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faire partie d'Allemagne, quoiquelle foit par-delà les Alpes, & à leur midi.

Les Alpes commencent du côté de France, vers la côte de la Mer Méditerrannée, près de Monaco, entre l'état de Gênes & le comté de Nice, d'où elles s'étendent vers le feptentrion, entre ce comté, celui de Tende & le Col de la Fenêtre; puis elles continuent par le mont Camélione, entre le val de Barcelone & le Piémont, & delà par le col de Lagnet; & d'autres au mont Vifo, où elles fe joignent au Dauphiné, dont elles traverfent un petit bout au mont Genévre, & delà jusqu'au col de la Roue, fur les confins de la Maurienne; puis féparant la Savoie du Piémont par le petit Cenis, le grand mont Cenis & le mont Iféran, elles s'étendent par le mont du petit faint Bernard & la glacière de l'Argentiere, entre la Savoie propre & le duché d'Aoufte jusqu'au mont Malai, qu'elles commencent à s'avancer du côté du levant, par le grand mont de faint Bernard & par le mont Sylvio, fur les frontiéres du Velais, & par le mont Sempione. Elles s'étendent, entre la Suiffe propre & les bailliages d'Italie,au mont S. Gothard, & delà dans le pays des Grifons, par le mont de la Splugue, vers les fources du Rhin, & enfuite par les monts Molaja, de la Bernine, Braulio, Louplan & Buffalora, d'où elles traverfent le Tirol entre l'Inn & l'Adige, & forment le grand Brenner, qui eft une des principales montagnes des Alpes, & celles de Venden & de Taurn, puis elles féparent le Tirol de l'archevêché de Saltzbourg au mont Sétio, & la Carinthie du Frioul, d'où, formant les monts de Céfo, elles traverfent la Carniole, & enfin par les monts del Carfo & della Vena, qui font fur les frontieres de l'Iftrie, elles s'étendent jusqu'au golfe de Carnero, qui fait partie de la Mer Adriatique, où elles fe terminent. Voilà pour ce qui regarde leurs principales parties, car elles ne laiffent pas d'étendre plufieurs chaînes de montagnes en divers endroits, comme dans le haut Dauphiné, la Savoie & la Suiffe, les Grifons & le Tirol, desquelles on fera mention dans leurs lieux.

ALPES. On donne quelquefois ce nom aux montagnes qui diftinguent la Tranfilvanie de la Moldavie & de la Valachie, & alors on les nomme en latin Alpes Transfilvane.

ALPES DOFRINÆ. C'est ainfi que Saxon, l'hiftorien de Danemarck, nomme en latin cette chaîne de montagnes qui borde la Suéde & la Norwege, & fert de borne à ces deux royaumes. Voyez DAARE-FIELD.

ALPES PERUVIANÆ fe dit par quelques auteurs de la Cordillera de los Andes, montagne qui court du fud au nord le long de l'Amérique méridionale.

Toutes ces montagnes font moins chacune un tout, que des parties de cet enchaînement de roches, qui eft la caufe la plus vraisemblable de la fermeté & de la folidité de la terre, & qui eft en elle ce que font les os au corps humain. C'eft pour cette raifon que le comte Marfilli, dans l'examen particulier qu'il a fait de cette fuite de montagnes, qui fe répand dans toutes les parties du monde, en doit intituler fes remarques fur leur connexion, de l'offature de la terre. Ce mot, qui exprime très-bien cette idée, a déja été employé par d'habiles phyficiens, & entr'autres par le P. Kircher, dans fon monde fouterrein. Outre cet ufage, la providence en a tiré un autre, qui n'eft pas moins avantageux au : ce font de riches réfervoirs, où les eaux humain : genre fe raffemblent pour prendre leur cours fur la terre, & c'eft dans les Alpes & dans les montagnes pareilles que fe trouvent les fources des grands fleuves, qui font la richeffe & la commodité des lieux qu'ils arrofent.

ALPESA, ancienne ville d'Espagne, dans la Bétique, felon Pline, l. 3, c. 1. Elle eft à préfent détruite, & ce lieu s'appelle maintenant FACIAL - CAÇAR, entre les bourgs d'Utrera & de Coronil, dans l'Andaloufie, à fept lieues & au midi oriental, felon Rodericus Carus, allégué par Baudr. éd. 1682.

ALPHA, riviere dans le voisinage d'Aquilée, auprès de laquelle on dit que Conftantin fut tué, & qu'on jetta fon corps, felon Ortelius, Thefaur. qui foupçonne, avec vraisemblance, que ce peut être ALSA, dans le Frioul. V. ANSA 2 & 3.

2 ALPHA, diverfes rivieres que l'on nomme aufli AA. Voyez ces articles.

ALPHA BUCCELLIS, ancienne ville des Marfes, en Italie, felon Ptolomée, l. 3, c. 1. Ortelius, Thefaur. fe mocque d'un homme qui croyoit que ce lieu eft aujourd'hui Avezzano, que Baudrand dit être au royaume de Naples, dans l'Abruzze ultérieure. Corneille ne laiffe pas d'embraffer ce fentiment. Ortelius ayant obfervé que l'itinéraire d'Antonin porte Albatucenfia, eft perfuadé que ce mot eft corrompu, auffi-bien que l'Alphabuccellis de Ptolomée, & eft à la place d'ALBA FUCENTIS, qui, comme je l'ai marqué au mot ALBA 20, eft la même qu'Alba Marforum; ainfi elle n'eft pas à huit milles de distance d'Alba, comme le dit Baudrand, éd. 1682, puisque c'eft le même lieu.

ALPHANO, bourg de Portugal, dans la province d'Alentejo, fur le chemin de Lisbonne à Elvas: plufieurs le prennent pour l'ancienne Fraxinum. * Corn. dict. Maty, que Corneille cite pour fon garant, qualifie ce lieu village, auffi-bien que Baudrand, duquel il a traduit cet article. Ce dernier écrit ALPAHANO; il est vrai que les imprimeurs de Maty ont mis Alphano, mais l'ordre demande que ce foit Alphahano, ce mot étant devant celui d'Alpes.

ALPHARINE, ville en Europe, & dont on ne trouve que le nom dans le livre des propriétés, fauffement attribué à Ariftote. * Ortel. Thefaur.

ALPHATEMIA ou ALPHATERNA, &
ALPHATERNI. Voyez NUCERIA.

ALPHÉE, felon Baudrand, fleuve du Péloponèse, qu'il traverfe presque tout entier, ayant fa fource à la montagne Partenio, qui n'eft qu'à quatre lieues de la côte orientale, &, fe déchargeant à l'occident, dans le golfe de l'Arcadie, il baigne l'ancienne Arcadie, qui fait maintenant partie de la province de Zaconie, & l'ancienne Elide, aujourd'hui partie de Belvedere, & reçoit un grand nombre de rivieres, dont les plus confidérables font le Ladon, joint à l'Orchomene, le Dimizana ou l'Erimanthe. Les différens noms qu'on a donnés à cette riviere, felon Ortelius, Thefaur. font ROPHÆA, ALABO, ORPHEA, CARBON ou DARBON, STYMPHELOS & NYCTIMOS.

Paufanias, après avoir dit, dans fes Eliaques, qu'Alphée étoit un chaffeur, qui aima Arethufe, fort adonnée à la chaffe, & que, l'ayant recherchée inutilement en mariage, il fut changé en fleuve, & cette nymphe en fontaine à Syracufe, où elle s'étoit retirée, ajoute qu'Alphée, par un empreffement amoureux, roule fes eaux à travers la mer, & les va mêler avec celles d'Aréthufe. Il traite cette fable d'une autre maniere dans fes arcadiques. Alphée, felon ce qu'il y rapporte de ce fleuve fépare les Lacédémoniens des Tégéates, & leur fert de borne: fa fource eft à Philace, à quelque diftance de laquelle il recoit l'eau de plufieurs petites fontaines, que l'on appelle le concours des eaux. Il a cela de particulier, que les fiennes fe perdent fouvent fous terre, d'où elles fortent ailleurs. Ce fleuve entre dans l'Eurotas, il fe perd enfuite, & paroît tout de nouveau en un autre endroit, que les Arcadiens appellent les fources. Il parcourt le territoire de Pife & d'Olympie, & va fe jetter dans le golfe Adriatique, & en fort, fans avoir mêlé fes eaux avec la mer, pour aller fe rendre en Ortygie, dans la fontaine d'Aréthufe, avec laquelle il fe mêle. Les poëtes ont feint qu'Hercule, chargé par Eurysthée de nétoyer l'étable d'Augie, remplie des immondices de trois mille bœufs, durant trente ans, tira un canal de la riviere d'Alphée, qu'il fit paffer au travers de cette étable. Strabon, que fuivent tous les géographes, met auffi la fource de l'Alphée dans l'Arcadie, mais il foutient que ce fleuve ne paffe point au travers de la Mer Ionienne par des conduits fouterreins, pour venir dans la Sicile fe mêler avec les eaux d'Aréthufe. Il dit qu'il a une embouchure, par laquelle il fe décharge dans la mer, & qu'il ne trouve point de goufres en fon chemin où il fe perde, pour fe montrer inopinément ailleurs. *Danet, Antiq. Grecques & Romaines.

1. ALPHEN ou ALPEN, felon Baudr. éd. 1705, petite ville d'Allemagne, avec une citadelle, dans le diocèfe de Cologne, près du duché de Cléves & du Rhin, entre la ville de Rhinberg & celle de Santen. Quelques-uns croyent que c'étoit anciennement CASTRA ULPIA, que d'autres placent à Cléves.

2. ALPHEN ou ALPEN, gros village de la Hollande

méridionale, fur le Rhin, entre Leyde & Woerden, deux lieues & demie au-deffus de Leyde. * Dict. Géog. des Pays-Bas.

Corneille ne fait s'il en doit faire une ville ou un bourg. Ce n'eft ni l'un ni l'autre. Alting, Notit. Germ. infer. I part. pag. 2, écrit ALFEN, & met ce lieu à dix mille pas au-deffus de Leyde. Il condamne ceux qui veulent qu'on écrive dans les anciens itinéraires d'Antonin & de Peutinger Alpheniana Caftra au lieu d'Albiniana Caftra. Voyez ALBINIANA.

ALPHESUM, lieu auprès duquel il doit s'être tenu un concile fous le roi Conrad, felon Gratien, de la maniere que lit Ortelius, Thef. l'édition du corps du droit canon à Lyon 1584, porte in concilio apud Altheum, & non pas Alphenfum. Il me paroît que l'erreur eft du côté d'Ortelius, car Conrad, roi de Germanie, commença de regner en cette qualité en 912, & mourut en 919. Or on trouve dans la collection du P. Labbe qu'en 917 il fut célébré un concile à Altahein, village de Suiffe, fous Conrad I, roi de Germanie, en préfence du nonce apoftolique du pape Jean X, & c'eft fans doute ce concile que Gratien, Decret. 2, caufa 31, a cité. ALPHION LACUS, lac qui, au rapport de Pline, 31, C. 2, ôtoit les taches blanches qui viennent fur la peau comme une espéce de lépre (Vitiligines.) Le nom de ce lac vient de cette qualité, car 'Anqos, Alphos, fignifie cette forte de maladie; & non - feulement ce lac, mais auffi le fleuve Alphée, étoient ainfi nommés, à caufe de cette propriété. C'est la penfée de Strabon, 1. 8, p. 347, & du P. Hardouin, qui croit que ce lac pouvoit bien être la fource de l'Alphée ou du moins l'endroit de ce fleuve où l'on fe lavoit pour cet effet.

1.

ALPHIONIA ou ALPHIUSA, furnom de Diane, fous lequel on lui avoit confacré un bois, felon Strabon, 1. 8. Ce bois étoit dans le Péloponnéfe, à l'embouchure de l'Alphée. Au lieu de l'un ou de l'autre de ces deux mots, Gyraldus Syntagm. Deor. 12, aime mieux lire ALPHIA,

ALPHISSAH, contrée de l'ifle de Madagascar, dans fa partie méridionale, & à l'occident de celle de Mananboule; on y voit beaucoup de vignes & quantité de foie. Flacourt dans fon histoire de Madagascar, p. 128, citée par Corneille, écrit ALFISSAC.

ALPIA & ALPEIA. Etienne le géographe nomme ainfi le rivage de la Mer Thyrrhéne vers le nord.

ALPINI, Aulugelle, l. 2, c. 22, nomme ainfi quelques peuples d'Espagne qui vivoient auprès de l'Ebre, & cite Varron, qui dit qu'il y avoit dans leur pays d'excellentes mines de fer & d'argent. Ortelius me fournit cette remarque, & lifoit ainfi : Nam cum de Hispancis Alpinis scriberet qui circa Iberum colunt, &c. mais l'édition de Thyfius & d'Oifelius obmet ce mot Alpinis, & porte, Nam cum de Hispanis scriberet, &c. de plus dans cette édition c'eft Caton, & non pas Varron dont on emprunte l'autorité. Ce paffage prouveroit, s'il étoit tel qu'Ortelius l'a cité, que du tems de Caton les montagnes d'autour de l'Ebre étoient regardées comme faifant partie des Alpes.

ALPINUS. Voyez ALPON-VECCHIO.
ALPIS. Voyez ALPES.

ALPIUM, village de la Laconie, felon Paufan, 1.3, c. 18. C'eft-là qu'étoit le temple de Minerve l'Ophthalmide; c'est-à-dire, confervatrice de la vue. On prétend qu'il avoit été dédié par Lycurgue; qu'après qu'Alcandre lui eut crevé un œil, parce que les loix de Lycurgue ne lui plaifoient point, ce légiflateur fe réfugia dans cevillage, où les Lacédémoniens l'ayant fuivi, le garantirent de fon ennemi; &, pour fauver l'œil qui lui restoit, il bâtit un temple à Minerve fous le titre d'Oph

thalmide.

ALPON-VECCHIO (l'), en latin Alpinus, felon Baudrand, éd. 1705, petite riviere de l'état de Venise, dans le territoire de Verone. Elle fe jette dans l'Adige. Corneille la nomthe Alpin. Elle coule au nord-ouest, au fud-eft, & a fa fource au nord oriental de Trignago, paffe au nord & à l'eft de Montecchio, fe mêle avec l'Aldego, & la Tramegna, & tombe dans l'Adige, audeffus d'Albaredo. Sanfon, Atlas.

1. ALPONOS, ville ancienne de la Macédoine, felon Etienne le géographe.

2. ALPONOS, montagne de la Macédoine, felon le même.

3. ALPONOS, ville des Locres Epichnémidiens, felon le même. On peut, avec Berkelius, acquiefcer au fentiment d'Ortelius, qui croit qu'Alpenus & Alpanos font la même chofe; en effet, Herodote & Euphorion qu'Etienne cite, ayant écrit en différentes dialectes peuvent bien avoir mis 2 pour E; c'est-à-dire, O pour E, cela arrive fouvent dans la langue grecque..

ALPUXARRAS, (les) montagnes d'Espagne, dans le royaume de Grenade, au bord de la Méditerrannée. Baudrand les nomme les ALPUJARDS, & en latin Alpuxara & Solis mons. Elles font fi hautes, dit Vairac, Etat de l'Espagne, t. 1, p. 165, que de leur fommet on voit non-feulement le détroit de Gibraltar, mais encore toute la côte de Barbarie, & les villes de Tanger & de Ceuta. On fait dériver leur nom d'un fameux capitaine More, qui en eut le commandement, nommé Alpuxar. Elles s'étendent entre Veles & Almeria, & ont dix-fept lieues de longueur fur onze de largeur. Elles ne font habitées que par des Morisques, triftes reftes de leur ancien empire, lesquels ayant embraffé la religion chrétienne, qu'ils profeffent encore, ne laiffent pas de conferver leur ancienne maniere de vivre, leurs habits, & leur langue particuliere, qui eft un mêlange monstrueux d'Arabe & d'Espagnol. Elles font partagées en onze quartiers, que les habitans appellent en leur langage corrompu Taus, & les Espagnols Cabeça de partido. Les principaux font Taa de Orgiva, & Taa de Pitras, appellé ainfi, parce qu'il eft renfermé entre deux bourgs, dont l'un s'appelle Pitros, & l'autre Portugos. On voit dans ces montagnes des arbres fruitiers d'une hauteur & d'une groffeur prodigieufe; mais ce qu'on y remarque de plus extraordinaire, c'elt un ruiffeau, dont l'eau teint en noir dans un inftant les filets de lin ou de foie qu'on y plonge. Près delà eft une caverne qui exhale une vapeur fi maligne, qu'elle tue les animaux qui s'approchent de fon ouverture. De toutes les contrées d'Espagne, les Alpuxarras font les plus peuplées. Tout le pays eft couvert d'un nombre incroyable de bourgs & de villages, qui font la demeure de ces Morisques, lesquels, ayant confervé leur naturel vigilant & laborieux, tandis que les Espagnols naturels fe font plongés dans la parelle & la fainéantife, s'appliquent avec un foin merveilleux à la culture des terres, tellement que toutes ces montagnes font plantées de vignes & d'arbres fruitiers, qui produifent du vin excellent & des fruits exquis qu'ils vont vendre à Velez-Malaga, & en quelques autres endroits de la côte, pour être revendus par ceux qui les leur achetent, à d'autres marchands de pays étrangers. Baudrand, éd. 1705, dit que les onze quartiers dont il eft parlé ci deffus font nommés Taas, dont voici les noms:

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2. ALRE. Davity, fuivi par Corneille, nomme ainfi la riviere de la Grande-Bretagne en Hantshire, laquelle passe à Winehester. C'est par conféquent la même que ITCHIN.

ALREFFORD, felon l'atlas de Blaeu, ou Alresford, vers la fource de l'Itchin.

ALRICH. Voyez ETTRICH.

ALROSE. Davity & Corneille nomment ainfi la riviere de Suiffe, que d'autres géographes nomment LA ROSE. V. REUS.

ALS ou AALS, Aalfa, village de Norwege, felon de l'Ifle, ou ville, felon Corneille. Elle eft dans l'Aggerhus, au canton de Hallingdal, au nord, & affez près de l'Eklifund.

ALSA, riviere de l'état de Venife, dans le Frioul. Pline en fait mention, l. 3, c. 18. Léandre croit que c'est

ANSA: Sanfon l'écrit de même : Nifer écrit Ausa, le P. Hardouin & le P. Coronelli l'écrivent de même. Blondi l'appelle LIMINO: Lazius, LIZONZO, & Ortelius préfére fon fentiment: il rapporte à cette riviere l'ALSUANUS de Calliodore. Variar. l. 4, num. 8. Aurelius Victor dit, dans la vie de l'empereur Conftans, que l'Alfa n'eft pas loin d'Aquilée. Paul Diacre, Longob. l. 3, c. 10, écrit ALPEN, felon un manuscrit confulté par Ortelius. L'imprimé porte Plave dans le même paffage. Ce même nom eft changé en celui d'ALPHA dans l'histoire mêlée, citée par Ortelius. Je crois avec Niger, les PP. Hardouin & Coronelli, que le nom moderne eft AUSA. Voyez

ANSA 2, 3.

e

par deux comtes; car fous fon ayeul l'empereur Louis l'Alsace étoit un duché ou grand gouvernement, appellé Ducatus Helifatiorum; il en eft fait mention à l'an 839, dans les annales de S. Bertin. Après la mort de Lothaire, fon royaume ayant été partagé par fes deux oncles, Louis le Germanique & Charles le Chauve, les deux Alfaces & le pays de Bafle échurent à Louis le Germanique, qui les laiffa à fon fils Charles le Gros, qui régna d'abord dans la haute Allemagne, puis fut empereur, & réunit l'empire de Charlemagne. Lorsqu'il fut dépofé, Arnoul, fon neveu & fucceffeur, fe trouva maître de l'Alface, qu'il laiffa à fes fils Zuentibold & Louis. Le duc Gifelbert défendit ce pays d'Alface contre Othon le Grand, qui ne s'en rendit maître abfolu & paifible poffeffeur, qu'après que ce duc eut péri dans le Rhin : les empereurs, fucceffeurs d'Othon, furent toujours maîtres de ce pays, qu'ils joignirent à la Suabe, que l'on appelloit Allamania (nom qu'il ne faut pas confondre avec la Germanie.) L'Alface faifoit encore partie de l'Allemagne proprement dite, ou de la Suabe, jusqu'au tems de Philippe - Augufte & au commencement du treiziéme fiécle, puisque Guillaume le Breton, dans fon poëme fur la vie de ce roi, dit que l'Allemagne (c'eft-à-dire, la Suabe) s'étendoit jusqu'aux montagnes de Vosge, Vogefas tangens Alamania fines. Elle étoit gouvernée par des ducs qui n'étoient pas encore héréditaires. On voit que Conrad le Salique, & Henri le Noir ne donnerent jamais que des bourgades ou petites villes, & des châteaux en fief perpétuel à des feigneurs, tant eccléfiaftiques que féculiers; & ils avoient dans l'Alface des préfets provinciaux qui n'étoient point héréditaires, & fe contentoient d'être officiers. Il y avoit outre cela des comtes en divers châteaux & petites places, comme à Egesheim ou Egenesheim & à Dachsbourg, dans la haute Alface, desquels étoit iffu le pape Léon XI. Les ancêtres de Rodolphe de Hapsbourg ont porté la qualité de Landgrave d'Afface, au moins depuis l'an 1210, comme les titres cotés par Guilliman le démontrent, qui prouvent que Rodolphe ayeul, & Albert le Sage, pere de l'empereur Rodolphe, ont porté ce titre de Landgrave d'Alface, dans le tems que les comtes d'Egesheim le portoient, fans qu'il leur fut contesté par les comtes de Hapsbourg. Après l'extinction des comtes d'Egesheim, qui poffédoient le landgraviat d'Alface, les évêques de Strasbourg & les princes d'Autriche en prirent le titre. Ces derniers n'avoient aucune prétention fur les évêques qui étoient princes, & dont l'évêché étoit une principauté qui relevoit immédiatement de l'Empire. Ils ont cependant eu la préfecture provinciale héréditaire de l'Alface avec droit de rendre la juftice aux dix villes impériales de cette province. Cette préfecture a paffé enfuite dans différentes familles, les empereurs s'acquirent par la fuite le droit d'en difpofer: les comtes Palatins l'ont poffédée long-tems; enfin Ferdinand I, après l'abdication de Charles - Quint fon frere, la fir paffer dans fa famille, la branche Allemande, où elle refta jusqu'au traité de Munfter, figné le 24 octobre 1648, par lequel Ferdinand III, tant en fon nom qu'en celui de la maifon d'Autriche, céda au roi de France & à fa couronne à perpétuité, & en toute fouveraineté, le Landgraviat de la haute & baffe Alface, comme la maifon d'Autriche en avoit joui, avec le Suntgau & la ville de Brifach, & la préfecture provinciale de Haguenau & des neuf autres villes impériales, à la charge que ces villes, avec les feigneurs eccléfiaftiques & féculiers d'Alface, & l'évêque de Strasbourg, qui avoient été immédiats à l'Empire jusqu'alors, feroient maintenus dans tous les droits & priviléges particuliers qui étoient compatibles avec la fouveraineté de S. M. très-chrétienne. Le roi de France paya aux archiducs d'Inspruck, anciens propriétaires de l'Alface, la fomme de trois millions de livres, comme il s'y étoit obligé par le traité; & l'archiduc Sigismond d'Autriche donna fa déclara tion, qu'il ne pretendoit plus rien fur le comté de Ferrette; & que ce comté faifoit partie du Suntgau. Les chofes demeurerent en Alface au même état jusqu'à la fin de l'été de l'an 1673, que le roi Louis XIV y alla, lorsque l'empereur Léopold étoit fur le point de lui déclarer la guerre. Il s'affura des villes impériales, ausquelles il ne fe fioit pas, & il les fit démenteler. Le

ALSACE, (l') felon Longuerue. Desc. de la France, 2 part. p. 217. Province de l'Allemagne Françoife, fur la rive occidentale du Rhin, qui la fepare de l'Allemagne Impériale. Elle eft bornée du côté du Nord par le Palatinat du Rhin, & au midi par la Suiffe, & par les états ou principautés de Montbelliard & de Porentrui. A l'occident, les montagnes de Vosge la féparent de la Lorraine; &, à l'orient, le Rhin la fépare du marquifat de Bade, & des pays d'Ortnau & de Brisgau, qui font partie de la Suabe, & font de l'Empire. Son étendue occupe depuis le 47° deg. 55' jusqu'au 49 deg. 10' de latitude. Sa longitude eft entre le 25 deg. 34' & le même deg. 56'. Le nom d'Alface fe prononçoit & s'écrivoit autrefois ELSASS, même en françois; ce qui fignifie en allemand, les habitans des environs de la riviere d', que l'on écrit aujourd'hui Ill. Le nom ELSASS, en latin Elifatia, Elifata ou Elitaza, fe trouve dans Nithard, dans les annales de faint Bertin, au neuviéme fiécle; &, dans le dixième, dans la chronique de Flodéard. L'auteur des annales de Fule emploie aufli ce mot; mais il fe fert aufli de celui d'Afatia; & Frédégaire, qui vivoit dans le milieu du feptiéme fiécle, appelle les peuples de cette province, Allefatis & Allefationes, en pailant du différend qui étoit entre les deux freres Thierri & Théodebert: ce qui nous fait voir qu'il y a très-longtems que l'on dit Alface pour Elfass, qui eft le véritable nom; de forte de forte que, dans l'acte de partage du royaume de Lothaire, entre Louis le Germanique & Charles le Chauve, cette province eft nommée lifatia, & elle étoit alors divifée en deux comtés. L'Alface, fous l'Empire Romain, appartenoit à deux proviuces. La baffe Alface étoit de la premiere Germanie, & la haute faifoit partie des Séquaniens, ou de la province nommée Maxima Sequanorum. La baffe étoit du territoire des Médiomatrices, qui s'étendoient jusqu'au Rhin, felon Céfar; mais, comme dit Strabon au quatriéme livre, les Tribocques, peuples Germains, ayant paffé le Rhin, & en ayant occupé le bord, s'établirent dans le territoire des Médiomatrices, ou de ceux de Metz, vraifemblablement du tems que Jules-Céfar faifoit la guerre dans les Gaules; c'eft alors que les Vangions, qui font ceux de Mayence & de Wormes, & les Nemétes, qui font ceux de Spire, ayant aufli paffé le Rhin, s'établirent au-deçà dans le même territoire des Médiomatrices. Enfin tout le pays, occupé par des peuples de la Germanie, fut nommé la premiere Germanie, dont la baffe Alface faifoit partie. Ses habitans les Tribocques avoient apporté ce nom d'au-delà du Rhin, comme les Nemétes & les Vangions avoient fait. Après la ruine de l'Empire Romain, ce pays fut d'abord occupé par les François il n'y avoit point alors de villes. Le royaume de Clovis étoit borné par le Rhin; & les Allemands occupoient l'autre côté du fleuve, comme on voit par l'auteur de la vie de faint Waaft. Il eft certain que la baffe Aface faifoit partie du royaume d'Auftrafie, & que la haute étoit du royaume de Bourgogne, ayant été occupée par les Bourguignons avant que d'être foumife aux François. Childebert, roi d'Auftrafie & de Bourgogne, donna toute l'Alface à son fils Thierri, roi de Bourgogne; ce qui caufa beaucoup de chagrin à Théodebert, fon fils aîné, roi d'Auftrafie, qui entreprit de fe rendre maître de l'Alface; & ce fut la le commencement des différends des deux freres, & la premiere origine de leur haine. Sous la race des Carlovingiens, les deux Alfaces échurent en partage à l'empereur Lothaire, fils aîné de Louis le Débonnaire: elles pafferent enfuite à fon fils Lothaire, fous lequel elles furent gouvernées

traité

traité de Munfter fut confirmé par celui de Nimégue l'an 1679.

L'année fuivante le confeil royal, établi dans la ville de Brifach, procéda contre toutes les villes & tous les feigneurs & nobles d'Alface, qui ne vouloient pas reconnoître la fouveraineté du roi. Il fe fit après cela un traité à Ratisbonne, par lequel on convint que tout ce qui avoit été réuni par les officiers des tribunaux de Brifach, de Metz & de Befançon, demeureroit à la France durant vingt ans.

La guerre ayant été déclarée l'an 1688, elle finit par la paix de Ryswyck, qui a cédé à la France Strasbourg & les lieux réunis dans l'Alface; les réunions n'ayant été révoquées, & les jugemens qui les avoient ordonnées, n'ayant été caffés que pour les lieux fitués hors de

l'Alface.

Après la paix de Munster, les François, comme on en étoit convenu à Nuremberg, ayant évacué les places de ce pays, il fut rétabli presqu'au même état qu'auparavant parce que non-feulement l'Evêque & la ville de Strasbourg, mais le Palatin de la petite Pierre, le comte de Hanau, les barons de Fleckeftein & d'Oberstein, avec les villes impériales du bailliage de Haguenau, avoient été maintenus dans le droit, dont ils avoient joui jusqu'alors, de relever immédiatement de l'Empire; enforte que le roi ne pouvoit prétendre fur ces états aucune fouveraineté royale, & qu'il n'avoit fur eux que les droits dont avoit joui la maifon d'Autriche; ce qui avoit été confirmé en tous fes points par celui de Nimégue, excepté pour ce qui concernoit Philisbourg, cédé à la maifon d'Autriche, en échange de Fribourg en

Briscau.

Après le traité de Nimégue, le confeil royal d'Alface féant à Brisach, fit affigner les princes & les feigneurs eccléfiaftiques & féculiers, & la nobleffe de la baffe Alface, pour se voir condamner à faire foi & hommage au roi & à reconnoître fa fouveraineté, à quoi ils réfisterent, & la nobleffe de la baffe Alface comparant à Brifach par fon fyndic, dit qu'elle ne conteftoit pas au roi les droits qui lui appartenoient par le traité de Munster; mais qu'elle fupplioit le confeil de ne pas étendre la domination & la fouveraineté de fa majefté, & la dépendance de cette même nobleffe au-delà des termes du traité, par lequel on avoit promis de conferver la nobleffe de la baffe Alface dans la poffeflion dont elle avoit joui jusqu'alors, de relever immédiatement de l'Empire Romain.

Le confeil d'Alface rendit un arrêt, le 9 Août 1680, par lequel il déclara que toute la baffe Alface, fans exception, étoit de la fouveraineté du Roi, enjoignant à tous ceux du pays de lui prêter ferment de fidélité, comme à leur fouverain & monarque.

L'année fuivante 1681, la nobleffe de la baffe Alface fe foumit en corps à cet arrêt, & reconnut la fouveraineté du roi. L'évêque & le chapitre de Strasbourg en firent autant avec tous les autres gens du pays, & enfin la ville de Strasbourg même, au mois d'Octobre, ouvrit fes portes au feu roi Louis XIV, & fut affujettie à la couronne de France.

On fit cependant de très-grandes plaintes durant trois ou quatre ans, tant à la cour de Vienne qu'à la diéte de Ratisbonne, qui finirent par le traité conclu à Ratisbonne, l'an 1684 au mois d'Août, par lequel on convint que la jouiffance de tous les lieux réunis, dont le roi de France étoit en poffeffion, lui demeureroit pendant vingt ans ; mais pår le traité de paix perpétuelle conclu à Ryswyck, tout ce qui étoit compris dans la baffe Alface comme dans la haute, eft demeuré à la couronne de France; enforte qu'il n'y a plus fur cela aucune conteftation, les bornes de la baffe Alface & du Palatinat ayant été réglées, & ce qui avoit été pris fur le Palatinat a été reftitué & réuni à l'électorat, au duché de DeuxPonts & à l'évêché de Spire.

Les armes du Landgraviat de la haute Alface, felon Piganiol de la Force, Desc. de la France, t. 6, p. 188 & fuiv. font d'azur à fix couronnes d'or, féparées par une barre d'or, & celles du Landgraviat de la baffe Alface font de gueules à une barre dentellée d'or. L'Alface eft une des bonnes provinces de France. Elle contient environ cinq cents mille habitans. Elle eft très-fertile en

bleds, en pâturages, en bois, en légumes, &c. Les montagnes qui féparent l'Alface de la Lorraine font fort élevées, & font la plûpart couvertes de bois de fapins de 120 pieds de haut, hêtres, chênes & charmes. Celles qui font du côté de la Suiffe font moins hautes, & fourniffent toutes fortes de bois, tant de chaufage qu'à bâtir. Le pays que ces montagnes enferment eft varié par d'agréables côteaux & par des plaines fertiles. On y trouve des forêts confidérables; les mieux fituées & les plus remarquables font celles de la Hart, dans la haute Alface, de Haguenau & de Bienwal ou de Lutterbourg, dans la baffe. Le pays qui eft entre la riviere d'Ill, lá Hart & le Rhin jusqu'à Strasbourg eft étroit & d'une fertilité médiocre; on n'y trouve point de vignes, & il y a même peu de bonnes, prairies à caufe des fréquens débordemens du Rhin. Il ne produit que des feigles, des orges & des avoines. L'étendue qui eft enfermée entre les montagnes, l'Ill, & la plaine depuis Soults dans la haute Alface jusqu'à deux lieues au - deffus de Haguenau, eft très-abondante en toutes fortes de grains, vins & fourages. Ce qui eft au - deffus de Soults & de Betfort, en fuivant la montagne fur la largeur de trois lieues, eft beaucoup moins fertile, étant rempli de bois, & le peu de terres labourables qu'il y a, font spongieufes & difficiles à labourer; mais, d'un autre côté, il est affez abondant en prairies, & les habitans s'occupent particulierement à la nourriture des beftiaux. Ce canton qui s'étend vers la Suiffe, en allant vers la montagne jusqu'à Altkirch, Bâle & Mulhaufen, eft plus fertile. Le terroir de Haguenau, appellé la plaine de Mariendal, n'eft que des bruyeres fabloneufes qui ne produifent que du bled de Turquie. Il n'y croît point de vin à caufe de la proximité de la forêt & des bois qui font aux environs. Les terres, depuis la montagne de Saverne & la plaine de Strasbourg jusqu'au Rhin, font plus fertiles que les autres cantons de la province. Elles abondent en toutes fortes de grains, tabac, légumes, fafran & chanvre. C'est un beau pays, agréable aux yeux & délicieux pour toutes cbofes. Le pays d'entre la montagne & le Rhin, depuis Haguenau jusqu'à Landau & Germesheim, eft fort rempli de bois & de terres incultes, plus abondantes en fourages qu'en toutes autres commodités, mais la plaine de Landau eft abondante en grains. Elle peut avoir trois lieues de long & autant de large. Le pied de la montagne, depuis Landau jusqu'à Weiffenbourg,eft rempli de vignes, dont le rapport eft affez confidérable. Les rivieres, dont l'Alface eft arrofée, font,

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On remarque en Alface trois grandes routes, qui font praticables en tout tems. 1°. Čelle de Francfort, laquelle paffe par le village de Botternir, & qui eft tellement élevée au - deffus du terrein, que les eaux du Rhin ni des autres rivieres ne peuvent jamais paffer par deffus. Elle a des ponts de bois dans les endroits où les rivieres, les ruiffeaux ou les foffés la coupent. 2°. Celle qui, fortant de Kel, paffe à Newmuhl, à Wildsted, à Offenbourg, &c. & donne entrée dans la Suabe & dans le Wirtemberg, n'eft plus fi praticable que la premiere; étant très-proche de la riviere de la Queisch, elle fouffre quelquefois lorsque cette riviere fe déborde. 3°. Celle qui conduit à Brifach, Fribourg & autres lieux du Brisgaw, paffant par Altenheim, eft très-bien faite, au-dessus des grandes eaux, elle est toujours praticable.

Il y a, dans la haute Alface, des mines d'argent, de cuivre & de plomb; favoir, à Giromani, à Ste Marieaux-Mines, à Aftembach & à Munfter; mais on ne travaille qu'à celles de Giromani, & l'on en peut tirer par. an environ mille fix cens marcs d'argent, & vingt-quatre mille livres péfant de cuivre ; mais la dépense du travail égale presque le profit ; & le duc de Mazarin, à qui ces mines appartiennent, n'en retire que cing ou fix mille livres de rente. Il y a des forges & des fourneaux de fer en plufieurs endroits d'Alface; mais furtout du côté de Betfort.

Tome I. A a

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Il y a des fources d'eaux minérales, dans la haute & la baffe Alface. Celles de Sultzbach, qui font dans la haute auprès de Munfter, font fort renommées pour la paralyfie, la foibleffe des nerfs & la gravelle. Celles de Saulz & de Widerbroun, dans la baffe, font moins estimées.

La Langue vulgaire d'Alface eft l'Allemande, mais dans les villes on parle françois.

La Religion dominante eft la Catholique. On tolére les Proteftans; mais on veut qu'ils envoyent leurs enfans aux écoles Catholiques.

Cette Province dépend pour le fpirituel de quatre diocèfes qui font, Befançon, Balle, Strasbourg & Spire.

Le gouvernement civil de l'Alface n'eft pas le même que celui des autres provinces de France. La haute & la baffe font du reffort du Confeil Supérieur établi à Colmar. Cette cour fupérieure fut érigée pour la premiere fois en la ville d'Einfisheim en 1658, en la place de la Régence ou confeil, que les archiducs avoient auparavant établie dans la même ville. Comme le reffort de ce tribunal étoit d'une affez pétite étendue, parce que le traité de Munster étoit demeuré en partie fans exécution, le roi jugea à propos en 1661 de fupprimer ce confeil fupérieur, & d'ériger en fa place un confeil provincial, dont les appellations reffortiffoient en derniere inftance au parlement de Metz. Ce dernier tribunal dura jusqu'en 1679, que le roi lui rendit fa premiere fupériorité, & lui donna le pouvoir de juger en dernier reffort toutes les affaires civiles & criminelles, avec la même puissance & autorité que les cours de parlement & autres compagnies fupérieures du royaume. Toutes les charges avoient été données gratuitement & fans finances, & ce confeil fut transféré à Brifach. Le roi, par fon édit du mois d'avril 1694, créa une feconde chambre dans le même confeil, & par le même édit, en confirmant tous les officiers dudit confeil en la poffeffion de leurs offices, les rendit héréditaires, comme dans le reste du royaume, moyennant la finance qu'ils payerent. Ce confeil a été enfin transféré à Colmar, où il eft actuellement fédentaire; il connoît en premiere inftance de toutes les affaires de ceux qui avoient autrefois leurs caufes commifes à la régence d'Autriche, tels qu'étoient les abbés, prieurs & autres eccléfiaftiques, gentilshommes, officiers dudit confeil & de la chancellerie, qui y eft établie, & autres officiers y reffortiffans, à l'exception des officiers de la baffe Alface, qui ont leurs caufes commifes en premiere inftance par - devant le préfidial ou directoire de la nobleffe de la baffe Alface, comme auffi des officiers des lieux dépendans du temporel de l'évêché de Strasbourg, & de ceux du comté de Hanau, &c. dont les appellations des fentences font portées à leur régence. Il en faut encore excepter le grand & le petit fénat de la ville de Strasbourg. Toutes les appellations, tant des juges royaux que des feigneurs & magiftrats des villes, & même les appellations comme d'abus, font portées audit confeil fupérieur. Il y a peu de juftices royales dans cette province, parce que le roi Louis XIV donna la plupart des terres & feigneuries domaniales au cardinal Mazarin & à d'autres feigneurs. Les juftices royales qu'on y remarque font le bailliage & prévôté de la ville neuve de Brifach, le bailliage & préfecture de Haguenau, bailliage de Weiffenbourg, celui de Candek, les prévôtés d'Huningue, d'Einfisheim & du Fort-Louis. Les officiers de toutes ces jurisdictions ont été créés en titre & héréditaires par édit du roi du mois d'avril de l'an 1694. Le roi établit en même tems à Strasbourg une chambre des Monnoies, compofée de deux juges-gardes, d'un procureur du roi, d'un contregarde & d'un greffier. Le Préfidial ou Directoire de la nobleffe de la baffe Alface, eft une jurisdiction féante à Strasbourg. J'en parle à l'article particulier de cette ville. Il ne faut pas le confondre avec le magiftrat de la ville de Strasbourg.

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Le Droit écrit, c'est-à-dire le droit romain, eft la feule loi fur laquelle on rende juftice en Alface; car il n'y a aucune coutume qui y déroge, fi ce n'eft quelques ftatuts ou ufages locaux qui ne font obfervés que dans les lieux où ils font introduits. Quoique la ville de

Strasbourg foit depuis affez longtems fous l'obéiffance du roi de France, l'ordonnance civile de 1667, ni la criminelle de 1670 ne font point obfervées à Stras bourg, & on a laillé jusqu'à préfent à fon magiftrat la liberté de fuivre l'ancienne procédure qui étoit en usage. Comme ce magiftrat juge en dernier reffort les affaires criminelles, on eft moins furpris de cette inobfervation que dans les affaires civiles, qui, lorsqu'elles excédent la fomme de mille livres, font portées par appel au confeil fupérieur de Colmar, où ces deux ordonnances font regardées comme des loix inviolables. Il eft fingulier de voir que les juges, en premiere instance, n'obfervent pas une ordonnance à laquelle les juges fupérieurs font obligés de fe conformer.

L'Alface étoit autrefois un Pays d'Etat, mais elle est aujourd'hui Pays d'impofition. Au lieu de taille, cette province paye au roi là Subvention, qui eft la même chofe fous un autre nom : elle montoit par an à 99000 livres; mais en 1700, la province offrit au roi de payer par an la fomme de 300000 livres, s'il plaifoit à fa majefté de la décharger des deux maîtrifes particulieres des eaux & forêts, créées en 1694, & de l'exécution des édits, portant création de lieutenans généraux & autres officiers de police, & de nouveaux offices, &c. Cette offre fut acceptée purement & fimplement par arrêt du 29 novembre de l'an 1700, & l'impofition des 300000 livres fut faite pour la premiere fois en 1701. Les autres impofitions, comme la capitation, &c. ont lieu, & fe levent dans cette province comme dans les autres : on les remet aux receveurs généraux de la généralité de Metz. Le Domaine du roi, dans ce pays, confiftoit dans les droits de fouveraineté, & en plufieurs terres & feigneuries qu'il poffédoit dans la province. Sa majefté ayant fait don au cardinal Mazarin des terres de Betfort, d'Ell, Ferrete, Altkich, Tann & Ifenheim, elle ne jouit plus en Alface que de quelques forêts & des droits de fouveraineté qui confiftent dans les droits d'entrée & de fortie de la province, d'impôt fur le fel, d'amendes & confiscations, &c. Les Droits du Sel & Aides ne fe perçoivent, en Alface, que dans les terres qui dépendent de l'ancien domaine, & point dans celles de la baffe Alface qui ont été réunies. Ces droits font partie de la ferme du domaine, laquelle comprend auffi les droits de péage qui fe levent à l'entrée & à la fortie de la province; car dans toutes les terres & feigneuries qui dépendent de la réunion de la haute & baffe Alface, le roi ne jouit d'aucun péage, & ils fe levent au profit des feigneurs. L'an 1694, le roi établit en Alface de nouveaux droits des traites foraines, pour lesquels on établit plufieurs bureaux. Ces droits font partie des cinq groffes fermes de France. Le papier timbré, le contrôle des exploits, celui des actes des notaires, les impôts fur les bois, les bleds, les vins & le tabac n'ont point lieu dans cette province. Comme il n'y a en Alface, ni élec tion, ni cour des aides, ni bureaux des finances, c'eft l'intendant ou fes fubdélégués qui connoiffent des conteftations qui furviennent fur le fait du domaine & des deniers royaux, & les appellations de leurs jugemens font portées au confeil d'état. L'intendant connoît auffi de tous les différens concernant les deniers communs & patrimoniaux, & prend foin des voiries, grands chemins, ponts & chauffées, &c.

L'Alface étant un des plus fertiles pays qu'il y ait en France, elle fait un commerce plus ou moins confidérable, felon que le royaume eft en paix ou en guerre. Avant que la guerre eut interrompu le commerce de cette province, le plus important étoit celui des bois de la baffe Alface, que l'on vendoit aux Hollandois pour la conftruction des navires. Il paffoit auffi en Hollande une quantité confidérable de vins de la haute Alface, qu'on transportoit enfuite en Suéde & en Danemarck où on les débitoit pour vins du Rhin. On transportois auffi des eaux-de-vie & du vinaigre en Hollande & en Allemagne. La ville de Strasbourg faifoit encore un grand commerce de graines d'oignons, de pavots, d'anis, de fénouil, de fafran, de térébentine, de chanvre, de tartre, de fuif, de poudre à giboyer, qui eft très-eftimée, de treillis & de cannevas, que l'on portoit en Angleterre, en Hollande & en Allemagne : le débit de bled qu'on faifoit en Suiffe, l'engrais des beftiaux & celui

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