personnes; et Célius, historien romain digne de ❘ étant introduits dans l'arène, du côté où était foi, déclare en avoir entendu parler du vivant même du tribun ( An de R. 626). 7. Il y avait quelque chose de plus terrible encore dans l'apparition que voici. Après la défaite et la ruine de M. Antoine à Actium, Cassius de Parme, un de ses partisans, se réfugia dans Athènes. Vers le milieu de la nuit, le sommeil ayant enfin gagné son esprit dévoré d'inquiétude et de chagrin, il lui sembla qu'il voyait venir à lui un homme d'une taille gigantesque, le teint noir, la barbe négligée, les cheveux en désordre; que lui ayant demandé qui il était, le fantôme répondit en grec : « Ton mauvais génie. Épouvanté de cette affreuse vision et de ce nom horrible, il appela ses esclaves, et s'enquit d'eux s'ils n'avaient pas vu entrer dans sa chambre, ou en sortir, un homme dont il leur peignit l'aspect. » « Personne, répondirent-ils, n'a pénétré ici. » Cassius se recoucha et se rendormit. Le même spectre lui apparut de nouveau. Alors, renonçant au sommeil, il fit apporter de la lumière, et défendit à ses esclaves de s'éloigner. Cette nuit-là fut suivie de bien près du supplice auquel il fut condamné par César (An de R. 733). 8. Il s'écoula moins de temps encore entre le songe d'Atérius Rufus, chevalier romain, et l'événement qu'il présageait. Se trouvant à Syracuse pendant les jeux de gladiateurs, il crut voir, en dormant (1) un rétiaire, le percer de son épée. Le lendemain, au spectacle de ces jeux, il raconta son rêve à ceux qui étaient près de lui. Dans ce moment même, un rétiaire et un mirmillon (2) (1) Nom d'une espèce de gladiateurs armés d'un filet dont ils cherchaient à envelopper leur adversaire, pour le frapper ensuite plus sûrement. —(2) Autre gladiateur, qui portait sur son casque un poisson (popuúpoç, poisson ). 7. Vincit hujusce somnii dirum adspectum, quod sequitur. Apud Actium M. Antonii fractis opibus, Cassius Parmensis, qui partes ejus sequutus fuerat, Athenas confugit: ubi concubia nocte, quum sollicitudinibus et curis mente sopita in lectulo jaceret, existimavit ad se venire hominem ingentis magnitudinis, coloris nigri, squalidum barba, et capillo demisso interrogatumque, quisnam esset, respondisse xxxodzipova. Perterritus deinde tam tetro visu, et nomine horrendo, servos inclamavit, sciscitatusque, si quem talis habitus aut intrantem cubiculum, aut exeuntem vidissent. Quibus affirmantibus, neminem illuc accessisse, iterum quieti et somno se dedit: atque eadem animo ejus obversata est species. Itaque fugato somno, lumen introferri jussit, puerosque a se discedere vetuit. Inter hanc noctem et supplicium capitis, quo eum Cæsar affecit, paullulum admodum temporis intercessit. 8. Propioribus tamen, ut ita dicam, lineis Aterii Rufi, equitis Romani, somnium certo eventu admonitum est : qui, quum gladiatorium munus Syracusis ederetur, inter quietem retiarii se manu confodi vidit : idque postero die in spectaculo consessoribus narravit. Incidit deinde, ut proximo ab equite loco retiarius cum mirmillone introduceretur: cujus quum faciem vidisset, idem dixit, ab assis le chevalier, celui-ci, à la vue du premier, s'écria : « Voilà le rétiaire par qui j'ai cru être tué; » et il voulut se retirer aussitôt. Ses voisins parvinrent à le rassurer, et causèrent ainsi la mort de ce malheureux. En effet, le rétiaire poussa le mirmillon vers cet endroit, l'y terrassa, et, en voulant le frapper, traversa Rufus de son glaive et le tua. DES SONGES, CHEZ LES ÉTRANGERS. 1. Annibal eut aussi un songe dont le présage fut aussi sûr que fatal au nom romain; tant les veilles de cet ennemi, tant son sommeil même étaient hostiles à notre empire! Ce rêve, en effet, répondait bien à ses projets et à ses vœux. Il crut voir un jeune guerrier d'une taille plus qu'humaine, et que lui envoyait Jupiter, pour le guider dans l'invasion de l'Italie. D'abord, selon le conseil de ce guide, il le suivit sans détourner les yeux d'aucun côté; bientôt, cedant trer ce qu'on nous cache, il regarda en arrière, à ce penchant qui nous porte à vouloir pénébonds impétueux, écrasait tout ce qui se trouet aperçut un serpent immense, qui, dans ses vait sur son passage: derrière lui, des nuages qui crevaient avec un grand bruit de tonnerre, et un affreux mélange de lumière et de ténèbres. Annibal étonné demanda ce que c'était que ce prodige et ce qu'il annonçait. Tu vois, lui dit son guide, la dévastation de l'Italie; mais garde le silence, et, pour le reste, laisse faire à de secrets destins. >> 2. Pour avertir le roi Alexandre de Macédoine de mieux veiller à la sûreté de ses jours, que fallait-il de plus que la vision qu'il eut dans son illo se retiario trucidari putasse, protinusque inde discedere voluit. Illi, sermone suo metu ejus discusso, causam exitii misero attulerunt. Retiarius enim in eum locum compulso mirmillone et abjecto, dum jacentem ferire conatur, trajectum gladio Aterium interemit. DE SOMNIIS EXTERNORUM. 1. Hannibalis quoque, ut detestandum Romano sanguini, ita certæ prædictionis somnium : cujus non vigiliæ tantum, sed etiam ipsa quies hostilis imperio nostro fuit. Hausit enim proposito et votis suis convenientem imagi nem, existimavitque missum sibi ab Jove mortali specie excelsiorem juvenem, invadendæ Italiæ ducem: cujus monitu primo vestigia nullam in partem motis sequutus oculis, mox humani ingenii prona voluntate vetita scru tandi pone respiciens, animadvertit immensæ magnitudinis serpentem, concitato impetu, omne, quidquid obvium fuerat, proterentem: postque eam magno cum cœli fra gore erumpentes nimbos, lucemque caliginosis involutam tenebris. Attonitus deinde, quidnam esset monstri, et quid portenderet, interrogavit. Hic dux, Italiæ vides, inquit, vastitatem: proinde sile, et cætera tacitis per mille fatis. 2. Quam bene Macedoniæ rex Alexander per quietem sommeil, si la fortune eût aussi voulu l'armer de prudence contre le danger? Un songe lui avait appris à redouter la perfide main de Cassandre avant l'expérience qu'il en fit par sa mort; car il s'était cru assassiné par cet homme, qu'il n'avait jamais vu. Quelque temps après, lorsque Cassandre parut devant le roi, ce dernier reconnut en lui l'image qui avait troublé son sommeil; mais, apprenant qu'il était le fils d'Antipater, il cita un vers grec sur la vanité des songes; et, quand déjà était préparé le poison que l'on croit lui avoir été donné par Cassandre, il bannit de son esprit tout soupçon de ce genre (Av. J.-C. 323). 3. Les dieux montrèrent bien plus de bienveillance au poëte Simonide, en lui donnant en songe un avis salutaire, et, de plus, la résolution de le suivre. Sur un rivage où il venait d'aborder, il trouva un cadavre gisant sans sépulture, et il l'inhuma. Averti par l'ombre du mort de ne point se mettre en mer le lendemain, il resta sur la côte. Ceux qui s'embarquèrent furent assaillis par une tempête et engloutis à ses yeux. Il s'applaudit alors d'avoir confié sa vie à la foi d'un songe plutôt qu'à un vaisseau; et, en reconnaissance du bienfait, il immortalisa cette ombre par un admirable poëme, lui érigeant ainsi, dans la mémoire des hommes, un monument plus durable et plus beau que celui dont il l'avait honoré sur une plage déserte et inconnue (Av. J.-C. 464). 4. Un autre songe trop fidèlement accompli, est celui qui causa d'abord tant d'alarmes et ensuite tant de douleur au roi Crésus. Il avait deux fils, dont l'un, nommé Atys, supérieur à visa imagine præmonitus erat, ut vitæ suæ custos esset diligentior, si eum cavendi etiam periculi consilio fortuna instruere voluisset! namque Cassandri pestiferam sibi dexteram somnio prius cognovit, quam exitu sensit: existi. mavit enim ab illo se interfici, quum eum nunquam vidisset. Interposito deinde tempore, postquam in conspectum venisset, nocturni metus patefacta imagine, ut Antipatri filium esse cognovit, adjecto versu græco, qui fidem somniorum elevat, præparati jam adversus caput suum veneficii, quo occidisse Cassandri manu creditur, suspicionem animo repulit. 3. Longe indulgentius dii in poeta Simonide, cujus salutarem inter quietem admonitionem consilii firmitate roboraverunt. Is enim quum ad litus navem appulisset, inhumatumque corpus jacens sepulturæ mandasset, admonitus ab eo, ne proximo die navigaret, in terra remansit. Qui inde solverant, fluctibus et procellis in conspectu ejus obruti sunt. Ipse lætatus est, quod vitam suam somnio, quam navi, credere maluisset. Memor autem beneficii, elegantissimo carmine æternitati consecravit; melius illi et diuturnius in animis hominum sepulcrum constituens, quam in desertis et ignotis arenis struxerat. 4. Efficax et illa quietis imago, quæ Crosi regis animum maximo prius metu, deinde etiam dolore confecit. Nam e duobus filiis, et ingenti agilitate, et corporis doti. l'autre par une rare activité et par les avantages extérieurs, était destiné à lui succéder; il crut le voir expirer sous le fer. Sa sollicitude paternelle prit donc toutes les précautions imaginables pour prévenir le cruel malheur que lui annonçait un tel songe. Jusque là, il avait envoyé ce jeune prince à la guerre; il le retint dans son palais : il avait un vaste arsenal rempli d'armes de toute espèce; il le fit transporter loin de sa résidence : des gardes l'escortaient l'épée au côté; il leur fut fait défense de trop s'approcher de son fils. Mais la nécessité sut bien donner accès au malheur. Un énorme sanglier ravageait les riches campagnes du mont Olympe, et en faisait périr un grand nombre d'habitants. On vint implorer le secours du roi contre ce terrible monstre. Atys, impatient d'aller le tuer, en arracha la permission à son père, et d'autant plus aisément que c'était le fer et non des coups de dents que l'on redoutait pour lui. Mais tandis que tous les chasseurs se disputaient l'honneur de tuer le sanglier, le sort, s'acharnant à la perte d'Atys, détourna sur lui une lance dirigée contre l'animal, et choisit pour cet horrible meurtre la main même à laquelle le père avait confié la garde de son fils; cette main déjà souillée d'un homicide involontaire, et que Crésus, dans la crainte des dieux hospitaliers, avait purifiée, suppliante, par un sacrifice expiatoire (1) (Av. J.-C. 550). 5. Le premier Cyrus offre aussi un mémorable exemple de l'invincible pouvoir du destin. Astyage, son aïeul maternel, averti, par deux songes, de la naissance future d'un petit-fils destiné (1) Cet Adraste, chassé de Phrygie après le meurtre involontaire de son frère, s'était réfugié chez Crésus. Il se tua sur le tombeau d'Atys. bus præstantiorem, imperiique successioni destinatum Atym, existimavit ferro sibi ereptum. Itaque quidquid ad evitandam denuntiatæ cladis acerbitatem pertinebat, nulla ex parte patria cura cessavit avertere. Solitus erat juvenis ad bella gerenda mitti; domi retentus est: habebat armamentarium omnis generis telorum copia refertum ; id quoque amoveri jussit gladio cinctis comitibus utebatur; vetiti sunt propius accedere. Necessitas tamen aditum luctui dedit. Quum enim ingentis magnitudinis aper, Olympi montis culta, crebra cum agrestium strage vastaret, inusitatoque malo regium imploratum esset auxilium: filius a patre extorsit, ut ad eum opprimendum mitteretur; eo quidem facilius, quod non dentis, sed ferri sævitia in metu reponebatur. Verum dum acri studio interficiendi suem omnes sunt intenti, pertinax casus imminentis violentiæ, lanceam petendæ feræ gratia missam, in eum detorsit: et quidem eam potissimum dexteram nefariæ cædis crimine voluit adspergi, cui tutela filii a patre mandata erat, quamque Croesus imprudentis homicidii sanguine violatam, hospitales veritus deos, supplicem sacrificio expiaverat. 5. Nec Cyrus quidem superior invictæ fatorum necessitatis parvulum argumentum est; cujus ortus ad imperium totius Asiæ spectantis, maternus avus Astyages, duos præ. nuntios somnii frustra discutere tentavit: Mandanen filiam suam, quod in quiete viderat urinam ejus omnes à l'empire de toute l'Asie, essaya en vain d'en empêcher l'accomplissement. Comme il avait rêvé que Mandane, sa fille, inondait de son urine toutes les nations asiatiques, il craignit, en lui fai- | sant épouser un personnage distingué parmi les Mèdes, que la dignité royale ne passât dans sa famille, et il l'unit à un Perse d'une médiocre condition. A peine Cyrus fut-il né, qu'il le fit | exposer, parce que, dans un autre songe, il avait cru voir une vigne sortant du sein de Mandane et s'accroissant toujours, jusqu'à ombrager toutes les régions de son empire. Mais il ne mit que lui en défaut, en voulant s'opposer, par les conseils de la prudence humaine, aux destinées que la volonté des dieux assurait à son petit-fils (Av. J.-C. 594). 7. La mère de ce Denys eut un songe qu'elle paya moins cher. Quand elle le portait encore dans son sein, elle crut mettre au monde un petit satyre. Le devin qu'elle consulta répondit que son enfant serait le plus illustre et le plus puissant des Grecs; prédiction que l'événement justifia. 8. Amilcar, général des Carthaginois, assiégeant Syracuse, crut entendre, pendant son sommeil, une voix qui lui disait : « Tu dîneras demain à Syracuse. » Plein de joie, et assuré d'une victoire que les dieux semblaient lui promettre, il disposa son armée pour le combat. Mais, profitant d'une querelle survenue entre les Siciliens (1) et les Carthaginois, les Syracusains firent une sortie, s'emparèrent de son camp, et l'emmenèrent lui-même prisonnier dans leur ville. Ainsi trompé, plutôt dans son espoir que par son rève, il dîna à Syracuse, mais en captif et non en vainqueur, comme il s'en était flatté (Av. J.-C. 309). 9. Alcibiade vit aussi, dans son sommeil, la fidèle image du triste sort qui l'attendait : car le manteau de sa maîtresse, dont il s'était cru couvert en songe, servit, quand il fut tué, à envelopper son corps, laissé sans sépulture (Av. J.-C. 404). 6. Quand Denys de Syracuse n'était encore que simple particulier, une femme de la ville d'Himère, d'une naissance distinguée, rêva qu'elle était montée au ciel, et que, visitant la demeure de tous les dieux, elle voyait au pied du trône de Jupiter un homme des plus vigoureux, les cheveux blonds, le visage parsemé de taches rousses, le corps emprisonné dans des chaînes de fer. «Quel est ce captif? » demanda-t-elle au jeune guide qui lui faisait les honneurs du ciel : « C'est, lui dit-il, le mauvais destin de la Sicile et de l'Italie ; une fois déchaîné, il portera la désolation dans bien des villes. » Le lendemain, elle raconta ce songe à plusieurs personnes. Lorsqu'ensuite la fortune, conjurée contre la liberté de Syracuse et 10. Le songe suivant, bien que le récit en soit contre la vie d'une multitude d'innocents, tira un peu plus long, annonça trop clairement la Denys de sa prison céleste, et le lança, comme vérité pour être omis dans ce recueil. Deux Arcala foudre, au sein de la paix et de la tranquil- diens, amis intimes et voyageant ensemble, lité, cette femme l'aperçut, à son entrée dans Asiaticas gentes inundasse, non Medorum excellentissimo, ne in ejus familiam regni decus transferretur, sed Persarum modicæ fortunæ viro collocando, natumque Cyrum exponi jubendo: quia similiter quietis temporibus existimaverat, genitali parte Mandanes enatam vitem eo usque crevisse, donec cunctas dominationis suæ partes inumhraret. Sed frustratus est se ipse, nepotis felicitatem, cœlestium judicio destinatam, humanis consiliis impedire conando. 6. Intra privatum autem habitum Dionysio Syracusano adhuc se continente, Himeræ quædam non obscuri generis femina, inter quietem opinione sua cœlum conscendit, atque ibidem deorum omnium lustratis sedibus, animadvertit prævalentem virum flavi coloris, lentiginosi oris, ferreis catenis vinctum, Jovis solio pedibusque subjectum interrogatoque juvene, quo considerandi cœli duce fuerat usa, quisnam esset? audiit, illum Siciliæ atque Italiæ dirum esse fatum, solutumque vinculis, multis urbibus exitio futurum : quod somnium postero die sermone vulgavit. Postquam deinde Dionysium inimica Syracusarum libertati, capitibusque insontium infesta fortuna cœlesti custodia liberatum, velut fulmen aliquod, olio ac tranquillitati injecit; Himeræorum monia inter effusam ad officium et ad spectaculum ejus turbam intran (1) Les Siciliens faisaient partie de son armée. tem ut adspexit, hunc esse, quem in quiete viderat, vociferata est. Id cognitum tyranno, curam tollendæ mulieris dedit. 7. Tutioris somnii mater ejusdem Dionysii : quæ quum eum conceptum utero haberet, parere visa est Satyriscum consultoque prodigiorum interprete, clarissimum ac potentissimum Graii sanguinis futurum, certo cum eventu cognovit. 8. At Carthaginiensium dux Hamilcar, quum obsideret Syracusas, inter somnium exaudisse vocem credidit nuntiantem, futurum, ut proximo die in ea urbe cœnaret. Lætus igitur, perinde ac divinitus promissa victoria, exercitum pugnæ comparabat : in quo inter Siculos et Pœnos orta dissensione, castris ejus Syracusani subita irruptione oppressis, ipsum intra mœnia sua vinctum pertraxerunt. Itaque magis spe, quam somnio, deceptus, cœnavit Syra cusis captivus, non, ut animo præsumpserat, victor. 9. Alcibiades quoque miserabilem exitum suum haud fallaci nocturna imagine speculatus est. Quo enim pallio amicæ suæ dormiens opertum se viderat, eo interfectus, et insepultus jacens, contectus est. 10. Proximum somnium, etsi paulo est longius, propter nimiam tamen evidentiam ne omittatur impetrat. Duo familiares Arcades iter una facientes, Megaram venerunt : arrivèrent à Mégare, et allèrent loger, l'un chez son hôte, l'autre dans une auberge. Le premier voit en songe son compagnon, qui le prie de venir le défendre contre la perfidie de l'aubergiste, | l'assurant qu'il peut encore, en faisant diligence, le soustraire au danger qui le menace. Réveillé par cette vision, il s'élance du lit, et court vers l'auberge où était cet ami. Mais bientôt, par une cruelle fatalité, il condamne comme inutile cette généreuse résolution, regagne son lit et se rendort. Son ami lui apparaît alors couvert de blessures : « Puisque tu as, lui dit-il, négligé de me sauver la vie, au moins ne refuse pas de venger ma mort. J'ai été assassiné par l'aubergiste, et en ce moment même on transporte hors de la ville, dans un tombereau, mon cadavre recouvert de fumier. » Cédant à de si vives prières, il court aussitôt à la porte de la ville, arrête le tombereau que lui avait désigné le songe, et fait traîner l'aubergiste au dernier supplice (Av. J.-C. 403). CHAPITRE VIII. DES FAITS MIRACULEUX, CHEZ LES ROMAINS. On a vu souvent, même en plein jour, quand on était éveillé, des choses pareilles à celles qui se cachent sous le voile mystérieux d'un songe; ces choses, dont il est difficile de discerner le principe et la raison, s'appellent nécessairement miraculeuses. 1. Parmi beaucoup d'exemples, celui-ci s'offre le premier. Le dictateur A. Postumius et Mami quorum alter ad hospitem se contulit, alter in tabernam meritoriam devertit. Is, qui in hospitio erat, vidit in somnis comitem suum orantem, ut sibi cauponis insidiis circumvento subveniret : posse enim celeri ejus accursu se imminenti periculo subtrahi. Quo viso excitatus, prosiluit, tabernamque, in qua is deversabatur, petere conatus est. Pestifero deinde fato ejus humanissimum propositum tamquam supervacuum damnavit, et lectum ac somnum repetiit. Tunc idem ei saucius oblatus obsecravit, ut qui auxilium vitæ suæ ferre neglexisset, neci saltem ultionein non negaret. Corpus enim suum a caupone trucidatum, tum maxime plaustro ad portam ferri stercore coopertum. Tam constantibus familiaris precibus compulsus, protinus ad portam cucurrit, et plaustrum, quod in quiete demonstratum erat, comprehendit, cauponemque ad capitale supplicium perduxit. CAPUT VIII. DE MIRACULIS QUE CONTIGERE ROMANIS. Multa etiam interdiu, et vigilantibus acciderunt, perinde ac tenebrarum somniique nube involuta: quæ, quia unde manaverint, aut qua ratione constiterint, dignoscere arduum est, merito miracula vocentur. lius Octavius, général des Tusculans, se livraient, auprès du lac Régille, un combat acharné; aucune des deux armées ne pliait devant l'autre. Alors on vit Castor et Pollux combattre à la tête des Romains, et mettre en pleine déroute les troupes ennemies (A. de R. 257). Pendant la guerre de Macédoine, P. Vatinius, de la préfecture de Réate, se rendant de nuit à Rome, crut voir deux jeunes gens d'une grande beauté, montés sur des chevaux blancs, venir à sa rencontre, et lui annoncer que le roi Perséc était tombé, la veille, au pouvoir de Paul-Émile. Il en donna connaissance au sénat on le prit pour un imposteur qui se jouait de la majesté de cette auguste assemblée, et on le mit en prison. Mais quand les dépêches de Paul-Émile eurent prouvé que Persée avait été fait prisonnier ce jourlà même, on élargit Vatinius, et on lui accorda une terre et l'exemption de toute charge (An de R. 585). On eut une autre preuve que Castor et Pollux veillaient au salut de l'empire romain lorsqu'on les vit se baigner, couverts de sueur, eux et leurs chevaux, dans le lac Juturne; et lorsque leur temple, voisin de la source de ce lac, s'ouvrit, sans qu'aucune main humaine en touchât la porte (An de R. 257). 2. Citons aussi des exemples de la bienveillance des autres dieux envers Rome. Cette ville était, depuis trois années, ravagée par la peste, sans qu'on entrevît le terme d'un fléau si terrible et si opiniâtre, soit dans la miséricorde divine, soit dans les efforts humains. Nos vigilants pontifes, en consultant les livres sibyllins, trouvèrent que le seul moyen de ramener la salubrité dans Rome, 1. Quorum e magno acervo in primis illud occurrit. Quum apud lacum Regillum A. Postumius dictator, et Tuscula norum dux Mamilius Octavius magnis viribus inter se concurrerent, ac neutra acies aliquamdiu pedem referret, Castor ac Pollux Romanarum partium propugnatores visi, hostiles copias penitus fuderunt. Item bello Macedonico P. Vatinius, reatinæ præfectura vir, noctu urbem petens, existimavit duos juvenes excellentis formæ, albis equis residentes, obvios sibi factos nuntiare, die, qui præterierat, Persen regem a Paullo captum. Quod quum senatui indicasset, tamquam majestatis ejus et amplitudinis vano sermone contemptor, in carcerem conjectus, postquam Paulli litteris illo die Persen captum apparuit, et custodia liberatus, et insuper agro et vacatione donatus est. Castorem vero et Pollucem etiam illo tempore pro imperio populi Romani excubuisse, cognitum est, quo ad lacum Juturnæ, suum equorumque sudorem abluere visi sunt; junctaque fonti ædes eorum nullius hominum manu reserata patuit. 2. Sed ut cæterorum quoque deorum propensum huic urbi numen exsequamur, triennio continuo vexata pestilentia civitas nostra, quum finem tanto, et tam diuturno malo, neque divina misericordia, neque humano auxilio, imponi videret : cura sacerdotum, inspectis Sibyllinis libris, animadvertit, non aliter pristinam recuperari salubritatem posse, quam si ab Epidauro Esculapius esset rigea vers le vestibule du temple d'Esculape, et s'entortilla autour d'un palmier dont la cime superbe dominait majestueusement un myrte touffu. Il y resta trois jours, pendant lesquels on lui apporta sa nourriture. Les ambassadeurs craignaient qu'il ne voulût plus retourner dans la galère; mais, quittant le séjour hospitalier du temple, il alla reprendre sa première place, pour être porté à Rome. Enfin, les députés eurent à peine mis le pied sur le rivage du Tibre, qu'il se rendit à la nage dans l'île où un temple lui fut dédié depuis; et son arrivée dissipa l'horrible fléau contre lequel on avait imploré son secours (An de R. 461). c'était de faire venir d'Épidaure Esculape même. La république, dont l'autorité était déjà immense dans l'univers, se persuada qu'elle obtiendrait, par une ambassade, l'unique remède indiqué par les destins. Le succès répondit à son attente, ear on lui promit ce secours avec le même empressement qu'elle avait mis à le demander. Surle-champ les Épidauriens conduisirent les députés romains dans le temple d'Esculape, situé à cinq mille pas de leur ville, et les invitèrent généreusement à y choisir, à y prendre tout ce qu'ils croiraient utile au salut de leur patrie. Cette bienveillance empressée des habitants fut imitée | par le dieu lui-même, dont la bonté céleste ratifia la parole des mortels. En effet, le serpent, qui se montrait rarement aux Épidauriens, mais toujours pour leur présager quelque chose d'heureux, et qu'ils honoraient comme Esculape, se mit alors à parcourir les quartiers les plus fréquentés de la ville, d'un air plein de douceur et de sérénité. Après s'être offert ainsi, pendant trois jours, à la religieuse admiration de la foule, il se dirigea vers la galère romaine, témoignant, par des mouvements de plaisir, le désir qu'il avait d'une plus glorieuse résidence. Il entra dans le vaisseau, en présence des matelots effrayés de ce spectacle, gagna la chambre de l'ambassadeur Q. Ogulnius, et, se roulant en replis nombreux, il y demeura dans une profonde tranquillité. Les 4. Il y a sur la voie Latine, à quatre milles ambassadeurs, au comble de leurs vœux, ren- de Rome, le temple et la statue de la Fortune des dirent aux dieux des actions de grâces; et, après femmes, dont la consécration remonte à l'épos'être informés de la manière d'honorer le ser- que où Coriolan, prêt à détruire sa patrie, fut pent, ils se hâtèrent de quitter Épidaure. Une désarmé par les larmes de sa mère. On assure heureuse navigation les fit bientôt aborder à aussi que cette statue prononça jusqu'à deux fois Antium. Là, le serpent, qui partout ailleurs des mots tels que ceux-ci : « Heureux les ausétait demeuré dans le vaisseau, en sortit, se di-pices sous lesquels vous m'avez vue, ô Romai 3. L'arrivée de Junon dans notre ville ne fut pas moins volontaire. Furius Camillus, maître de Véies, avait ordonné à ses soldats de transporter à Rome la statue de Junon Monéta, principal objet du culte des Véiens. Tandis qu'ils s'efforçaient de l'enlever de son piédestal, un d'eux demanda, en plaisantant, à la déesse, si elle voulait bien venir à Rome : « Oui,» réponditelle. Cette parole, entendue de tous, changea le badinage en admiration. Ils crurent alors emporter avec eux, non la statue, mais Junon même descendue du ciel ; et ils la placèrent, pleins de joie, dans cette partie du mont Aventin où l'on voit maintenant son temple (An de R. 357). in vestibulo ædis Esculapii, myrto frequentibus ramis diffusæ supereminentem excelsæ magnitudinis palmam circumdedit: perque tres dies positis, quibus vesci solebat, non sine magno metu legatorum, ne inde in triremem reverti nollet, Antiensis templi hospitio usus, urbi se nostræ advehendum restituit, atque in ripam Tiberis egressis legatis, in insulam, ubi templum dicatum est, transnavit : adventuque suo tempestatem, cui remedio quæsitus erat, dispulit. arcessitus. Itaque eo legatis missis, unicam fatalis remedii | lerunt, anguis, qui ubique in navigio remanserat, prolapsus opem auctoritate sua, quæ jam in terris erat amplissima, impetraturam se credidit; neque eam opinio decepit; pari namque studio petitum ac promissum est præsidium, e vestigioque Epidaurii Romanorum legatos in templum Æsculapii, quod ab eorum urbe quinque millibus passuum distat, perductos, ut quidquid inde salubre patriæ laturos se existimassent, pro suo jure sumerent, benignissime invitaverunt. Quorum tam promptam indulgentiam, numen ipsius dei subsequutum, verba mortalium cœlesti obsequio comprobavit. Siquidem is anguis, quem Epidaurii raro, sed nunquam sine magno ipsorum bono visum, in modum Esculapii venerati fuerunt, per urbis celeberrimas partes mitibus oculis et leni tractu labi cœpit, triduoque inter religiosam omnium admirationem conspectus, haud dubiam præ se appetita clarioris sedis alacritatem ferens, ad triremem Romanam perrexit: paventibusque inusitato spectaculo nautis, eo conscendit, ubi Q. Ogulnii legati tabernaculum erat, inque multiplicem orbem per summam quietem est convolutus. Tum legati, perinde atque exoptatæ rei compotes, expleta gratiarum actione, cultuque anguis a peritis accepto, læti inde solverunt : ac prosperam emensi navigationem postquam Antium appu 3. Nec minus voluntarius Junonis in urbem nostram transitus. Caplis a Furio Camillo Veiis, milites jussu imperatoris simulacrum Junonis Monetæ, quod ibi præcipua religione cultum erat, in urbem tralaturi, sede sua movere conabantur. Quorum ab uno per jocum interrogata dea, an Romam migrare vellet, Velle se respondit. Hac voce audita, lusus in admirationem versus est. Jamque non simulacrum, sed ipsam cœlo Junonem petitam, portare se credentes, læti in ea parte montis Aventini, in qua nunc templum ejus cernimus, collocaverunt. 4. Fortunæ etiam Muliebris simulacrum, quod est via Latina ad quartum milliarium, eo tempore cum æde sua consecratum, quo Coriolanum ab excidio urbis maternæ |