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vir M. Tullius ayant, pour de l'argent, laissé transcrire à Pétronius le Sabin le livre des mystères du culte public, livre confié à sa garde, fut, par l'ordre du roi, cousu dans un sac de cuir et jeté à la mer. Ce supplice fut, longtemps après, appliqué par une loi aux parricides : et rien de plus juste, car un même châtiment doit venger les pères et les dieux des crimes qui les outragent. 14. Mais en fait d'attachement à la religion, je doute que personne ait égalé M. Atilius Régulus. Après de brillantes victoires, il se vit réduit, par les piéges d'Asdrubal et du Lacédémonien Xanthippe, à la triste condition de captif, et fut envoyé comme député, auprès du sénat et du peuple romain, pour proposer contre lui, contre lui seul et déjà vieux, l'échange d'un grand nombre de jeunes Carthaginois. Il donna un avis contraire, et reprit le chemin de Carthage, quoiqu'il n'ignorât pas quels ennemis cruels et justement irrités il allait retrouver; mais il leur avait juré, si les prisonniers de leur nation ne leur étaient pas rendus, de venir reprendre ses fers (An de R. 498). Les dieux immortels pouvaient sans doute adoucir la sauvage fureur de ce peuple; mais, pour la plus grande gloire d'Atilius, ils laissèrent les Carthaginois suivre leur nature, se réservant de leur faire expier dans la troisième guerre Punique, par la ruine entière de leur ville, les horribles traitements qu'ils auraient fait subir au plus religieux des hommes.

15. Que le sénat romain montra bien plus de respect pour les dieux ! On le vit, après le désastre de Cannes, défendre aux mères de famille de prolonger leur deuil au delà de trente jours,

prisci viri quidquam in hac asservari civitate, quo animi hominum a deorum cultu avocarentur.

13. Tarquinius autem rex M. Tullium duumvirum, quod librum secreta civilium sacrorum continentem, custodiæ suæ commissum, corruptus Petronio Sabino describendum dedisset, culeo insutum in mare abjici jussit: idque supplicii genus multo post parricidis lege irrogatum est. Justissime quidem; quia pari vindicta parentum ac deorum violatio expianda est.

14. Sed in his, quæ ad custodiam religionis attinent, nescio an omnes M. Atilius Regulus præcesserit; qui ex victore speciosissimo, insidiis Hasdrubalis, et Xanthippi Lacedæmonii ducis ad miserabilem captivi fortunam deductus, ac missus ad S. P. Q. R. legatus, ut ex se et uno, et sene, complures Pœnorum juvenes pensarentur, in contrarium dato consilio, Carthaginem repetiit; non ignarus, ad quam crudeles, quamque merito sibi infestos deos reverteretur: verum quia his juraverat, si captivi eorum redditi non forent, ad eos se rediturum. Potuerunt profecto dii immortales efferatam mitigare sævitiam cæterum quo clarior esset Atilii gloria, Carthaginienses moribus suis uti passi sunt: tertio Punico bello religiosissimi spiritus tam crudeliter vexati, urbis eorum interitu, justa exacturi piacula.

15. Quanto nostræ civitatis senatus venerabilior in deos! qui post Cannensem cladem decrevit, ne matronæ ultra

afin qu'elles pussent célébrer les mystères de Cé rès; car plus de la moitié peut-être de l'armée romaine était restée sur cette terre execrable et maudite, et il n'était point de maison où l'on ne versât des pleurs. Ainsi, les mères et les filles, les épouses et les sœurs de ces guerriers dont la mort était si récente, durent sécher leurs larmes, quitter les marques de la douleur, et aller, en robes blanches, porter l'encens sur les autels. Un zèle si constant pour le maintien de la religion fit sans doute rougir les dieux, et les empêcha de sévir plus longtemps contre un peuple que les plus cruelles épreuves n'avaient pu détacher de leur culte (An de R. 537).

DU MÉPRIS DE LA RELIGION.

16. Le déplorable échec du consul Varron, battu par les Carthaginois à la journée de Cannes, fut attribué au ressentiment de Junon, parce qu'à l'époque de son édilité il avait, pendant la célébration des jeux du Cirque, confié à un jeune comédien d'une rare beauté la garde du temple de Jupiter. On se rappela ce fait quelques années après, et l'on ordonna des sacrifices expiatoires (An de R. 533).

17. Hercule punit, dit-on, d'une manière aussi éclatante que terrible le mépris de sa divinité. Les Potitius étaient attachés au service de ses autels, sacerdoce qu'il avait lui-même assigné, par faveur, à cette famille, et qu'on s'y transmettait comme un bien héréditaire; mais l'ayant abandonné, par le conseil du censeur Appius, au vil ministère de leurs esclaves, tous, et ils étaient plus de trente en âge de puberté, tous moururent dans l'année.

tricesimum diem luctus suos extenderent, uti ab his sacra Cereris peragi possent: quia majore pæne Romanarum virium parte in exsecrabili ac diro solo jacente, nullius penates mœroris expertes erant. Itaque matres ac filiæ, conjugesque et sorores nuper interfectorum, abstersis lacrymis, depositisque doloris insignibus, candidam induere vestem, et aris dare tura coactæ sunt. Qua quidem constantia obtinendæ religionis, magnus cœlestibus injectus est rubor ulterius adversus eam sæviendi gentem, quæ ne injuriarum quidem acerbitate ab eorum cultu abster. reri potuerit.

DE RELIGIONE NEGLECTA.

16. Creditum est, Varronem consulem apud Cannas cum Carthaginiensibus tam infeliciter dimicasse ob iram Junonis; quod quum ludos Circenses ædilis faceret, in Jovis Opt. Max. templo eximia facie puerum histrionem ad excubias tenendas posuisset : quod factum post aliquot annos memoria repetitum, sacrificiis expiatum est.

17. Hercules quoque detractæ religionis suæ, el gravem et manifestam pœnam exegisse traditur. Nam quum Potitii sacrorum ejus ritum quem, pro dono genti eorum ab ipso assignatum, velut hereditarium obtinuerant, auctore Appio Censore, ad humile servorum ministerium transtulissent; omnes, qui erant numero super xxx puberes, intra annum exstincti sunt, nomenque Potitium in duo

Ainsi fut anéanti le nom des Potitius, que se partageaient douze familles. Quant à Appius, il perdit la vue (An de R. 441).

18. Apollon vengea aussi cruellement sa divinité. A la prise de Carthage par les Romains, on lui avait arraché sa tunique d'or; mais, par un effet de sa puissance, les mains du sacrilége se retrouvèrent, coupées, parmi les lambeaux de ce vêtement (An de R. 607). Brennus, chef des Gaulois, ne fut pas plus tôt entré dans le temple d'Apollon à Delphes, que, par la volonté de ce dieu, il tourna ses armes contre lui-même. (An de R. 475).

19. Non moins exemplaire fut la vengeance exercée par son fils Esculape, pour une pareille profanation. Il avait eu la douleur de voir le bois sacré qui entourait son temple (1), en grande partie abattu par Turullius, lieutenant d'Antoine, qui voulait construire une flotte à ce trium vir. Pendant lé temps même que se consommait le sacrilége, le parti d'Antoine fut défait, et Turullius, destiné à la mort par César (2), fut entraîné (visible effet de la puissance du dieu) dans le bois qu'il avait profané. En l'y faisant immoler par les soldats du vainqueur, Esculape voulut que sa mort expiât l'outrage fait aux arbres déjà tombés, et garantît du même attentat ceux qui étaient encore debout. Ce dieu augmenta ainsi la profonde vénération que son culte avait toujours inspirée (An de R. 723). 20. Ce ne fut pas non plus impunément que Q. Fulvius Flaccus enleva, pendant sa censure, les dalles de marbre qui couvraient le temple de Junon Lacinienne, pour en orner celui qu'il

(1) Dans l'ile de Cos. (2) Octave.

decim familias divisum interiit. Appius vero luminibus captus est.

18. Acer etiam sui numinis vindex Apollo, qui, Carthagine a Romanis oppressa, veste aurea nudatus, id egit, ut sacrilegæ manus inter fragmenta ejus abscissæ invenirentur. Brennus Gallorum dux Delphis Apollinis templum ingressus, dei voluntate in se manus vertit.

19. Nec minus efficax ultor contemptæ religionis filius quoque ejus Esculapius, qui consecratum templo suo lucum a Turullio præfecto Antonii, ad naves ei faciendas, magna ex parte succisum dolens, inter ipsum nefarium ministerium devictis partibus Antonii, imperio Cæsaris destinatum morti Turullium, manifestis numinis sui viribus eum in lucum, quem violaverat, traxit: effecitque, ut ibi potissimum a militibus Cæsarianis occisus, eodem exitio, et eversis jam arboribus poenas lueret, et adhuc superantibus immunitatem consimilis injuriæ pareret : suamque venerationem, quam apud colentes maximanı semper habuerat, deus multiplicavit.

20. Q. autem Fulvius Flaccus impune non tulit, quod in censura tegulas marmoreas ex Junonis Lacinia templo in ædem Fortunæ Equestris, quam Romæ faciebat, transtulit. Negatur enim post hoc factum mente constitisse : quin etiam per summam ægritudinem animi exspiravit,

élevait à Rome en l'honneur de la Fortune

Equestre. On dit, en effet, qu'après ce sacrilége sa raison reçut quelque atteinte, et même qu'il expira dans la plus vive douleur, en apprenant que, de ses deux fils qui servaient en Illyrie, l'un était mort et l'autre dangereusement malade. Frappé de ces événements, le sénat fit reporter à Locres ces dalles sacrées, et, par un décret plein d'une pieuse sagesse, corrigea l'œuvre impie du censeur (An de R. 579).

21. Cetrait de piété des sénateurs répond bien à la juste vengeance qu'ils exercèrent contre un lieutenant de Scipion, Q. Pléminius, lequel avait porté une main avare et criminelle sur le trésor de Proserpine. Ce misérable fut chargé de chaînes, traîné à Rome et jeté en prison, où il mourut, avant son jugement, d'une épouvantable maladie. Un décret du sénat rendit, en outre, à la déesse tout son argent, et même le double (An de R. 549).

EXEMPLES ÉTRANGERS DU RESPECT OU DU MÉPRIS DE LA RELIGION.

1. Si les sénateurs firent bonne justice du crime de Pléminius, la déesse sut bien aussi se venger elle-même, par un châtiment terrible, de la violente avarice du roi Pyrrhus, qui avait forcé les Locriens à lui donner sur le trésor de Proserpine une forte somme d'argent. A peine embarqué avec ce butin sacrilége, il fut assailli par la tempête, et vint échouer, avec toute sa flotte, sur les rivages voisins du temple. La somme y fut retrouvée tout entière, et restituée au trésor sacré de la déesse (An de R. 478).

2. Ce n'est pas ainsi que se conduisit le roi

quum, ex duobus filiis in Illyrico militantibus, alterum decessisse, alterum graviter audisset affectum. Cujus casu motus senatus, tegulas Locros reportandas curavit, decretique circumspectissima sanctitate impium opus censoris retexuit.

21. Tam me hercule quam Q. Pleminii, legati Scipionis, in thesauro Proserpina spoliando sceleratam avaritiam justa animadversione vindicavit. Quum enim eum vinctum Romam protrahi jussisset, aute causæ dictionem in carcere teterrimo genere morbi consumptus est: pecuniam dea ejusdem senatus imperio, et quidem summam duplicando, recuperavit.

EXTERNA EXEMPLA OBSERVATE VEL NEGLECTÆ RELIGIONIS.

1. Quæ, quod ad Pleminii facinus pertinuit, bene a patribus conscriptis vindicata est: quod ad violentas regis Pyrrhi sordes attinuerat, se ipsam potenter atque efficaciter dea defendit. Coactis enim Locrensibus ex thesauro ejus magnam illi pecuniam dare, quum onustus nefaria præda navigaret, vi subitæ tempestatis tota cum classe vicinis dea littoribus illisus est : in quibus pecunia incolumis reperta, sanctissimi thesauri custodia restituta est.

2. At non similiter Masinissa rex: cujus quum præfectus

Masinissa. Le commandant de sa flotte ayant abordé à Malte, et enlevé du temple de Junon des dents d'ivoire d'une grandeur extraordinaire, en avait, à son retour, fait présent au roi : mais quand ce dernier apprit d'où elles venaient, il les fit reporter dans cette île sur une galère à cinq rangs de rames, et replacer dans le temple de Junon, avec une inscription en sa langue, signifiant qu'il les avait acceptées par ignorance, et s'était empressé de les rendre à la déesse.»> L'action de Masinissa est plutôt un trait de son caractère que du génie africain. Pourquoi, au reste, juger d'un homme par le seul nom de sa nation? Celui-ci, né au sein même de la barbarie, sut réparer le sacrilége d'un autre (An de R. 549).

3. Denys de Syracuse, coupable de tous les vols que nous allons rapporter, aimait, au contraire, à en faire le sujet de ses plaisanteries. Il avait pillé le temple de Proserpine à Locres, et repassait la mer, secondé par un vent favorable. « Voyez, dit-il en riant à ses amis, voyez l'heureuse navigation que les immortels accordent aux sacriléges! » Après avoir enlevé à Jupiter Olympien un manteau d'or d'un grand poids, pris sur les Carthaginois et offert à ce dieu par le tyran Hiéron, il le remplaça par un manteau de laine, en disant : « L'or est trop pesant pour l'été, trop froid pour l'hiver; et pour les deux saisons la laine est préférable. » Dans Épidaure, il fit ôter sa barbe d'or à Esculape : « Il ne convient pas, dit-il, que le fils porte de la barbe, puisque Apollon, son père, n'en a point. » Il prit aussi, dans différents temples, des tables d'or et d'argent; et comme, selon l'usage des Grecs, on les avait déclarées, par une inscription, la propriété des dieux, qualifiés de bons, « Je ne fais,

classis Melitam appulisset, et æque ex fano Junonis dentes eburneos eximiæ magnitudinis sublatos, ad eum pro dono attulisset, ut comperit, unde advecti essent, quinqueremi reportandos Melitam, inque templo Junonis collocandos curavit, insculptos gentis suæ litteris, significantibus, regem ignorantem eos accepisse; libenter des reddidisse. Factum Masinissæ animo, quam Punico sanguini conveniens quamquam quid attinet mores natione perpendi? in media barbaria ortus, sacrilegium rescidit alienum.

"

3. Syracusis Dionysius genitus, tot sacrilegia sua, quot jam recognoscimus, jocosis dictis prosequi voluptatis loco duxit fano enim Proserpinæ spoliato Locris, quum per altum secundo vento classe veheretur, ridens amicis : Videtisne, ait, quam bona navigatio ab ipsis immortalibus sacrilegis tribuatur? » Detracto etiam Jovi Olympio magni ponderis aureo amiculo, quo eum tyrannus Hiero e manubiis Carthaginiensium ornaverat, injectoque ei laneo pallio, dixit, æstate grave amiculum aureum esse, hieme frigidum laneum autem ad utrumque tempus anni aptius. Idem Epidauri Esculapio barbam auream demi jussit : quod affirmaret, non convenire, patrem Apollinem imberbem, ipsum barbatum conspici. Idem mensas argenteas atque aureas e fanis sustulit: quodque in bis more Græciæ scriptum erat, bonorum deorum eas esse, uti se bonitate

disait-il, qu'user de leur bonté. » Voyait-il aussi de ces Victoires d'or, de ces coupes, de ces couronnes que les statues des dieux tiennent à la main, le bras étendu, il s'en emparait, « les acceptant, mais ne les ravissant pas; » c'était son mot; et il ajoutait, par forme d'argument : « Il serait absurde, quand nous demandons tant de choses aux dieux, de refuser celles qu'ils nous présentent. » Si cet impie ne subit pas la peine due à ses crimes, il trouva, après sa mort, dans l'opprobre de son fils, la punition épargnée à sa vie car la colère des dieux est parfois tardive; mais la sévérité du châtiment en compense la lenteur.

4. Loin de s'exposer à leur vengeance, Timasithée, premier magistrat de Lipari, sut à la fois en préserver sa personne et sa patrie entière, et donner un utile exemple. Des habitants de cette île, qui faisaient le métier de pirates, avaient pris dans le détroit une coupe d'or d'un grand poids, et le peuple voulait se la partager. Timasithée, informé que c'était une offrande destinée par les Romains, à titre de dîme, à Apollon Pythien, l'arracha des mains des vendeurs, et la fit porter à Delphes, dans le temple du dieu (An de R. 359).

5. A la prise de Milet par Alexandre, Cérès, particulièrement révérée dans cette ville, punit les soldats qui s'étaient jetés dans son temple pour le piller, en faisant briller à leurs yeux une flamme qui les rendit aveugles (Av. J.-C. 334).

6. Les Perses, quand leurs mille vaisseaux relâchèrent à Délos (1), se livrèrent, dans le temple d'Apollon, à des actes de piété plutôt que de brigandage (Av. J.-C. 479).

7. Les Athéniens bannirent le philosophe

(1) Pendant l'expédition de Xerxès.

eorum prædicavit Idem Victorias aureas et pateras, et coronas, quæ simulacrorum porrectis manibus sustinebantur, tollebat, et eas se accipere, non auferre, dicebat : perquam stultum esse argumentando, a quibus bona pre camur, ab his porrigentibus nolle sumere. Qui tametsi debita supplicia non exsolvit, dedecore tamen filii, mortuus pœnas rependit, quas vivus effugerat. Lento enim gradu ad vindictam sui divina procedit ira; tarditatemque supplicii gravitate compensat.

4. In quam ne incideret Timasitheus, Liparitanorum princeps, consilio sibi pariter, atque universæ patriæ, utili providit exemplo. Excepta namque in freto a civibus suis piraticam exercentibus magni ponderis aurea cratera, incitatoque ad eam partiendam populo, ut comperit a Romanis Pythio Apollini decimarum nomine dicatam, manibus venundantium ereptam deo Delphos perferendam curavit.

5. Milesia Ceres, Mileto ab Alexandro capta, milites, qui templum spoliaturi irruperant, flamma objecta priva. vit oculis.

6. Persæ, mille navium numero Delum compulsi, templo Apollinis religiosas potius manus quam rapaces adhibuerunt.

7. Athenienses Protagoram philosophum pepulerunt, quia scribere ausus fuerat, primum ignorare se, an dij

Protagoras, pour avoir osé écrire, d'abord qu'il ignorait s'il y a des dieux, et ensuite, supposé leur existence, quelle est leur nature. Ils condamnèrent Socrate, parce qu'il leur parut introduire une religion nouvelle. Ils écoutèrent Phidias faisant ressortir l'avantage du marbre sur l'ivoire pour la statue de Minerve, et alléguant que l'éclat en serait plus durable; mais dès qu'il ajouta, « et le prix plus modique,» ils lui ordonnèrent de se taire.

8. Diomédon, l'un des dix généraux qui, à la bataille d'Arginuse, assurèrent tout ensemble aux Athéniens la victoire, et à eux-mêmes leur condamnation, n'adressa, en marchant au supplice, d'autre prière à son injuste patrie, que d'acquitter les vœux qu'il avait faits pour le salut de l'armée (Av. J.-C. 406).

CHAPITRE II.

des mensonGES RELIGIEUX, CHEZ LES ROMAINS.

1. Numa Pompilius, pour attacher le peuple romain à la religion, feignait d'avoir des entretiens nocturnes avec la nymphe Égérie, et attribuait à ses conseils l'établissement d'un culte qui ne pouvait que plaire aux dieux immortels (An de R. 39).

2. Scipion l'Africain ne commençait aucune affaire, ou pour l'État ou pour lui-même, qu'il n'eût été se recueillir dans le sanctuaire de Jupiter Capitolin; aussi passait-il pour son fils (An de R. 542).

3. L. Sylla, maître d'une petite statue d'Apollon enlevée à Delphes, n'oubliait jamais,

essent: deinde si sint, quales sint. Iidem Socratem damnaverunt, quod novam religionem introducere videbatur. lidemn Phidiam tulerunt, quamdiu is marmore potius quam ebore Minervam fieri debere dicebat, quod diutius nitor esset mansurus; sed ut adjecit, et vilius, tacere jusserunt.

8. Diomedon, unus ex decem ducibus, qui Arginusæ eadem pugna Atheniensibus victoriam, sibi vero damna. tionem pepererunt, quum jam ad immeritum supplicium duceretur, nihil aliud loquutus est, quam ut vota pro incolumitate exercitus ab ipso nuncupata solverentur.

CAPUT II.

DE RELIGIONE SIMULATA A ROMANIS.

1. Numa Pompilius, ut populum Romanum sacris obligaret, volebat videri sibi cum dea Egeria congressus esse nocturnos, ejusque monitu se, quæ accepta diis immortalibus sacra forent, instituere.

2. Scipio Africanus non ante ad negotia publica vel privata ibat, quam in cella Jovis Capitolini moratus esset, et ideo Jove genitus credebatur.

3. L Suila, quoties prælium committere destinabat, parvum Apollinis signum Delphis sublatum, in conspectu

avant de livrer une bataille, de l'embrasser à la vue de ses troupes, en priant ce dieu de hâter l'effet de ses promesses (An de R. 671).

4. Qu. Sertorius traînait avec lui, à travers les âpres collines de la Lusitanie, une biche blanche (1), qui l'avertissait, disait-il, de ce qu'il devai faire ou éviter (An de R. 673).

DES MENSONGES RELIGIEUX, CHEZ LES ÉTRAN

GERS.

1. Minos, roi des Crétois, se retirait tous les neuf ans dans une grotte profonde, et consacrée, de temps immémorial, par la religion des peuples. A son retour, il feignait que Jupiter, dont il se disait le fils, lui avait transmis les lois qu'il publiait (Av. J.-C. 1432).

:

2. Pisistrate, pour recouvrer le pouvoir qu'il avait perdu, imagina une cérémonie où on le voyait ramené dans la citadelle par Minerve ellemême la majestueuse contenance d'une femme inconnue, appelée Phya et revêtue du costume de la déesse, suffit pour tromper les Athéniens (Av. J.-C. 557).

3. Lycurgue sut persuader à l'austère Lacédémone que les lois qu'il présentait étaient l'œuvre d'Apollon (Av. J.-C. 845).

4. Zaleucus, en se couvrant du nom de Minerve, acquit chez les Locriens la plus haute réputation de sagesse (Av. J.-C. 500).

CHAPITRE III.

DES RELIGIONS ÉTRANGÈRES REJETÉES PAR LES ROMAINS.

1. La fête des Bacchanales, nouvellement in(1) Animal consacré à Diane.

militum complexus, orabat, uti promissa maturaret. 4. Qu. Sertorius per asperos Lusitaniæ colles cervam albam trahebat, ab ea se, quænam aut agenda, aut vitanda essent, prædicans admoneri.

DE RELIGIONE SIMULATA AB EXTERNIS.

1. Minos, Cretensium rex, nono quoque anno in quoddam præaltum, et vetusta religione consecratum specus secedere solebat: et in eo moratus, tamquam a Jove, quo se ortum ferebat, traditas sibi leges prærogabat.

2. Pisistratus in recuperanda tyrannide, quam aniserat, simulatione reducentis se in arcem Minervæ est usus: quum per ostentationem ignotæ mulieris, quæ Phya vocabatur, formatæ ad habitum deæ, Athenienses deciperet. 3. Lycurgus consilio Apollinis gravissimæ Lacedæmoniorum civitati leges compositas ferre se persuasit.

4. Zaleucus sub nomine Minervæ apud Locrenses prudentissimus habitus est.

CAPUT III.

DE PEREGRINA RELIGIONE REJECTA.

1. Bacchanalium sacrorum mos novus institutus, quum ad perniciosam vesaniam iretur, sublatus est.

troduite à Rome, y fut abolie, parce qu'elle en- | piqué de sa résistance, si une pensée qui lui venait traînait à de pernicieuses extravagances (An de R. 567).

Quand Lutatius, qui termina la première guerre Punique, voulut aller consulter les sorts de la Fortune Prénestine, le sénat le lui défendit, déclarant que les magistrats de la république ne devaient pas recourir aux auspices étrangers, mais s'en tenir à ceux de la patrie (An de R. 511).

2. C. Cornélius Hispallus, préteur pour les étrangers, porta, sous le consulat de M. Popilius Lénas et de Cn. Calpurnius, un édit qui enjoignait aux Chaldéens de sortir dans les dix jours de Rome et de l'Italie; vils imposteurs qui, spéculant sur l'ignorance et la crédulité, à l'aide d'une prétendue divination astrologique, vivaient de l'aveuglement que propageaient leurs mensonges. Il reavoya de même dans leur pays d'autres aveaturiers qui, sous prétexte d'enseigner le culte de Jupiter Sabazius, travaillaient à corrompre les mœurs romaines (An de R. 614).

3. Le consul L. Emilius Paullus, voyant que, malgré l'ordre donné par le sénat de démolir les temples d'Isis et de Sérapis, aucun ouvrier n'osait y porter la main, quitta sa prétexte, saisit une hache et en frappa les portes. (An de R. 534).

CHAPITRE IV.

DES AUSPICES, CHEZ LES ROMAINS.

1. Le roi L. Tarquin, voulant ajouter de nou velles centuries à celles que Romulus avait créées sur la foi des auspices, et se voyant arrêté dans ce projet par l'augure Attius Navius, lui demanda,

Lutatius, qui primum Punicum bellum confecit, a senatu prohibitus est, sortes Fortunæ Prænestinæ adire; auspiciis enim patriis, non alienigenis, rempublicam administrari oportere judicabant.

2. C. Cornelius Hispallus, prætor peregrinus, M. Popilio Lænate, Cn. Calpurnio Coss. edicto Chaldæos, in tra decimum diem abire ex Urbe atque Italia jussit: levibus et ineptis ingeniis, fallaci siderum interpretatione, quæstuosam mendaciis suis caliginem injicientes. Idem, qui Sabazii Jovis cultu simulato mores Romanos inficere conati sunt, domos suas repetere coegit.

3. L. Æmilius Paullus consul, quum senatus Isidis et Serapis fana diruenda censuisset, eaque nemo opificum attingere auderet, posita prætexta securim arripuit, templique ejus foribus inflixit.

CAPUT IV.

DE AUSPICIIS QUÆ CEPERE ROMANI.

1. L. Tarquinius rex centuriis equitum, quas Romulus auspicato conscripserat, alias adjicere cupiens, quum ab Attio Navio angure prohiberetur, offensus interrogavit,

alors à l'esprit pouvait s'exécuter : « Oui, reprit l'augure. » C'est, dit Tarquin, de couper avec ce rasoir la pierre à aiguiser. » On apporta la pierre, et Attius, accomplissant ce prodige incroyable, fit éclater aux yeux du roi le pouvoir de sa science (An de R. 140).

2. Ti. Gracchus, plein des innovations qu'il méditait, consulta chez lui les auspices, au point du jour, et n'en reçut que de sinistres réponses. En effet, à peine sorti de sa maison, il se heurta si rudement le pied qu'il se disloqua un doigt. Un peu plus loin, trois corbeaux volèrent à sa rencontre en croassant, et firent tomber devant lui un morceau de tuile arraché d'un toit. Il méprisa tous ces présages, et, repoussé du Capitole par Scipion Nasica, souverain pontife, il tomba expirant sous le coup d'un débris de banquette (An de R. 620).

3. Dans la première guerre Punique, P. Claudius, près d'engager un combat naval, voulut, selon l'ancien usage, consulter les auspices. Sur l'avis donné par l'augure, que les poulets sacrés ne sortaient pas de leur cage (1), il les fit jeter à la mer, en disant : « Puisqu'ils ne veulent pas manger, qu'ils boivent. » De son côté, L. Junius, collègue de P. Claudius, ayant négligé de prendre les auspices, perdit sa flotte dans une tempête. Un jugement du peuple fit justice du premier; le second prévint, par une mort volontaire, l'ignominie d'une condamnation (An de R. 504).

4. Le souverain pontife Métellus allait à sa terre de Tusculum; deux corbeaux se précipitèrent au-devant de lui, comme pour l'empêcher de poursuivre sa route, et le déterminèrent enfin à retourner à Rome. La nuit suivante, le feu prit

(1) Pour manger; ce qui cût été un bon présage.

possetne fieri, quod ipse mente conceperat? Posse fier dicente, jussit novacula cotem discindi. Qua Attius allata, administrato incredibili facto, effectum suæ professionis oculis regis subjecit.

2. Ti. Gracchus, quum ad res novas pararetur, aus. picia domi prima luce petiit: quæ illi perquam tristia responderunt. Nam janua egressus, ita pedem offendit, ut digitus ei decuteretur: tres deinde corvi, in eum adversum occinentes, partem tegulæ decussam ante ipsum propulerunt. Quibus omnibus contemptis, a Scipione Nasica pontifice maximo decussus Capitolio, fragmento subsellii ictus procubuit.

3. P. Claudius bello Punico primo, quum prælium navale committere vellet, auspiciaque more majorum petiisset, et pullarius non exire cavea pullos nuntiasset, abjici eos in mare jussit, dicens : « Quia esse nolunt, bibant. »> Et L. Junius, P. Claudii collega, neglectis auspiciis, clas sem tempestate amisit. Quorum ille populi judicio concidit, damnationisque hic ignominiam voluntaria morte prævenit.

4. Quum Metellus pontifex maximus Tusculanum peteret, corvi duo in os ejus adversum veluti iter impedien. tes advolaverunt: vixque extuderunt, ut domum rediret. Insequenti nocte ædes Vestæ arsit: quo incendio, Metel

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