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Elle dura vingt-huit mois, vota la constitution que nous allons rapporter, et, en outre, deux mille cinq cent cinquante-sept décrets. On l'a surnommée Constituante.

Constitution publiée à Paris, le 14 septembre 1791 (1).

Louis, par la grâce de Dieu et par la loi constitutonnelle de l'État, roi des Français: à tous présents et à venir, salut.

L'Assemblée nationale a décrété, et nous voulons et ordonnons ce qui suit:

DÉCRET DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
DU 3 SEPTEMBRE 1791.

Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Les représentants du peuple français, constitués en assemblée nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme, sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs; afin que les actes du pouvoir législatif et ceux du pou

(1) Elle fut présentée à Louis XVI, qui la jura, et non soumise à l'acceptation des citoyens; mais elle fut adoptée par l'assentiment général.

voir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la constitution, et au bonheur de tous. En conséquence, l'Assemblée nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Étre Suprême, les droits suivants de l'homme et du citoyen:

Art. 1et. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune (1).

2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression.

3. Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément.

4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui: ainsi l'exercice des droits naturels de chaque homme, n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi.

5. La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu

(1) Tout individu est libre aussitôt qu'il est entré en France. Tout homme, de quelque couleur qu'il soit, jouit en France de tous les droits de citoyen, s'il a les qualités prescrites par la constitution pour les exercer. (Décret du 28 septembre, publié le 16 octobre 1791.)

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par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être
contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.

6. La loi est l'expression de la volonté générale.
Tous les citoyens ont droit de concourir personnelle-
ment, ou par leurs représentants, à sa formation. Elle
doit être la même pour tous, soit qu'elle protége, soit
qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses
yeux, sont également admissibles à toutes dignités,
places et emplois publics, selon leur capacité, et sans
autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs
talents.

7. Nul homme ne peut être accusé, arrêté, ni détenu que dans le cas déterminé par la loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi, doit obéir à l'instant; il se rend coupable par la résistance.

8. La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.

9. Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimée par la loi.

10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre établi par la loi.

11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer libre

ment, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

12. La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique; cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

13. Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.

14. Tous les citoyens ont droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

15. La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration.

16. Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution.

17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.

CONSTITUTION FRANÇAISE.

L'Assemblée nationale voulant établir la constitution française sur les principes qu'elle vient de reconnaître et de déclarer, abolit irrévocablement les institutions qui blessaient la liberté et légalité des droits.

Il n'y a plus ni noblesse, ni pairie, ni distinctions héréditaires, ni distinction d'ordres, ni régime féodal, ni justices patrimoniales, ni aucun des titres, dénominations et prérogatives qui en dérivaient, ni aucun ordre de chevalerie, ni aucune des corporations ou décorations pour lesquelles on exigeait des preuves de noblesse, ou qui supposaient des distinctions de naissance ni aucune autre supériorité que celle des fonctionnaires publics dans l'exercice de leurs fonctions.

Il n'y a plus ni vénalité, ni hérédité d'aucun office public.

Il n'y a plus, pour aucune partie de la nation, ni pour aucun individu, aucun privilége, ni exception au droit commun de tous les Français.

Il n'y a plus ni jurandes, ni corporations de professions; arts et métiers.

La loi ne reconnaît plus ni vœux religieux, ni aucun autre engagement qui serait contraire aux droits naturels ou à la constitution.

TITRE PREMIER.

Dispositions fondamentales

garanties par la constitution.

La constitution garantit, comme droits naturels et civils: 1o que tous les citoyens sont admissibles aux places et emplois, sans autre distinction que celle des vertus et des talents; 20 que toutes les contributions seront réparties entre tous les citoyens également en proportion de leurs facultés; 3o que les mêmes délits seront punis des mêmes peines, sans aucune distinction de personnes.

La constitution garantit pareillement, comme droits naturels et civils:

La liberté à tout homme d'aller, de rester, de par

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