfants nés du mariage de sa sœur avec Denys eussent une portion de l'héritage paternel. Ces paroles ne demeurèrent pas secrètes: elles furent rapportées par les médecins au fils du tyran, qui en conçut de vives alarmes. Afin d'empêcher toute conférence entre Dion et son père, il força les médecins de donner au malade un breuvage assoupissant. Le vieillard parut alors tomber dans un profond sommeil, et mourut.

III. Tel fut le principe de la haine qui subsista entre Dion et Denys, et que plusieurs circonstances augmentèrent dans la suite. Elle fut déguisée d'abord sous les apparences de l'amitié ; et Dion ayant prié Denys de faire revenir Platon à Syracuse, afin de profiter de ses avis, celui-ci, qui voulait imiter son père en quelque chose, se rendit aux instances de Dion. Il rappela en même temps l'historien Philistus, homme non moins dévoué à la tyrannie qu'au tyran. J'ai parlé de lui avec détail dans mon livre sur les historiens. Platon ac

la permission de le faire venir. D'après ses ordres, ❘ quit une telle influence sur Denys par sa sagesse

Platon fut conduit en grande pompe à Syracuse, et Dion conçut pour lui tant d'estime et d'admiration, qu'il s'abandonna entièrement à ses conseils. De son côté Platon ne fut pas moins charmé de Dion, car il voulut bien céder à ses prières et revenir à Syracuse, malgré l'outrage qu'il avait reçu du tyran, Denys l'ayant fait vendre comme esclave lorsqu'il retournait à Athènes. Surces entrefaites, Denys tomba malade; et comme le mal paraissait grave, Dion interrogea les médecins, les priant, si le danger venait à augmenter, de ne ❘ pas le lui cacher. Il voulait, disait-il, l'entretenir |

Namque, etsi Dionysii crudelitas ipsi displicebat, tamen salvum esse propter necessitudinem, magis etiam suorum cansa, studebat. Aderat in magnis rebus; ejusque consilio multum movebatur tyrannus, nisi qua in re major ipsius capiditas intercesserat. Legationes vero, quæ essent illasiriores, per Dionem administrabantur: quas quidem ille diligenter obeundo, fideliter administrando, crudelissimum nomen tyranni sua humanitate tegebat. Hunc, a Diomysio missum, Carthaginienses suspexerunt, ut neminem un quam græca lingua loquentem magis sint admirati.

II. Neque vero hæc Dionysium fugiebant: nam quanto esset sibi ornamento, sentiebat. Quo fiebat, ut uni huic maxime indulgeret, neque eum secus diligeret ac filium. Qui quidem, quum Platonem Tarentum venisse fama in Siciliam esset perlata, adolescenti negare non potuit, quin eam arcesseret, quum Dion ejus audiendi cupiditate flagraret. Dedit ergo huic veniam, magnaque eum ambitione Syracusas perduxit. Quem Dion adeo admiratus est atque adamavit, ut se totum ci traderet. Neque vero minus Plato delectatus est Dione. Itaque, quum a Dionysio ty. ranno crudeliter violatus esset, quippe quem venundari jussisset, tamen eodem rediit, ejusdem Dionis precibus adductus. Interion in morbum incidit Dionysius. Quo quum graviter conflictaretur, quæsivit a medicis Dion quemadmodum se haberet? simulque ab his petiit, « si forte majori

et son éloquence, qu'il lui persuada d'abdiquer la tyrannie et de rendre la liberté aux Syracusains; mais Philistus l'ayant détourné de cette résolution, il n'en devint que plus cruel.

IV. Les talents de Dion, son crédit, l'amour de ses concitoyens, le mettaient dans une position très-supérieure à Denys, qui en fut effrayé. Il craignit, en le gardant près de sa personne, de lui fournir l'occasion de le détrôner. Il lui donna une trirème pour le transporter à Corinthe, lui représentant que leurs défiances réciproques exigeaient cette séparation; que tant qu'ils reste

esset periculo, ut sibi faterentur; nam velle se cum eo colloqui de partiendo regno; quod sororis suæ filios, ex illo natos, partem regni putabat debere habere. » Id medici non tacuerunt, et ad Dionysium filium sermonem retulerunt. Quo ille commotus, ne agendi cum eo esset Dioni potestas, patri soporem medicos dare coegit. Hoc aæger sumpto, ut somno sopitus, diem obiit supremum.

III. Tale initium fuit Dionis et Dionysii simultatis, eaque multis rebus aucta est: sed tamen primis temporibus aliquandiu simulata inter eos amicitia mansit; quumque Dion non desisteret obsecrare Dionysium, ut Platonem Athenis arcesseret, et ejus consiliis uteretur, ille, qui in aliqua re vellet patrem imitari, morem ei gessit, eodemque tempore Philistum historicum Syracusas reduxit, homi. nem amicum non magis tyranno, quam tyrannidi. Sed de hoc in meo libro plura sunt exposita, qui de historicis conscriptus est. Plato autem tantum apud Dionysium auctoritate potuit, valuitque eloquentia, ut ei persuaserit tyrannidis facere finem, libertatemque reddere Syracusanis. A qua voluntate Philisti consilio deterritus, aliquanto crudelior esse cepit.

IV. Qui quidem quum a Dione se superari videret ingenio, auctoritate, amore populi, verens, ne si eum secum haberet, aliquam occasionem sui daret opprimendi, navem ei triremem dedit, qua Corinthum deveheretur, ostendens

raient ensemble, ils auraient à craindre des embûches réciproques. Mais voyant l'indignation qu'inspirait sa conduite, il fit embarquer tous les objets qui appartenaient à Dion et qui pouvaient être transportés, et les lui envoya. Il voulait faire croire que c'était bien moins l'inimitié qui le dirigeait, que le soin de sa sûreté personnelle. Mais lorsqu'il eut appris que Dion levait des troupes et se préparait à lui faire la guerre, il maria sa femme Arété à un autre, et fit élever son fils de manière à le précipiter dans les plus honteuses passions, par l'indulgence calculée dont on usait envers lui. Il n'avait pas encore atteint l'âge de puberté qu'on lui amenait des courtisanes; on le gorgeait de vin et d'aliments, sans lui laisser un moment de relâche. Dion, à son retour, eut beau l'entourer de surveillance pour réformer ses habitudes; ce jeune homme ne put supporter ce nouveau genre de vie. Il se jeta du haut de sa maison, et mourut de sa chute. Mais je reviens où j'en étais.

V. A peine Dion était-il arrivé à Corinthe, qu'Héraclide, également banni par Denys, dont il avait commandé la cavalerie, vint se réfugier dans cette ville. Ils firent ensemble leurs préparatifs de guerre. Mais leurs progrès étaient lents; la tyrannie de Denys était trop ancienne et semblait trop bien affermie, pour qu'ils trouvassent beaucoup de gens prêts à partager leurs périls. Mais Dion comptait moins sur ses forces que sur la haine qu'on portait au tyran: il eut le courage de partir avec deux vaisseaux seulement, pour attaquer un pouvoir qui comptait déjà cinquante ans d'existence, et qui s'appuyait sur une flotte de cinq cents galères, dix mille hommes de ca

se id utriusque facere causa, ne, quum inter se timerent, alteruter alterum præoccuparet. Id quum factum multi indignarentur, magnæque esset invidiæ tyranno, Dionysius omnia quæ moveri poterant Dionis in naves imposuit, ad eumque misit. Sic enim existimari volebat, id se non odio hominis, sed suæ salutis fecisse causa. Postea vero quam audivit, eum in Peloponneso manum comparare, sibique bellum facere conari, Areten, Dionis uxorem, alii nuptum dedit, filiumque ejus sic educari jussit, ut indulgendo turpissimis imbueretur cupiditatibus. Nam puero, priusquam pubes esset, scorta adducebantur; vino epulisque obruebatur, neque ullum tempus sobrio relinquebatur. Is usque eo vitæ statum commutatum ferre non potuit, postquam in patriam rediit pater (namque appositi erant custodes, qui eum a pristino victu deducerent), ut se de superiore parte ædium dejecerit, atque ita interierit. Sed illuc revertor.

V. Postquam Corinthum pervenit Dion, et eodem perfugit Heraclides, ab eodem expulsus Dionysio, qui præfectus fuerat equitum, omni ratione bellum comparare cœperunt. Sed non multum proficiebant, quod multorum annorum tyrannis magnarum opum putabatur. Quam ob causam pauci ad societatem periculi perducebantur. Sed Dion, fretus non tam suis copiis, quam odio tyranni, maximo animo, duabus onerariis navibus, quinquaginta annorum imperium, munitum quingentis longis navibus,

valerie et cent mille fantassins; et ce qui étonna toutes les nations, il l'abattit si aisément, qu'il entra dans Syracuse le troisième jour après son débarquement. D'où l'on peut conclure que sans l'amour des peuples il n'y a point de pouvoir assuré. Denys était absent. Il attendait sa flotte en Italie, persuadé qu'aucun de ses ennemis ne viendrait l'attaquer sans avoir de grandes forces. L'événement fit voir qu'il s'abusait; car c'est avec l'aide de ses propres sujets que Dion le renversa et confondit son orgueil. Toute la partie de la Sicile qui lui avait été soumise reconnut l'autorité de Dion, lequel s'empara aussi de Syracuse, à l'exception de la citadelle et de l'île touchant à la ville. Il réduisit enfin le tyran à recevoir la paix aux conditions suivantes : à savoir que Dion posséderait la Sicile, Denys l'Italie; Apollocrate, son plus intime confident, la ville de Syracuse.

VI. Tant de prospérités et de succès inattendus furent suivis d'un changement soudain. La fortune, dans son inconstance, voulut renverser celui qu'elle avait élevé si haut. Elle le frappa d'abord dans la personne de ce fils dont j'ai déjà parlé. Dion avait repris sa femme, qui avait été livrée à un autre; il cherchait à retirer son fils des honteuses débauches où il était plongé, quand la mort de ce jeune homme vint lui porter le coup le plus sensible. Puis vinrent ses querelles avec Héraclide, qui, ne voulant pas lui céder le premier rang, se mit à la tête d'un parti. Il n'avait pas moins de crédit que Dion auprès des grands. Ceuxci l'avaient mis à la tête de la flotte. Dion commandait l'armée de terre, et ne vit point sans dépit ce partage de l'autorité. On l'entendit citer ce vers du second livre d'Homère, où il est dit

decem equitum, centum peditum millibus, profectus oppugnatum, quod omnibus gentibus admirabile est visum, adeo facile perculit, ut post diem tertium, quam Siciliam attigerat, Syracusas introierit. Ex quo intelligi potest, nullum esse imperium tutum, nisi benevolentia munitum. Eo tempore aberat Dionysius, et in Italia classem opperie batur, adversariorum ratus neminem sine magnis copiis ad se venturum. Quæ res eum fefellit : nam Dion iis ipsis, qui sub adversarii fuerant potestate, regios spiritus repres sit, totiusque ejus partis Siciliæ potitus est, quæ sub potestate Dionysii fuerat; parique modo urbis Syracusarum, præter arcem, et insulam adjunctam oppido; eoque rem perduxit, ut talibus pactionibus pacem tyrannus facere vellet: Siciliam Dion obtineret, Italiam Dionysius, Syracusas Apollocrates, cui maximam fidem uni habebat Dionysius.

VI. Has tam prosperas, tamque inopinatas res consecuta est subita commutatio, quod fortuna, sua mobilitate, quem paulo ante extulerat, demergere est adorta. Primum in filio, de quo commemoravi supra, suam vim exercuit. Nam quum uxorem reduxisset, quæ alii fuerat tradita, filiumque vellet revocare ad virtutem a perdita luxuria accepit gravissimum parens vulnus morte filii. Deinde orta dissensio est inter eum et Heraclidem; qui quidem, Dioni principatum non concedens, factionem comparavit. Neque is minus valebat apud optimates, quorum consensu præ. erat classi, quum Dion exercitum pedestrem teneret. Non

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qu'un État ne. peut être bien gouverné par | est de charger quelqu'un des siens de se déclarer

plusieurs maîtres. Ce mot excita contre lui une haine violente, car il semblait trahir l'ambition du pouvoir absolu. Mais, au lieu de désarmer la haine par sa modération, il voulut l'étouffer par des rigueurs; et lorsque Héraclide vint à Syracuse, il le fit assassiner.

VII. Cet attentat jeta l'effroi dans tous les esprits: personne, après le meurtre d'Héraclide, ne se crut en sûreté. Dion, débarrassé de son rival, ne crut pas devoir ménager ceux dont l'opinion lui était contraire, et distribua leurs biens à ses soldats. Mais quand tout fut partagé, les dépenses excessives qui serenouvelèrent chaque jour épuisèrent son trésor, et ne lui laissèrent d'autre ressource que de dépouiller ses amis; c'était le moyen d'aliéner les grands, en voulant gagner les soldats. Les embarras de sa position l'accablaient. Il n'avait jamais éprouvé la haine du peuple, et ne pouvait s'accoutumer à ce changement d'opinion de la part de ceux qui naguère l'élevaient au ciel. Le peuple, de son côté, voyant qu'il était devenu désagréable aux soldats, s'écriait qu'on ne pouvait plus supporter sa tyrannie.

VIII. Dion redoutait les suites de cette animosité générale, et ne savait comment la calmer, lorsqu'un Athénien, nommé Callicrate, qui l'avait accompagné du Péloponnèse en Sicile, vint le trouver. C'était un homme sans honneur et sans foi, plein de ruse et d'artifice: il représente à Dion le danger où il est, à cause de l'indignation du peuple et de la haine des soldats, ajoutant que le seul parti à prendre pour conjurer le péril

contre lui comme s'il était son ennemi. Que s'il trouve un homme capable de jouer ce rôle, il pourra facilement, parson moyen, connaître les dispositions de chacun, et se défaire des mécontents, lesquels ne manqueront pas de découvrir leurs projets à qui semblera en être complice. Dion approuve ce conseil, et Callicrate se charge du rôle convenu. Fort de l'imprudence de Dion, il cherche des conjurés pour le tuer, se rend chez ses ennemis, et organise la conspiration; mais le secret, confié à beaucoup de monde, est ébruité. Aristomaque, sœur de Dion, et son épouse Arété en sont instruites, et, dans leur frayeur, courent le prévenir; mais Dion refuse de croire à la pertidie de Callicrate, et leur dit qu'il n'agit que par son ❘ ordre; ce qui ne les empêche pas de conduire Callicrate dans le temple de Proserpine, et de lui faire jurer que Dion n'a rien à craindre de lui. Ce serment, loin de le retenir, lui fait håter davantage l'exécution de son dessein, de peur d'être découvert avant que tout ne fût prêt.

IX. Profitant donc d'un jour de fête où Dion se tenait chez lui éloigné de la foule, et reposait dans un appartement supérieur, il distribue à ses complices les principaux postes de la ville, investit la demeure de Dion, place aux portes des gens affidés, avec ordre de ne pas s'en écarter, garnit de soldats une galère et en donne le commandement à Philostrate, son frère, lui ordonnant de la faire manœuvrer dans le port comme pourexercer les rameurs, mais dans le fait pour se ménager une retraite, en cas de revers. Enfin il choisit parmi les siens quelques jeunes

sine ulla religione ac fide, adit ad Dionem, et ait eum in magno periculo esse propter offensionem populi et odium militum; quod nullo modo evitare posset, nisi alicui suorum negotium daret, qui se simularet illi inimicum; quem si invenisset idoneum, facile omnium animos co

tulit hoc animo æquo Dion, et versum illum Home-, ri retulit ex secunda rhapsodia, in quo hæc sententia est: ■ Non posse bene geri rempublicam multorum imperiis. >>> Quod dictum magna invidia consecuta est. Namque aperuisse videbatur, se omnia in sua potestate esse velle. Hanc ille non lenire obsequio, sed acerbitate opprimere | gniturum, adversariosque sublaturum, quod inimici ejus

studuit, Heraclidemque, quum Syracusas venisset, interfi ciendum curavit.

VII. Quod factum omnibus maximum timorem injecit: nemo enim, illo interfecto, se tutum putabat. Ille autem, adversario remoto, licentius eorum bona, quos sciebat adversus se sensisse, militibus dispertivit. Quibus divisis, quum quotidiani maximi fierent sumptus, celeriter pecunia deesse cœpit; neque, quo manus porrigeret, suppetebat, nisi in amicorum possessiones. Id hujusmodi erat, ut, quum milites reconciliasset, amitteret optimates. Quarum rerum cura frangebatur, et, insuetus male audiendi, non æquo animo ferebat, de se ab iis male existimari, quorum paulo ante in cælum fuerat elatus laudibus. Vulgus autem, offensa in eum militum voluntate, liberius loquebatur, et tyrannum non ferendum dictita

bat.

VIII. Hæc ille intuens, quum, quemadmodum sedaret, nesciret, et quorsum evaderent, timeret, Callicrates quidam, civis Atheniensis, qui simul cum eo ex Peloponneso in Siciliam venerat, homo et callidus et ad fraudem acutus

dissidenti suos sensus aperturi forent. Tali consilio probato, excipit has partes ipse Callicrates, et se armat imprudentia Dionis: ad eum interficiendum socios conquirit: adversarios ejus convenit, conjurationem confirmat. Res, multis consciis quæ gereretur, elata defertur ad Aristomachen, sororem Dionis, uxoremque Areten. Illæ, timore perterritæ, conveniunt, cujus de periculo timebant. At ille negat a Callicrate fieri sibi insidias, sed illa, quæ agerentur, fieri præcepto suo. Mulieres nihilo secius Callicratem in ædem Proserpinæ deducunt, ac jurare cogunt, nihil ab illo periculi fore Dioni. Ille hac religione non modo ab incepto non deterritus, sed ad maturandum concitatus est, verens, ne prius consilium suum aperiretur, quam conata perfecisset.

IX. Hac mente, proximo die festo, quum a conventu remotum se Dion domi teneret, atque in conclavi edito recubuisset, consciis loca munitiora oppidi tradit, domum custodibus sepsit, a foribus qui non discedant, certos præficit; navem triremem armatis ornat, Philostratoque, fratri suo, tradit, eamque in portu agitari jubet, ut si exer

Zacynthiens, vigoureux et résolus, et les charge de se présenter sans armes chez Dion, sous prétexte de lui faire leur cour. Comme ils étaient connus, on les introduisit; mais, à peine étaientils entrés, qu'ils ferment les portes avec soin, se précipitent sur lui, le saisissent et le garottent. Le bruit s'entendit au dehors. On put juger en cette occasion de la haine qu'inspire la puissance d'un seul, ainsi que nous l'avons dit plus haut, et du triste sort des souverains qui aiment mieux se faire craindre que se faire aimer. Pour peu que les gardes de Dion eussent été bien disposés, ils auraient pu le sauver en brisant sa porte; car les conjurés n'ayant point d'armes, en demandaient une au dehors, et ne faisaient que le tenir vivant. Personne ne venant à son secours, le Syracusain Lycon passa par la fenêtre une épée, avec laquelle on le tua.

X. Après ce meurtre, le peuple se précipita dans la chambre pour voir ce qui s'était passé, et quelques citoyens furent massacrés par méprise. Car le bruit s'étant répandu que Dion venait d'être assassiné, ceux qui n'approuvaient pas ce crime accoururent en foule, et, trompés par leurs soupçons, ils tuèrent comme coupables des gens innocents qui se trouvaient là. Dès que la mort de Dion fut connue, il s'opéra dans les esprits une singulière révolution. Ce peuple qui le traitait de tyran pendant sa vie, se mit à le pleurer après sa mort, en lui prodiguant les noms de sauveur de la patrie, de destructeur des tyrans. La compassion avait si vite succédé à la haine, qu'ils auraient voulu, s'il eût été possible, le rappeler à la vie au prix de leur sang. On lui éleva, aux

frais du trésor, un mausolée dans le lieu le plus fréquenté de la ville. Il fut tué à l'âge d'environ cinquante-cinq ans, la quatrième année après son retour du Péloponnèse en Sicile.

IPHICRATE.

SOMMAIRE.

CHAP. I. Iphicrate, célèbre par ses talents militaires. II. Il fait la guerre aux Thraces; met en fuite les Lacé. démoniens; commande les troupes soldées des Perses; arrête les progrès d'Épaminondas. III. Caractère et qualités d'Iphicrate: son fils lui reproche d'avoir pris une épouse étrangère.

I. Iphicrate doit sa réputation à ses talents militaires plutôt qu'à ses exploits comme soldat. Il était si habile dans l'art de la guerre qu'on l'égalait aux plus illustres capitaines de son temps, et qu'on ne lui en préférait aucun parmi ceux des temps passés. Il passa presque toute sa vie dans les camps, n'ayant jamais essuyé de revers par sa faute, et devant à son habileté tous ses succès. L'art militaire lui doit même beaucoup d'améliorations. C'est lui qui changea les armes de l'infanterie. Avant lui on se servait d'énormes boucliers, et au contraire de javelines très-courtes et de petites épées. Iphicrate substitua la pelle à la parme, pour rendre les fantassins plus légers dans les manœuvres et dans les attaques. C'est ce qui les fit appeler peltates dans la suite. Il doubla la mesure de la pique et allongea les épées. Il supprima aussi les cuirasses de fer, et les remplaça par celles de lin. Par là il

cere remiges vellet; cogitans, si forte consiliis obstitisset | monumento donatus est. Diem obiit circiter annos quinqua

fortuna, ut haberet, quo fugeret ad salutem. Suorum autem e numero Zacynthios adolescentes quosdam eligit, quum audacissimos, tum viribus maximis, hisque dat negotium, ut ad Dionem eant inermes, sic uti conveniendi ejus gratia viderentur venire. Hi propter notitiam sunt intromissi. At illi, ut limen ejus intrarunt, foribus obseratis, in lecto cubantem invadunt, colligant: fit strepitus, adeo ut exaudiri posset foris. Hic, sicut ante dictum est, quam invisa sit singularis potentia, et miseranda vita, qui se metui, quam amari malunt, cuivis facile intellectu fuit. Namque illi ipsi custodes, si propitia fuissent voluntate, foribus effractis, servare eum potuissent, quod illi inermes, telum foris flagitantes, vivuni tenebant. Cui quum succurreret nemo, Lyco quidam Syracusanus per fenestras gladium dedit, quo Dion interfectus est.

ginta quinque natus, quartum post annum, quam ex Peloponneso in Siciliam redierat.

IPHICRATES.

ARGUMENTUM.

CAP. I. Iphicrates disciplina militari nobilis. - II. Bellum gerit cum Thracibus; Lacedæmonios fugat; Persarum conductitiis præest, Epaminondain retardat. III. Ejus indoles et dotes; filii exprobratio de uxore barbara.

I. Iphicrates, Atheniensis, non tam magnitudine rerum gestarum, quam disciplina militari nobilitatus est. Fuit enim talis dux, ut non solum ætatis suæ cum primis compararetur, sed ne de majoribus natu quidem quisquam anteponeretur. Multum vero in bello est versatus; sæpe exercitibus præfuit; nusquam culpa sua male rem gessit; semper consilio vicit, tantumque eo valuit, ut multa in re militari partim nova attulerit, partim meliora fecerit : namque ille pedestria arma mutavit, quum, ante illum imperatorem, maximis clypeis, brevibus hastis, minutis gladiis uterentur. Ille e contrario peltam pro parma fecit (a quo postea peltastæ pedites appellantur), ut ad motus

X. Confecta cæde, quum multitudo visendi gratia introisset, nonnulli ab insciis pro noxiis conciduntur. Nam, celeri rumore dilato, Dioni vim allatam, multi concurrerant, quibus tale facinus displicebat. Hi, falsa suspicione ducti, immerentes, ut sceleratos, occidunt. Hujus de morte ut palam factum est, mirabiliter vutgi mutata est voluntas. Nam qui vivum eum tyrannuru vocitarant, iidem liberatorem patriæ, tyrannique expursorem prædicabant. Sic subito misericordia odio successerat, ut eum suo sanguine, si possent, ab Acheronte cuperent redimere. Itaque in urbe, celeberrimo loco, elatus publice, sepulcri I concursusque essent leviores: haste modum duplicavit :

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